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Chapitre 1



1.




17 août 1980, Baker's Breakfast,

Hemington, Géorgie,


Terminer le lycée sans aucun projet d'avenir équivaudrait à se réveiller en pleine apocalypse.

À travers l'épaisse vitre du café, Willow lève les yeux au ciel. Sur la banquette de cuir, la table vernie et les milkshakes qui colorent l'atmosphère, il y a leurs rires, leurs paroles étouffées. Ils se sont placés de façon à voir la route, et les quelques voitures qui rasent le béton pour rentrer à la maison.

— Même pendant tes jours de congé, tu traînes ici, râle son patron depuis le comptoir. Me fais pas croire que t'aimes ton travail.

Les amis de Willow rient, et celui-ci fait un clin d'œil au patron Steinfield, chiffon en main, en train de nettoyer le bar et les tabourets. La musique flotte dans les haut-parleurs, pendant qu'une petite fille en jupe fleurie accourt jusqu'au jukebox. Quelques cents en main, son père est sur ses talons et ils changent ensemble de morceau, pour laisser l'air de Hit Me with Your Best Shot remplacer Another One Bites the Dust.

Sandra saisit la main de Maggy, l'entraînant dans l'allée en hurlant. Les deux jeunes filles se mettent à danser sous le son et les voix. Les yeux des garçons coulent sur le jupon qui voltige, et sur les mèches raides, qui finissent en une unique boucle au-dessus de l'épaule.

Il y a Byron face à Willow, celui avec une veste en cuir et un sempiternel cure-dent entre les lèvres. Il a toujours trop de gel dans les cheveux, des yeux couleur miel et une mâchoire un peu trop marquée. Son bras est posé autour des épaules de Rachel, la jolie rousse qui a intégré l'université de Princeton, mais qui pleure jour et nuit car elle ne veut pas quitter son petit ami.

— Cassez rien, ça va encore être pour ma poire ! s'exclame Willow quand Maggy vacille près des verres.

— Fais pas ton rabat-joie ! On pourra plus se voir aussi souvent !

— Allez Will, montre nous un peu d'enthousiasme.

Puis il y a Steve.

Il tend la main pour presser son épaule, un sourire de soutien sur ses jolies lèvres. Imperceptiblement, Willow mord sa joue, puis tourne la tête vers la vitre. Le soleil y dépose un rayon orange. La nuit va bientôt tomber sur eux.

Willow Fitzgerald a beau ne pas aimer l'attention, il se retrouve dans pas mal d'histoires, depuis son plus jeune âge. Là, il est avec son groupe d'amis, dans le café dans lequel il travaille à mi-temps depuis presque un an. Il y a encore la main de Steve sur son épaule, et Willow se sent un peu patraque, il fronce les sourcils.

Willow peut dire que ses années lycée ont été bien. La seule chose qui venait assombrir le tableau harmonieux de sa scolarité résidait dans ses notes : elles n'ont jamais brillé. Ses notes, et son laxisme vis-à-vis du principe même de l'école, en fait. Willow est un peu plus âgé, car il a trop séché. Du coup, il a accumulé du retard et a dû refaire une année. Cela aurait pu lui apporter des moqueries, du jugement, mais il faisait partie d'un groupe admiré. Il ne sait pas vraiment comment, mais son redoublement a été vu comme quelque chose de même attrayant. Aux yeux de ses amis, c'était drôle à voir. Mais de son point de vue à lui, c'était exaspérant.

Le lycée, c'est fini. Dans quelques semaines à peine, ils affronteront le monde. Et dans le monde, Willow ne sait pas où se projeter. Il n'a postulé pour aucune université, Byron non plus, mais c'était prévisible. Byron ne veut pas étudier, il veut reprendre le garage de son père et voir des voitures à longueur de journée, c'est sa passion. Byron a une passion, quelque chose qui le fait vibrer.

Sandra a déjà commencé sa formation de journalisme, et personne n'est sûr concernant Maggy mais elle semble savoir ce qu'elle veut, et cela semble lié à la mode. Comme Rachel, Steve compte partir faire de longues études. Sauf que lui, il s'en va à l'autre bout du pays.

Eux, il les connaît depuis qu'il sait marcher. Pourtant, la distance qui s'instaure de seconde en seconde ne semble pas rencontrer la moindre résistance. C'est à croire que le temps n'est pas toujours corrélé à la force des liens. Ça a été l'une de leurs dernières journées ensemble, au complet. Ils ont ri, comme ils l'ont toujours fait. Mais au-delà de cette apparence si solide, redevenir des étrangers n'a pas eu l'air de tant les attrister.

Il n'y a eu aucune promesse.

Aucun vœu de retrouvailles.

Comme si la page qui se tourne n'aura été que le préambule d'un nouveau bouquin. Comme si toutes ces années passées ne méritent finalement pas leur propre histoire.

— Je te ramène ?

À la sortie du Baker's Breakfast, Steve passe en voiture devant lui. Son quartier n'est pas des plus éloignés, il peut le gagner en quinze minutes de marche, et il aime bien marcher.

Mais en observant le ciel violet, les néons qui se réfléchissent sur la route, Willow contourne la Mustang éraflée et prend place aux côtés de son camarade.

Ancien camarade, le lycée, c'est fini.

Le moteur vrombit une unique fois avant qu'ils ne s'élancent vers chez lui.

Finis les cours, les rires dans les couloirs et les histoires qui éclosent entre deux publicités au cinéma. Finis les regards confus quand deux mains se frôlent, quand on passe le permis à seize ans mais qu'avoir seize ans est bien loin maintenant.

— Je pars dans dix jours, partage Steve.

Ses cheveux châtains remuent dans la brise, il a encore ses lunettes de soleil remontées au-dessus de sa tête.

— C'est dans pas longtemps, répond simplement Willow.

— Tu viendras me dire au revoir ?

Steve a les yeux bleus, très clairs, comme dans un lagon sans corail, avec juste beaucoup, beaucoup de sable blanc. Pas vraiment comme les bords de Miami, là-bas, ce n'est pas bleu. Quand ils arrivent devant la maison de Willow mais que ce dernier n'a pas encore répondu à la question, Steve pivote vers lui.

— T'es fâché contre moi ?

— Non.

— Tu mens.

— Alors pourquoi tu demandes ? s'énerve-t-il.

Steve se penche, s'abaissant de l'autre côté de la voiture. Willow sent les doigts qui effleurent sa joue, puis qui glissent derrière son oreille. Une pression, il se tourne dans sa direction et Steve ferme les yeux pour l'embrasser.

Fini le lycée. Finie l'adolescence où l'on se cherche sans être sûr de se trouver. Les baisers camouflés derrière la porte des vestiaires, le secret qui étouffe l'un et arrange l'autre. Quelques promesses muettes se partagent dans l'air de la jeunesse. On y arrivera, disaient-ils, mais il ne faut pas promettre quand personne ne sait à quoi ressemble demain.

Les lèvres de Steve ont un goût de glace à la fraise, et les siennes, une légère fragrance de cigarette, qu'il a essayé d'atténuer avec une pastille à la menthe.

Willow caresse sa joue quand ils se séparent, frôlant délicatement ses taches de rousseur de son pouce. Ses yeux sont voilés.

— T'as promis qu'on leur dirait avant de tous se séparer.

— C'est pas aussi simple Will...

— Rien n'est simple pour toi, Steve. Rien t'arrange, mais tu promets encore et toujours dans le vide.

— Dis pas ça...

Il sent une détresse inconnue dans sa voix, il observe Steve déglutir, car dans les yeux de Willow se profile une nouvelle lueur.

— Je t'aime..., chuchote-t-il.

Il pourrait presque croire que ça suffit.

— Je te souhaite le meilleur pour l'avenir.

Willow sort de la voiture, les épaules voûtées.

— Est-ce que...

Il se retourne une dernière fois, pour planter son regard dans celui de son ami, ou petit ami, il ne sait même plus. Mais quelque chose se froisse dans les pupilles de Steve, ses lèvres se pincent, il y a une lueur entre l'incompréhension et la désillusion.

« pour l'avenir »..., répète-t-il avec les mains sur son volant.

— Je savais déjà que tu te serais braqué, se justifie Willow, que tu leur dirais rien.

— T'es en train de me plaquer ?

Et Steve s'énerve, sans que Willow puisse le calmer. Et Willow n'essaye pas de le calmer, même si son cœur se serre, très fort. Son cœur se serre quand il voit les yeux de son premier amour se remplir de larmes, parce que c'est arrivé comme ça, sans prévenir. Ils ne savaient pas qu'ils battaient de l'aile à ce point, qu'il y avait quelque chose à briser. Peut-être que ce n'était pas prévu. Peut-être que Willow est monté dans cette voiture, l'a embrassé, et que c'est à ce moment qu'il a compris que ça ne marcherait pas. Que ça ne marcherait jamais.

Alors, la voiture démarre en trombe, réveille le quartier. Steve s'en va la rage dans le corps. Il lui dit d'aller se faire voir. Willow le suit du regard avec la gorge nouée.

C'est la fin du lycée, de l'insouciance envers les responsabilités. La nuit tombe et les lampadaires s'allument un à un. Willow tourne les talons en inspirant, la chaleur persiste mais les nuits de Géorgie trépassent anormalement dans le froid depuis quelque temps. Sa maison est vide, ses parents voient des amis aujourd'hui.

Willow monte les escaliers puis fonce dans sa chambre. Tout passe vite, le lycée est fini. Il ouvre son armoire, l'amertume danse encore sur sa langue. Ses yeux se plissent quand il balaie le reste de ses vêtements sur le côté, faisant apparaître la valisette qu'il est allé dérober dans le sous-sol il y a deux jours, la même qu'il a remplie la veille. Willow, ici, n'a aucun avenir.

Willow le sait depuis longtemps, que cette soirée sera la dernière dans cette ville miteuse.

Alors il redescend, claque les portes, les armoires, secoue la vaisselle, brise les tirelires. C'est con, c'est minable, et ça fait du bruit, mais bientôt ça sera silencieux.

Il balance ses affaires sur la banquette arrière de la Mercedes Benz de son père, une décapotable qui ne sort jamais du garage. Willow n'attend plus, la poitrine lourde, le cœur en pagaille, il se place au volant et ne regarde plus derrière lui.

Certaines personnes l'auront vu, sans savoir ce qu'il avait en tête. Tout le monde se connaît dans cette ville, et pourtant, elle renferme tant de secrets qu'en vrai, personne ne se connaît vraiment.

Dans un coin de son esprit, Willow ne s'imaginait pas seul dans cette sottise. Il avait le maigre, très maigre espoir que Steve serait avec lui, qu'il aurait plaqué ses plans et ses projets pour lui. Mais au dernier moment, Willow a réalisé que ce n'était pas eux qui étaient perdus dans la vie, mais juste lui.

— Tu veux monter ?

La solitude fait mal, surtout quand quelqu'un essaye encore de renier un cœur brisé. Quiconque pourrait dire qu'il a hésité quelques secondes quand il a aperçu ce jeune homme prendre la même route que lui : celle qui ne mène vers nulle part. Quand ils se trouvent à quelques mètres de la pancarte de la ville, celle sur laquelle est écrit « Welcome to Hemington » d'un côté et « You just left Hemington » de l'autre, le temps file dans une direction aléatoire.

Il paraît pourtant que les coïncidences n'existent pas.

Ses cheveux blonds capturent la lumière du soir, son sac à dos sur l'épaule. Il marche d'un pas rapide et Willow ne voit pas son visage. Il aura fallu beaucoup, beaucoup de brouillard dans son esprit pour qu'il ait l'idée bien idiote de s'arrêter sur le bas-côté.

Les cheveux blonds, le sac à dos, et les yeux qui s'agrandissent sous la lumière du dernier lampadaire de Hemington, voici le tableau qui se dresse à un instant qu'ils pensent encore dérisoire. Tout le monde se connaît ici, et personne en même temps. Les visages sont les mêmes.

— Willow ? s'étonne-t-il.

Un regard s'échange.

— Nils ?

Les cheveux blonds, la chemise bordeaux boutonnée au maximum et le pantalon taille haute. Il a l'impression que c'était ce qu'il portait le jour de la remise des diplômes, juste avant qu'ils n'enfilent tous leur toge cérémoniale. Il se souvient qu'ils se tenaient l'un à côté de l'autre sans se parler. Ils ne s'étaient jamais vraiment parlé. Willow se souvient des félicitations du directeur envers Nils quand il lui a tendu son diplôme, parce que Nils a toujours été au sommet, un modèle, une utopie. Aucun reproche à lui faire, il est parfait.

Et à côté, Willow a juste eu droit à un regard qui disait : « Tu as survécu, mais qu'en est-il de maintenant ? ». C'était en partie l'impulsion, le directeur avait raison. Et maintenant ?

Willow cligne des yeux, désarçonné. Nils détourne le regard, parce qu'ils savent tous les deux que la situation, en plus d'être absurde, est bizarre. Nils n'a aucune raison de vouloir s'en aller, de se retrouver aux limites de la ville avec juste un sac à dos et ses deux pieds. Nils, il y a tout qui brille devant lui.

— Tu veux monter ?

Mais Willow a répété.

Et Nils a ouvert la portière.

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