Chère Camille,
Je ne te connaissais pas, et je ne pourrais jamais te connaître. J'ignore si tu liras ce texte du paradis, je l'espère, enfin si tu ne peux voir ta mère. Je t'écris parce que je ne peux te parler.

Ta mère souffre, finalement, elle a craqué. Tout s'est passé si vite, un coup de téléphone, un rendez-vous sur Paris, et la nouvelle.
BOUM, c'était beaucoup trop pour elle. Je ne te cache pas qu'elle ne s'en remettra pas de sitôt, mais je te promets de tout faire pour qu'elle aille mieux, même si je suis encore une enfant.

Tu es morte, sautant de beaucoup trop haut dans le vide. Je ne te juge pas, je ne peux pas te promettre de comprendre, mais je respecte ta décision. Ta mère aussi, son mari aussi et j'imagine que ta soeur aussi.
Je m'en veux un peu, le téléphone a sonné, j'ai cru que l'on était simplement invité à manger, mais c'était mille fois plus grave, car tu es partie rejoindre les étoiles.

Ton beau père a laissé un message, je n'ai pas écouté, tu me diras, c'était sur le téléphone de ma mère. Il t'aimait, t'aime et t'aimera, n'en doute jamais.
Tu sais, tu étais comme sa fille. Je ne peux pas te parler de ton père, j'en suis sincèrement désolée.

Ma mère est passée dans la chambre de ma sœur, où j'étais posée tranquillement. Elle m'a dit "Camille a réussi son suicide", cinq petits mots qui m'ont transpercée, même sans te connaître. J'ai pensé à ta mère, et j'ai donc suivi ma mère dans la rue, jusqu'à chez ton beau-père.

Ta mère était calme, avant de fondre dans les bras de la mienne. Mon cœur s'est déchiré, mais je suis restée, sans un mot. Puis j'ai pris ta mère dans mes bras. Nous sommes restées toutes les trois, les unes à côté des autres, chuchotant quelques mots. Ta mère nous expliqué que tu t'étais suicidée, elle a aussi dit qu'elle se sent coupable. Mais si tu est morte aujourd'hui, tu aurais très bien pu le faire demain, ou dans une semaine.

Personne ne t'en veut. Tu as été forte, très forte, parce que peu de personnes aurait été capable de dire la veille de son suicide à sa mère "Tout va bien, on s'appelle demain", et être crédible. Je ne suis pas sûre en être capable.

Je te dis adieu, ce soir, quelques heures après ta mort.