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Chapitre 18 : Le bien ou le mal ?

Adélaïde se sentait lamentable. Elle avait l'impression qu'elle ne réussirait jamais à faire tout ce que le grimoire venait de faire. Ses émotions reprirent le dessus, et des larmes coulèrent sur ses joues sans qu'elle ne puisse les arrêter. Elle bafouilla entre deux pleurs : « Je Je... ne veux... pas cont... continuer... On arrête les fr... frais.... Tu Tu ... t'es ... trompé. Je... Je ne ...suis pas ... la bonne... personne ! Je Je... n'ai ... pas ...ton ... talent ! Ils ... sont ... trop ... fort pour ...moi ! Oublie-moi ! »

Le grimoire hurla dans la pièce : « Non, tu ne peux pas t'arrêter. Une fois le processus de transfert entamé, il faut le finir. J'ai été surpris par ce sorcier. En général, je réagis de suite. Mais d'habitude, c'est moi qu'ils veulent, ils se jettent sur moi directement. Maintenant, c'est toi leur cible. Ce qui peut ne signifier qu'une seule chose : c'est que tu es encore plus puissante que je ne le pensais. Ils ont réussi à repérer ta puissance bien trop vite à mon goût ! Mais saches que cela ne se reproduira plus, je serais prêt à te protéger en attendant que tu acquiers l'ensemble de tes pouvoirs. Ne l'oublie pas, tu es un peu comme un robot, tu es modulable à souhait. Si tu ne continues pas ta formation et que quelqu'un s'empare de toi, imagines ce qu'il pourrait te faire. Il te modulerait à son avantage ! Tu ne seras plus capable de faire la différence entre le bien et le mal, car on ne t'aura enseigné que des actes de cruauté. Tu deviendrais un peu comme ces démons de l'enfer qui font régner le mal partout où ils passent ! C'est ce que tu veux ? »

Adélaïde était toujours en pleurs, elle avait du mal à réaliser ce qu'il venait de se passer. Elle ne savait pas quelle était la bonne décision à prendre : continuer ou arrêter ? Pouvait-elle faire confiance à ce grimoire qui disait qu'elle était modulable. Elle se demandait s'il ne s'était pas servi de sa vulnérabilité pour la forcer à renoncer à sa vie de simple humaine. Le grimoire lui demandait une réponse immédiate, mais elle ne faisait que réfléchir et ne savait plus quoi penser... Elle se sentait démunie et à bout de forces.

Elle laissa passer quelques minutes pour tenter de reprendre ses esprits et affirma « Non, je ne veux pas que l'enfer se déchaîne sur la terre ! Je veux un monde juste ! Mais j'ai peur de toute cette folie, je ne sais pas où cela m'emmènera. Je me sens perdue et à bout ! Comment être sûre que je peux te faire confiance ? Comment être certaine que tu ne m'as pas utilisé puisque je suis soit disant modulable ? »

Le grimoire répondit : « Je ne laisserais jamais personne te faire du mal, nous sommes liés. Et je ne t'ai pas forcé la main non plus, tu as accepté de ton plein gré. Les sorciers maléfiques comme celui que tu as vu, eux ne se soucieront pas de toi. Ils veulent juste faire de toi une machine prête à détruire le monde. Tu n'aurais pas de libre choix, tu serais branchée en continue à une autre machine qui te transmettrait des connaissances sur le mal. Tu deviendrais une coquille vide qui ne penserait même plus par elle-même. Tu serais méconnaissable. Tu crois que je serais capable de laisser faire ça ! En plus, tu détiendras dans peu de temps tout mon savoir. En s'emparant de toi, ils peuvent se servir des données à leur avantage, les modifier, ... Je ne peux pas laisser passer ça ! Tu es la gardienne ! À nous deux, on est plus fort ! Tant qu'on est ensemble, notre pouvoir est décuplé ! Si tu m'abandonnes, je perdrai ma force et toi la tienne ! On sera tous les deux vulnérables, et n'importe qui pourra en profiter pour s'emparer de l'un ou l'autre ou même des deux ! Je n'ose même pas imaginer ce qu'ils feront avec une double puissance comme la nôtre ! »

En versant son sang dans l'œil du grimoire, Adélaïde n'avait pas compris qu'elle était liée à celui-ci pour le reste de sa vie. Elle venait de prendre conscience qu'elle devrait toujours l'avoir sur elle peu importait où elle allait. Sa liberté de mouvements serait alors amoindrie. Certes, elle gagnerait des pouvoirs non-négligeables. En ayant ce grimoire avec elle, ses pouvoirs seront dès lors multipliés par deux. Mais si elle venait à l'oublier chez elle ou pire encore, à le perdre, ses pouvoirs seraient moins puissants et elle serait alors bien plus vulnérable... Elle avait la sensation que sans le grimoire, elle n'était plus rien ! Elle aurait toujours le savoir, mais la puissance en moins ! Elle serait juste bonne à être exploitée par des sorciers ignobles ! Elle n'avait plus le choix d'aller jusqu'au bout de sa formation et le plus vite possible pour éviter de se sentir à nouveau impuissante !

Elle attrapa le grimoire et lui confirma avec de la colère dans les yeux : « C'est bon, je vais continuer ta formation ! Je n'ai pas vraiment le choix de toute manière ! Toutefois, je veux poser une condition : que tu finisses toute la formation aujourd'hui ! »

Le grimoire essaya de se rebeller : « Mais je ne peux pas terminer ta formation en une après-midi ! Il y a encore beaucoup à voir, et il y a la pratique aussi ! »

Adélaïde répondit méchamment : « Bon alors, débrouille-toi pour la terminer au plus vite ! Je veux pouvoir me défendre ! Je veux que toutes les puissances maléfiques me craignent et ne viennent plus m'embêter ! »

Le grimoire rigola et avoua : « Bon, je ferais au plus vite, mais je ne te promets rien ! Par contre, les puissances maléfiques ne craignent personne ! Même pas moi ! Alors cela m'étonnerait qu'ils aient peur de toi ! À mon avis, ils vont surtout se donner le mot entre eux et revenir souvent à la charge en espérant t'affaiblir ! Ils viendront peut-être même en groupe ! Mais vu ton petit air de défis, tu n'auras pas peur ! Tu seras largement prête à les recevoir et à leur en faire voir de toutes les couleurs ! Les démons n'auront qu'à faire profil bas avec toi ! En tout cas, j'ai foi en toi ! Tu y arriveras ! Quand tu te sentiras prête, pose ta main sur la page des sorts, on recommence le transfert instantané ! »

La réponse du grimoire avait redonné le sourire à Adélaïde qui posa sa main sur la page des sorts. Elle reçut à nouveau une petite décharge électrique qui eut pour effet d'effacer la petite tache rouge qu'elle avait sur la main. Cette décharge avait pour but de dissuader l'interruption du transfert. Mais là, c'était un cas de force majeure, elle n'avait pas eu le choix.

Le transfert reprit alors au début de cette page des sortilèges. En plus de tous les sorts qu'elle avait déjà acquis, elle en apprit de nouveaux tels que le sort d'auto-guérison, d'exorcisme, d'invocation, d'envoûtement, ... Il lui enseigna aussi comment créer et utiliser une amulette ou comment fabriquer des armes magiques surpuissantes. Il s'arrêta là. Il n'avait plus besoin de demander à Adélaïde de répéter, il savait qu'elle connaissait tout sur le bout de ses doigts.

Adélaïde fut surprise qu'il s'arrête déjà. Il restait encore beaucoup de pages, elle voulait aller vite, peut-être même trop vite. Elle cria : « Mais pourquoi tu t'arrêtes, ce n'est pas fini, apprends moi tout ton savoir ! Je te rappelle que je suis une machine en quelques sortes, je peux tout encaisser, je ne dormirais pas et ne mangerais pas tant que je n'aurais pas acquis l'ensemble de tes connaissances ! »

Le grimoire ne s'attendait pas à une telle rébellion de la part d'Adélaïde. Il avait l'impression que plus il lui en donnait plus elle en voulait encore ! Elle n'était jamais assez rassasiée. Le sera-t-elle quand il arrivera à la fin du grimoire ou en réclamera-t-elle encore ? Elle prenait la grosse tête et il commençait à avoir peur qu'elle devienne maléfique. C'était trop pour lui. Il devait mettre les choses au clair.

Il éructa : « Je m'arrête quand j'ai besoin de m'arrêter ! Tu deviens abjecte avec moi ! La cruauté commence à t'aveugler ! Si tu vas sur ce terrain-là, bientôt, tu seras malfaisante et je ne pourrais plus rien pour toi ! Il faut que tu te reprennes ! Je m'étais arrêté pour te donner des explications avant de continuer ! Mais tant que tu ne changes pas de comportement avec moi et les personnes qui t'entourent, je stoppe l'enseignement ! Il reprendra quand tu changeras ! Je ne suis pas seulement un objet, j'ai aussi une âme au cas où tu voudrais le savoir ! Avant d'être un grimoire, j'avais une vie moi aussi ! Mais quand tu seras redevenue l'Adélaïde que j'ai choisie, je te dirais qui j'étais auparavant ! Tu ne penses qu'à ton propre intérêt, plus rien d'autre ne compte ! Mais moi aussi, je peux être triste ou en colère ! Je te laisse à tes sombres pensées pour ce soir et je disparais temporairement ! »

Il récita une petite formule en espagnol « Libro ! Desaparece ! ». Puis en latin pour accentuer son intention de disparaître « Liber ! Perit ! ». Son but était aussi de ne pas être compris par Adélaïde étant donné qu'elle ne connaissait pas ces deux langues. Il espérait qu'elle redeviendrait elle-même et que son attitude changerait.

Le plan du grimoire fonctionna très bien, car même si elle était très intelligente, elle ne savait pas inverser la formule. Elle n'avait pas encore atteint le niveau de connaissances du grimoire, elle en était même très loin. Elle comprit qu'elle n'atteindrait pas son niveau en une journée. Elle avait cru qu'en ayant recours au transfert, cela accélérerait le processus, mais elle s'était plantée sur toute la ligne. Même en ayant ses connaissances, cela lui prendrait des mois voire des années pour acquérir l'expérience nécessaire !

Tant que le grimoire se cachait, elle devait méditer sur la manière dont elle avait agi. La peur ne justifiait pas son comportement, ni sa recherche excessive de pouvoir ! Elle se sentait honteuse d'avoir été aussi ignoble avec ce grimoire. Elle se demandait si le mal ne coulait pas également dans ses veines ! Elle avait peut-être un côté sombre et un côté lumineux. Cela expliquerait sans doute pourquoi elle était si modulable ! Si le grimoire était magique, il l'avait sans doute vu aussi ! Dans tous les cas, elle devrait éclaircir ce point avec lui !

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