Lorsque je me réveille c'est sans compagnie que je me retrouve. Lane a disparu.

Je descend de mon lit, regarde l'heure qu'il est et monte les rideaux avant de quitter ma chambre.

J'ai fait une grosse matinée. Ce qui explique pourquoi je n'ai pas à me disputer avec Abby pour qu'elle quitte la salle de bain. Elle est déjà en cours. Cependant ce calme qui règne dans tout l'appart me dérange. Où est passé Lane?

Je vais dans ma cuisine après que je me sois débarbouillé. Lane y est, et le petit-déjeuner par la même occasion aussi. Il mange une tartine et me salut lorsqu'il me voit.

- C'est Abby qui a fait tout ça ?

- Non, je me suis réveillé avant elle et j'avais faim. Alors j'ai préparé le petit-déjeuner.

J'ouvre grand la bouche. Je croyais que Lane ne savait pas cuisiner. La table n'a jamais était aussi pleine de si bon matin : des pancakes, des croissants, des oeufs cuits au plat et du bacon. Sans oublier le smoothie.

Cette vue aurait mit le sourire à mon estomac s'il possédait une bouche. Alors c'est moi qui sourit à sa place. Je prend place sur la chaise en face de Lane et commence à remplir mon bide de pancakes.

Lane me toise calmement mais sérieusement. Il me demande:

- Pourquoi est-ce qu'on dormait ensemble?

- Ben, m'exclamais-je la bouche pleine. Parce que tu as insisté.

Il ne répond rien et médite. J'en profite pour lui demander:

- Alors il est comment ton iPhone X?

- Pardon?

- Ton iPhone. Enfin, celui acheté avec mes économies.

Il me dévisage, comme perdu.

Je remarque qu'il n'a pas sourit une seule fois. Qu'est-ce qu'il lui arrive?
Il n'a pas joué avec le portable pour lequel il m'a fait toute une histoire? Il était tellement excité hier, il avait vraiment hâte de l'utiliser.

Je me lève et vais vérifier la prise duquel Lane avait du retirer l'iPhone hier soir pour le remettre en charge ce matin. Et l'étonnement me prend. Le portable n'a pas été remis en charge. C'est littéralement impossible que Lane ait oublié.

Ce dernier m'a suivi et est derrière moi. Il me demande si tout va bien. Je suis surprise de voir que ses cheveux sont coiffés en arrière.

- A-... Adam ?!

J'ai la bouche grande ouverte. Il est déjà de retour? Il ne me répond pas, mais observe les alentours.

- C'est chez toi ici?

- Oui.

- Et Abby... (j'aquisce) Je n'aurais jamais pensé que tu aurais une soeur.

- C'est ma petite soeur adorée.

- Et moi, qu'est-ce que je fais ici?

Je ne répond pas tout de suite. Il m'a l'air tellement perdu et fâché que je préfère ne rien dire.

- Je suppose que Lane est passé à l'action et me traîne à nouveau dans ses bêtises.

- Désolée.

- Gaby, tu peux m'expliquer ce que Lane fichait chez toi?

- C'est à dire que...

- Il est dangereux! Il te tuerai dès que l'envie le prendrait! C'est un putain de criminel!

Je n'aurai jamais cru voir un jour Adam me gueuler dessus, même pour mon bien. Lui qui est d'ordinaire posé et gentil. Il ne doit plus être en mesure de supporter Lane depuis qu'il sait qu'il a causé la mort de leurs parents. Et dire que j'étais comme lui il y a encore quelque jours. Comme quoi l'image que j'avais de Lane n'était qu'un jugement précipité. C'est vrai qu'il n'est pas des plus agréables à vivre et qu'il est préférable de ne pas lui chercher des noises. Mais en dehors de ça il a un passé assez douloureux qui le hante toujours. Je le comprend un peu, ayant moi même eu une enfance pas très heureuse. Et je suppose que j'essaie dorénavant de le traîter comme j'aurai souhaiter qu'autrui le fasse pour moi.

Lane a réussi à effacer l'image du criminel psychopathe démoniaque qui s'était incrustée dans mon esprit. Et pendant que je commence à l'apprécier c'est tout l'inverse qui se passe avec Adam.

Ce dernier se calme. Il soupire et s'assied sur la chaise qu'il trouve à ses côtés.

- Pardon, s'excuse-t-il d'une petite voix. Je ne voulais pas t'engueuler.

- Ta réaction est tout à fait justifiée. Tu dois être carrément perdu. Beaucoup de choses sont arrivées depuis ton dernier éveil.

- Tu sais, quand je me suis réveillé ce matin j'ai failli faire une crise cardiaque. Parce que j'étais nez à nez avec ma psy qui dormait à poing fermé.

- Rassures-moi, le suppliais-je. Il n'y avait pas de mauvaise haleine dans l'air pas vrai?

- Je vais ignorer cette question, continu-t-il gêné. (Qu'on me ramène du Listerine, ou plutôt un cercueil ce serait plus efficace) Je disais donc que dans la surprise j'ai sauté du lit. Et là j'ai observé avec un oeil attentif la pièce dans laquelle je me trouvais. Et c'est complètement perdu que je me suis rendu compte que je n'étais ni dans ma cellule, ni en prison tout court.

- Mais dans ma chambre.

- Il a fallu que je quitte la chambre pour comprendre que je me trouvais dans un appartement, en l'occurrence le tiens, Gaby.

- Tu as fait quoi après ?

- Je me suis baladé dans à peu près toute les pièces.

- Tu aimes la déco ?

- Je l'ai fait pour retrouver la sortie, m'avoue-t-il sur la défensive.

- Ah...(il vient de me clouer le bec)

- Mais oui, c'est joli. ( je souris, quand même rassurée) Après ça je me suis retrouvé dans ta cuisine, avec un ventre en pleine crise. Je me suis permis de sortir quelques trucs du frigo. Et puis Abby est arrivée.

- Et?

- Elle m'a sautée dessus en hurlant de joie. Décidément c'est Lane qui lui avait manqué.

- Oui, elle s'est vite attachée à lui.

- J'ai dû me faire passer pour lui et on a un peu discuté. Elle est vraiment gentille. Mais à un moment elle m'a sorti et je cite : "Gaby a été chiante hier ou quoi? T'es même plus drôle. Je me casse".

- Et?

- Elle s'est cassée.

J'éclate de rire. Adam n'est pas aussi gamin que Lane, ce qui fait que leur niveau de connerie -et donc l'humour qui va avec- n'est pas exactement le même.

- Après ce vent, j'ai grignoté une tonne de tartines pour faire passer qu'on préfère Lane à moi. Et tu es arrivée juste après.

Je fixe Adam en me rappelant ce que m'avait demandé Lane.

- Que comptes-tu faire maintenant?

- Je ne sais pas.

- Ecoutes-moi, je vais devoir aller au boulot. Je te confie mon chez-moi. Alors ne pars nulle part s'il-te-plait.

- Lane... tu avais l'intention de le cacher ici?

- Pas au départ, non. Mais je crois que c'est la meilleur chose à faire. Pour vous protéger tous les deux.

- De qui? La police? Non Gaby, c'est la police qui protège. Et si elle nous arrêtes... et bien elle aura raison.

- Pas de la police. Enfin si, un peu. Mais je veux vous protéger de vous même, et l'un de l'autre.

- Tu cherches une solution pour notre cas?

-  Vous souffrez du trouble dissociatif de l'identité. C'est une maladie incurable c'est vrai, mais des traitements existent.

- Incurable? On est donc voués à se supporter.

- Laisses-moi au moins me charger de vous. Je veux en connaître d'avantage sur vous deux, savoir qui est l'original, pourquoi vous êtes ainsi. Vous apporter du soutien et un traitement si possible.

- En tant que psy ?

- En tant qu'amie.

- Ce n'est qu'une perte de temps et d'énergie, soupire-t-il.

- J'ai de l'énergie et du temps à donner!

Il hausse les épaules.

- Lane n'a blessé personne pour le moment?

- Il a été sage comme une image.

- S'il fait la moindre bêtise je ne pourrai pas fermer les yeux Gaby. Je vais me rendre aux flics.

- Il ne fera rien, il me l'a promis.

Il arque un sourire. Je le laisse en compagnie du portable qui lui appartient également, en quelque sorte, pour me changer.

- Tu pars déjà ?

- Oui, Newton n'est pas très patient.

Je m'en vais retrouver ma dose de Newton par-ci et de ses amis imaginaires par-là.

À mon retour l'appart est plutôt silencieux. Seul le son de la tv résonne. Je retire ma veste et mes escarpins, lisse ma jupe m'arrivant juste au dessus des genoux et me dirige dans ma chambre me débarrasser de mon sac et de ces vêtements. J'opte pour mon jogging préféré et un t-shirt aux inscriptions illisibles. Je vais au salon retrouver Adam mais j'y vois une autre personne.

Adam assied sur le coin du canapé se fait tout petit. Il inspire de soulagement lorsqu'il me voit enfin arriver. De l'autre côté du canapé se trouve une jeune femme à la peau basané. Elle prend tout l'espace qu'elle a besoin, et contrairement à Adam, elle est loin de se faire petite.

Elle croise les jambes en me toisant de haut, les sourcils froncés. Ses bras tout aussi croisés jusque là se décroisent pour se mettre de part et d'autre du dos du canapé. Pour prendre son espace, elle est douée.

Elle me dévisage longuement avant d'ouvrir ses lèvres pulpeuses:

- Tu m'expliques qui c'est? (Elle fait un léger mouvement de tête vers Adam pour m'indiquer que c'est de lui qu'elle parle)

Elle me semble déçu, surprise ou même ennuyée, je ne saurai dire.
Aaliyah est ce genre de personne, qui n'aime pas les cachoteries. Or, elle doit penser qu'Adam est quelqu'un comme un petit-ami dont je lui ai caché l'existence. Maintenant que j'y réfléchi à deux doigts, il est censé l'être. Enfin Lane du moins. Supposant qu'aucun des deux n'est au courant pour cette supercherie inventée par Lane, il n'en reste pas moins qu'Abby pourrait tout dévoiler à son retour. Je me retrouve face à un dilemme.

- "Bonjour", me contentais-je de répondre. "Excuses-moi de rentrer par effraction chez toi, mais ça fait tellement longtemps Gaby et tu m'as manquée" serait un début de discussion plus approprié tu ne trouves pas? Après tout ça va faire 8 mois.

- J'ai toqué à la porte et cet individu m'a ouvert. Alors non, ce n'était pas par effraction. Bon, j'avoue que je l'ai un peu forcé à me laisser entrer mais que veux-tu? Un mec chez Gaby Clarke? Je croirai rêver. Que t'es-t-il arrivé en à peine 8 mois?

- Beaucoup de choses, crois-moi.

Elle soupire puis se lève en jetant un dernier regard glacial à Adam qui baisse les yeux. Un rictus de satisfaction se dessine sur ses lèvres :

- C'est MA meilleur-amie alors pas touche, qui que tu sois.

- Arrêtes Aaliyah c'est mon patient, tu sais je suis psy et tout.

- Donc ce mec a un truc qui cloche dans sa tête ? J'en étais sûre.

De là elle arrête de fixer le pauvre Adam et accourt dans ma direction. Je peux prédire un gros gros calin de retrouvailles qui arrive.

Elle me saute carrément dessus. Et malgré qu'elle soit plus grande que moi de presque 10 centimètres, elle ne se retient pas et ses jambes entourent ma taille, on croirait voir une enfant qui retrouve ses parents après une journée de cours saoulante.

Je dois bien m'appuyer au sol pour éviter de basculer en arrière. Elle enroule ses bras autour de mes épaules. Je glisse les miens sur son dos et lui donne de petits coups. Notre étreinte dure éternellement. Mais c'est totalement compréhensible. Après tout ça va presque faire une année qu'elle est partie.

Aaliyah est ma meilleure-amie. Elle est forte, indépendante et a un sacré caractère, ce qui fait qu'elle a toute mon admiration.
C'est une beauté orientale venu des Émirats Arabes-unis. Elle est ce qu'on pourrait qualifier de gosse de riche, presqu'une princesse arabe. Mais contrairement à certains préjugés elle est adorable, drôle et généreuse. Et même si elle a toujours eu ce qu'elle voulait elle n'agit pas égoïstement, par contre elle est quelqu'un de jaloux, ce qui inclut qu'elle risquera de se frotter à quiconque désire sortir avec moi.

Ce qui signifie que si Lane ressurgit avec ce même entêtement à prétendre être mon copain, et bien... je préfère ne pas imaginer la suite.

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