7.0
Taehyung était là.
Il était rentré de son voyage d'affaires imprévu, et à peine avait-il posé un pied dans son appartement que je m'étais empressé de le rejoindre. Je lui avais sauté dans les bras dès que je l'avais vu, et j'avais planqué ma tête contre lui en humant son parfum, ne le laissant même pas réagir à mon intrusion rapide.
Il m'avait manqué.
Il était parti à peine une semaine, et j'avais déjà l'impression que ça en faisait vingt.
J'étais complètement dépendant de lui, je m'en rendais compte maintenant : il n'y avait qu'à voir combien la simple idée qu'il parte loin de moi me brisait le cœur, combien la seule crainte qu'il ne m'aime pas lui aussi me broyait les entrailles, et combien ces jours à le savoir à l'autre bout du pays m'avaient parus longs.
Si l'amour m'était apparu comme quelque chose de merveilleux au début, il me faisait maintenant presque peur. Je prenais conscience de ma vulnérabilité face à lui. De ma fragilité. C'était quasiment devenu une addiction, et je n'étais pas sûr de vouloir connaître la douleur du sevrage. Taehyung pouvait faire ma joie ou ma douleur en un claquement de doigt. Il pouvait me faire pousser des ailes aussi bien que m'enterrer plus bas que terre. Il pouvait m'emmener au paradis aussi facilement qu'il pouvait me pousser en enfer. J'avais la désagréable sensation que mon cœur n'était qu'un pantin au service de ses humeurs, sur lequel je n'avais plus aucun contrôle.
C'était dangereux.
Je jouais à un jeu dangereux.
Chaque jour à ses côtés me liait un peu plus à lui, et moi qui ne savait rien de ses intentions, je commençais à avoir peur de la chute si elle venait à arriver.
Je ne voulais plus rester dans l'incertitude comme ça, ça me rendait fou. Je ne pouvais plus.
Ce que m'avait dit Yoongi me hantait ; ça ne servait à rien de me voiler la face. Et Seojoon ne m'avait pas rassuré.
Il fallait que je sache.
_______
J'observai un instant Taehyung s'affairer dans la cuisine, dos à moi. Je mangeais avec lui ce soir, et pour l'occasion, il avait voulu tenter une recette italienne qui rien qu'à l'odeur, me donnait l'eau à la bouche.
Je me relevai alors de la chaise haute sur laquelle j'étais installé, et vint me coller à son dos, passant mes mains autour de sa taille et enfouissant ma tête dans sa nuque. Il eut un petit sursaut, mais il se détendit de nouveau tout en posant doucement une main sur mon avant-bras.
Il sentait bien meilleur que sa préparation.
Son léger rire me sortit de mes pensées, puis sa voix - magnifique, comme toujours - résonna dans la pièce :
« Bah alors ? Je t'ai tant manqué que ça ? Tu fais que me sauter dessus depuis que je suis rentré.
- Mmh...
- C'est pas une réponse ça Kook.
- Je suis en manque d'affection.
- Ben voyons. »
Il me donna une petite tape sur la hanche, avant de lancer en indiquant sommairement le bar-table derrière nous.
« Rends-toi utile plutôt, et mets le couvert. Les câlins ce sera pour après. »
Je fis la moue, mais me détachai néanmoins de lui pour aller sortir deux grands bols du placard. Ça avait beau être sa maison, j'avais passé tant de temps dans cette cuisine à faire des bêtises que je connaissais cette pièce presque mieux que la mienne, c'était dire. Je trouvais donc sans difficulté deux verres que je disposais sur la table, tout en regardant du coin de l'œil Taehyung couper soigneusement une tranche de jambon.
Ou plutôt, en regardant ses mains.
La façon dont il les bougeait avec cette concentration qui lui était propre, ces longs doigts habiles finement bronzés qui s'enroulaient autour du manche du couteau fermement...
Je me demandais de quelle manière elles glisseraient sur mon corps. De quelle façon elles épouseraient mes courbes, si elles étaient aussi douces qu'elles en avaient l'air, ou si elles avaient un toucher plus appuyé, moins délicat.
Ce que ça me ferait, à moi, de sentir la chaleur de leurs paumes contre ma peau.
Réaliser à quoi j'étais en train de penser me fit rougir, et je m'empressai alors de détourner le regard, m'éclaircissant la gorge. Au même moment, Taehyung se retourna vers moi après avoir fait glisser les petits carrés de jambon dans la casserole et sourit :
« C'est prêt. »
Sans remarquer mon embarras, il sépara le plat en deux parts égales dans les bols puis s'assit sur sa chaise haute, avant de relever le regard vers moi.
« Tu penses à quoi ? » demanda-t-il en voyant mon air absent.
- À rien. »
Je m'installai en face de lui, et rajoutai rapidement pour ne plus penser, justement :
« Ça a l'air bon. »
Il haussa simplement les épaules, un fin sourire aux lèvres. Ce sourire ne le quittait pas depuis que je l'avais retrouvé. J'ignorais quelle en était la cause, si c'était son voyage qui l'avait mis de bonne humeur, ou au contraire son retour, mais une chose était sûre : il me donnait envie de sourire aussi.
Il me donnait envie de le regarder encore et encore, parce que je ne m'en lasserait jamais.
De poser ma main contre sa joue joliment relevée par sa joie.
De passer mes doigts contre ses lèvres pour en retracer la forme, et l'imprimer dans mon esprit puis l'afficher dans un coin de ma tête.
De l'embrasser, aussi, pour sentir pleinement ce sourire si beau et pouvoir le gracier de tout l'amour que je lui portais.
Ma gorge se fit soudain sèche, et je détachai mon regard qui s'était inconsciemment accroché à ses lèvres en me remplissant un grand verre d'eau que je n'attendais pas avant de porter à ma bouche. Il fallait vraiment que j'arrête de penser à tout ça, je n'allais pas survivre à la soirée sinon. Pire encore ; je n'allais pas réussir à survivre au repas. Le tête à tête ne me réussissait pas.
« T'es tout rouge. T'es sûr que tu pensais à rien ou t'as plutôt pas envie de me le dire ? »
Sa remarque sortie de nulle part me fit avaler de travers, et je m'étouffai instantanément comme dans les vieux films clichés.
Ce qui sembla le faire bien rire, d'ailleurs.
Quel salaud, il devrait être en train de me demander si ça allait, au lieu de pouffer de façon peu discrète en se moquant de moi.
Je retenais, je retenais.
J'avais mal à la gorge en plus maintenant, c'était malin.
C'est uniquement lorsque j'eus fini de m'étouffer qu'il daigna me demander sans se défaire de son petit rictus amusé :
« Ça va ?
- Non.
- Tu reveux de l'eau ?
- Pour me re-étouffer ? » m'outrai-je. « Mais tu veux ma mort ?
- Non, c'est juste marrant de te voir paniquer et devenir rouge comme une tomate tout seul. »
... Bon.
Je proposai l'option fuite.
« On regarde un film ? »
_______
C'est ainsi que nous nous retrouvions côte à côte dans son grand canapé, devant le générique d'un long métrage qui venait de se terminer. On avait finalement fini notre repas devant la télé, et nos deux bols faisaient le bonheur de Yeontan qui ne se privait pas de manger le moindre reste – en gardant toujours une attitude de chien bourge, n'oublions pas.
Moi, j'avais le cœur qui battait à mille à l'heure.
D'une part parce qu'il avait posé une de ses mains sur ma cuisse et ne l'avait pas retiré de tout le film, et que sa seule présence accélérait mon rythme cardiaque, d'autre part parce que l'angoisse ne me lâchait pas, vicieuse, bien encrée en moi et de plus en plus forte.
Ça n'allait pas.
Je ne le supportais pas.
J'avais envie de me planter devant lui, de le regarder droit dans les yeux, et de lui demander : Taehyung, est-ce-que tu m'aimes ? Ne me réponds pas qu'il n'y a pas besoin de mots, parce ce que moi, j'en ai besoin. Dis moi que quand je ne suis pas avec toi je te manque, que chaque seconde loin de moi te fait aussi mal que chaque seconde qui nous sépare me blesse. Dis-moi, Taehyung, est-ce que tu es amoureux de moi ?
Mais je ne le fis pas ; parce que j'en étais incapable.
Alors à la place, je demandais simplement lorsqu'il saisit la télécommande pour éteindre l'écran :
« Est-ce que je peux rester dormir ? »
Son regard se posa sur moi, et il répondit par une autre question :
« Ton père est d'accord ?
- Oui.
- Alors avec joie. »
Il me sourit doucement, le regard chaleureux. Je me félicitai mentalement d'avoir dit à mon père que j'allais dormir chez Jimin ce soir, parce que comme ça, il ne poserait pas de question.
Je ne voulais plus de questions.
« Je bosse demain matin, » prévint t-il pendant qu'il ramassait nos deux bols, les arrachant à Yeontan qui poussa un petit jappement plaintif. « Du coup on pourra pas faire de grasse mat', ça te dérange pas ?
- Du moment que je suis avec toi...
- T'es niais. » pouffa-t-il.
J'aurais pu rétorquer que « non » comme d'habitude et repartir dans un éternel débat de « non-si », mais je n'avais pas la tête à ça, alors je me contentai de rester silencieux tandis qu'il se relevait pour emmener les bols dans la cuisine.
À vrai dire, ce soir-là, je n'avais pas la tête à grand-chose. Je n'avais même pas l'impression d'être réellement moi. Ça se bousculait, là-haut, mes pensées s'entremellaient et se chamaillaient la première place, et je me sentais presque comme un spectateur de ma propre vie. Alors que paradoxalement, j'allais peut-être la prendre en main bien plus que je ne l'avais jamais fait.
C'était une espèce de transe d'incertitude, de questionnements, d'amour et d'angoisse qui se mêlaient tous ensemble dans un joyeux bordel.
Il faut dire que ce mot décrivait sacrément bien ma vie ces derniers temps.
Taehyung revenant dans la pièce me sortit de mes pensées, et je m'autorisai alors à le regarder comme je ne l'avais jamais regardé.
Je crois que j'avais fait mon choix.
_______
« Tu peux éteindre la lumière en passant ? » me demanda Taehyung depuis le lit dans lequel il était déjà confortablement installé.
Je ne me fis pas prier, et appuyai sur l'interrupteur avec une forme de soulagement qui m'était étrange. Ça m'arrangeait, qu'il me demande ça. Je ne me sentais pas avoir la force d'affronter encore pleinement son regard, et si l'obscurité pouvait camoufler un peu mes rougeurs, alors je ne disais pas non.
La pièce se retrouva donc plongée dans le noir, uniquement éclairée par le ciel de la ville qui ressortait derrière la fenêtre, lui-même éclaircit par la pollution lumineuse et la lueur de la lune. C'était agréable. Rassurant, peut-être. Juste assez lumineux pour me permettre de distinguer les traits de l'acteur, et assez sombre pour cacher ce que je ne voulais pas lui montrer.
Nous étions montés dans sa chambre à la fin du film, et il m'avait à nouveau prêté son fameux tee-shirt trop grand que je commençais sérieusement à affectionner. Déjà, parce qu'il était super doux. J'ignorais quel genre de coton c'était, mais il me donnait l'agréable sensation d'être enroulé dans un plaid. Ensuite parce qu'il était franchement confortable. Il avait beau me tomber sur les cuisses, je me sentais libre de bouger n'importe comment et ça c'était cool. Et puis, peut-être aussi, parce qu'il avait l'odeur de Taehyung. L'enfiler c'était un peu comme recevoir une étreinte de sa part.
Il fallait sérieusement que je songe à voler ce tee-shirt.
Lentement, pour éviter de me casser la gueule et de me ridiculiser une énième fois, ( et puis peut-être parce que j'avais un peu peur aussi ), je m'approchai du lit pas à pas. Je m'asseyai ensuite dessus, et redressai le regard vers Taehyung.
Il me regardait aussi. Je le voyais.
Un doux sourire étira ses lèvres, et il lança simplement en s'installant confortablement :
« Ça fait longtemps qu'on a pas dormi tous les deux. »
Oui, et la dernière fois j'étais ivre mort et tu m'as repoussé parce que j'ai tenté de te monter dessus.
Ça, c'est ce que j'avais envie de lui répondre.
À la place, j'haussai simplement les épaules, le cœur trop lourd pour parler. Il battait si fort que je craignais qu'il ne se calme jamais.
« Je suis content que tu sois là. » rajouta-t-il face à mon silence sans se défaire de son beau sourire.
Je voulais lui dire que moi aussi, j'étais content d'être là, et que si ça ne tenait qu'à moi j'arrêterai le temps pour rester à ses côtés éternellement, parce que l'avenir me faisait peur. Mais j'avais la gorge nouée.
Alors pour toute réponse, je me redressai et vint m'asseoir doucement sur lui, avant de prendre son visage en coupe et de déposer mes lèvres contre les siennes. D'abord chastement, délicatement, puis plus fortement, plus intensément. Je m'accrochai à lui avec le cœur battant à tout rompre dans ma poitrine, et j'avais presque l'impression qu'il allait lâcher.
Il répondit à mon baiser puis détacha nos lèvres pour dire quelque chose, mais je ne lui laissai rien le temps de prononcer que je l'embrassai de nouveau, plus fermement encore. Je prenais une de ses mains dans la mienne, entrelaçai nos doigts, avant de la guider jusqu'à mon ventre où je la fis passer sous mon tee-shirt. Le contact de sa main contre ma peau me fit frémir. D'abord sa froideur, puis sa chaleur qui reprenait doucement le dessus, inconnue, nouvelle, étrange, agréable.
J'eus soudain envie de goûter à sa peau, moi aussi. De la sentir sous mes doigts. De la choyer sous mes lèvres.
Je descendis mes baisers le long de sa mâchoire, avec une fièvre méconnue, tandis que je le sentis tenter de m'éloigner de lui.
« Kook, attends... »
Sans répondre, j'appuyai mon bassin contre le sien, et j'eus à peine le temps de l'entendre jurer qu'il se dégagea de ma prise et me repoussa en posant ses deux mains contre mon torse, me forçant à plonger son regard dans le sien. Ses yeux noirs me firent déglutir. Je ne l'avais jamais vu me regarder comme ça. Avec tout ce désir caché dans ses prunelles.
« Qu'est ce que tu fous ? » demanda-t-il d'un ton peut-être un peu cassant, comme s'il se faisait violence pour parler.
Je ne répondis pas tout de suite. Les yeux plongés dans les siens, l'angoisse revint accompagner la chaleur dans mon ventre, et je ne pus m'empêcher de déglutir. Qu'est ce que je foutais ? Je n'en savais rien. Je faisais n'importe quoi, sûrement. Je m'offrais à lui. Je lui laissai prendre tout ce qu'il voulait de moi. Faire ce qu'il voulait de moi.
« Je... »
Ma gorge se noua, puis je laissai sortir dans un souffle :
« J'ai envie de toi, Taehyung. J'ai envie de coucher avec toi. »
Et ainsi, demain, je serai enfin fixé sur ce qu'il voyait réellement dans le jeune homme que j'étais.
______oOo______
.......
..........
...............
Yey.
BON.
Je vous avoue, j'ai un peu peur de vous présenter ce chapitre :')
Déjà parce que je suis une éternelle incertaine et que j'arrive pas à savoir si je l'aime ou pas, ensuite parce que j'ai pas du tout l'habitude d'écrire ce genre de truc, et surtout parce que j'avais peur de pas avoir amené la décision de Jungkook correctement et qu'il soit incompris :')
D'ailleurs, vous la comprenez, sa décision ?
Vous pensez qu'il va se passer quoi ? Que Taehyung va réagir comment ?
NE FAITES PAS COMME MISTER JAY KAY D'AILLEURS, on sait jamais x)
Re bref
Je suis en stress lol
J'espère que ça vous a plu, hésitez pas à donner votre avis et... à dimanche ? J'espère ? :')
Je vous aime, merci de me lire <333
( Merci à Anuryane et blanblan06 pour la correction de ce chapitre :3 )
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