Chapitre 5 (1) : Bloody beginning
Chapitre 5 : Ticking down the last clock
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Surviving students : 7
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Quand je me suis réveillée ce matin, je n'étais pas toute seule.
Ce n'est pas simplement l'affaire de voir Michi veiller sur moi. Oh, comme j'aurais aimé que ce soit le cas. Que j'ai été en mesure de m'oublier, même pour un court instant, dans le creux de ses bras, de sa chaleur et des battements de son cœur, de sa vie qui m'entoure en entier.
Mais autour de moi, point de battements de cœur.
Juste des chuchotis que je ne peux pas entendre, et des doux regards que je ne peux pas voir.
Et ma paranoïa constante m'empêchera à jamais de vivre quoi que ce soit d'autre.
Je me lève. Me dirige, tel un fantôme, vers le miroir de ma salle de bain. Pas le temps de faire autre chose que ramasser des vêtements au hasard et les lâcher sur le carrelage de la pièce, avant de capter les cernes et les yeux éteints de mon reflet.
Cela fait deux jours qu'Akihito et Shizuka ont perdu la vie. Habituellement, on se retrouve, tous les matins, au réfectoire, histoire de suivre encore quelques vieilles règles qui n'ont plus aucun sens. Mais quand j'y suis allée ce matin, personne. Et je n'ai pas eu la patience de les attendre toute la journée.
Je n'ai croisé personne d'autre que des ombres.
Et ce matin, je le sens, ne fera pas exception. Nous avons tous perdu beaucoup avant-hier, pendant ce procès. Ou même pendant ces deux derniers mois. Saki, un ami très proche, Michi, un frère, moi, la certitude que tout le monde ici restait un être qu'on ne pouvait que pousser au meurtre.
Combien de Shizuka parmi nous sept ?
Est-ce que je pourrais en devenir une ?
Et même sans parler de Shizuka, de la rage et de la haine de ses derniers instants, combien de meurtres me reste-il avant de pouvoir enfin voir l'épilogue de ce jeu de l'horreur ?
Est-ce que je la verrai seulement ?
La question que tout le monde doit se poser, à ce stade. Vais-je tuer, ou être tuée. Est-ce que je survivrai. Les probabilités se rallongent en même temps que le couperet tombe, au prix de nos camarades, mais que me reste-t-il, à moi, comme temps à vivre ici ?
D'après l'Originelle, au maximum, deux meurtres.
Il ne me reste plus qu'à prier pour que quelqu'un fasse comme Senri.
.... Ou, sans doute...
L'ampoule de la salle de bain clignote. J'entends un grésillement au-dessus de ma tête, mais un bruissement le couvre. Et dans le miroir, elles sont là. Elles sont là, les neuf formes vibrantes, invisibles et pourtant si reconnaissables, qui m'entourent, se reflètent dans mes yeux sans la moindre lumière.
L'une d'entre elles, la plus proche de moi, secoue doucement la tête.
Non.
Non, je ne veux pas du destin de Senri. Morte exécutée sous les flèches, ou bien simplement piétinée sous les robots avec en fond les hurlements de ceux que je voulais sauver. Je dois vivre. Pour lui. Pour elle.
Pour les neuf victimes de ce jeu de la mort qui, dans un tout autre monde, auraient peut-être eu un destin plus lumineux.
« Trop aimable à vous de me tenir compagnie. »
Une des formes ondoie. Je vois du bleu dans mon champ de vision. Je dois avoir l'air stupide, sans doute, à parler à des effets de lumière, ou peut-être est-ce simplement la folie qui me rattrape. Je ne m'attendais pas, après tout, à tenir longtemps mon mental dans un endroit pareil.
Mais au point où j'en suis, je crois que j'ai besoin de toute la compagnie possible. Et si ce n'est pas celle des vivants, peut-être est-ce celle des morts qui m'aidera à traverser cette épreuve.
Au point où j'en suis, les délires mystiques de Sora sont peut-être ma seule manière de préserver au mieux ma santé mentale.
La forme qui vibrait tout à l'heure semble se rétracter, avant de m'entourer. Je soupire.
« Oui, bon, ça va. Tu ne peux pas m'en vouloir de douter. »
Est-ce une manière de renier le deuil que de faire comme si l'homme que j'aimais se tenait toujours à côté de moi, souriant, prêt à me parler de ses passions, ou me gronder parce que je les foule aux pieds ? Encore une fois, je ne le saurai jamais.
Derrière moi, la brume frémit. Et puis, je me détourne du miroir. Et cette belle illusion disparaît.
Je suis de nouveau seule.
Personne pour m'écouter parler.
Je ferme les yeux. Prends une grande inspiration. Avant de ramasser mes vêtements et de me diriger vers ma cabine de douche.
Je ne peux pas rester enfermée dans mes illusions toute la journée.
Sortie de ma chambre, j'espérais tomber sur quelqu'un, qui se dirigerai vers le réfectoire au même rythme que moi. Quelqu'un à qui parler. Mais personne ne se trouve dans le couloir. Personne, non plus, devant le réfectoire. Et la poussière que je vois sur la poignée m'invite à penser que personne n'y est rentré, ce matin.
Je lève les yeux au ciel. Je ne devrais pas être agacée. Mais ça m'énerve. Est-ce que l'apathie est vraiment votre solution pour éviter de tuer, Saki, Soma, Junko, Daisuke, Michi, Yuuki ?
Une liste de noms qui se réduit toujours plus.
Dans le réfectoire, comme je m'y attendais, personne. Juste un unique kumarobot abandonné au milieu de la pièce, qui se dirige vers moi en roulant. Je l'entends cliqueter alors que je me rapproche. Son œil en forme de symbole de Monokuma clignote en me voyant, alors que sa petite tête d'ours se relève à mon arrivée.
Son apparence si évocatrice de ces maudits juges improvisés me dégoûte.
J'ai envie de taper dedans, l'envoyer balader à l'autre bout du réfectoire.
Je me rappelle de l'armée de robots recouvrant Haruko.
De celle qui m'a empêchée de sauver Khalil.
Des robots aux pieds de Monokuma lui montrant la preuve du meurtre d'Hina.
Pourtant, cette petite machine de même pas soixante centimètres est tellement pathétique, tellement insignifiante, que je ne peux faire que me pencher devant elle.
Le kumarobot ne bouge pas d'un pouce. Son œil rouge se plante dans le mien alors que je l'examine avec soin, cherchant les failles, les faiblesses, de cette petite créature mécanique. Mais un simple examen visuel ne m'apprend, évidemment, rien. Je ne peux que repérer où la caméra du robot se cache, dans le creux de son œil droit, et le petit boîtier sans doute pour visualiser l'enregistrement vidéo de ce kumarobot en particulier.
Rien d'intéressant dans la vidéo, toutefois.
Je pousse un profond soupir, avant de reposer la créature mécanique. Ce n'est pas le moment de chercher trop loin. Je ne trouverai certainement pas sur un unique robot le point faible de leur entière armée. Je n'ai pas autant d'espoir que ça.
Et ce n'est certainement pas l'espoir qui me sauvera de cet endroit pourri.
Je prends mon petit déjeuner en silence, essayant de mettre au point le programme de ma journée dans ma tête. Je n'ai pas le temps de chercher les autres et je n'en ai de toute façon aucune envie. Le silence m'accompagne depuis trop longtemps pour que sa présence ne soit pas rassurante. Et Monokuma peut bien nous expliquer ce qu'elle veut, je m'en fiche complètement. Une nouvelle zone ouverte, peut-être, les clés de laboratoire qu'il manque. Je crois que les seuls à ne pas l'avoir obtenue sont Daisuke et Yuuki.
Mine de rien, je reste curieuse. Mais sans nos rituels de début de chapitre, je me demande bien si Monokuma les a vraiment cachées.
Étrange comme on trouve un certain réconfort à la plus noire des routines.
Peut-être que je pourrais me rendre dans la salle informatique. Je dois encore décrypter une partie du dossier d'Haruko, et pour ça mieux vaut être seule que mal accompagnée. Les souterrains sont aussi une option viable. J'ai encore des choses à explorer dans la carte du troisième sous-sol, et je suis presque sûre qu'il y a des diamants dans la bouse. Ou les tuyaux, plus précisément.
Mais pas le temps de prendre une décision. Parce que la porte du réfectoire vient de s'ouvrir.
Et y rentrent Daisuke et Soma, avec des têtes d'enterrement tous les deux et main dans la main.
... Est-ce que j'ai loupé des trucs, moi ?
Je préfère ne pas le savoir.
En tout cas, ce sont les premiers visages vivants que je vois depuis deux jours. Je peux donc bien aller les saluer. Je me lève donc, avant de me diriger vers eux d'un pas lent. Soma me fait un sourire faible en me regardant en coin. Daisuke ne semble même pas remarquer ma présence avant que je le salue.
« Daisuke. Soma. Je ne m'attendais pas à vous voir ici.
— Nous non plus, princesse, marmonne Daisuke en m'adressant un signe de tête. Mais ça se comprend un peu. C'est vide. »
Il désigne le réfectoire d'un large geste du bras, mais je me doute bien qu'il ne parle pas que de la pièce. À ses côtés, Soma a un petit soupir.
« Je crois on a tous pris un sacré coup. Toutes les chambres sont verrouillées. Même celle de Yuuki. Et je serais pas sorti si... Il fallait pas que je vide mon sac, d'une certaine manière. »
Je pince les lèvres. Merci de me dire des choses que je savais déjà, Soma, mais bon, je ne peux pas vraiment lui en vouloir. Le silence du réfectoire est bien plus perçant que ta petite voix. Et je crois que tu veux juste essayer de couvrir les hurlements dans nos têtes.
Je ne pense pas que tu y arriveras un jour.
« J'imagine que ça se comprend. Monokuma ne semble pas faire beaucoup d'efforts non plus pour nous tirer du lit. Elle attend peut-être juste que l'apathie ait raison de nous.
— j'en doute, grommelle Daisuke. Si on est tous apathiques, personne ne tuera. À quoi bon ? On sera tous morts à l'intérieur. Nan, elle attend qu'on regagne une étincelle de vie pour pouvoir mieux la détruire et ce n'est pas elle, dans cette situation, qui y arrivera. »
Hm. Il n'a pas tort. Je vois mal Monokuma, aussi avide de sang qu'elle puisse être, abandonner pour nous laisser mourir par nos propres corps. Elle guette sans doute la bonne occasion. Et peut-être que cette discussion est en train de la lui offrir.
... Ou bien elle est occupée à autre chose.
Couvrir le meurtre de Kazumi Mizutani ne doit pas être chose facile, même dans un contexte tel que les Tueries. Elle vient, certes dans ses règles, d'assassiner la première des génies sans preuve de son Désespoir. Un sujet d'étude qui aurait pu être fascinant qu'elle a laissé pourrir dans son donjon.
Le fait qu'on ait pas eu la moindre nouvelle des proches alors que je suis certaine que personne n'est allé les voir pourrait être un bon indicateur du fait qu'elle a autre chose à penser.
De toute façon...
« Il va falloir qu'on se réorganise, d'une manière où d'une autre, je finis par soupirer. La fin est proche. Maintenant qu'on est arrivés jusque-là, on a sûrement moyen de mener l'enquête de manière plus sûre. Plus de clés. Moins de suspects. Plus de marge de manœuvre. »
Et plus de temps pour moi pour décrypter le dernier fichier d'Haruko.
Je suis persuadée que la clé est là.
Daisuke hoche la tête.
« Ouais, c'est pour ça qu'on est là, princesse. Soma est venu me parler d'un truc que je crois qu'il faut que tu saches. Pour qu'on soit sur la même longueur d'onde sur ce que Monokuma est capable de faire. »
Ledit Soma déglutit, et je vois ses joues déjà bien blanches pâlir alors que je me tourne vers lui. Il se serre contre Daisuke, et ce dernier lui tapote maladroitement la tête ; Un moment, je crains pour le crâne de l'Illustrateur, mais cette étrange marque d'affection semble lui avoir donné la force de prendre la parole.
« ... S'il te plaît, Reina, est-ce que tu pourras... Ne pas t'énerver sur moi ? Parce que ça te touche indirectement, d'une certaine manière... »
Ouh là, je le sens mal. Et mon expression ne semble pas plus que ça rassurer Soma, vu qu'il se recroqueville encore contre Daisuke, mais alors que je hoche la tête, il prend une profonde inspiration.
« ... C'est au sujet de l'exécution d'il y a un mois. Celle du... Du grand frère de Michi. »
... Je le sens encore plus mal.
Soma se triture les doigts, et, devant mon silence, grimace.
« ... Monokuma a dit que... c'était le hasard qui avait décidé, c'est ça ?
— C'est ce qu'elle a dit, oui, je soupire. Que Michi aurait dû se dépêcher pour ne pas tomber dans le piège. »
Et je n'ai aucune envie de me souvenir de ça. Des hurlements, du sang, des ricanements de l'exécutrice devant sa guillotine, encore un moyen presque miséricordieux mais ô combien cruel de tuer. De son discours devant Khalil prisonnier et Michi folle de désespoir.
Soma ferme les yeux.
« ... C'est pas tout à fait exact. »
Je me raidis. Net.
Le hasard n'était pas à l'œuvre ici ?
L'aveu de Soma ne laisse qu'une seule possibilité.
« Comment ça ?!? Elle... Ne me dis pas que-«
Je n'arrive pas à finir sa phrase tant la colère m'étrangle d'un seul coup, mais la fin est tellement évidente, monstrueusement évidente, que les deux garçons se raidissent d'un coup sec devant moi à leur tour. Ils ont très bien compris ce que j'ai en tête.
Est-ce qu'elle a fait décider à un des participants... à Soma de qui allait mourir ?
Mon visage doit avoir une expression terrifiante puisque Soma gémit, et ses yeux se remplissent de larmes.
« Non ! Pas comme ça ! Elle est... Elle est juste venue me voir, il sanglote, avec son grand sourire et deux urnes... Elle m'a dit que j'avais le choix... Je tirais parmi nous neuf, mon nom compris, ou les quatorze proches restants ! j'avais trop peur... Peur pour moi, pour vous, pour les probabilités qui se réduisaient, alors j'ai pris la plus grosse des urnes, et... Et j'ai tiré... »
Et je devine quel nom est sorti de sa boîte.
Le hasard, d'une certaine manière, était bien à l'œuvre. Simplement, ce n'est pas elle qui l'a manipulé. Elle a laissé le sale boulot à un des participants, pour toujours plus de douleur, toujours plus de tensions.
Puisque Michi ne verra pas, elle, quelqu'un qui n'a pas eu le choix.
Je regarde Soma. Ce dernier a fondu complètement en larmes, et Daisuke semble ne pas savoir quoi faire du grand dadais blotti dans ses bras en train de chercher le réconfort où il peut. Difficile de s'imaginer, objectivement, que quelqu'un comme lui aurait délibérément choisi la mort. Que quelqu'un de sa force mentale aurait pu envisager un autre choix.
Parce que je suis persuadée qu'il était possible de lutter, d'une certaine manière.
Proposer sa propre fin à la place.
Refuser de tirer, au risque d'être celui puni.
Une compliance malicieuse, qui sait.
Ou même une révolte immédiate.
Tant de possibilités en dehors de la boîte.
Mais à quoi elles auraient servi, si ce n'est à signer sa propre fin ?
Je pousse un profond soupir. Évidemment que Soma n'a pas vu d'autre choix. Et maintenant, tout ce que ça nous sert, c'est à créer un nouveau secret alors que presque tous tombent les uns après les autres.
Je prends une profonde inspiration. Avant de poser ma main sur l'épaule de Soma, qui continue de sangloter.
« Merci d'être venu m'en parler. »
Il renifle, avant de se serrer un peu plus fort contre Daisuke. À qui je jette un regard interrogateur.
Il se contente de hausser les épaules, avant de me jeter un coup d'œil du type « je t'expliquerai plus tard ». Mouais. On va dire que je l'accepte, pour le moment.
Pour le moment, parce que la porte vient encore de s'ouvrir.
Et que ce que je vois derrière n'a rien de réjouissant.
Monokuma pointe enfin son nez. Un large sourire aux lèvres devant notre étrange trio, elle se dirige vers nous, sautillante, son maquillage écarlate ressortant d'autant plus sur la pâleur de sa peau que les lumières viennent de s'allumer. Je n'avais même pas vu que j'étais à moitié dans le noir, tiens. Mais cet état me convenait plutôt bien.
En même temps que nos expressions s'effondrent, son propre sourire s'élargit.
« Eh bien eh bien que vois-je, des zombies ? je m'attendais à un peu plus de décès, quel dommage !
— Mécontente, Monokuma ? Je réplique avec calme. On ne se comporte pas comme tes robots ? »
Soma gémit de nouveau depuis les bras de Daisuke, mais Monokuma ne le remarque même pas. Elle se contente de rigoler.
« Oh, si c'était le cas, ce serait moins marrant. Enfin, j'ai un peu de retard, mais je vais bien pouvoir vous expliquer quelques trucs, même s'il manque du monde, upupupupu...
— Abrège, grommelle Daisuke. J'ai pas la journée.
— Moi non plus figure-toi, elle ricane. Mais moi, au moins, j'ai un peu de temps à vous adresser. Ne soyez pas si ingrats, ça ne vous va pas bien au teint ! »
Nos regards d'unanime hostilité sont la seule réponse que son petit trait d'esprit obtient. Mais comme d'habitude, elle ne semble pas s'en préoccuper.
« Passons sur les préoccupations d'usage, nouvelle zone et clés, yadda yadda... Il y a un petit changement dans l'emploi du temps ! A partir d'aujourd'hui, enfin, techniquement, d'hier, plus d'accès possible aux proches ! J'ai eu quelques petits rebelles à mater, upupu...
— Et surtout tu n'en as plus aucune utilité, pas vrai ? Je siffle, ne cherchant pas à retenir mon agacement. Maintenant que tu as tué celle que tu voulais tuer avec ce mobile... »
Cette fois, il semble bien que j'aie fait réagir Monokuma.
Cette dernière se tourne vers moi avec une lenteur presque machinale. Elle ne sourit plus du tout.
« Quelque chose à dire, Satou ? »
Je devrais sans doute m'arrêter là.
Tout mon instinct de survie me hurle de ne pas aller plus loin.
Mais le visage poupin de notre tortionnaire, chaque seconde que je passe à le regarder, m'emplit de plus de rage.
C'est elle qui a tué Hina. Shô. Haruko. Shizuka. Qui a poussé Soma à choisir la mort de Khalil. Elle qui a créé une situation propice au meurtre de Kichiro, Ryo, Taichi, Sora, Akihito. C'est elle qui a semé le sang et la mort dans ma vie.
C'est elle qui nous a détruits.
Elle n'a pas le droit de garder son stupide sourire.
Non. Elle n'a pas le droit.
Je ne suis pas Wen Xiang Monogatari. Mais un moment, juste un instant, bouillonne en moi toute la rage et la haine qui a guidé sa main vers la joue du Juge Ultime, le premier des Monokuma jamais vu à l'œuvre, et sans doute le plus cruel.
Et contrairement à elle, je sais exactement comment la diriger.
« Nous ne sommes pas tes pions, Monokuma. Ne crois pas une seule seconde pouvoir me cacher ton objectif. Tu cherchais depuis le début à tuer Kazumi, pas vrai ? Aucun autre des proches, excepté Kanade, n'avait un réel intérêt logistique pour toi à part plus de souffrance. Ce sont pour la plupart des gens normaux, les gens que notre stupide gouvernement cherche à protéger de nous, les génies. Maintenant qu'elle est morte, plus aucune excuse pour la tuer discrètement, pas vrai ? »
Chacun de mes mots semple porter un coup à la façade de Monokuma, dont je vois le visage se décomposer au fur et à mesure que je lui crache à la gueule cette vérité qu'elle a cru nous occulter. Avant de se reconstruire, petit à petit, sur la plus noire colère. Une colère que je n'ai vu qu'une seule fois, dans ses yeux pleins d'orage, recouverts par la fumée de son arme.
Une colère braquée sur le corps sans vie de l'Ultime Assassin.
Monokuma fait quelques pas vers mois, avant de lever la tête. Étrangement, cette fois, tout ce que je remarque, c'est que je la regarde de haut.
« Ne fais pas celle qui a tout compris, ma jolie, parce que tu ne sais rien de mes motivations, et tu ne sais rien des gens qui sont dans ce couloir, à commencer par ta très chère cousine. Tu te targues peut-être de ne pas être un pion sur un échiquier mais tu n'es pas mieux qu'un personnage de jeu vidéo, qui ne peut suivre que les choix qui s'imposent à son code ! Quand bien même voudrais-tu te rebeller que ta nature même te l'empêche, parce que tu as été conçue pour te soumettre, à ceux plus grands que toi...
— Remballe ton god complex, je siffle, sans me préoccuper des regards paniqués et presque inquiets de Daisuke et Soma. Si je suis un personnage de jeu, tu n'es pas mieux que moi, à suivre un archétype sans personnalité. C'est quand la dernière fois que tu as réfléchi par toi-même ? au lieu de suivre ce que tu penses être un Monokuma mais qui n'est au final qu'un pathétique avatar de haine ! »
Dans ses yeux, une lueur s'éteint.
Elle lève sa main, prête à me frapper.
J'attends le coup venir.
J'attends.
...
J'attends.
Elle a toujours la main levée, toujours les yeux plein de haine et de stupéfaction. Mais ils ne sont pas fixés vers moi.
Ils sont fixés vers le sang qui goutte par terre.
Le sang qui goutte d'entre ses lèvres.
Elle lève les yeux.
Me regarde.
Regarde le sang.
Une seconde.
Et une violente quinte de toux déchire ses organes, projetant au sol une nouvelle gerbe de sang, alors que s'effondre au sol notre maîtresse de cérémonie dont ne reste plus en elle que la panique.
Et je regarde, au sol, ce qui me paraissait autrefois un atout inébranlable cracher, encore, et encore, et encore du sang sur le sol.
Sans bouger.
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