Chapitre 22
KALLY
Jimmy, un jeune prospect, unique fils de Bart le gérant du bar, venait de me déposer à l'entrée de l'hôpital. Le trajet s'était déroulé dans le silence. On ne pouvait pas dire qu'il était un grand bavard, ou alors il avait eu la consigne de boucler sa petite bouche en ma présence.
Toujours était-il que j'étais tout de même soulager de quitter l'habitacle de sa voiture, même si les prochaines minutes seraient... seraient ? certainement les dernières... Et j'avais beau essayé de tourner cette situation tragique dans tous les sens, je ne trouvais aucune solution pour éviter l'enclume qui me tomberait sur la tête dans quelques instants.
Vous me direz qu'il me restait la fuite. Mais avec quel argent ? et puis, il était certain que Matt me retrouverez en moins de vingt-quatre heures. Et après ?... je laissais votre imagination faire le reste... Non, il valait mieux s'avouer vaincue. Dès demain, je serai entre les pattes de mon baby-sitter de deux mètres de haut avec sa grosse barbe, et il me collerait comme une crotte sous ma chaussure jusqu'à la fin de mes jours.
Quant aux deux lascars, ils fêteront très certainement leur victoire autour d'une bonne bière, se congratulant d'avoir été super intelligents. Je serrai mes poings... je trouverai le moyen de leur rendre la pareille... Dussé-je y consacrer le restant de mon existence !
Je pénétrai dans le hall presque vide de l'hôpital. Seule une secrétaire pianotait sur son ordinateur, les lunettes au bout de son nez fin.
Je m'approchai de l'un des trois ascenseurs et les portes s'ouvrirent pour laisser sortir un vieux couple qui se tenait par le bras. Je fis un pas pour entrer dans la cabine mais finalement, je décidai d'emprunter les escaliers. Après tout, je n'étais point pressée de me faire gronder.
Je commençai à monter les marches avec la désagréable impression de me rendre à l'échafaud où un bourreau m'attendrait avec sa grande hache dans les mains. Mais alors que j'atteignais le troisième étage, je me stoppai, mes sens en alerte. Quelqu'un montait en courant les escaliers, tandis qu'un autre avait surgi brutalement du palier du dessus. Une alerte rouge sanguine se mit à clignoter dans mon cerveau. Je pensai aux deux gars de la dernière fois et je me maudissais de ne pas en avoir référé Jack ou ce maudit épineux. Je soupirai d'agacement. Ce n'était pas le moment de jouer au chat et à la souris ! J'avais des affaires bien plus urgentes à traiter.
N'ayant pas le choix, encore une fois, je poussai rapidement les portes du troisième étage : service cardiologie. Génial ! les malades ne me seront d'aucune utilité. Je pris alors la direction opposée des chambres, dans l'espoir un peu fou qu'un médecin me vienne en aide. Mais à peine avais-je fait dix mètres, que les deux individus de la dernière fois, surgirent en courant.
Je paniquai et je jetai un chariot rempli de produits désinfectants vers le plus rapide. Le chariot se renversa et le gars sauta par-dessus. Mais en l'enjambant, il se prit les pieds dans un bidon de désinfectant pour les toilettes et tomba de tout son long. Le second esquiva son camarade mais ne put éviter la poubelle qui avait roulé un peu plus loin. Il se retrouva sur le tapis également.
Je marquai un arrêt pour les observer avec un joli sourire et ils me fusillèrent d'un regard aussi noir que du charbon. Ils se relevèrent avec une vitesse qui me surprit et je poussai un petit cri. Je m'enfermai alors dans la première pièce que je trouvai. Super Kally ! un placard sans fenêtre !
Je regardai rapidement autour de moi et, alors que mon avenir s'obscurcissait, mon visage s'illumina instantanément : un défibrillateur ! Presque trop facile !
Soudain je sursautai devant un terrible bruit : un bélier devait enfoncer la porte avec sa grosse tête. Le chambranle trembla sous l'impact. Je branchai rapidement le défibrillateur et je l'allumai.
- Ouvre la porte, gamine ! lança mécontent l'un des deux hommes avec une voix éraillée.
- Pourquoi faire ? demandai-je pour gagner un peu de temps.
- On veut juste discuter, répondit l'autre en s'excitant sur la poignée.
Je pris les électrodes dans mes mains. J'entendis de l'agitation de l'autre côté de la porte et une dame, très certainement une infirmière, leur intima de cesser de hurler. Je tendis l'oreille et il semblait y avoir du mouvement dans le couloir, puis la poignée se remit à bouger avec énergie. Je plaçai les électrodes dessus et j'appuyai sur le bouton choc. Aussitôt, il y eut le son d'un corps qui tombe, suivi du cri strident de l'infirmière.
- Appelez la police ! lança une autre voix féminine. Ils sont partis par les escaliers de secours !
- Oh mon dieu, il est mort ? demanda une troisième voix d'homme cette fois-ci.
J'avais la désagréable sentiment qu'il y avait une ***** dans le potage. Il me semblait qu'il n'était que deux... Qui était donc le troisième que j'avais aligné ?
Je déverrouillai la porte et l'ouvrit avec lenteur. Je restai abasourdie. Devant moi, un mec étendu en blouse blanche, la bouche grande ouverte, les yeux clos. J'avais semble-t-il dégommé le médecin. Cette fois, c'était le peloton d'exécution immédiat.
HARPS
Je vous jure, cette nana était incroyable. Elle pleurnichait dans les bras de cette mocheté de frère aîné et jouait le rôle de la pauvre petite victime qui avait échappé aux vilains grands méchants loups. Sa prestation était une grosse daube et cela crevait les yeux qu'elle pétait la santé. Pas la moindre égratignure, pas même une minuscule petite bosse. On ne pouvait pas dire la même chose du pauvre médecin qu'elle avait électrocuté. Le malheureux venait à peine de se réveiller du coma où elle l'avait expédié. Une chance qu'il ne porte pas plainte !
Elle me lança un regard rapide tout en se blottissant dans les bras du cinglé et je compris parfaitement le message : « Alors vieux épineux, que vas-tu faire ? » ? Je serrai les poings, me contenant de l'envoyer par la fenêtre.
Vraiment elle détenait l'oscar de la comédienne la plus pourrie de l'histoire du cinéma. Elle s'en était sortie, non ? Alors pourquoi Matt ne lui tordait pas le cou. S'était-il ramolli ?
Mes yeux se tournèrent vers Jex qui paniquait sur son lit. La sueur jaillissait de son front comme les chutes du Niagara et j'étais certain que sa culotte se remplissait de merde. Putain, les évènements avaient pris une tournure qui sentait l'œuf pourri.
Mes pensées furent interrompues par la sonnerie de mon portable. Je le pris et décrochai rapidement. Jack me raconta brièvement la transaction et la nouvelle que lui avait transmis le mexicain. Je sentais le regard du fou braqué sur moi. J'étais certain que son oreille avait capté les paroles de mon vice-président et malheureusement, je ne pus m'empêcher de blêmir. Los Manos était un clan de bikers rival très dangereux. Il y avait trois ans, nous avions perdu deux gars dans une confrontation directe.
- On voit ça ce soir, Jack. Rassemble tout le monde pour vingt-et-une heure.
Je raccrochai et croisai le regard de Matt. Le gars était vraiment flippant. Rien ne transparaissait dans son visage. Aucune émotion dans ses yeux. Aucun signe d'énervement. Il était calme, dangereusement calme.
- Tu repars demain matin ? demandai-je avec l'espoir fou qu'il dégage rapidement de mon paysage.
Il me fixa un moment. Jex et moi étions suspendus à ses lèvres comme deux gros pandas sur leur branche.
- Je reste le temps de retrouver les deux individus qui ont tenté de kidnapper ma sœur.
Je crus entendre un sanglot sortir de la bouche de mon ami.
- Après, je la ramènerai au manoir.
- Sérieux ? intervint Jex illuminé telle une ampoule.
Je lui lançai un regard de travers pour lui faire comprendre que ce n'était pas le moment de se faire choper. Il se tassa sur son lit, se mordant la lèvre. La mioche se décomposa. Et ouais cocotte, la fin était proche.
- Voilà ce que nous allons faire, annonçai-je. Ta sœur ne sortira plus du ranch. Elle y est en sécurité avec mes hommes. Jex rentre également dès ce soir afin d'éviter de l'exposer si les péteux revenaient en force.
Matt hocha de la tête, signe qu'il adhérait à mes paroles et je poursuivis.
- Jex a un traumatisme crânien qui lui nécessite du calme. La mioch... Kally a...
La sorcière m'interrompit grossièrement :
- Matt, je ne me sens pas bien. Je veux rentrer maintenant.
Elle se mit à le fixer avec les larmes au coin des yeux. Putain, rien ne l'arrêtait. Au pied du mur, le fusil braquait sur sa tête, elle continuait à jouer la comédie. Le gars se pencha et lui embrassa le front.
- Pas de soucis, princesse.
Les yeux de Jex s'ouvrirent comme deux soucoupes bien rondes. J'étais trop estomaqué pour en placer une. Le gaillard s'était fait avoir. Comment c'était possible ? Il avait bien ramolli du cerveau pour avaler les conneries de la démone.
La mioche lui rendit un pâle sourire et il lui passa un doigt sur sa joue avec une infinie tendresse. Le sol semblait tanguer sous mes pieds comme le pont d'un bateau en pleine tempête. Le gars n'était pas clair. Il devait avoir le cerveau qui partait en vrille.
Il lui prit son visage dans ses mains et son regard se fixa dans le sien. Le silence était lourd dans la chambre.
- Et tu m'expliqueras pourquoi Jex se trouve dans un tel état.
Ding dong ding dong ! Ce n'était pas le tintement d'une cloche qui marquait la fin d'un règne ? Le jugement dernier arrivait à plein régime. Prépare ton derrière la sorcière ! Matt allait te botter le cul !
La mioche maîtrisée, je pouvais m'occuper de la tuile qui nous était tombée dessus.
KALLY
Muffle ! Ce maudit biker me payera cher cette humiliation. Magouilleur, accroche-toi à ton conte de fée ! Si tu croyais m'enfermer dans ta tour dorée, tu irais déchanter dans les jours prochains ! Pour l'heure, balle au centre.
Je fusillai Jex du regard. Celui-ci sembla paniquer. Et bien tremble mon frère ! Ta petite vie bien pépère, je me ferai un point d'honneur à m'en occuper personnellement. La boîte de Pandore venait de s'ouvrir complètement sur ta petite tête bien lisse.
Mais pour l'instant, un problème plus complexe devait être réglé. Un pressentiment étrange m'avait envahi, et cela ne présageait rien de bon... Matt était réputé pour ne rien pardonner et je le connaissais assez pour sentir qu'il était furieux. Je me mordis les ongles. Mon sort était scellé. La mort était proche.
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