Sébastien avait passé des jours et des jours à éplucher des annonces et visiter des appartements. Et enfin, il avait trouvé un endroit à lui. Son premier appartement. Celui dans lequel il allait refaire sa vie. Mais les choses se passent rarement comme on les avait prévus.

Alors que Sébastien déballait ses cartons, il tomba sur une pile de lettres. Des lettres qui n'était pas à lui. Des lettres qui ne lui avait jamais été destinées. Il en prit une au hasard. Il reconnut l'écriture d'Elena, soigneuse, délicate. « Ben ».

Sébastien savait qu'il ne devait pas la lire. Mais la curiosité est un défaut que nous connaissons tous, et il l'ouvrit.

Ben,

Tu es parti. Tu as fui comme mon père avant toi. Ma mère me l'avait pourtant dit.

Tu as pris avec toi, mon cœur, le peu de confiance que j'avais retrouvé, l'espoir que j'avais misé en l'avenir, en l'amour, en la vie.

Tu es parti, laissant un vide profond. Un froid que je ne parviens pas à réchauffer.

Pourtant tu savais.

Je t'ai attendu, je t'ai écrit, je t'ai laissé des messages.

Mais tu as choisi de partir et je ne comprends pas. Je ne comprends pas comment j'ai pu y croire. Te croire. Je ne comprends pas.

Je n'arrive pas à concilier l'image que j'avais de toi, de tes mots, de tes gestes, de ta douceur et l'amour que tu affirmais me porter avec ce départ, cette lâcheté. Non, je n'arrive pas à comprendre.

J'avais tellement besoin de toi en ce moment. J'avais besoin de ton rire et de tes conseils. J'avais besoin de tes bras autour de moi. J'avais besoin que tu me murmures à l'oreille des mots réconfortant. J'avais besoin que tu me dises que tout se passerait bien et que tu serais là, à mes côtés pour affronter l'avenir.

Mais il n'y a qu'un profond silence. Et il fait si froid sans ta présence !

Tu es parti sans un mot.

Je ne vais pas le garder. Je ne veux pas qu'il subisse ce que j'ai subi. Je refuse que cet enfant naisse et connaisse la haine que j'ai pour toi. Je ne veux pas qu'il vive l'abandon comme je l'ai vécu avec mon père. Avec toi. Et par-dessus tout, je ne veux pas devenir comme ma mère. Alors c'est décidé, je vais avorter.

Mais tu ne le sauras jamais.

Tu ne le sauras pas parce que tu es parti. Tu n'as répondu à aucun message, laissé aucune adresse me permettant de te faire parvenir cette lettre.

Je te hais. Je hais l'espoir que tu as fait naître avant de le faire mourir. Et pire encore, je hais l'amour qui subsiste en mon cœur. Parce que je n'arrive pas à simplement te haïr. Je t'ai trop connu pour te croire si mauvais.

Je te hais,

Amoureusement,

Elena

Sébastien referma la lettre. Une rage sourde naissait en lui. Il avait passé quatre ans à l'aimer et jamais elle ne lui avait parlé de Ben. Et jamais, il n'avait appris pour ce bébé. Elle lui avait menti encore et encore. Mais cette fois, elle lui devait la vérité. Il voulait l'entendre de sa bouche.

Alors, il attrapa ses clés, la lettre toujours danssa main. Il monta dans sa voiture, jeta la lettre sur le siège passager etroula à toute allure dans la nuit qui tombait. Il repensait à ses momentspassés ensemble. Il repensait aux espoirs qu'il avait fondé en eux. Ilrepensait à ces quatre années passé à ses côtés. Et sa rage grandissait. Ilaccéléra encore. 120 km/h, 130 km/h, 140 km/h. Il ne vit pas le virage. Il nevit pas l'arbre. Il s'endormit simplement.