Il est plus de vingt-et-une heures, lorsque je rentre chez moi, épuisé et couvert de sueur à la suite de ce premier entraînement, qui m'a littéralement séparé de mon âme. Car oui, après notre longue, très longue discussion et le réconfort qu'il m'a apporté, j'ai décidé, suite à sa demande, de reprendre l'entraînement. Je ne voulais pas me dégonfler, ni baisser les bras, je voulais vraiment montrer que j'étais motivé à prendre les devants, et sortir de l'eau dans laquelle je baigne depuis trop d'années, à garder la tête à la surface pour ne pas me noyer.

En prenant ma douche, je ne fais que repasser en boucle la « déclaration » de Jaekyung. Dans ma tête, je souligne ce mot entre guillemets, car pour moi, une déclaration se résume à un je t'aime et en l'occurrence, ça n'en était pas un. Je lui plais et je n'arrive toujours pas à croire que je venais d'entendre ces mots, pour la deuxième fois de ma vie.

Le premier m'ayant fait une telle déclaration, n'étant autre que Ha-joon.

Ne vous méprenez pas, j'étais loin, très loin de m'emballer à ce moment-là. J'étais plutôt effrayé, car c'était la seule relation amoureuse sur laquelle je pouvais me baser, sur laquelle où j'avais des repères, des références, une routine, avait été désastreuse.

Encore une fois, j'ai été incapable de lui répondre. Il est encore trop tôt dans mon esprit et dans mon cœur pour envisager une nouvelle aventure, un nouvel amour potentiel. Mais je dois tout de même vous avouer qu'il ne me laissait pas indifférent. C'est un très beau garçon, en plus d'avoir un cœur immense dans le creux de sa main.

Même si Ha-joon s'était montré tout aussi doux et affectueux durant le premier mois de notre couple, je me rappelle à quel point ses gestes étaient particulièrement brutaux. Que ce soit dans sa manière de me tenir la main, de me caresser lorsque je désirais quelques moments de tendresse avant de dormir, ou même la façon dont il avait de m'embrasser, il n'y avait aucune douceur de sa part. Tout était brutal, contrairement au toucher de Jaekyung, que je peux parfaitement comparer à la douceur d'une plume, effleurant notre épiderme pour nous voler quelques vagues de frissons.

Oui, après tout, il faut que je me l'avoue à moi-même, qu'il me plait un peu, lui aussi. Mais, à ce moment-là, j'ai comme le sentiment que je n'ai pas le droit, que je ne suis pas légitime de ressentir cette attirance que j'ai eue pour lui, lorsque nos regards se sont croisés.

Dites-moi... Est-ce que c'est normal ? Normal d'être attiré par une autre personne après ce que j'ai vécu. Car j'ai vraiment le sentiment que quelque chose ne va pas dans ma tête.

— Joshua, tu as bientôt fini de prendre ta douche ? On ne va pas tarder à manger ! s'écrie ma mère de l'autre côté de la porte de la salle de bain, me sortant de mes songes.

— Oui, mère ! Donnez-moi encore cinq petites minutes ! dis-je en retour, haussant un peu la voix pour qu'elle entende par-dessus le bruit de l'eau.

Je termine de prendre ma douche, toujours avec cette difficulté de devoir toucher mon intimité, qui s'est amplifiée lorsque j'ai découvert que je suis devenu impuissant. Alors, pour pouvoir faire ma toilette sans encombre, je fais en sorte d'imaginer autre chose lorsque je touche mon pénis, et je mets un gant toilette pour éviter tout contact avec ma propre peau. C'est le même calvaire quand je dois aller aux petits coins. Je privilégie essentiellement les toilettes fixes et je me mets assis, comme le ferait une femme, même si ce n'est que pour uriner, pour ne pas avoir à le toucher de mes propres mains.

Lorsque je clôture cette difficile étape, qui dure tout de même plus d'une quarantaine de minutes, car même si j'ai cette peur effroyable de me toucher le pénis, je fais tout de même en sorte d'être propre au maximum, je ferme le mitigeur d'eau et prend une serviette sèche, que j'enroule autour de mon corps. Puisqu'une nouvelle fois, j'ai allumé la lumière, m'étant décidé à affronter progressivement mon reflet. Toutefois, il m'est encore nécessaire de cacher mon corps le plus possible, et d'éviter au maximum de le voir dans le miroir, embué à cause de la vapeur d'eau chaude, me facilitant la tâche pour me sécher et enfiler rapidement mon pyjama.

Ce n'est qu'au même moment de regagner ma chambre, que mon portable me notifie d'un petit son, à la réception d'un nouveau message.

Jaek : J'espère que tu es bien rentré ? Ta première séance de boxe était incroyable, tu as assuré ! Pense à boire beaucoup d'eau pour éviter les courbatures ;) Repose-toi bien, on se voit demain pour les cours.

Un large sourire courbe mes lèvres, en lisant son message.

Si vous vous posez la question, du pourquoi du comment, à la fin de la séance, j'ai expliqué à Jaekyung que le numéro de téléphone est quelque chose d'assez intime pour moi, dans le sens où il n'y a que les personnes très, très proches de mon entourage qui peuvent l'avoir. En l'occurrence, il n'y a que Gabriel qui m'envoie des messages, et mes adorables parents. Pour ce qui est des potentielles connaissances, je leur donne mon nom sur Kakao pour qu'ils puissent m'y ajouter, s'ils le désirent. Jaekyung étant le premier à m'avoir ajouté sur cette application.

D'après lui, j'ai été incroyable, et je dois vous avouer que malgré mes petits bras maigrichons, j'ai réussi à prendre un bon rythme dans les frappes. Ce qui m'a fait un bien fou, de pouvoir me défouler et de décompresser de tout le stress qui s'est accumulé en moi.

Jo☆Gabi : Oui, je viens de prendre ma douche et là je vais aller manger. Merci à toi, tu ferais un excellent coach... On se voit demain, bonne soirée !

Une fois prêt, je rejoins mes géniteurs dans la salle de séjour. Ces derniers m'attendent patiemment pour pouvoir commencer le dîner.

Pour la première fois de ma vie, j'avais une dalle à pouvoir dévorer tout ce qui se trouvait sur la table.

— Tiens mon chéri, mange ça ! C'est important après une séance de sport, me dit ma mère, en me servant un bon bol de ramen avec des tranches de porc caramélisées et une sauce assez piquante, au vu de sa couleur rouge volcanique.

Mon estomac va être ravi. Les toilettes un peu moins.

— Merci, mère, réponds-je, en saisissant de mes baguettes pour commencer à manger, avant de réaliser que c'est brûlant.

— Fais plus attention, Joshua, me réprimande mon père, en levant les yeux au ciel. Même pour ça, tu n'es pas doué. Comment était cette séance ? Je suis surpris que tu ne sois pas rentré avec un plâtre autour du bras.

J'aurais pu me sentir offensé il y a quelques jours par cette remarque désobligeante, mais à cet instant, le message de Jaekyung se reflète sous mes yeux, m'arrachant un léger sourire, qui ne laisse guère indifférent.

Leur fils, sourire ? Une première !

— Ça te fait rire ce que je viens de te dire ? souligne mon père d'un air méprisant, un sourcil arqué.

— Pour tout vous dire, père, j'ai pensé exactement à la même chose que vous, admis-je simplement, en gardant mon sourire aux lèvres, tout en dégustant mon plat, sous leurs regards médusés.

Le reste du repas se déroule comme à son habitude, sans encombre, et sous un silence de mort, comme si nous avions assisté à l'enterrement d'une personne. Une bonne demi-heure plus tard, je me retrouve dans ma chambre pour réviser mes cours, au vu d'un potentiel examen, avant que mon portable ne se mette à vibrer à nouveau, à la suite de plusieurs messages.

Gabi : Alors ma vie ????

Gabi : Comment c'était cette séance de boxe ?

Gabi : Raconte-moi tout !!

Gabi : Joshuaaaaaaaa !

J'esquisse un sourire à ses SMS, me décidant à l'appeler, plutôt que lui répondre par écrit pour éviter les longs pavés ennuyeux, vu tout ce que j'ai à lui raconter. Il n'y eut que deux bip sonores, avant que Gabriel ne décroche à mon appel.

— Hey, mon chaton, tu vas bien ? demandé-je, en me glissant sous les draps.

— Je vais très bien ! Mais ce n'est pas le plus important ! Raconte-moi tout ! me répond-il sur une intonation reflétant son excitation.

— Eh bien... ça s'est très bien passé en soi, dis-je honnêtement, en humidifiant mes lèvres. Même si le début de la séance a été catastrophique...

— Ah bon ? Comment ça ? Qu'est-ce qu'il s'est passé ? Il a fait quelque chose de mal ?

— Non, non du tout ! Il n'a rien fait de mal, au contraire ! réfuté-je, avant que Gabriel ne se fasse de mauvaises idées. J'ai juste eu une nouvelle crise d'angoisse avant de commencer. Mais il a su tout de suite réagir pour me calmer, avant que ça ne devienne trop intense...

— Oh mon cœur... mais que s'est-il passé pour que tu fasses une crise d'angoisse ? Il y a bien quelque chose qui t'a fait paniquer ? Tu avais peur de ne pas réussir ? questionne-t-il, de l'inquiétude dans le fond de sa voix. Mais tu sais que je t'ai déjà dit que tu es extraordinaire ! Tu n'as pas à douter de toi, vraiment !

C'est toi qui es extraordinaire, Gabi.

— J'ai paniqué quand il a voulu se mettre derrière moi pour corriger ma position...

Gabriel est au courant de cette peur. Il en a fait malheureusement les frais au tout début de notre rencontre, lorsqu'il s'était mis derrière moi pour me faire peur, juste pour rigoler, un soir où j'étais chez lui. Je ne vous fais pas un dessin, ça s'était malencontreusement transformé en terrible crise de panique juste au moment où il a posé les mains sur mes épaules pour me faire savoir sa présence.

Depuis, il ne l'a plus jamais tenté de le faire, tout en ignorant l'origine de cette peur.

— Oh non, je suis tellement désolé mon cœur, je suis sûr que ta peur s'est amplifiée à cause de moi, regrette-t-il sur un ton attristé. Mais s'il a réussi à calmer ta crise dès ses débuts, c'est le plus important. Je suis vraiment content que tu arrives à t'ouvrir petit à petit à d'autres personnes. Je suis fier de toi.

— Merci, Gabi... murmuré-je à ses mots, en souriant d'émotion.

— Tu te sens mieux, maintenant ? Tu n'es pas trop fatigué ?

— Je suis un peu vidé de mes forces, mais je vais bien. Ça m'a vraiment fait du bien cette séance, car j'ai pu me décharger de tout ce stress que j'ai gardé en moi, dis-je alors que j'ai terriblement envie de lui parler d'un autre sujet, mais je ne sais pas comment l'aborder. Mais...

— Mais, quoi ? rétorque-t-il de vive voix. Il s'est passé quelque chose ? Dis-moi ce qui s'est passé ! Kim Joshua, tu vas...

— Jaekyung m'a dit que je lui plaisais, balançé-je, comme un cheveu sur la soupe. Et je lui ai donné mon identifiant sur Kakao pour qu'on puisse se parler.

Mon cœur tambourine comme un dingue contre ma cage thoracique, tandis qu'une bouffée de chaleur étouffante embrase tout mon corps, me poussant à ouvrir la fenêtre de ma chambre pour me refroidir avec la brise fraîche de la nuit.

— Tu... quoi ? bégaie Gabriel, me laissant totalement imaginer qu'il est en état de choc.

Ce qui est tout à fait normal.

— Jaekyung a dit quoi ? hurle-t-il, jusqu'à attirer l'attention de Conor, qui devait être à ses côtés, lorsque j'entends un : « Qu'est-ce qu'il y a avec Jaek ? » en fond, me glaçant immédiatement le sang.

— Non, Gabriel, s'il te plaît, je ne veux pas que d'autres personnes le sachent... S'il te plaît, le supplié-je dans la foulée, car je ne souhaite vraiment pas que cette annonce ne s'ébruite autour de moi. Dis simplement à ton mec que Jaekyung m'a dit que j'ai été incroyable, selon lui, pour cette première séance.

— Oui, pardon mon cœur, je me suis laissé emporter, s'excuse-t-il, en se raclant la gorge, avant de s'adresser à Conor, l'entendant dire : Jaekyung a fait un compliment à Joshua pour sa première séance, en lui disant qu'il a été incroyable !

— C'est pour ça que tu as crié ? commente-t-il, en fond. Il t'en faut peu.

— Ouais, en attendant, toi tu es obligé de me la mettre pour me faire crier, alors, tais-toi, réplique mon meilleur ami, en me reprenant au téléphone. Désolé ma vie, il y en a un qui l'ouvre un peu trop à côté de moi.

Je glousse en entendant au même moment d'étranges bruits de fond, mélangés à des rires, avant que je ne me retrouve avec son petit-ami au téléphone.

— Josh, tu vas bien ? Je suis content si ta séance avec ce trou du cul s'est bien passée, il enseigne bien ! Mais... ça ne te dérange pas si vous en parlez demain ? J'ai un truc important à régler avec ton best friend.

A cette demande, je sens la gêne m'envahir, comprenant aussitôt de quel sous-entendu il s'agit.

— Pas de soucis... Passez une bonne soirée ! balbutié-je dans ma barbe inexistante, avant de raccrocher le premier.

Je ne me fais aucun doute sur le fait qu'ils vont certainement passer une très bonne soirée, me faisant presque me sentir jaloux de savoir qu'ils ne rencontrent aucun soucis, en ce qui concerne la sexualité. Je me sens soudainement découragé, abattu, harassé de me sentir si inférieur aux autres.

Souain, une nouvelle notification fait vibrer mon portable, faisant louper à mon cœur un battement, lorsque je lis ce qui est écrit :

Camtv : BJ Golden est actuellement en live !

❃ ❃ ❃ ❃

— Bonsoir à tous ! Comment allez-vous, ce soir ? ? demande le jeune homme au masque mystérieux, vêtu d'une simple chemise blanche mi-ouverte et d'un pantalon noir, dont la braguette est déjà baissée. J'espère que vous avez passé une bonne journée ?

Mon doigt à glisser tout seul sur la notification. Et comme à mes dernières habitudes, je me contente de regarder les autres spectateurs dépenser leur argent, et mettre des commentaires, que j'ai peu à peu arrêté d'en mettre, de peur de me faire à nouveau prendre pour cible par la méchanceté gratuite de certains. Même si je sais pertinemment que ce camboy n'apprécie guère ce genre de comportement, il ne peut cependant pas tout gérer à son échelle.

— Je vois que vous êtes bien réactif, ce soir ! glousse le garçon, en glissant le bout de sa langue sur le coin de ses lèvres, les rendant brillantes, le temps d'un instant. Pour ma part, ça a été plus qu'une merveilleuse journée ! Et comme je suis de très très bonne humeur, je vais encore mieux m'occuper de vous, ce soir...

Au fur et à mesure des visionnages, je commence à me sentir beaucoup moins gêné à regarder ce genre de show, qui, au début, me mettait extrêmement mal à l'aise, étant donné que je ne connaissais nullement ce milieu, avant que Gabriel ne m'en parle. J'en apprends un peu plus sur le sexe, plus que je n'en ai appris avec Ha-joon, qui décidait toujours de tout, faisant ce qu'il désirait avec mon corps, sans me demander ce que moi je préférais.

Mais le problème, c'était que même moi, je ne savais pas ce que j'aimais réellement.

Ce que je sais à présent, c'est que la pénétration anale est quelque chose que je ne veux nullement recommencer dans l'immédiat, ou même dans un futur proche, encore traumatisé de mes précédents ébats avec mon ex-petit-ami, me rappelant les quelques saignements que j'avais par moment, lorsqu'il en avait terminé avec moi, me reprochant d'être trop étroit, selon lui, et que c'était de ma faute s'il me blessait.

Qu'il ne pouvait faire autrement.

Pour ce qui est de la masturbation, je n'en connais pas non plus tout un rayon à ce sujet. Ha-joon ne me touchait jamais et ne m'avait jamais fait de fellation non plus, sous prétexte que c'était un endroit sale.

Cependant, je me souviens que je devais lui en faire, parce qu'il en avait envie, parce que c'était comme ça et pas autrement. Que c'était mon devoir de lui donner du plaisir. Ce furent les pires moments que j'aie pu découvrir en matière de sexe, notamment lorsqu'il mettait ses mains dans mes cheveux pour appuyer sur l'arrière de ma tête, et forcer le passage avec son pénis, pour le faire glisser plus profondément dans ma gorge, au point que j'ai failli m'étouffer plusieurs fois autour de sa queue. Je vous épargne également les réflexes nauséeux, que je peinais à contrôler pour ne pas lui vomir dessus.

Ça non plus, je ne veux pas recommencer.

En y réfléchissant bien, il ne me reste plus beaucoup de possibilités à faire avec le sexe. Du moins, c'est ce que je pensais. J'en suis tant écoeuré, tant terrifié, alors, qu'en réalité, il y a tellement de choses à pratiquer avec son ou sa partenaire, sans pour autant qu'il y ait besoin d'une pénétration pour avoir du plaisir, pour avoir un orgasme.

Mais ça, encore une fois, je l'ignore totalement à ce moment-là, en regardant le show de ce camboy, espérant trouver des réponses à mes questions dans ses gestes, dans ses mots, avant que mon esprit ne divague et ne soit dominé par la vision de Jaekyung, ainsi que de notre discussion d'aujourd'hui, suivi de sa révélation sur le fait que je lui plaisais.

Est-ce que je lui plairais toujours, s'il par malheur il apprend que je suis impuissant ? S'il découvre que je ne suis qu'un novice en matière de sexe, sans aucune expérience, à part des souvenirs désastreux en guise de traumatismes sexuels ? Rien qu'en y pensant, mon cœur se brise. Car je sais bien au fond de moi que je ne pourrais jamais rien commencer avec un autre homme, sans avoir guéri de mes blessures, si je ne veux pas qu'il s'enfuit en courant ou qu'il se moque de moi ouvertement, sous mes yeux.

Mais ai-je vraiment envie de recommencer quelque chose de nouveau avec quelqu'un d'autre ? Ou ai-je plutôt peur que ce que j'ai vécu avec Ha-joon ne se répète à nouveau ? Qu'est-ce que j'ai vécu dans tous les cas ?

Comme beaucoup trop souvent, depuis ces derniers jours, je plonge dans les prémices de mes démons, n'ayant prêté attention au camboy qui a commencé à se masturber, sans pour autant nous montrer ses parties intimes, nous laissant totalement imaginer à quoi peut ressembler son pénis. J'entends ses gémissements dans le creux de mes oreilles, qui ne me laissent guère sans émotions, m'arrachant quelques vagues de frissons en faisant grimper la température dans mon corps.

La seule chose qui ne bouge pas est mon sexe, et en constatant cela, une terrible envie de le frapper, de le serrer si fort dans ma main pour tenter de le réveiller, de le faire réagir, de me rassurer qu'il n'est pas « mort », me traverse l'esprit. Mais c'est inutile.

Il est mort. Tout comme moi je le suis intérieurement.

Je sais, ça peut paraître dingue à lire ou à entendre, mais les mutilations sexuelles sont monnaie courante pour les victimes d'agression, et ça, je l'ignorais aussi à ce moment-là.

Mais au lieu d'en arriver à une telle violence physique, je tapote sur les touches de mon clavier, une fois que le garçon masqué a terminé sa petite affaire, après avoir répondu aux demandes des spectateurs.

@Jo☆Jo : Je suis désolé pour cette question soudaine, mais comment on peut faire, quand on est... impuissant... ?

Bien évidemment, ma question n'est pas la bienvenue, et est prise d'assaut par les autres spectateurs, dont quelques-uns ne sont pas privés pour se jeter sur l'occasion de se moquer de moi.

@HotKr : PTDR @Jo☆Jo a une panne de sexe !

@LoveBigDick : La honte de ne pas pouvoir bander ! Tu es bon à la casse lol

@XXX__9687 : MDR @Jo☆Jo tu as cru que BJ était un sexologue ou quoi ?

Après tout, n'ont-ils pas tort ? Ma question n'a aucunement sa place sous ce genre de vidéo. Ce n'est ni le bon moment, ni le bon endroit pour discuter de ce type de problème et j'aurais mieux fait de ne rien écrire, regrettant amèrement d'avoir pensé que je pourrai être aidé sur ce sujet.

— J'ai comme l'impression que vous avez oublié ce que j'ai dit la dernière fois, intervient soudainement le camboy, après s'être rhabillé. Mais je peux aussi voir qu'il y a de nouvelles personnes parmi les spectateurs, alors, je vais rappeler quelques petites règles qui se déroulent sur mon compte, ajoute-t-il d'une intonation plus basse et ferme. Premièrement, le respect, deuxièmement, le respect, et troisièmement, le respect. En gros, c'est soit vous respectez les autres, soit vous dégagez, je n'ai pas besoin de vous ici.

@Joe.x_x : Je ne paye pas pour entendre ce qu'un psy pourrait lui dire !

@DaddyBJ : Grave ! On s'en fout qu'il n'arrive pas à bander, ce n'est pas notre problème !

— Sauf que sur mon compte, je fais ce que je veux, et je souhaite absolument à ce que ce soit une safe place pour tout le monde, commente le camboy, en lisant en même temps les commentaires qui défilent devant lui. Et que si jamais l'un d'entre vous a besoin de conseil en matière de sexe, des questions comme JoJo vient de le faire, ou bien de réconfort, d'écoute, puisse le trouver ici, sur mon compte.

Voilà. C'est exactement pour ces raisons principales, que je continue de consommer les shows de ce mystérieux garçon. Je suis écouté, pris au sérieux par cet inconnu qui se permet aucun jugement à mon égard, et qui prend ma défense pour appuyer ses mots. Je n'ai jamais tenté d'aller voir le contenu des autres BJ de cette plateforme, mais je peux mettre ma main à couper, qu'ils ne font pas le quart de ce que ce camboy fait, et que ce n'est sans doute pas pour rien, qu'il est devenu le n°1 de ce site, à brasser des millions de followers.

— Maintenant que les choses sont bien claires, je vais pouvoir répondre à la question de Jo ! Je vais t'appeler comme ça, si tu le veux bien. Ce sera mieux, dit-il en direction de la caméra, à laquelle il adresse un petit clin d'œil qui m'est adressé, me faisant faiblement rougir. Ce que tu dois tout d'abord savoir, c'est qu'il n'y a aucune honte à être impuissant. Je sais à quel point ça peut faire mal, à quel point on peut se sentir différent des autres hommes, parce que je l'ai été aussi, dans le passé.

Lui aussi a déjà été impuissant ? Ça me parait totalement irréel, une telle chose, que j'ai du mal à y croire.

— Effectivement, je ne suis pas sexologue, mais de par mon expérience et de ce que j'ai pu vivre vis-à-vis de ce sujet, je peux t'assurer qu'on peut s'en sortir. Tu dois surtout savoir si ce « problème », souligne-t-il en mimant des guillemets, vient d'un souci médical, tel que les maladies et problèmes de santé, ou d'un point de vue physiologique. Une fois que tu sais vers lequel te diriger, tout s'arrange très rapidement.

Plus aucun message ne défile sur le mur du Chat, car on est tous captivés par sa voix.

— Par exemple, si je dois entrer un peu plus dans le vif du sujet, je sais que j'ai eu mon impuissance à cause d'une trop forte consommation d'alcool et de tabac durant le passé. L'hygiène de vie peut aussi en être le facteur, avoue-t-il, sans une once de tabou pour en parler ouvertement. Tout ça pour dire que l'impuissance peut toucher tout le monde, mais qu'on peut y remédier, avoir de l'aide, en découvrant ce qui a causé ce dysfonctionnement. Alors, ne perds pas espoir, Jo, tout comme peut-être d'autres garçons, ici présents, qui n'ont pas osé exposer leur problème. Prenez le temps de réfléchir, de vous poser les bonnes questions, et vous verrez, vous pourrez bientôt bander à nouveau.

Après toutes ces explications, plus enrichissantes les unes que les autres, le sentiment de regret que j'ai ressenti quelques minutes plutôt, s'est totalement dissipé, me sentant à présent mieux avec ma conscience, et surtout en réalisant que je ne suis pas le seul dans ce cas de figure assez complexe.

Cependant, il me reste un dernier obstacle avant de parvenir à me débarrasser de ce problème nuisible. Ma relation avec le sexe est la première cause de mon dysfonctionnement, j'en ai pris conscience, lorsque je m'étais à nouveau confronté à la sexualité, lors de mon premier visionnage avec ce BJ. Un tas de questions s'agglutinent dans mon esprit, en quête de nouvelles réponses, mais au vu des messages défilant de plus belle dans le Chat, je me ravise, ne souhaitant pas gâcher l'ambiance de son live.

On peut y lire des : « Putain épouse-moi, tu es trop parfait », « Je fais comment pour t'avoir ? Il n'y a pas d'autres mecs comme toi dehors qui soient autant compréhensibles et à l'écoute :((( », mais encore des : « Il n'y a pas à nous faire désespérer comme ça... Tu ne peux pas te cloner ? », me faisant prendre conscience, qu'effectivement, le genre d'homme comme ce BJ, est assez rare dans les parages, voire inexistant, et que mes chances de tomber sur un individu comme lui sont quasiment nulles.

— Mais non, ne dites pas n'importe quoi ! glousse affectueusement le garçon, en s'affalant dans le fond de son fauteuil, les jambes écartées. Je suis certain que vous trouverez la perle rare. Ne perdez pas espoir. Regardez-moi, par exemple, j'étais convaincu que je n'allais jamais revoir cet ange qui m'était tombé dans les bras la dernière fois, et pourtant ! Comme quoi, la vie nous réserve de sacrées surprises. Sur ce, le live est terminé ! déclare-t-il soudainement. Je sais que c'était assez rapide aujourd'hui, mais je suis attendu quelque part ! Alors, passez une bonne soirée, prenez soin de vous, et à bientôt !

Je n'ai pas eu le temps de le remercier, que je me retrouve face à une page noire, avec écrit au milieu : « Le live de BJ Golden est terminé ! ». La coupure est toujours aussi brutale, nous retrouvant désormais seuls dans notre chambre pour la plupart d'entre nous, avec ce sentiment de solitude planant tout autour de nous, et qu'on met de côté durant l'espace de quelques minutes, ou quelques heures, selon la durée du show.

Je les vois danser dans l'ombre. Ces formes difformes. Je les entends me parler, me chuchoter, attendant patiemment le moment propice pour posséder mon âme meurtrie. Sur le point d'être à nouveau envahi par ce désagréable sentiment de solitude, générateur de de mes malheurs et de mes souffrances, la sonnerie de mon téléphone m'avertit d'une nouvelle notification, attirant subitement mon attention.

Je m'empresse d'ouvrir mes messages.

Jaek : Joshua, tu dors ?

Étonné de recevoir un message de sa part, et plus particulièrement à cette heure si tardive, je laisse mes doigts glisser naturellement sur le clavier.

Jo✰Gabi : Non, pourquoi ? Quelque chose ne va pas ?

Lui envoie-je, en me sentant subitement inquiet à son sujet.

Jaek : Tu es vraiment trop adorable, mais tout va très bien, ne t'inquiètes pas ! J'avais juste oublié de te demander si tu voulais refaire une séance de boxe demain, après les cours ?

Je lis le message en souriant inconsciemment. L'idée de passer un peu plus de temps à ses côtés, d'en apprendre davantage à son sujet ne me déplait pas. Mais je suis également excité de me rendre à cette nouvelle séance de boxe, ayant pu constater, sur l'immédiat, les premiers effets bénéfiques que ce sport a eu sur mon stress, mon anxiété, me donnant l'envie d'y retourner encore et encore pour pouvoir me défouler et soulager mon mal-être à travers mes coups.

Jo☆Gabi : Oui, bien sûr, avec plaisir !

Jaek : Parfait ! J'ai hâte d'être à demain soir ;) J'espère que tu as bien mangé ? Que tu as bu assez d'eau ?

Je peux m'empêcher de secouer la tête, en lisant ses questions.

Jo☆Gabi : Hé ! Je te rappelle que je ne suis pas un enfant ! Mais pour ta gouverne, oui j'ai bien mangé et je me suis bien hydraté, si ça peut te rassurer !

Jaek : Effectivement, ça me rassure. Je ne vais pas t'embêter plus longtemps. Repose-toi bien, Joshua, à demain :)

Ça aussi, j'avais encore du mal à le réaliser ; qu'il s'inquiétait réellement pour moi. Et quand je relis nos messages, je les trouve affreusement niais. Vous ne trouvez pas ? Bon après tout, il faut bien que les romances aient un commencement et une finalité... La nôtre n'était pas très glorieuse.

Jo☆Gabi : Bonne nuit, Jaekyung. Et encore merci pour aujourd'hui...

Jaek : Bonne nuit, Joshua, fais de beaux rêves.

C'est sur ces derniers mots, que je parviens à m'endormir paisiblement quelques minutes plus tard, le sourire aux lèvres.

Aucun mauvais rêve du passé n'était venu perturber mon sommeil, ce soir-là.