J'ai toujours cru, et avec raisons, que je vivrai une vie ordinaire et paisible, comme la majorité de mes compatriotes.

- C'est en ce jour unique que deux êtres vont être liés à jamais, commença solennellement le soi-disant prêtre de la déesse.

      Mais j'ai grandi bercée d'illusions. Au final, je n'étais même plus maîtresse de mon avenir.

- Malgré le regrettable incident qui s'est produit au palais, il y a moins d'une heure, nous pouvons célébrer cet heureux événement, ce mariage qui sera primordial pour l'avenir de notre beau pays, poursuivit le vieillard en s'approchant des futurs mariés.

Olympe se tenait au milieu du temple, face à Lancelin, et ne cessait de fixer ses pieds, la gorge sèche. À sa gauche, une centaine de personnes, issues de familles riches ou bourgeoises, assistaient à la cérémonie et se réjouissaient de cette union.

  Pour moi, le mariage est l'une des étapes les plus importantes d'une vive. Astrid avait beau me répéter que c'était une idée trop stéréotypée, je m'obstinais. Ma relation avec Link me confortait dans l'envie qu'elle soit durable avec lui. 

- Que les déesses soient remerciées ! Grâce à elles, vous avez pu vous rencontrer et tomber sous le charme. 

    Les servantes de la maison des Mauboir avaient été contraintes de maquiller la marque d'Olympe sur son cou, ce qui avait d'autant plus blessé la jeune femme. Il ne passait pas une minute sans qu'elle ne pense à son amant, à tous les moments qu'ils avaient vécus ensemble. 

   Certains soirs, à Elimith, je m'imaginais avoir dix ans de plus, en train de vivre une vie paisible avec Link. Hyrule connaîtrait enfin une grande période de paix et de prospérité, le royaume renaîtrait de ses cendres pour retrouver sa beauté d'antan. 

- Lancelin de Derauld, malgré que vous ayez vécu de moments difficiles et douleureux, vous désirez enfin vous unir et partager votre vie.

- Oui, déclara-t-il d'une voix neutre.

Le prêtre lui accorda un hochement de tête.

      Avec beaucoup d'embarras, je me voyais porter notre enfant dans mes bras, face à un soleil levant.

- En ce jour, prêtez-vous serment de rendre Olympe de Mauboir, ici présente, heureuse ? Jurez-vous qu'elle ne manquera de rien et qu'elle bénéficiera de votre protection ? 

    Lancelin posa une main au-dessus de son cœur et répondit d'une voix grave :

- Je le jure. 

       Dans mon rêve, nous vivions à Elimith. Link, souvent, devait se rendre au château pour enseigner aux jeunes filles et aux jeunes garçons les devoirs des chevaliers. 

- Jurez-vous, devant Maurdrid, de rester fidèle et sincère envers votre épouse ? 

- Oui.

        Le cœur d'Olympe se serra douloureusement et les larmes lui montèrent aux yeux. À plusieurs mètres d'elle était assis son père, aux côtés de sa mère au visage encore plus creusé par le souci et la maladie. 

      Et... Et même s'il s'absentait souvent, il revenait toujours avec une surprise pour se faire pardonner ...

- Jurez-vous de ne pas la violenter ?

   La châtaine osa lever son regard vers lui et frémit en le voyant esquisser un sourire presque imperceptible.

  Dans ce rêve que je m'imaginais, nous étions tout simplement heureux. 

- Oui, dit enfin Lancelin. 

        Des applaudissements résonnèrent entre les parois du temple et renforcèrent l'idée qu'Olympe n'était qu'une bête de foire dont le malheur amusait la société.

 Et maintenant, que me reste-t-il ? On m'a tout pris. Ma liberté...

- Bien, se réjouit le vieillard en se tournant dorénavant vers la jeune mariée. Mademoiselle Olympe de Mauboir, c'est avec bonheur que vous avez accepté la demande de Lancelin de Derauld. Cette union marquera une nouvelle étape dans votre vie car vous aspirez à être une future dirigeante.

       Mon avenir...

    Les invités retinrent leur souffle. Quelle était donc cette mariée qui ne bougeait pas et dont le visage était marqué par la tristesse ? Quelle indécence ! Comment osait-elle faire aussi honte à son fiancé ?!

- En ce jour, prêtez-vous serment de rendre votre futur époux, ici présent, heureux ? Jurez-vous de lui porter assistance toutes les fois où il nécessitera vos bons soins ? 

Mes pensées...

- Oui... souffla-t-elle d'une voix tremblante.

- Jurez-vous de rester fidèle envers votre mari et de ne pas commettre de péchés ? Jurez-vous de respecter les traditions de votre peuple ?

Ma dignité...

 L'air devint irrespirable et sa poitrine se compressa horriblement. Les lèvres d'Olympe se pincèrent tandis qu'elle essayait de cacher les tremblements de ses mains dont les doigts étaient entremêlés. 

- Ou... Oui...

       Une larme perla discrètement sur sa joue puis tomba sur sa poitrine. Le prêtre fut légèrement déstabilisé et jeta un regard interrogateur au dirigeant qui l'invita à poursuivre.

- Bien... Hum. Chers amis, réjouissons-nous de voir deux êtres s'unir par... par amour. Lancelin de Derauld, je vous pose, avec mes plus grands respects, la question qui conclura votre union. Voulez-vous prendre Olympe de Mauboir pour épouse ? 

- Oui, assurément, je le veux, sourit-il en la dévisageant. 

     Tous les membres de la jeune femme se tendirent et sa gorge se noua brusquement. 

 Ils m'ont pris l'homme dont je commençais à tomber éperdument amoureuse...

- Olympe de Mauboir, acceptez-vous de prendre pour époux Salvin de Derauld et de devenir Olympe de Derauld ? 

       Pourquoi... Pourquoi personne n'entendait son cœur hurler "non" ?  Ses lèvres tressaillirent, ses épaules s'affaissèrent. Elle ne pouvait pas... Elle ne pouvait pas ! Si Olympe acceptait, elle s'en voudrait pour toujours, les remords la rongeraient jusqu'en enfer... Si la jeune femme disait oui, elle trahissait Link et la marque qui les liait... Son lourd silence provoqua un murmure d'incompréhension parmi les invités. Salvin planta profondément ses doigts dans ses cuisses et jeta un regard assassin à sa fille, les dents serrées. Allait-elle enfin accepter, cette trainée ?! Déjà qu'il avait eu la bonté de ne pas la faire exécuter pour s'être donnée au héros ! Une fois ce stupide mariage terminé, lui et Lancelin donneraient une énième punition à la châtaine, qu'elle n'oublierait pas. 

- Mademoiselle ? intervint le prête en sentant l'impatience gagner l'assemblée. 

Il ne me reste moins de deux jours... alors à quoi bon ?  En fin de compte... je ne méritais pas Link...

Vaincue, elle ouvrit enfin la bouche pour prononcer avec aversion : 

- Oui... 

    Salvin soupira de soulagement tandis que sa femme, Clémence, se leva précipitamment et quitta son banc pour sortir avec empressement. Quant à Lancelin, il s'inclina devant elle en feignant de montrer une quelconque marque de respect. 

- Bien, bien, émit-il en remettant correctement son costume de marié en place. Procédons à l'échange des alliances, mon ami. 

      Ironie du sort, ce fut Claudius en personne qui amena les bagues et rouvrit la profonde blessure d'Olympe. Elle le savait... Elle savait que son père mettait tout en place pour la punir. 

- Je vais maintenant bénir les alliances, annonça le prêtre avant de les asperger d'un parfum profane. Olympe, votre main, je vous prie. 

      Quand la jeune femme la lui tendit, il y déposa la bague et l'encouragea, d'un léger signe de la tête, à la passer au doigt de son époux. Que pouvait-il lui arriver de pire... Lancelin lui donna sa main avec dédain et lui fit subir son lourd regard. Ne lui avait-il pas dit, un mois plus tôt, qu'il la ferait plier ? 

     La porte monumentale du temple fut soudainement propulsée sur les bancs du fond dans une explosion assourdissante, et fit hurler les invités de peur. Une immense masse blanche se précipita à l'intérieur dans un rugissement terrifiant qui fit dresser les poils de la majorité des personnes.

- El...zier ? murmura Olympe, déboussolée. 

   L'elvësch courut à travers l'allée, prenant dans sa gueule tous ceux qui osaient se dresser sur son chemin puis les jeta à l'autre bout du temple. Salvin se leva d'un bond tandis que Claudius se mit devant lui pour le protéger. Elzier bondit devant son amie, expulsa le prétendu prêtre à plusieurs mètres de là et fondit vers Lancelin. Ce dernier hurla en voyant ses grandes dents acérées se refermer sur lui. Avec sauvagerie, la créature secoua dans tous les sens ce déchet de la nature puis le lança contre une colonne en rugissant de nouveau. Une silhouette atterrit soudainement devant Olympe, la figeant de stupeur, puis se dressa de toute sa hauteur. Les iris bleus qu'elle reconnut de suite la fit papillonner des yeux pour chasser les nouvelles larmes qui remontaient. Son cœur rata un battement dans sa poitrine et un vif sentiment se propagea en son sein et la fit frémir. Alors qu'Elzier s'occupait de les protéger des gardes qui rappliquaient, Olympe tendit une main tremblante vers la joue de Link puis elle l'effleura, la bouche entrouverte. À la douce chaleur qui s'en émanait, ses sourcils se haussèrent et se froncèrent sous l'émotion.

- Link... C'est... C'est bien toi ? demanda-t-elle, la voix traversée par de forts trémolos.

     Il lui prit délicatement la main, les yeux embués, et y déposa un baiser avant de la prendre dans ses bras pour la porter. Elzier lui tendit son aile afin qu'ils montent dessus.

- Ne les laissez pas s'échapper ! s'époumona Salvin, hors de lui. Tuez-moi ce monstre !! 

     Les soldats se lancèrent à la poursuite de la créature mais celle-ci les sema en quelques bonds et se précipita dehors avant de se propulser pour prendre son envol. Fou de rage, Salvin se tourna vers Claudius et le prit par le col malgré leur différence de taille. 

- Appelle ton elvësch et lance-toi à leur poursuite ! Je veux les voir morts ! Est-ce que c'est clair ?!

- Bien.

     Placée dans les bras du héros, Olympe éclata en sanglots en le serrant de toutes ses forces contre elle pour ne plus jamais le lâcher. Il... Il était vivant... Link était vivant. La jeune femme poussa une plainte déchirante après avoir enfoui sa tête au creux de son cou. Sa joie et son soulagement étaient indescriptibles... 

- Tout va bien, je suis là, la rassura-t-il en passant une main dans son dos pour la détendre. Je vais te ramener à Hyrule, maintenant. 

- Link... Oh, Link... murmura Olympe alors qu'elle mouillait sa peau de ses larmes. Si tu savais... J'étais si... si désespérée... si malheureuse...

    Le jeune homme ne put se retenir plus longtemps et il l'étreignit en lui transmettant tous ses sentiments. Ses pleurs s'écoulèrent contre elle et ses gémissements déchirèrent le cœur d'Olympe. 

- Par les déesses, vous allez réussir à me faire chialer, tous les deux... 

     Elle prit soudainement Link par les joues et l'embrassa avec fougue pour faire disparaître tout le mal qu'ils avaient emmagasiné en leur sein. Mais Olympe savait que leur peine ne s'arrêterait pas là. S'il était encore vivant... il allait la voir mourir ! Non, impossible... Cela ne pouvait pas se produire. Le visage de la jeune femme se contracta de douleur et elle serra avec plus de force encore son amant. Devait-elle lui dire ? Non... Link allait combattre Ganon, il ne devait pas être dévasté par cette nouvelle. Elzier comprit que sa cavalière était au courant pour sa mort prématurée. Il en fut tellement désolé... 

    Ainsi se poursuit la vie. La mienne est vouée à s'achever dans les heures qui arrivent.

- Olympe, avec ta sœur, nous avons tué les neufs autres dirigeants, lui annonça Link en posant son menton sur sa tête. Il ne restait plus que ton père mais... Mais en te revoyant, je n'ai pensé qu'à toi. Nous avons aussi détruit le Cristal.

     Elle releva son visage rougi par ses pleurs et plongea ses yeux dans les siens. 

- Alors tu sais pour... pour nos origines ?

- Oui, Astrid m'a tout expliqué. Ne t'inquiète pas, ton peuple ne subira plus la malédiction qui le poursuit depuis des millénaires.

- Je suis soulagée... 

    Elzier tourna soudainement la tête vers la droite.

- Link, Eldry est en approche. 

- D'accord.

Les yeux d'Olympe s'écarquillèrent sous la surprise.

- Vous... Vous pouvez communiquer ?! 

      Le prodige lui offrit un sourire, mêlé à un certain amusement refoulé.

- Oui, grâce à la marque.

- Moi aussi je suis content de pouvoir de parler, Olympe, maugréa Elzier. Grâce à la destruction du Cristal, le sort qu'on t'a jeté s'est brisé, visiblement. 

      Un deuxième elvësch se positionna à côté d'eux et Astrid apparut, émue de revoir sa jumelle. Le faux brun fut soulagé qu'elle soit en vie et moins affectée par la magie démoniaque.

- Que les déesses soient louées... soupira la soldate, rassurée de les voir tous les deux sains et saufs. Je vais vous raccompagner jusqu'à la frontière !

- Que comptes-tu faire ensuite ? lui demanda Link, inquiet quant à la délicate situation de la jumelle. 

      Elle balaya l'air d'une main.

- Ne t'en fais pas pour moi, je trouverai bien un moyen pour rallier l'armée à ma cause maintenant que le Cristal est détruit. Olympe, tu es affreusement pâle ! Est-ce que tu as besoin de soins ? 

     Les yeux de la concernée s'agrandirent subitement alors qu'un vif pincement au cœur lui redonna l'envie de pleurer tout son malheur. Olympe secoua la tête et lui répondit que cela était dû aux émotions. Ce qui, en soi, était absolument vrai. Tout à coup, une flèche frôla la tête d'Astrid et la fit sursauter. Elle se retourna aussitôt et découvrit deux cavaliers sur des elvëschs en train de les poursuivre.

- Nous sommes pris pour cible ! s'exclama la soldate alors qu'Eldry prenait de l'altitude. 

    Le sang de sa sœur se glaça. Son calvaire n'était toujours pas fini. Jamais ils ne la laisseraient quitter Panah... 

- Olympe, prends les barres, la pria son amant, l'expression sombre. Je vais m'occuper d'eux. Elzier, essaie de garder ta trajectoire.

- Compris.

       La châtaine déglutit et s'exécuta malgré son rythme cardiaque croissant de plus en plus. Enfin... ce n'était même pas son véritable cœur qui battait dans sa poitrine. Link s'empara de son arc et choisit les flèches les plus appropriées : les flèches électriques. Elles paralyseraient directement l'elvësch et le feraient indéniablement chuter.  Leurs ennemis, derrière eux, ne visaient que les humains et semblaient être des archers très adroits. Le héros se tourna vers la queue d'Elzier et banda son arc, un œil fermé. Lorsqu'une flèche passa à quelques centimètres de lui, il ne bougea pas d'un pouce. Pour le jeune homme, il était bien plus facile de viser une créature de plus de quinze mètres plutôt qu'un homme, surtout à cette vitesse. Il décocha sa première flèche qui vint se planter dans le buste de l'animal. L'elvësch poussa un cri de douleur en s'immobilisant, les ailes et les pattes crispées, avant de sombrer dans le vide.

Son compagnon, déstabilisé, comprit que Link était un véritable danger et commença à changer sans cesse de position pour l'empêcher de lui tirer dessus. Le prodige tiqua, agacé. D'un bond, il se jeta hors du dos d'Elzier puis ralentit le temps, rendant son ennemi impuissant face à lui. Son elvësch reçut la flèche entre les deux yeux, la puissante décharge électrique le tua sur le coup. Alors que Link avait déployé sa paravoile pour arrêter sa chute, ce fut Eldry qui vint le chercher et le prendre sur son dos, derrière sa cavalière. 

- Dépêchons-nous ! D'autres vont très certainement arr...

      Elzier, à leurs côtés, fut brutalement percuté sous le ventre par une imposante masse blanche, lui arrachant un terrible rugissement de souffrance.

- ELZIER ! hurla Olympe, affolée. 

        Un elvësch, bien plus gros que lui, avait planté profondément ses crocs dans le cou de la pauvre créature et battait des ailes pour éviter de tomber avec. Sur son dos se tenaient Claudius et Salvin. Elzier tenta de se dégager en donnant des coups de pattes mais sa force était en deçà de celle de son assaillant. Eldry grogna, s'élança vers cet ennemi qui osait s'en prendre directement à son compagnon et elle le percuta en lui assénant un violent coup de tête. La créature ennemie lâcha soudainement sa cible et vola sur place en foudroyant la femelle du regard. Quant à Elzier, son pelage se tacha bien trop rapidement de son sang et sa blessure lui provoquait de vives douleurs. 

- Elzier, tu perds bien trop de sang ! paniqua sa vieille amie, la voix chevrotante.

    Alors qu'Eldry fondait sur l'animal de Claudius, les ailes d'Elzier commencèrent à se désynchroniser et sa vue se troublait. 

- Cet... cet enfoiré m'a empoisonné... prononça-t-il avant de sombrer dans le vide en gémissant. 

- Non ! s'écria Olympe en s'accrochant de toutes ses forces. 

      Link tourna brusquement la tête et ses pupilles se rétractèrent en les voyant chuter vertigineusement. 

- OLYMPE !! cria-t-il tandis que son sang se glaçait d'effroi. 

      Pour les empêcher de partir les chercher, Claudius ordonna à son elvësch d'attaquer Eldry sans répit. Au moment où la femelle commençait à plonger, Eleth, son ennemi, lui attrapa la patte arrière en refermant fortement sa gueule dessus. Eldry poussa un rugissement douloureux en sentant une vive chaleur se propager dans son membre, puis elle donna un violent battement d'ailes pour se défaire de son emprise. Mais il ne cédait pas... 

- Lâche-moi !! vociféra-t-elle en élançant sa patte vers l'avant une fois qu'elle se fut redressée à la verticale. 

     Eleth fut propulsé et relâcha son emprise en geignant. Dans sa chute, Elzier sentait les forces le quitter peu à peu, ses sens ne répondaient plus correctement. Les hurlements de détresse de sa cavalière lui parurent tels de lointains bourdonnements. Il devait faire quelque chose... Olympe ne devait pas mourir maintenant, ni ainsi... La créature tourna la tête vers elle, l'attrapa entre ses lèvres malgré ses protestations et la plaça contre son ventre avant d'essayer de battre de nouveau des ailes. Mais quand il vit la terre, une plaine se rapprochait bien trop dangereusement, l'impact était inévitable. Elzier se mit soudainement face au ciel et recouvrit la jeune femme de ses ailes avant qu'ils ne heurtent le sol avec une violence sans pareille. Le souffle d'Olympe fut brutalement coupé tandis que le corps de son ami s'enfonçait dans la terre en dérapant. La poussière se soulevait sur leur passage, les oiseaux s'envolaient avec effarement. 

- Elzier ! s'égosilla la jeune femelle en accélérant, horrifiée. 

     Paralysé par l'effroi, Link ne parvint pas à pousser le moindre cri, la moindre lamentation. Eldry atterrit brusquement et galopa à toute vitesse vers la silhouette de son compagnon. Elle frotta son museau contre lui pour détecter un moindre signe de sa part. Une fronce se forma entre les yeux d'Elzier et deux iris jaunes apparurent difficilement. Grièvement blessé sur une grande majorité de son corps, il geignit en essayant de bouger. Link sauta à terre et se précipita vers l'une de ses ailes pour la soulever avec empressement.

- Olympe ! l'appela-t-il avec détresse.

        Astrid accourut et profita qu'il tienne l'aile pour venir tirer sa sœur ses pattes de la créature. 

- Par Maurdrid, es-tu blessée ? lui demanda-t-elle immédiatement. 

    Étourdie et sous le choc, sa jumelle ne put que secouer la tête pour lui répondre non. Ses yeux s'écarquillèrent alors et elle s'élança vers son ami, les larmes aux yeux. Olympe se laissa tomber à genoux près de sa tête, dérapant sur le sol terreux et déchirant une partie de sa robe.

- Elzier ! Elzier, dis quelque chose ! 

      L'écoulement rapide de son sang au niveau du cou l'alerta davantage et provoqua une panique telle que tous ses mouvements devinrent insensés. 

- Il... Il faut te soigner ! Eldry, pars chercher oncle Norbert, vite !! cria-t-elle d'une voix brisée. 

     L'elvësch n'avait plus la force de parler. Le poison qui s'écoulait dans ses veines le tuait à petit feu et provoquait son fort halètement. La femelle s'envola s'en plus tarder en direction de Panahpolis. 

- Je t'en supplie, tiens bon jusqu'à l'arrivée de mon oncle... 

      Olympe éclata en sanglots et prit la tête de son ami entre ses bras pour l'étreindre en gémissant. La terre trembla alors, déséquilibrant Link et Astrid un court instant. Ils se retournèrent d'un coup et tombèrent face à Claudius et Salvin, au côté d'Eleth. Le dernier dirigeant se tint en retrait alors que le chasseur de primes avançait vers ses proies. 

- Eleth, finis le travail et bouffe-les, ordonna-t-il d'une voix grave. 

      L'elvësch rugit puis bondit en leur direction. D'un coup, Link s'empara de son arc, plaça une flèche archéonique avec rage puis la décocha sur la créature en serrant les dents. À peine fut-elle touchée qu'elle disparut dans un souffle bleuté qui vint frapper son maître. Les larmes aux yeux, le chevalier baissa son arme en jetant un regard meurtrier à Claudius, dévasté par la brutale et soudaine disparition de son animal.

- Co... Comment ?

- Tu n'aurais jamais dû t'en prendre à Elzier, cracha le prodige. 

- Où est-ce que tu l'as envoyé, connard ?! aboya Claudius en dégainant son arme, une large épée imbibée de magie démoniaque.

       Derrière lui, Salvin esquissa un sourire.

- Oui, Claudius. Vas-y et tue ces déchets qui ont osé annihiler ton ami.

- OÙ EST-CE QU'IL EST ??

      Link rangea son arc et prit à son tour son épée, imité par Astrid. 

- Il est mort. Tu as dû le ressentir, non ? 

    Aucun être vivant ne pouvait survivre à une flèche de ce type, quelle que soit sa taille, quelle que soit sa résistance. Elle disloquait les molécules entre elles et les détruisait aussitôt, ne laissant qu'un souffle derrière elle. 

- J'VAIS TE BUTER ! rugit-il en bondissant vers lui. 

       Link s'élança à son tour en attrapant son bouclier, talonné par Astrid. D'après ce qu'on lui avait raconté, Claudius était certainement l'homme le plus puissant de l'armée, tout résidait dans sa force brute et dans la magie de son épée. Astrid, en entraînement, avait eu l'occasion de se mesurer à lui mais n'avait pas tenu une minute face à lui. Alors peut-être qu'à deux, ils parviendraient à en venir à bout... Elle avait observé le style de combat de Link, il ne lui restait plus qu'à s'adapter. 

         Voyant que Claudius levait son épée pour le frapper, le héros plaça son bouclier devant lui et reçut le coup de plein fouet, ce qui le propulsa en arrière et le fit percuter violemment Astrid. Tous deux s'écrasèrent au sol dans un râle étouffé. Leur ennemi sauta et abattit son arme sur eux. Ils roulèrent tous deux dans un sens opposé et se relevèrent en grimaçant de douleur. L'arc de Link avait heurté le ventre de la soldate et avait bien failli la blesser. N'attendant pas que Claudius se reprenne, le chevalier l'attaqua en coup droit mais fut paré par l'arme à la terrible aura. 

- Crève ! cria Astrid, derrière lui.

      Le chasseur de primes eut tout juste le temps d'esquiver qu'une lame coupa superficiellement son flanc et le fit tiquer. Claudius fit plusieurs pas en arrière, les dents serrées, et se tint à l'endroit blessé.

- Vous... Vous l'aurez voulu... Je vais vous anéantir ! 

    Claudius fit tourner son arme puis la planta soudainement devant lui, les traits crispés par la rage. Un long cri rauque se forma dans sa gorge alors qu'un vent se mit à balayer la plaine. 

- Link, tire-lui la même flèche que pour son elvësch ! lui hurla Astrid en comprenant la situation. 

        Le héros s'exécuta aussitôt et décocha une nouvelle flèche en sa direction. Une main l'attrapa soudainement juste avant qu'elle ne touche sa cible, puis elle fut brisée en deux avant d'être jetée. Les deux guerriers tressaillirent  en apercevant les iris rouges de leur ennemi ainsi que ses veines visibles. 

- C'est... Impossible... murmura la jeune femme, déconcertée. Le Cristal a été détruit ! Comment peut-il se transformer ?!

- Oh, c'est bien simple, ma chère traîtresse de fille, dit Salvin en s'approchant de son garde personnel. Claudius, contrairement à toi, possède une part de Cristal dans son organisme.

       Le soldat retira son arme et s'avança lentement vers ses proies.

- Par conséquent, je peux toujours activer ses pouvoirs quand bon me semble. Voici la forme ultime de mes futurs pantins, Astrid ! 

- Vous êtes fous... 

       Elle se mit en position de combat, prête à attaquer. Claudius plia les jambes puis se propulsa d'un coup vers elle, l'épée brandit au-dessus de lui. Le sang de la soldate se glaça soudainement en voyant l'arme sombrer sur elle. Mais Link se précipita pour bloquer l'attaque et reçut le violent coup en serrant les dents. La force qu'exerçait Claudius était bien plus conséquente que celle de la meilleure race de lynel. Le chasseur rugit en crachant une multitude de postillons qui dégoûtèrent  le jeune homme. Astrid passa alors à côté de lui et enfonça son épée dans l'avant-bras armé de son ennemi. Au même moment, elle activa le pouvoir de son arme et Claudius hurla de douleur avant de reculer précipitamment après qu'elle l'eut retirée. 

      Ne devant lui laisser aucun temps de repos, Link s'élança une nouvelle fois vers lui alors que la lame d'Excalibur prenait une teinte à la lueur bleutée. Claudius, meurtri, changea son arme de bras et trancha l'air avec, formant une multitude de projectiles noirs qui fusèrent vers Link. Ce dernier essaya de les éviter mais l'un d'eux le toucha au niveau du tibia et lui arracha une plainte terrible à cause de la brûlure qui avait lieu. Il plaqua aussitôt la Lame Purificatrice contre la corruption créée et put ainsi éviter la catastrophe. Claudius avait profité de ce moment pour lui asséner un coup de pied agressif qui le mit brutalement à terre. Le démon abattit alors son épée vers lui avant qu'elle ne rencontre celle d'Astrid, venue lui porter secours. Sous sa forme humaine, sa force était amoindrie, si bien qu'elle crut durant un instant que son épaule allait être arrachée avec son arme. 

 -Link !! l'appela-t-elle avec panique. 

      De son bras blessé et sanglant, Claudius l'attrapa par le cou et la souleva en ancrant son regard fou dans le sien. Astrid gémit et se débattit en agrippant sa main où elle planta ses ongles dedans. Il serra si fort qu'un craquement eut lieu et lui donna des vertiges, sa tête se compressait à cause de son épouvante. Soudain, Link sortit sa tablette et figea le démon avant de sauter et de trancher le bras qui la retenait. Le sort se rompit et leur ennemi bascula en arrière en hurlant pendant que son sang noir giclait. Astrid retomba lourdement et le héros retira la main qui la gardait prisonnière. Elle fut prise d'une terrible quinte de toux et inspira rapidement de grandes goulées d'air, le visage blême.  

     Link se précipita vers l'être démoniaque et fondit sur lui jusqu'à que l'épée noire pare son attaque. Le choc provoqua une onde et un vif éclat lumineux qui les aveugla tous les deux. Le jeune homme plaça son bouclier devant lui quand Claudius essaya de lui donner un coup de pied pour le faire reculer. En combat singulier, ce type était imbattable. Même à deux, il serait impossible de le tuer à l'aide de simples épées. Le démon attaqua de nouveau Link pour le déstabiliser. Le prodige n'avait plus le temps d'utiliser une arme différente. Pourtant, il devait bien exister un moyen... 

     Soudain, l'épée démoniaque lui coupa la peau de l'épaule et le fit hurler en tombant à la renverse. Link roula sur le côté pour éviter un nouvel assaut et grimaça lorsque son sang coula entre ses doigts. L'arme de Claudius était parvenue aisément à trancher sa cotte de mailles. L'adrénaline qui fluait dans les veines de l'Hylien atténuait tout de même une majeure partie de la douleur. Astrid revint bientôt à la charge et attaqua de toutes ses forces Claudius ; les lames crissèrent désagréablement, elles s'entrechoquèrent incessamment durant plusieurs secondes avant que la châtaine ne se retrouve éjectée par un coup de genou. Mais elle se releva aussitôt. Link lâcha son bouclier à cause de son épaule meurtrie et bondit sur Claudius. 

       Le démon bloqua son attaque et fit courber Link en poussant à l'aide de toute sa puissance. Soudain, Astrid bondit par-dessus lui en hurlant et planta son épée dans le torse de son ennemi. Claudius se cambra, la bouche entrouverte et retint un hoquet de surprise. Link se précipita vers l'embout de sa flèche archéonique et s'en empara avec hâte. 

- Astrid, écarte-toi ! hurla-t-il soudainement.

     Les yeux de la soldate s'écarquillèrent puis elle courut se mettre à l'abri à une dizaine de mètres. Claudius, l'expression ravagée par la rage, tourna la tête vers lui alors que de la salive moussait au niveau des commissures de ses lèvres.

- To...TOI ! rugit-il avant de se propulser vers lui.

        Link plissa les yeux, le visage sombre, puis plaça une main devant lui. Les atouts qu'il lui restait en main n'étaient pas sans conséquence. Mais pour être enfin libres, il devait risquer le tout pour le tout. Le héros claqua soudainement des doigts en direction du démon, un puissant éclair s'abattit sur lui et explosa le sol tout autour, soulevant des mottes d'herbe et de la terre. La foudre traversa sa tête et ressortit par le pied de Claudius. Mais il en fallait plus pour tuer un démon, bien qu'il soit déjà paralysé par l'attaque inattendue. Épuisé, Link réunit ses dernières forces pour courir vers lui. Il brandit le morceau de flèche sur le côté puis l'enfonça profondément dans sa poitrine jusqu'à atteindre son cœur. 

       Les traits du démon se contractèrent subitement, sa peau se teinta d'une lueur bleue mais aucun son ne sortit de sa bouche. D'un coup, il explosa dans un souffle bleuté et disparut de la plaine, laissant le héros haleter agenouillé. Il était éreinté, sa plaie à l'épaule le faisait atrocement souffrir et répandait une chaleur insoutenable dans l'intégralité de son corps. 

- Link ! Nous... Tu as réussi ! s'exclama Astrid en le rejoignant rapidement. Par quel miracle as-tu invoqué cet éclair ?!

     Elle le prit sous l'épaule pour l'aider à se relever et pour le soutenir. Lorsqu'ils levèrent leur regard vers Olympe, leur sang se glaça de nouveau face à ce qui les attendait. Salvin se dressait devant eux et tenait fermement sa fille, un couteau placé au-dessus de sa poitrine et prêt à lui transpercer son cœur. 

- Vous pensiez que c'était fini, hein ? leur lança-t-il d'une voix étrangement aigüe. Vous avez tout détruit, les dirigeants, le Cristal, mon palais... Vous pensiez sérieusement que j'allais m'enfuir en vous voyant tuer cet imbécile ?! 

- Je te conseille de la lâcher tout de suite, répliqua froidement Astrid en le foudroyant du regard. 

     Il ricana, ce qui dévoila toute sa nervosité.

- Sinon quoi ? Votre satané héros n'est même plus capable de tenir seul debout, ce sale elvësch est en train de crever et cette trainée est sur le point de se faire assassiner ! cria-t-il en posant la pointe du couteau sur sa poitrine.

       Olympe gémit, ce qui fit serrer le cœur du prodige et l'anima d'une haine sans pareille.

- Ne... la touche pas, enfoiré... prononça-t-il avant de laisser échapper une plainte à cause de ses blessures. 

        La soldate approcha un peu plus, ce qui déplut à Salvin.

- N'avancez pas plus ! Ou je vous jure que je la tue sous vos yeux ! Vous comprenez ? Il ne me reste plus rien ! Vous avez détruit l'avenir glorieux que j'étais en train de bâtir !! J'allais faire de Panah l'une des plus grandes puissances au monde !! 

- C'est faux ! Tous les peuples auraient été anéantis par Ganon, la Terre n'aurait été que désolation et pauvreté ! Si Ganon revient, ce monde est voué à disparaître ! 

      Il lui rit au nez.

- Le maître suprême accepte les démons, ma fille ! Si tu t'en étais tenue à ton rôle, tu aurais pu régner à mes côtés ! 

      Les jambes d'Olympe cédèrent soudainement et elle bascula sur le côté, prenant de court son père. Elle était en train de perdre connaissance. 

- Qu'est-ce que tu fous, ingrate ?! Redresse-toi !

      La jeune femme se releva tout à coup et donna un violent coup de tête dans le visage de Salvin, le déstabilisant, puis elle posa ses mains sur son bras armé pour le repousser de toutes ses forces. Le dirigeant poussa un cri de douleur en se tenant le front. Olympe courut en direction de sa jumelle et de son amant qu'elle prit dans ses bras quand la soldate le lâcha. 

- Link ! Par les déesses, tu... 

    Il posa un doigt sur ses lèvres pour la faire taire et lui offrit un sourire forcé.

- Ne... Ne t'inquiète pas... Ce ne sont que les effets secondaires. 

- Il faut te soigner !

- Seulement quand nous serons en sécurité... 

       Salvin grogna en clignant plusieurs fois les yeux. Il fut plaqué au sol avec tant d'animosité qu'il en eut le souffle coupé et les yeux arrondis. Astrid l'immobilisa en posant son pied sur son torse et pointa son épée juste sous sa mâchoire. Elle offrit un regard glacial à cet être qui n'était plus un homme à ses yeux. La terreur le gagna immédiatement et il se mit à trembler en jetant des coups d'œil désespérés tout autour de lui.

- Personne ne te viendra en aide, déclara la châtaine avec mépris. Tu es seul. 

- Non, mes soldats vont venir me chercher ! 

     Ce fut à son tour de ricaner amèrement.

- Comme s'ils allaient venir sauver un salaud comme toi. 

       Salvin serra les dents et attrapa d'une main la lame démoniaque. Mais à son contact, une vive douleur se répandit dans sa paume et lui arracha un autre cri. Elle posa alors son épée sur sa peau et la fit glisser jusqu'à son buste, le faisant frissonner sur toutes les zones touchées.  Il eut d'horribles vertiges. 

- Tu... Tu n'oserais pas me tuer ! Je suis ton dirigeant ! Sans moi, le pays sombrera ! 

    Elle haussa les sourcils.

- Ah bon ?

      Maintenant, elle l'entendait, son cœur battait à tout rompre dans sa poitrine. Salvin était terrifié.

- Je suis ton père, tu ne peux pas me tuer !

      Les lèvres de la jeune femme se pincèrent soudainement alors que ses yeux s'agrandirent sous la haine.

- Tu n'es pas mon père !! s'époumona-t-elle en brandissant son épée au-dessus de lui. 

      Elle retira son pied de son torse et le dirigeant tenta de se relever aussitôt en hurlant d'épouvante. Astrid abattit son épée sur lui et un bruit de chair déchiquetée parut arrêter le temps. Olympe ferma fortement ses paupières, prise de vives nausées mêlées pourtant à un sentiment de grand soulagement. C'était fini... Plus personne ne viendrait gêner son retour en Hyrule. Plus personne ne se dressera sur son chemin. 

Elle était libre.

  Link la prit difficilement dans ses bras, le front en sueur, pour la réconforter et lui apporter son soutien. Mais lui-même n'était pas en état. Astrid lança son épée le plus loin possible en rugissant ; elle voulait s'en débarrasser pour toujours. Plus jamais elle ne voulait toucher un objet qui était en lien avec les démons ou Ganon. La soldate rejoignit les deux amants et s'accroupit devant lui pour évaluer la gravité de ses blessures. 

- Il n'est jamais bon de se faire blesser par une arme démoniaque. Tu vas devoir la purifier rapidement. 

      Le héros dégaina lentement l'épée de légende en grimaçant puis fit matérialiser une gourde d'eau. Olympe fit couler le liquide sur la lame à quelques centimètres de la plaie. Il se mordit l'intérieur de la joue à cause des vifs picotements. Ensuite, sa cotte de mailles et sa tunique furent retirées pour lui bander l'épaule et le torse. On lui remit enfin ses vêtements, exceptée sa protection de fer.

- Link, est-ce que je peux prendre ton épée pour... pour essayer de... de soigner Elzier ? S'il te plait... le supplia la châtaine alors que des larmes roulaient sur sa joue.

      Le faux brun hésita un instant. En temps normal, il n'aurait jamais accepté que quelqu'un d'autre que lui touche à la Lame Purificatrice. Mais il avait grandement confiance à la jeune femme. De plus, elle n'avait aucune mauvaise intention. Comme Olympe ne désirait pas s'en servir pour le combat, l'arme accepterait qu'un autre que Link la tienne. Dans son immense générosité, l'Hylien acquiesça et elle le remercia d'un baiser sur le front. Olympe, une fois qu'elle eut pris délicatement la lourde épée, courut se mettre aux côtés de son ami et effectua les mêmes gestes. La créature n'avait plus la force d'ouvrir les yeux, ni même de grogner. Seul son souffle rauque et saccadé montrait qu'il était toujours vivant.

- Tiens bon, Elzier... Oncle Norbert va arriver d'une minute à l'autre. 

    Le poison s'était très certainement répandu dans tout le corps... Il avait déjà atteint le cerveau depuis longtemps et infligeait une mort lente à sa victime. Une souffrance qu'Olympe ressentait par l'intermédiaire du pacte. 

   En effet, un quart d'heure plus tard, Eldry revint avec sur son dos Norbert, un panier sous le bras. Dans la précipitation, il avait pris l'intégralité de ses soins. La femelle atterrit non loin de son compagnon et Norbert sauta à terre. Quand il vit le cadavre de Lancelin, il s'arrêta, l'air peiné, puis poursuivit son chemin en soupirant. C'était certainement mieux ainsi... 

- Bon sang, mais il est dans un piteux état ! s'apitoya le bonhomme en ouvrant le couvercle du panier. 

- Oncle Norbert, il... Elzier s'est fait empoisonner ! C'est... C'est affreux... 

   Il posa une main bienfaitrice sur son épaule pour la rassurer.

- Je prends les choses en main, Olympe.

     Norbert tourna alors la tête et vit pour la première fois le héros. Il lui accorda un sourire avant de lui dire avec sincérité :

- Merci pour tout ce que tu as fait. Je te serai à jamais reconnaissant d'avoir libéré Panah du Mal qui le rongeait à sa source. 

       Link hocha légèrement la tête. 

- Olympe, je me charge du reste, intervint Astrid. Il faut que tu partes maintenant. 

- Mais...

- Eldry vous aidera à traverser la mer de l'Est, affirma sa jumelle en relevant le chevalier. Elle restera avec vous jusqu'à que vous jugiez ne plus avoir besoin de son aide 

      Sa sœur en fut outrée.

- Eldry n'est pas liée avec nous ! 

- C'est elle qui vient de proposer son aide. Olympe, il n'y a aucun moyen aussi rapide pour rejoindre Hyrule.  

       La voyageuse baissa sa tête, déglutit puis posa son front contre la tête d'Elzier.

- Il faut que tu vives... La prochaine fois que nous nous verrons, tu auras intérêt d'être en pleine forme. 

     Elle se sépara rapidement de lui, le cœur lourd, et rejoignit Link, déjà installé sur le devant de la selle. La châtaine monta sur l'aile d'Eldry afin de prendre place derrière son amant ; de cette façon, elle pourrait le tenir durant le trajet et veiller à ce qu'il ne tombe pas. Astrid s'approcha de sa grande amie pour lui donner des dernières indications.

- Il faudra que tu fasses tout ce qu'Olympe ou Link te dira. Protège-les et veille à ce qu'ils ne manquent de rien.

- Tu peux compter sur moi. Fais bien attention ici, l'assassinat des dix dirigeants risquent de faire trembler tout le pays... Promets-moi d'être tout autant vigilante.

    La soldate lui adressa un sourire rassurant.

- Ne t'inquiète pas pour moi. Le peuple à toujours besoin de ceux qui ont participé à sa libération. 

      Eldry opina puis elle s'envola sans plus tarder. Sa nouvelle cavalière avait entouré Link de ses bras et posé sa tête sur son épaule saine. Bien entendu, il avait dématérialisé toutes ses armes. 

- Link, tu peux t'endormir en paix. Je te tiendrai jusqu'à ce que nous soyons arrivés.

- Merci... souffla-t-il, la fatigue prenant l'ascendant sur lui. 

        Après qu'ils aient fini leur ascension dans les airs, le héros s'endormit presque immédiatement contre celle qu'il aimait et qu'il avait réussi à sauver, une fois de plus. Entre le terrible état d'Elzier et ses retrouvailles avec son amant, Olympe ne cessait de se morfondre quant à sa propre condition. C'en était presque fini pour elle... L'épuisement se faisait durement ressentir depuis qu'elle était revenue à Panahpolis mais elle le cachait pour ne pas inquiéter plus le jeune homme. Il devait impérativement se concentrer sur sa mission finale. 

    Ses yeux la piquèrent péniblement et, pour la énième fois, elle fondit en larmes en poussant des plaintes désespérées. Pour la énième fois, elle était inconsolable. Pour la énième fois, elle trouva la vie injuste... 

  Pardonne-moi, Link... Pardonne-moi... Pardonne-moi...

   Eldry l'entendait nettement pleurer mais elle ne put rien faire à part continuer à voler. 

    Il doit me rester deux nuits à vivre. Au moins, je pourrai assister à son retour triomphal après avoir battu Ganon...

     La jeune femme se cramponna à la tunique du héros et la mouilla de ses larmes. Elle était tellement soulagée qu'il soit en vie... Mais par sa faute, il la verrait s'éteindre devant lui. 

   Et pour cette raison, elle s'en voulait atrocement.