Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

60 Secondes

« Logan contemplait avec une stupeur médusée la bombe fixée sur son torse. Les secondes s'égrénaient avec des bips réguliers, brisant le silence retenu qui englobait les deux amis.

Sur leurs figures trempées qui faisaient office d'îles inondées, les volcans humides plantés sur leurs pâles territoires restaient entrouverts, n'osant dégager leur souffle chaud. Au nord, les lacs bleutés venaient de perdre toute trace de vivacité, et demeuraient immobiles, tandis qu'au centre, les cavernes rocheuses semblait patauger au milieu de leurs îles respectives, inondées par des amas de sueur.

Comme si le temps s'était arrêté.

Mais le minuteur semblait être le seul à faire exception à la règle ; inflexible, il continuait à émettre des sons aiguës pour montrer que le temps n'était pas encore essoufflé.

Son insolence ramena Julian à la réalité.

60 secondes ! s'exclama-t-il. Dans 60 secondes, on sera tous carbonisés ! Logan, réagis, mon vieux.

00:59.

59, comme le numéro de département du Nord.
Logan ne bronchait toujours pas, comme paralysé.

00:58.

58, comme la découverte du système HLA en 1958 par [...] »

― La découverte du système HLA ? répète Xavier, perplexe.

Je sursaute à l'entente de ses propos, puis abats ma tête sur la copie afin de dissimuler mon mièvre travail. Mon cœur qui palpite, mes doigts qui s'efforcent de couvrir chacune des lettres, mon souffle qui se saccade, la vérité qui me rattrape... Il l'a vu. Il a lu mon récit.

Je ferme les yeux, apeurée à l'idée de devoir subir ses moqueries.

Devant ce silence désarmant, je me décide à lever la tête, et découvre avec horreur le visage de mon frère.

La casquette vissée à l'envers sur sa tête, des mèches brunes chatouillant son front plissé, mon grand frère est l'archétype parfait du pitre de l'école, ce type de personne qui aime se confondre avec l'obscurité vespérale en marchant sans vraiment savoir où aller d'une démarche flegmatique.

Le jeune homme coince sa sucette à la pomme entre ses dents, et enfonce ses mains calleuses dans ses poches de jean.

― Je t'avais dit de ne jamais regarder ce que j'écris ! Surtout quand c'est pour la rédac...

― Je suis sûr que tu ne sais même pas ce qu'est le système HLA, ajoute-t-il en voyant mon iPhone ouvert sur une page Wikipédia.

Mes pommettes de jeune fille prépubère se chauffent, bien trop intensément à mon goût. Je retourne l'objet rénégat qui dévoile la face arrière d'une coque Snoopy.

― Ce ne sont pas tes affaires, bougonné-je, loin de me laisser abattre.

― C'est quoi, la consigne ? « Il reste 60 secondes. À vous de raconter cette minute fatidique. »

Les balles qui jaillissent de mon regard suffisent à le dissuader d'en savoir davantage. Il penche sa tête sur le côté, et ses vertèbres cervicales se craquent sous l'effort.

60 secondes... un laps de temps trop court pour laisser place à assez d'action.

Il me jette un regard torve puis poursuit :

― L'idée de la bombe n'est pas très originale, vois-tu, d'autant plus que consacrer deux lignes à chaque secondes engendrera un effet soporifique sur le lecteur... et ça ce n'est pas bien, pas bien du tout. Et enfin, tu devrais privilégier les noms français plutôt qu'américains... n'es-tu pas fière de ton pays ? Les romans de notre époque manquent de Jean-Pierre, de François, d'Émile ! Tant de noms charmants pas assez valorisés.

Le sarcasme perce dans son intonation théâtrale, cette ironie virile dont il parvient si difficilement à se détacher qu'il fait désormais partie de son identité. Son éloquence le laisse pantois, il se surprend à sourire, amusé devant cette qualité dont il ne soupçonnait l'existence. Je le connais, bien plus qu'il ne se connaît lui-même, j'arrive à cerner le caractère des gens, et c'est ce qui fait ma force.

― Depuis quand t'improvises-tu prof de français ?

― Je livre mon ressenti, c'est tout.

Je soupire, déchire la feuille, puis la mets en boule pour qu'elle puisse rejoindre le tas de balles de coton amassés dans la hotte métallique. Cela fait plusieurs heures que je réfléchis, et je ne parviens pas à trouver un scénario digne de ce nom. Serait-ce un manque d'imagination ? De talent ? D'expérience ? Me serais-je surestimée ? Cette incertitude serait-elle due à ma phobie sociale qui me rattrape dangereusement ?

Une foule compacte d'interrogations conquérit mon territoire encéphalique, ne laissant plus la place à ma lucidité de respirer.

Je lance un regard tranchant à Xavier. Il se contente de me dévisager, amusé devant tant d'ardeur inutile.

― Si tu veux, je peux t'aider, ajoute-t-il après avoir retiré sa friandise.

Je secoue derechef la tête, peu emballée. Xavier a le don de parvenir à vous déconcentrer avec son humour noir, même lorsque vous planchez sur un devoir de très grande importance. Travailler est futilité, se divertir est synonyme de vie. Je ne sais pas de quelle façon le prendre, si je dois l'écouter ou au contraire suivre ma raison.

Après avoir repris une nouvelle feuille, je commence à griffonner avec lassitude :

« Les serpents affluaient de toutes parts. Des lassos verts, jaunes, marron, qui sifflaient tout autour de Michel, qui semblaient le poignarder avec les lames qui leur servaient de pupilles. Le seul fait qu'ils pussent se mouvoir effrayait le doyen de l'émission, enfermé dans cette fosse étroite. Depuis son entrée, il avait compté mentalement le temps qui lui restait, et chaque seconde l'effrayait, l'électrisait ; ce chronomètre mental semblait plus le terrifier que le rassurer. Mais désormais, les chiffres étaient fixés dans son image mentale, et basculaient abruptement au rythme leur tic-tac régulier ; impossible d'enlever les clous qui retenaient tenacement cette horloge infernale.

Malgré cette vision d'épouvante, il ne quittait pas des yeux son but : récuperer les petits papiers cachés sous les reptiles. Néanmoins, il n'osait pas bouger, rattrapé par la phobie qui le poursuivait depuis son enfance. Il tenta de s'approcher de l'un de ces animaux visqueux, qui se mut aussitôt, au détriment de Michel qui avait l'envie irrépressible de sortir de cette galère.

Ses compagnons l'encourageaient mais les voix lui paraissaient trop lointaines.

Il lui restait une minute.

Une minute pour trouver ces fichus papiers. Il n'avait qu'à s'approcher un tout petit peu... Ils n'étaient pas venimeux, Michel ne risquait rien. Pourtant, son ophiophobie lui dictait de déguerpir d'ici, et vite. Au pire des cas, il n'avait qu'à abandonner, sortir d'ici d'un air dépité, assurer qu'il avait tout fait pour réussir et tout serait fini. Ses compagnons le féliciteraient, honoreraient son courage légendaire, et il n'aurait plus qu'à oublier. Mais ses jambes ne semblaient pas être de cet avis.

Trente secondes.

Les partenaires du vieux chanteur semblaient avoir renoncé à l'encourager. Sans cesse, il se retournait, palpait son dos, de peur de voir un de ces reptiles ramper sur son corps.

Sors, sors !

Non, le doyen n'osait pas sortir. Il était trop angoissé pour ça, la vue de ces immondes animaux venait de le paralyser entièrement.

Dix secondes...

Un serpent tomba sur le sol et s'avança vers lui, enfin il eut le courage de se reculer ; il s'adossa à la paroi opposée, mais ce fut une erreur monumentale. Elle était infestée de serpents, qui commencèrent à s'enrouler autour de ses bras. Il hurla, puis perdit connaissance.

La minute était écoulée. »

Un rire coupe court à ma rédaction acharnée.

― Fort Boyard ? Fort Boyard ? Non mais dis-moi que tu ne vas pas faire une rédac sur Fort Boyard ! Ton truc est le plus déprimant du monde !

Encore cet idiot de frère, qui ne compte pas me lâcher d'une semelle. Ses remarques nouent mes entrailles, et à ce moment, j'ai envie de le haïr de tout mon soûl, tellement j'abhorre le fait que les gens puissent prêter attention à mes écrits. Mais d'un autre côté, j'ai envie de lui montrer que j'ai des capacités également, que je vaux peut-être quelque chose sur cette planète insipide. A mon désespoir, il ne semble pas s'en apercevoir, ou du moins, n'ose l'affirmer à voix haute.

― Ben pourquoi pas ?

― C'est affreusement ringard ! Non mais... qui regarde encore Fort Boyard ?

― Hum... Ben, c'est original, non ? argué-je sans conviction.

― Non, bien sûr que non, tu n'es pas originale ! s'exclame Xavier en tapotant mon crâne. Personne ne l'est ! Il y aura toujours quelqu'un pour avoir la même idée que toi... Mais vous ne l'utiliserez pas de la même manière, et c'est ce qui fait votre singularité. Ton œuvre ne sera pas originale, simplement innovante. Tout est question de réflexion, pas d'imagination.

― Vraiment ?

-― L'imagination n'est pas forcément un talent inné. On a tous une part de créativité en nous ; d'aucuns l'ont trouvée, d'autres non.

Je me mords la lèvre inférieure. Peut-être que c'est lui, l'intellectuel, pas moi. Le désarroi me ronge, tandis que le sang de la solitude remonte dans ma trachée, liquide poisseux et nauséabond. Je me sens stupide, faible, petite, insignifiante, j'ai l'impression qu'une main immense me ratatine et m'enfonce six pieds sous terre. Peut-être que le grand manitou qui dirige nos vies vient de se rendre compte de l'erreur qu'il a faite en m'engendrant.

― Ça va, j'ai compris.

Je grogne, puis reprends mon dur labeur :

« Lisa tapait le volant avec ferveur, en espérant le voir s'écraser sur le sol. Mais toujours, son adversaire parvenait à le rattraper, ce qui ne faisait qu'augmenter sa frustration. Jacqueline, son adversaire, menait à 6-5.

Autour d'elle, les chocs retentissaient, les baskets crissaient sur le sol. C'était toujours ainsi, lorsqu'elle faisait du badminton, et cet environnement l'apaisait. Des rubans blonds épousaient sa cabèche rectangulaire et ondoyaient derrière elle comme une brume mordorée, tandis que ses yeux émeraude étaient cerclés de nimbes d'améthyste.

Lisa jeta un coup d'oeil vers l'horloge : 11h59. Maudit instrument qui semblait le narguer.

Plus qu'une minute et tout serait fini. Soit elle repartirait dépitée, soit elle sortirait du gymnase auréolée de gloire. Quitte ou double. Il lui suffisait seulement de marquer deux malheureux points.

40 secondes...

Le volant rebondit sur le sol. Elles étaient désormais au coude à coude.

30 secondes...

Le projectile à plumes sortit de la zone, au détriment de Lisa qui perdit tout espoir. Elle n'aurait jamais le temps de marquer d'ici là...

10 secondes...

Le score était désormais de 8-6. Exacerbée, la jeune joueuse capitula et se posa sur les gradins.

Jacqueline vint la rejoindre, embarrassée.

Écoute, Liz'...

Ne m'appelle pas Liz.

-― Je t'aime.

Les deux filles s'embrassèrent et depuis ce jour, elles fondèrent une famille heureuse et eurent beaucoup d'enfants. »

― Waouh, ça c'est une nouvelle à chute ! raille Xavier.

― Je pense que je devrais continuer un autre jour, renchéris-je.

***

« Delphine mâchouillait sa mèche blanche, comme toujours lorsqu'un livre capturait son attention.

Ses cheveux teintés étaient ramenés en queue de cheval, et ses orbes bleues scintillaient d'un éclat infantile, encore un peu rêveur. Sa silhouette était fine et ses hanches à peine marquées, et malgré le magnétisme qui paraissait être exercé par les galbes de ses formes pulpeuses, elle était horriblement complexée, et enviait jalousement sa mère qui était à son sens symbole de perfection.

Sous ses yeux défilaient des caractères noirs, encre désuète s'estompant au fil du temps. Elle assistait aux tourments de Denise, à l'obsession d'Octave, simplement résumés à l'aide de mots dénués de sens. Des lettres que l'on assemblait, que l'on écartait parfois, et qui étrangement formaient un ensemble harmonieux.

Les pages granuleuses gémissaient au fil de sa lecture, le papier se froissait, et parfois il arrivait que Delphine bravât les interdits en souillant le livre de son écriture maladroite.

Et comme toujours, elle avait l'impression d'être Denise, d'être Octave, d'être Geneviève, de s'émerveiller ou bien de pleurer devant les boutiques, elle se pâmait, suffoquait, hurlait parfois, et c'était souvent à bout de souffle qu'elle finissait ses livres.

Et comme toujours, le temps ne comptait pas, elle le laissait défiler sans réellement prêter attention à lui.

Mais ce fut ce jour-là une grave erreur.

Lorsqu'elle put enfin terminer le roman, elle regarda l'heure, pantelante ; 23h58.

Un cri étouffé s'échappa de sa gorge, puis une boulette de papier mâché envahit son estomac avant de tapisser les parois de l'organe digestif.

La jeune fille alluma fébrilement son ordinateur ; 24 septembre, 23h59 et 00 secondes.
Elle commença à enfoncer les touches du clavier. Les cliquetis semblaient résonner à l'intérieur de ses phalanges, elle avait déjà quitté Denise et Mouret, les abandonnant à leur idylle passionnée.

À présent, elle traçait le récit de Logan et Julian, livrés à eux-mêmes.

40.

Elle ne parvenait pas à s'arrêter d'écrire, c'était comme si le dieu de l'écriture contrôlait ses doigts, lui soufflait ce qu'elle devait faire. Comme Michel et les serpents, elle n'arrivait pas à se défaire de sa posture, seules ses mains travaillaient, le reste demeurait ankylosé.

30.

Elle était Lisa, c'était elle qui tenait fermement la raquette, elle qui se délectait de ces impacts répétés, redondants. La sueur couvrait son visage, la démangeait, mais elle ne pouvait stopper sa progression.

20.

Et quoi de mieux que d'écrire sa propre histoire, de rire avec Xavier, le frère qu'elle avait fabriqué à partir de sa propre conscience ? Ce qu'elle écrivait, elle le vivait également, ces sensations bénies qu'elle aimait tant.

10.

Des pas se rapprochaient, sa mère allait bientôt la repérer.
L'adolescente de treize ans appuya sur le bouton "publier" d'un clic de souris, plaqua l'écran de son ordinateur, mais alors qu'elle s'apprêtait à se réfugier sous sa couette, la porte s'ouvrit à la volée, dévoilant une mère au regard mi-furibond, mi-triomphant.
Ses yeux noirs luisaient d'une telle ardeur que Delphine avait l'impression de se consumer de l'intérieur.

La femme arracha l'ordinateur des mains de sa fille qui lâcha un cri de bête blessée et le brandit en l'air comme s'il s'agissait d'un trophée.

Je le savais, je le savais !

Maman, ne fais pas ça, je t'en supplie, couina la fille aux cheveux blancs.

Insensible, la mère se contenta de vociférer :

Si c'est cela, tu seras confisquée d'ordinateur et de portable pendant un mois !

Sa langue effleura son palet, puis un cri perçant fusa, à la fois désespéré et grandiloquent, un « on » qui sortait des tréfonds de ses organes respiratoires, son pernicieux et nocif, agressif et meurtrier.

Ce jour-là, Delphine atteignit la puissance de 162 décibels.

Ce jour-là, Delphine poussa le cri le plus puissant de l'Histoire.

Ce jour-là, Delphine parvint à s'inscrire au World Guiness des Records.

0."

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro