« Mamaaan, je retrouve pas le chapeau ! »

La mère accourt dans la chambre d'ami, le visage inquiet de celle qui remarque que le carton de vieilles fripes est renversé à terre, les vêtements pourtant parfaitement pliés quelques minutes auparavant, en tas sur le parquet. Ses poings se resserrent, sa mâchoire se referme pour prendre sur elle, et tout sourire envers sa fille, elle se met sur la pointe des pieds et récupère sur l'étagère trop haute aux yeux de l'enfant le chapeau tout biscornu. Grisé par la poussière, elle souffle rapidement dessus avant de le poser sur la tête de la fillette.

« Il est là ! »

Mathilde sourit, heureuse. La robe noire est encore un peu trop grande, alors la mère plie les manches pour faire dépasser les petits doigts. Elle lui tend le petit panier avant de la prendre par la main. Dix-huit heures, le soleilcommence à se coucher, c'est le moment parfait pour faire le tour des maisons du quartier.

Les lampadaires déjà allumés participent à rendre l'ambiance un peu lugubre, mais la main de la fillette fermement dans celle de sa mère, elle n'a pas peur. C'est même plutôt une excitation assez grisante qui la tenaille et elle ne peut pas s'empêcher de sautiller entre deux maisons. Encore une, la dernière de la rue. C'est une vieille femme tout sourire qui ouvre la porte lorsque Mathilde s'écrie « des bonbons ou un sort ! » de sa voix mielleuse de l'enfance.

La voisine plonge sa main dans le paquet de sucreries avant de déposer la poignée dans le panier déjà rempli de la fillette qui exulte de joie. Tous ces bonbons, de toutes les couleurs, pour elle, rien que pour elle. Même si maman a prévenu, ce ne sera qu'après le repas et pas tout d'un seul coup, sans oublier de bien se brosser les dents après, c'est son trésor, et un trésor, ça se chérit.