Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Je ne... Il faut vraiment que j'arrête de me répéter cela, parce que premièrement c'est totalement inutile, et deuxièmement parce que ça va me rendre complètement dingue, si je ne le suis pas déjà. Mais c'est plus fort que moi. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Quelque chose de plus fort que moi encore une fois. Tout semble plus fort que moi depuis une heure ce matin. Depuis que j'ai rencontré Hoseok. Il me rend dingue. Ou bien j'étais dingue et il me ramène sur le droit chemin. Je ne sais pas. Je ne sais pas grand-chose en vérité, je n'ai aucune certitude, et les quelques choses que je croyais savoir il me les a réduites en cendres. Je pensais ne plus pouvoir rien ressentir envers quelqu'un, il a fait battre mon cœur plus vite que la course d'un lièvre. Je n'arrivais plus à faire confiance à un inconnu, je pourrais maintenant me bander les yeux et le laisser me guider à travers la ville. Je ne pouvais plus parler aux autres, voilà que je viens de lui envoyer un message volontairement. Je ne sais pas ce qu'il m'a pris. Peut-être que l'appel de son numéro rentré dans mon répertoire était trop fort pour que j'y résiste. Et puis j'avais désespérément envie de lui parler. C'était comme une petite voix dans ma tête qui faisait constamment référence au roux. Par exemple, lorsque je me suis versé des céréales comme tous les matins, je me suis demandé si Hoseok en prenait aussi ou s'il mangeait plutôt du salé au petit-déjeuner. Lorsque je me suis habillé, un jeans noir épais, un tee-shirt guns and rose et un sweat à capuche du kendrick lamar tour, je n'ai pas pu m'empêcher de chercher à savoir si ma tenue lui plairait. Ou encore, lorsque j'ai commencé à marcher sur le trottoir gris et vide de monde, mon casque vissé sur les oreilles pour ne pas entendre la mélodie de la ville, j'aurais voulu savoir si lui possédait le permis, alors que moi je suis condamné à la marche à pied puisqu'il n'est même pas envisageable que je prenne les transports en commun. Tout ça pour dire qu'il me restait en tête, constamment. Alors une fois assis devant mon bureau recouvert de feuilles blanches elles-mêmes remplies de mon écriture serrée et d'un ordinateur en fin de vie, je n'ai pas pu réfréner ce besoin. Et voilà où j'en suis : je n'ai pas rédigé une seule parole, ni touché une seule touche de mon piano, ni même arrangé une seule mélodie sur mon logiciel de mixage parce que je suis trop occupé à discuter via message à ce roux trop malin. Et le pire je crois, c'est que je suis heureux de lui parler. Peut-être trop heureux. Je n'arrête pas de sourire devant mon petit gadget électronique en tournant sur ma chaise, et je suis soulagé que mon bureau ne comporte aucune fenêtre à part celle donnant sur l'extérieur sinon on m'aurait vraiment pris pour un idiot amoureux. Et je ne suis ni l'un, ni l'autre. Pas encore tout du moins.

Une petite vibration dans ma main indique l'arrivée d'un nouveau message que je m'empresse de lire.

De Hoseok :

Tu pourrais pas me répondre en plus de trois mots s'il te plaît ? ;^;

Il croit quoi ? Que parce que je me laisse apprivoiser il changera mon naturel ? Même avec Nam j'envoie des messages succincts, alors ce n'est pas lui qui aura le droit à un traitement de faveur. Quoiqu'avec Namjoon ce n'est jamais moi qui lance une conversation, ce qui n'est pas son cas. Je grimace avant de lui répondre.

A Hoseok :

Non

De Hoseok :

T'es quand même vachement buté comme mec...

Même pour moi tu ne le ferais pas... ?

A Hoseok :

Non

:)

Je suis curieux de voir sa réaction face à mon smiley. Le connaissant, très peu mais ça suffit amplement, il va s'exciter comme une puce et écrire tout en majuscule, ce que je trouve ridicule. On discute par message, pourquoi vouloir à tout prix imiter nos intonations de voix IRL ? Ça m'a toujours paru absurde. Une vibration. Un nouveau message s'affiche sur mon écran. Bingo, j'ai vu juste.

De Hoseok :

OMGGGBLBBJNBL

T'AS MIS UN SMILEY ?!!!!

Je me sens honoré tout à coup :')

Ça va ? Ça t'a pas fait trop mal de paraître aimable ?

A Hoseok :

Ça va ? T'es pas tombé de ton lit à t'exciter comme ça ?

De Hoseok :

Même pas ! Par contre je crois que j'ai dérangé Jimin et Nam dans une situation un peu délicate avec mon cri...

A Hoseok :

Je ne veux pas savoir !!

Mais pourquoi tient-il toujours à me mettre mal à l'aise ? C'est devenu son activité favorite ? Ça lui plaît autant de me faire rougir et bégayer ? OK actuellement on est par téléphone donc il ne peut pas le savoir que je me comporte comme si j'avais un balai dans le cul, mais ce n'est pas la première fois ! Déjà avec ses compliments lorsqu'il est venu m'aborder, auxquels je suis resté insensible en surface, puis pendant sa danse bien trop suggestive que j'ai fui (d'accord il ne pouvait pas savoir que je ne supporterais pas, il pensait plutôt que ça me ferait plaisir), son allusion à ma vie dite intime où je me suis statufié, et enfin sa proposition de rendez-vous. Enfin, pour toute personne normale ces choses auraient été flatteuses ou à la rigueur grotesques, mais cela me rappelle de mauvais souvenirs. Des choses que je préfèrerais oublier. Des choses que j'aimerais effacer. Alors pourquoi je me les fais revivre avec lui ? Pourquoi je continue cette relation avec le roux alors que chaque pas que nous faisons me renvoit toutes ces choses en pleine face ? Je dois aimer me faire du mal. Ou alors je dois un peu trop l'aimer, lui.

De Hoseok :

D'accord, j'arrête

Tu aimerais manger où ce midi ?

Mes rougeurs partent immédiatement qu'un autre sujet de conversation fait son apparition, la gêne se transformant en désolation. Pauvre Hoseok qui croit que je vais pouvoir l'aider à se décider... Ça fait depuis trop longtemps que je ne sors plus, je ne sais pas de quoi j'ai envie.

A Hoseok :

Je ne sais pas

De Hoseok :

Arrête, il y a forcément quelque chose qui te ferait plaisir

Où allez-vous lorsque tu sors avec Namjoon et Jimin ?

A Hoseok :

On ne sort pas

De Hoseok :

Je ne te crois pas

Eh bien qu'il ne me croit pas, je n'ai aucune preuve à lui fournir. J'hausse les épaules bien qu'il ne puisse pas voir ce geste. Je ferme mon téléphone un instant, sachant pertinemment qu'il relancera la conversation tôt ou tard. Il a dû être bien trop heureux de mon initiative pour me lâcher maintenant en terminant l'échange sur quelque chose d'aussi décevant. Quoique ce ne soit pas la première fois que je lui fais signe, je lui ai aussi glissé mon numéro dans sa poche arrière. Je me demande bien d'ailleurs comment il a fait pour ne rien sentir du tout. Ce mec est toujours sur ses gardes, ça ne lui ressemble pas d'être inattentif un instant. Comment est-ce que je peux certifier cela ? je me fais la réflexion. Je ne le connais pas. Il faut que ça me rentre dans le crâne.

Cependant, un nouveau message arrive et balaye cette réflexion en moins d'un dixième de seconde.

De Hoseok :

Si en fait, je te crois. Tu peux pas aller dans des endroits pleins de monde, ce qui compromet un peu un restau...

Je me sens d'autant plus touché que tu le fasses pour moi :)

Du coup, tu manges quoi chez toi ?

Ça c'est une bonne question mon cher Hoseok. En vérité je ne mange pas beaucoup... Je ne bouge pas de chez moi à part pour mon trajet vers l'agence qui dure un quart d'heure, où je me rassois à nouveau, et le retour. Je ne brûle que très peu de calories par jour, donc je mange peu, c'est aussi simple que cela. CQFD. En général je mange mon bol de céréale du matin, du riz pour le midi que je partage avec Namjoon parce que lui a toujours énormément de compléments, de la viande marinée et des légumes poêlés amoureusement par son copain qui en fait toujours trop. Je le soupçonne d'ailleurs d'en faire spécifiquement pour moi. Jimin est gentil, et au moins il me permet de rester en bonne santé. Je l'aime bien ce gamin. En pensant à eux deux, cela me rappelle nos soirées du vendredi autour d'un plateau de sushis. Je m'empresse de lui partager cette idée.

A Hoseok :

Pas grand-chose

Mais on commande souvent des sushis avec Namjoon et Jimin

De Hoseok :

Tu aimerais manger ça ?

Je réfléchis un instant. Il est vrai que j'adore les sushis, mais je pense les adorer justement parce que je les partage avec Namjoon et Jimin devant la télé le vendredi. Alors que là je vais manger avec Hoseok. Ce n'est pas le bon contexte, il y a comme une dissonance, je n'arrive pas à associer les deux. Et puis, tant qu'à changer mes habitudes, autant les changer jusqu'au bout.

A Hoseok :

Non

Je préfère que tu choisisses autre chose

Ou il n'y aura pas grand monde

De Hoseok :

*^*

Est-ce que je dois prendre cela comme un gage de confiance ?

A Hoseok :

Est-ce que tu avais vraiment besoin de ça pour savoir que tu as ma confiance ?

Parce qu'aussi absurde que ça puisse paraître, je lui fais confiance. Il n'a pas eu à la gagner à force de temps et d'actes comme Jimin, il l'a naturellement acquise. Pourquoi ? Aucune idée. Mais la logique n'a plus vraiment sa place dans ma vie. Encore moins depuis ma rencontre avec le roux.

De Hoseok :

AHHHHHHHHHHHH !!!

Tu ne peux pas dire ça aussi calmement !!

Tu sais dans quel état est mon cœur maintenant ?!?

J'ai l'impression qu'il va sortir de ma poitrine

Tu auras ma mort sur ta conscience !

A Hoseok :

:)

De Hoseok :

ARRETE ÇAAAAAAA !

Tu veux vraiment me causer un arrêt cardiaque?!

A Hoseok :

Peut-être bien...

De Hoseok :

Tant pis, au moins je mourrai heureux

A Hoseok :

Parce que je te rends heureux ?

C'est réellement une question que je me pose, j'espère qu'il la prendra avec le sérieux que je lui porte. Il met du temps à répondre, ce qui est plutôt bon signe.

Est-ce que je suis capable de rendre quelqu'un heureux ? Ça a été le cas, autrefois, lorsque Namjoon venait d'intégrer l'agence et que je lui apprenais à bidouiller deux trois trucs sur le logiciel de mixage. Mes parents aussi ont été heureux lorsque je suis monté sur Séoul, appelé par cette petite agence en plein essor en tant que compositeur, parolier et producteur. Enfin, ils étaient surtout très fiers, ils en parlaient sans cesse autour d'eux. Leur fils, si jeune et déjà reconnu. Jimin aussi a été heureux lorsque j'ai commencé à tolérer puis à apprécier sa compagnie. Mais maintenant, alors que je ne suis plus qu'une carcasse vide ? Mes parents ne savent plus rien de moi, c'est à peine si on se parle plus de dix minutes toutes les deux semaines. J'ai l'impression de causer beaucoup de soucis au grisé qui s'entête à vouloir me redonner goût à la vie, et de la peine à son compagnon qui culpabilise énormément face à ce que j'ai vécu, et qui cherche par tous les moyens à racheter sa faute alors qu'il n'y est pour rien. Je traîne le malheur dans mon sillon, personne n'est plus « heureux » avec moi.

Mais qu'en est-il de lui qui ne connait pas le « avant » mais seulement le présent ? Pourrais-je le rendre heureux sans être celui que j'ai été ? Car je ne le serais plus jamais, il ne servirait à rien qu'on poursuive dans cette voie si elle s'avère stérile, s'il ne s'accroche pas à ce que je suis désormais. Brisé.

De Hoseok :

Tu monopolises mes pensées, augmentes mon rythme cardiaque, colores mes joues de rouge et les étires d'un sourire. Je cherche constamment ce qu'il pourrait te faire plaisir et à chaque fois que je tombe juste, j'ai l'impression d'avoir gagné au loto. Chacune de tes réactions, de tes sourires et de tes soupirs, de tes silences et de tes rougeurs sont comme des victoires que j'accumule. J'ai envie d'accélérer le temps pour te revoir en tête-à-tête et de te protéger de quiconque s'approcherait de toi. Donc oui, on peut dire que tu me rends heureux.

Ça sonnait moins comme une déclaration dans ma tête, j'espère que tu n'as pas pris peur en lisant cela ^^'

Non Hoseok, je n'ai pas pris peur, mais je sens des larmes couler le long de mes joues.

A Hoseok :

Merci

Les mots qu'il a écrits me touchent. Profondément. J'hoquète et ramène mes genoux contre mon torse, posant ma tête par-dessus. Je ne sais pas s'il a conscience de tout le bien qu'il me procure, de la bouffée d'air frais qu'il est dans ma vie. Il me donne envie de continuer, à vivre. Il me donne un objectif, un avenir alors que j'étais bloqué dans le passé. Mais si je ne pouvais rien lui offrir en échange, tout cela n'aurait servi à rien. Être inutile, se sentir inutile est la pire sensation du monde. Ne rien pouvoir faire, ne pas pouvoir aider ceux qui nous sont chers parce qu'on ne peut déjà pas s'aider soi-même, c'est devenu mon quotidien. Mais ça peut changer, il peut renverser la balance. Et je peux me reposer sur lui sans culpabiliser.

De Hoseok :

Il n'y a pas de quoi ;)

Si ça ne te dérange pas je vais aller me coucher, pas que je n'apprécie pas notre conversation mais parce qu'il commence à se faire tard (ou tôt, ça dépend du point de vue) et si je veux être présentable pour notre rendez-vous, il vaut mieux que j'ai quelques heures de sommeil derrière moi.

On continuera cette conversation tout à l'heure

A très bientôt Yoongi !

A Hoseok :

J'ai hâte

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Courte annonce : pas de chapitre avant vendredi prochain car je pars en voyage scolaire :)

J'ai remarqué que dans ce chapitre j'avais fait énormément de fautes d'inattention donc merci -taesthyk d'avoir prêté attention à mes étourderies, j'essaierai de me relire davantage ^^