Day 79
Mercredi 4 décembre
Minuit moins quart.
Je venais de finir le travail.
La librairie avait eu une énorme commande à préparer aujourd'hui, sans compter les gens qui semblaient s'être passés le mot pour venir demander des recommandations de livres et en acheter.
Nous devions fermer plus tôt, mais nous n'avions eu une telle déferlante de clients depuis belle lurette. Le patron avait donc fait une exception, et nous étions restés ouverts jusqu'à vingt-trois heures trente. Voyant tout le boulot qu'il nous restait à faire et tout le rangement qui suivait l'activité de la journée, mon collègue de la nuit, Leon, avait décidé de commander quelque chose pour se remplir l'estomac, et en constatant l'heure tardive, m'avait dit de partir avant lui.
C'est dangereux pour toi de rester aussi tard dehors, m'avait-il dit.
Je l'avais remercié une bonne vingtaine de fois et lui avait demandé s'il était toujours sûr de pouvoir gérer tout ce désordre seul. Il m'avait limite mis à la porte.
Je marchais vers chez moi en passant par le même quartier glauque où j'avais croisé Livaï. Ça ne me plaisait pas particulièrement, mais le détour me couterait une bonne vingtaine de minutes de plus. Quelques lumières éclairaient la nuit, et je me dis qu'il valait mieux passer par ce chemin encore rempli de témoins oculaires et dangereux à une ruelle seulement que par l'autre, supposément sûr mais complètement désert.
Ma capuche abattue sur la tête, mes mains dans les poches et le menton baissé, j'accélèrais le pas autant que possible.
Passer par içi me faisais penser à Livaï et à notre dernier échange. Il l'avait senti lui aussi, j'en étais sûre, sinon il n'aurait pas reculé.
Il avait senti cette tension dans l'air. Cette électricité grisante. Ces non-dits que nos regards traduisaient pour nous.
Cette attraction.
Et il avait également compris que c'était mal. Car il avait quelqu'un, et qu'il criyait toujours que mon coeur appartenait à un autre.
Du moins c'est ce que je me plaisais à croire.
Pourtant, c'était évident que notre dernière entrevue n'était pas innocente. Il y'avait anguille sous roche. Livaï avait probablement jugé plus sage de l'ignorer et de repartir vers celle qu'il aimait.
J'accélèrais la cadence. Il y'avait de moins et moins de monde, et je m'approchais de cette zone noire de la ville. Une partie de moi espérait le rencontrer. L'autre, beaucoup plus raisonnable, la fit taire.
Et pourtant quand je le vis, je n'eus qu'envie de lui sauter dans les bras. Je n'ai jamais ressenti cela avant. Cette envie, ce besoin de sentir les bras de l'autre autour nous, mais quand on n'en a jamais fait l'expérience.
Il est à quelques mètres de moi, sur le trottoir d'en face. Je reconnais vaguement la silhouette de Furlan près de lui et tente de distinguer la voix d'Isabel au milieu des murmures qui me parviennent, sans résultats. Elle n'est pas avec eux pour une fois on dirait.
Je détourne le regard mais parvient à sentir ses iris se poser sur moi. En deux secondes, il est devant moi.
-"Bordel, t'es vraiment une fouteuse de merde. Qu'est-ce que tu fabriques içi ?!"
Entendre sa voix propage un sentiment de tristesse en moi. Je réalise chaque jour plus que j'aime ce garçon, et je ne cesse de me répéter que c'est mal et que je ne l'aurais jamais.
Pour me mettre dans un mauvais mood, je suis la meilleure.
J'haussais les épaules, avec ce sentiment persistant de n'être qu'un passe temps pour lui. Après tout, je ne lui dois pas d'explications.
Il m'attrape par le bras et me secoue un peu pour me forcer à soutenir son regard. Ce n'est pas un geste tendre et mignon, mais un geste particulièrement brutal. Je ne comprends pas pourquoi il semble si inquiet, et j'ai la sensation qu'un truc très sérieux se cache derrière tout ça.
-"L'autre chemin est désert et je ne peux pas me permettre un détour. Il fait déjà assez tard." Finis-je par céder. Je ne veux plus avoir à l'affronter. Je veux juste revenir en arrière et dire à ce putain de coeur qu'Eren était un bon crush, que lui au moins n'était pas officiellement en couple
-"On n'a pas cours demain. Tu aurais bien pu avoir un peu de temps de retard."
C'est à mon tour d'hausser les épaules.
-"Je te raccompagne."trancha t-il.
-"C'est pas la peine, vraiment. Puis la station est encore loin, tu ne vas pas marcher autant pour-"
-"Non, je ne vais pas te raccompagner jusqu'à la station, mais jusqu'à chez toi."
-"Je ne voulais pas rentrer."mentis-je.
-"Hein ?"
-"Je voulais... me changer un peu les idées." Avouai-je en laissant mes épaules s'affaisser.
Je n'en peux plus. Cacher cette histoire à ma meilleure amie, avoir l'impression d'être la pire peste de la planète et...ce foutu sentiment de ne pas être à la hauteur à chaque fois que mon regard tombe sur Petra. Je n'avais pas besoin d'un tel cocktail de négativité.
-"Tout va bien ?"
-"Oui oui. Je... je dois rentrer."
Livaï fronça les sourcils, ne lâchant toujours pas mon bras.
-"Décide au moins quel mensonge me balancer à la fin !"
Je laisse échapper un soupir. Pourquoi a t-il fallu que je tombe sur lui ?!
-"Je... s'il te plaît... je... je veux juste me reposer..."
-"Tu as besoin que j'appelle Hanji ?"
Livaï semble tellement confus que cela m'arrache presque un sourire, mais la mention du nom de ma meilleure amie me ramène sur terre.
-"Non. Pas la peine de l'inquiéter. Je vais... je vais partir."
J'essaie de me détacher de sa poigne mais je n'ai plus de forces. J'aurais pu craquer autre part, au fond de mon lit, seule par exemple. J'aurais pu ne pas craquer. Mais non. MADEMOISELLE doit faire sa fragile.
-"Hors de question. Tu ne vas clairement pas bien."
-"Ouah, jure !"
-"Bordel, tu n'arrêtes jamais d'être chiante, même quand t'es dans un état merdique."
-"C'est dans le sang ce genre de trucs."
Il me toise encore quelques secondes.
-"Viens."
Livaï me tire vers sa moto et je suis sans trop savoir quoi faire. Furlan nous fixe, et le brun lui fait signe pour lui dire qu'il lui reparlera plus tard.
Il enjambe sa moto et me regarde, debout au milieu de l'asphalte, gelée par le froid, pétrifiée par l'odeur et l'atmosphère morbide, au fond du gouffre et indécise quant à la décision à prendre.
-"est-ce que j'ai la gueule d'un psychopathe qui veut te kidnapper ?"finit-il par lâcher devant mon hésitation.
-"Non, mais le truc, c'est que c'est souvent la personne à qui on s'attend le moins."
-"Je croyais que Hanji me connais plutôt bien, et que j'aurais pas fait long feu dans la liste des gens qu'elle apprécie si j'avais des penchons chelous."
-"Tout est possible avec elle."
Furlan est parti et le ruelle se vide lentement. On ne s'est pas reparlés depuis qu'il m'avait raccompagné, et sa présence n'en est que plus déroutante.
-"Levi ?"
-"Tu vas te décider ou non ? Parce que là on se gèle les couilles."
-"On peut... aller quelque part ?"
-"Tu as un endroit en tête ?"
-"Non. Il faut en avoir un ?"
Il me scrute longuement avant de faire ronronner son véhicule. Je monte à mon tour et pose mes mains sur ses épaules. Je ne sais pas ce qui me prend. C'est comme si mon corps est contrôlée par une force invisible, et je ne sais pas si j'aime ça ou non.
-"Alors je vais t'emmener dans l'un des endroits les moins chiants de la ville à mes yeux."
Sa voix, sa proximité, ses yeux qui se posent brièvement sur moi, tout cela me détend.
-"Tout ira bien, même si ton cas à l'air d'être particulièrement merdique."
-"Très réconfortant."
-"Si c'est du réconfort que tu cherches, t'es au mauvais endroit."
Et pourtant j'ai l'impression d'être là où je suis sensée me trouver.
Livaï démarre, et mes soucis s'envolent en même temps que ma capuche.
Que ce soit bien ou non n'est plus mon premier soucis. J'ai besoin de quelqu'un ce soir, et ce quelqu'un est Livaï.
Ne serait-ce que comme un ami.
Bordel, encore une fois j'écris l'opposé de ce que j'avais en tête. Heureusement qu'ils n'y a pas de tensions pour une fois. Bon beh, je vous aime et à bientôt ♡.
~Caporal Neko
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