~Chapitre 9~
5 Mars 2 222
Depuis que j'ai découvert la véritable fonction de ces êtres métalliques, je passe mon temps à les observer. En soi, leur système est fascinant ! Ils sont capables de tellement de choses "humaines". Ils peuvent nous analyser complètement, savoir quelle émotion nous anime, si nous sommes heureux ou tristes, et même si nous avons peur, toutes les émotions quoi. J'aimerais savoir comment c'est possible, comment ils font pour le déterminer, connaître leur fonctionnement plus en détail. Je crois que mon esprit scientifique reprend le dessus.
Il y a quelques jours, j'ai reçu un message aérien de Zayre par rapport à la date du prochain rendez-vous. Il s'agit de demain, à la pause de l'après-midi. Bientôt, ces robots n'auront plus aucun secret pour moi. J'ai hâte de savoir comment il compte faire pour disséquer l'un d'entre eux sans que celui-ci envoie un signal d'alerte au contrôleur. On peut peut-être le déconnecter.
- Aesha, on mange ! M'interpelle ma mère
- Oui, j'arrive
J'interromps mes devoirs et je descends les rejoindre dans la salle à manger où Charly, notre robot, nous a préparé du rôti de porc au miel et des légumes verts. Même s'il est là pour nous espionner, il faut bien avouer qu'il cuisine divinement bien ! Tout est tellement délicieux que j'en oublierais presque leur raison d'être. Charly est comme un membre de la famille désormais, il est avec nous depuis si longtemps que son absence serait impensable. Je le considère comme un oncle. Grâce à son ressenti de nos émotions, il a toujours été là pour me consoler quand je n'étais pas au mieux de ma forme, il me donnait des conseils sur tout, comme quoi tout est possible, il m'encourageait, il jouait avec moi quand je m'ennuyais et que tout le monde était occupé, etc. Je l'aime comme une véritable personne. J'ignore ce que Zayre a prévu de faire d'eux une fois qu'on les aura désactivés, mais j'espère qu'on pourra les conserver. Beaucoup de familles voient ces espions de la même manière que moi, et les arracher à leur foyer serait cruel selon moi. J'espère que Zayre a trouvé un moyen de désactiver seulement leur fonction d'espionnage ainsi que leur liaison avec Maestro. Dans le cas contraire, je ferais tout ce qui est en mon pouvoir pour le convaincre de chercher une solution pouvant satisfaire tout le monde. Malheureusement, je ne sais pas si c'est possible, je ne peux que l'espérer. Il ne me reste plus qu'à attendre demain pour voir ce qu'il va nous dire.
- Qu'est-ce que tu en penses Aesha ? Me demande subitement mon père
- Ah, euh, oui, ce serait super, je bégaye
- Tu ne sais pas de quoi on parle, je me trompe ?
- Désolée, mes pensées m'ont emporté, encore, vous disiez ?
- Je disais qu'on pourrait peut-être partir quelques jours à Noël cette année.
- Non, c'est vrai ?!? Ce serait trop bien ! Je m'enthousiasme déjà. Et on irait où ?
- On ne sait pas encore, tu voudrais aller où toi ? Intervient ma mère
- Je ne sais pas, il y a tellement d'endroits à voir sur Terre !
Je tiens à préciser que je n'ai jamais quitté ma ville natale, d'où ma réaction qui vous semble sûrement exagérée. J'ai toujours rêvé de partir découvrir le monde. Je sais pourquoi nous n'avons jamais pu le faire : premièrement, nous n'avions pas forcément les moyens, les voyages coûtent extrêmement chers, et deuxièmement, il fallait avoir une certaine ancienneté dans l'entreprise pour avoir le droit de prendre plusieurs jours de congé d'affilés. Je suis tellement contente, j'ai envie de sauter de joie. J'ai l'impression d'être une petite fille le matin de Noël, découvrant les cadeaux empilés sous le sapin spécialement décoré pour l'occasion, et l'assiette de biscuits avec le lait et quelques carottes pour les rennes vide.
- Pourquoi on n'irait pas en France ? Ou en Espagne ? Il paraît que l'Angleterre est magnifique aussi, surtout à cette période de l'année.
- D'accord, d'accord, on verra la destination plus tard. Calme-toi un peu Aesha, on n'est pas encore parti. Il faut d'abord qu'on fasse toutes les démarches auprès du Maestro des Etats-Unis, ce qui peut prendre du temps. Ensuite, il faut qu'elle soit approuvée.
- Ce n'est qu'une formalité, pourquoi ne le serait-elle pas ?
- On ne sait jamais, il suffit d'une toute petite faute pour qu'elle soit refusée. Si je te dis ça, c'est parce que je sais que tu as tendance à t'emballer un peu vite et je ne veux pas que tu sois déçue si jamais on n'obtient pas l'aval du Maestro.
Ma joie retombe un peu à cette possibilité. Je sais que rien n'est encore perdu, mais si notre groupe est découvert, toutes nos chances de voyage seraient donc réduites à néant. Je ne peux pas leur faire ça, je ne peux pas priver ma famille d'un séjour qu'on attend depuis des années. Leur implication me saute maintenant aux yeux. Si je me fais prendre, c'est non seulement moi qui me fais arrêter, mais aussi mes parents. Je ne m'étais pas rendu compte jusqu'à présent à quel point mon envie de savoir, de changer les choses les mettait en danger. Le simple fait que nous allons bientôt passer à la pratique fait planer une épée de Damoclès au-dessus de leur tête, nous risquons tous la peine capitale, la mort. Est-ce que notre groupe en vaut-il vraiment la peine ? Est-ce que je suis prête à faire courir ce risque à mes parents ? Le discours de Zayre au début de groupe me revient alors en mémoire, il nous avait mis en garde des risques pour nos proches. A ce moment-là, je ne me rendais pas compte. En même temps, si nous réussissons, Maestro sera hors-jeu et ma famille sera saine et sauve, et libre. Si on arrive au bout de notre projet, le monde en sortira meilleur. Je suis perdue, je ne sais plus quoi faire, mon cerveau me dit de continuer l'aventure, de suivre Zayre quoi qu'il m'en coûte, mais mon cœur me dit de renoncer, que le jeu n'en vaut pas la chandelle. Que faire ? Encore une fois, mes émotions ont pris le dessus sur ma raison quand j'ai accepté. Sauver ma famille ou sauver le monde, un choix cornélien. D'un côté, la peur de perdre ma famille, de l'autre la possibilité de les libérer en acceptant de courir le risque de les faire tuer au passage. Même si je sais qu'en cas de victoire, ils seront vivants et que tout ira pour le mieux dans le meilleur des mondes, il faut accepter l'éventualité de la défaite et je ne sais pas si je suis assez forte pour le faire. Suis-je prête à accepter leur mort pour le bien du monde ? Voilà ce qui nous différencie de nos adversaires, eux ne se poseraient pas la question.
Il va falloir que je parle à quelqu'un, sinon, je vais rester dans cette impasse.
La raison ou le cœur ?
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