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Chapitre 15

~ Madeleine ~

Je me réveillais dans un calme étrange. Je tournais brusquement la tête en me rappelant où j'étais mais Wilhem avait disparu. Je soupirais en me redressant en grimaçant et examinais la pièce en silence. Qu'étais-je censée faire ? La honte m'accabla brusquement. Puis je me souvins de la veille : de sa décision - la sanction qu'il devait prendre - puis de son état à nouveau fiévreux. Et enfin, sa requête. Son ordre. Dormir avec lui. Un frisson me fit me redresser définitivement, le souffle court. Je repoussais les draps pour rejoindre la fenêtre mais la Cour était calme. La nuit était tombée depuis quelques heures, visiblement. Je me rapprochais de la porte au moment où je perçus un mouvement derrière et me figeais. Lorsque l'ombre réapparut, je compris qu'il s'agissait d'un garde. Il a... fait monter la garde ?! Le choc me coupa les jambes et je dus me rasseoir sur le lit pour assimiler l'information correctement. Je ne pouvais donc pas quitter les lieux sans lui.

Je soupirais en me relevant et me rapprochais du broc d'eau toujours près de la fenêtre. Retirant sa chemise, je la posais sur le rebord de la fenêtre et attrapais le tissu que j'avais utilisé pour faire baisser la température de Wilhem. Je me lavais autant que possible sans retirer mon uniforme, les yeux toujours rivés sur la porte. Je commençais par mon visage et eus toutes les peines du monde à faire partir les traces de crasse incrustées depuis le bombardement. Je soupirais en glissant le linge dans mon cou puis sur mes épaules. Mon uniforme s'humidifia mais je continuais mon rafraichissement, soulagée de me sentir un minimum propre. Lorsque je finis par le bas de mon corps, personne n'était réapparu. 

L'attente se prolongea et la nuque commençait à nouveau à me tirer quand enfin... l'ombre se figea devant la porte. Je m'étais rapprochée de la fenêtre entrouverte et étais par conséquent pile dans l'ouverture de la chambre lorsque Wilhem poussa le battant. Son regard balaya ma tenue avant qu'il ne se tourne, le bras bloquant l'accès à la pièce. J'aperçus une autre silhouette et me contentais de rester immobile et silencieuse, dans l'ombre de l'allemand. Les hommes du Colonel savaient que j'étais ici. Tout autant que ses hauts gradés puisque j'avais dû rester auprès de lui pour le soigner. 

- On se voit demain, dit-il soudain à son interlocuteur. 

- Bonne nuit ? S'amusa la voix de Ludwig. 

Wilhem ne lui répondit pas et referma la porte. Puis il se retourna lentement vers moi, le visage légèrement dans la pénombre qui tombait sur la chambre. Je le fixais sans savoir quoi faire d'autre, l'uniforme encore humide par endroit et la fatigue me pesant lourdement sur les épaules. 

- Bonsoir, Madeleine. 

- Bonsoir, soufflais-je. 

- Avez-vous pu vous reposer ? 

Tout en parlant, il avança jusqu'au bureau où il y déposa son arme. Son visage m'apparut entièrement : toujours aussi dangereusement beau et péniblement désirable. Il déboutonna lentement la veste de son uniforme et glissa une main dans la poche interne du vêtement pour en sortir un carnet noir. Je le fixais sans répondre. Lentement, il retira sa veste et la posa sur la chaise avant de me regarder à nouveau. C'était indéniable. Cet homme était extrêmement beau. Charismatique. Mais allemand. Mon esprit se remit à lutter contre l'inexorable attirance qui nous poussait l'un vers l'autre. Wilhem esquissa un pas dans ma direction et je reculais par réflexe avant de me figer, troublée. Un sourire amer glissa sur ses lèvres et il recula à nouveau pour s'asseoir sur le bureau. D'un geste, il m'invita à lui faire face. Je pris place sur le lit que j'avais quitté plus tôt, terriblement consciente de son odeur masculine omniprésente. 

- En somme-nous revenus là, Madeleine ? Murmura-t-il avec douceur.

Je détournais le regard en retenant mon souffle. Il reprit d'une voix douce.

- Votre... frère est passé.

Je relevais vivement la tête vers lui en inspirant brusquement.

- Il va bien, me rassura-t-il avec un nouveau sourire crispé.

- Comptez-vous me laisser le revoir ?

- Oui.

- Mais pas maintenant, compris-je.

- Non.

Les larmes m'assaillirent avec violence. Je battis des cils en regardant par la fenêtre, le cœur lourd.

- Madeleine, ce n'est pas contre vous.

Pour toute réponse, une larme glissa le long de ma joue.

- Auriez-vous préféré que je l'exécute ? Murmura-t-il.

- Non ! Protestais-je aussitôt.

Mon regard percuta à nouveau le sien. Son regard était torturé. Mais en l'étant aussi, j'étais incapable de lui venir en aide. 

- Alors, vous savez que c'est la seule solution, reprit-il. Je suis un officier de la Wehrmacht. Il m'a menacé en présence de témoin. J'aurais dû l'exécuter.

- Je sais...

- Vous comprenez donc ma décision ? Me demanda-t-il avec douceur.

Je me levais vivement, les mains serrés contre mon ventre. Wilhem se leva en miroir, me faisant tourner la tête vers lui. 

- La comprendre ne veut pas dire que je l'accepte, murmurais-je en me détournant. Je ne vous demande rien de plus que de le voir. Même en votre compagnie, rajoutais-je avec désespoir. Je ferais ce que vous m'ordonnerez...

Il esquissa un pas dans ma direction mais finit par dériver vers la fenêtre. Son corps se raidit alors qu'il inspirait profondément.

- De quoi avez-vous peur, Madeleine ?

Je papillonnais des cils en serrant à nouveau les mains contre moi.

- Vous me le demandez vraiment ? Soufflais-je avec audace.

Il me fit à nouveau face et arqua un sourcil, impassible.

- Vous... Vous devez encore me sanctionner.

- Je vous ai dit que vous ne craignez rien avec moi, claqua-t-il.

- Cela n'empêche pas que vous avez droit de vie et de mort sur moi, répondis-je sur le même ton.

Un sourire railleur glissa sur ses lèvres une fraction de seconde. Il soupira à nouveau puis replongea un regard inquisiteur dans le mien.

- Pensez-vous réellement que la toute-puissance du IIIème Reich est inébranlable ?

- Vous êtes là, non ? soufflais-je. N'en est-ce pas une preuve tangible ?

Il garda le silence en continuant de me fixer puis tourna la tête vers le ciel.

- Puis-je vous faire confiance, ma douce ?

- Ne vous l'ai-je pas prouvé en vous soignant ? Murmurais-je. 

- Touché, sourit-il à demi.

A nouveau, le silence reprit le pas sur notre échange. Lentement, Wilhem fit demi-tour et regagna la chaise devant le bureau, le regard toujours rivé au mien.

- Avez-vous déjà douté de votre armée, Madeleine ?

Je fronçais les sourcils en me levant à mon tour. En réponse à son geste précédent, je me postais près de la fenêtre pour réfléchir à sa question. Le vent me souleva légèrement les cheveux. Un frisson me parcourut le corps alors que je me tournais vers lui en secouant la tête.

- Je devrais répondre "non" mais...

Je lui lançais un regard évident. Mais vous êtes là. Il esquissa un nouveau sourire.

- Vos généraux ont fait fi de notre histoire commune, souligna-t-il.

- Nous avions fortifié nos frontières, me rebellais-je.

Il inclina la tête en me fixant avec une expression amusée, me faisant rougir. Je retombais dans le silence alors qu'il desserrait lentement la cravate de son uniforme.

- C'est donc un non ?

- Où voulez-vous en venir ? Me rebiffais-je sans le quitter des yeux. 

Il déposa le bout de tissu sur le bureau dans son dos et déboutonna les premiers boutons de sa chemise. Malgré la proximité que nous avions partagé ces derniers jours, le voir se dévêtir consciemment alors que j'étais avec lui me troublait davantage que de l'avoir vu torse nu inconscient. 

- La victoire de l'Allemagne était promise au peuple, à "l'histoire", ricana-t-il. Mais pas aux hommes. Paradoxalement, vous pouvez douter de tout sauf des hommes. Pourtant, vous clamez haut et fort que l'Allemagne a triomphé glorieusement tout au long de cette nouvelle guerre et s'impose en conquérante sur vos terres, sur vos richesses et parfois.. sur vous, admit-il. Comme un empire à la soif insatiable.

- N'est-ce pas le cas ? Demandais-je avec précaution.

- Quelle est la victoire quand les pavés sont noyés sous le sang de frères et de fils qui meurent pour une rue d'une ville déjà rasée, un bois inaccessible ou un puits dans le désert ? Soupira-t-il en détournant les yeux. L'armée allemande n'a pas connu que des victoires tout comme la France n'a pas eu que des défaites, Madeleine. Votre vision de cette guerre doit être plus large pour pouvoir la comprendre.

- Le résultat ne reste-t-il pas le même ? Me troublais-je. Je suis ici avec vous et vos hommes, sous vos ordres et ceux de votre... Reich, finis-je avec un frisson.

- De grès, j'espère ?

J'écarquillais les yeux et entrouvris les lèvres en blêmissant. Wilhem inclina une nouvelle fois la tête, une lueur amusé au fond des yeux.

- Vous flirtez avec le danger, ma douce...

Mon souffle s'emballa alors qu'il se levait une nouvelle fois. Puis d'un pas lent mais impérieux, il se rapprocha à nouveau de moi. Je reculais en réponse et heurtais bientôt le mur dans mon dos. Wilhem ne s'arrêta que lorsqu'il ne fut qu'à quelques centimètres de mon corps et m'adressa un nouveau sourire. Charmeur. Ô combien dévastateur. 

- Une réponse négative me forcerait à vous séduire pour vous faire changer d'avis, murmura-t-il d'une voix rauque.

L'air me manqua alors que je trouvais sans savoir comment la force de lui répondre.

- Encore une victoire allemande, alors ?

Il arqua un sourcil et un nouveau sourire étira ses lèvres. Son regard dévia légèrement tandis qu'il plongeait dans ses souvenirs. Il revint vers moi et commença sa confidence sans plus me lâcher du regard, observant la moindre de mes réactions. 

- Avant que ma compagnie ne se mette en garnison... avant mon arrivée ici, reprit-il plus simplement, j'étais sur le front lybien. Nous faisions route vers l'Égypte, épaulés par les italiens. Nous pourchassions les anglais. L'Afrikakorps chargeait au Nord pendant que cinq divisions devaient faire une tenaille en sur-nombrant une position.

Je ne tiquais pas devant son vocabulaire purement militaire. Il retint un sourire en remarquant que je le comprenais. Mais en travaillant dans un hôpital militaire... il fallait s'adapter. Il reprit du même ton bas, grave mais apaisant alors que ce qu'il me disait évoquait des émotions radicalement opposées. 

- Nous devions repousser l'ennemi vers le front marin et les piéger sur les bancs de sable à découvert. Exactement comme...

Sa phrase resta en suspens. Des histoires nous étaient parvenus des combats qu'il y avait pu y avoir ces dernières années. Et cette méthode était exactement celle utilisée... 

- A Dunkerque, finis-je dans un souffle.

Il franchit la distance qui nous séparait, posant une main sur le mur au niveau de mon épaule. J'étais prise au piège, entre son corps et la fenêtre. J'en avais une conscience aiguë mais fus incapable de bouger, incapable d'essayer de m'enfuir, hypnotisée par le militaire qui me surplombait maintenant de toute sa hauteur.

- Oui, admit-il. Comme en 1941.

- Alors... vous étiez avec... ce chasseur du désert ? Me troublais-je.

- Le renard du désert, me rectifia-t-il à voix basse. Le Generalfeldmarschall Rommel. Je suis toujours sous son commandement.

- Il est en France ? M'effrayais-je.

- Vous êtes bien curieuse...

- Je... Pardonnez-moi, murmurais-je.

Je me troublais mais Wilhem me devança alors que sa main encore libre venait repousser les cheveux de mon visage.

- Ne vous excusez pas, ma douce. Les informations se font rares. Votre curiosité est légitime.

- Vous étiez dans ces cinq divisions, Colonel ? Soufflais-je.

Il hocha la tête en replongeant dans ses souvenirs, jouant avec mes cheveux du bout des doigts.

- Nous faisions route vers le Nord. Nous devions passer Bir Hakeim, petite garnison de 3 700 hommes tout au plus sous le commandement du général Koenig, ricana-t-il avec amertume. La force de ses hommes se trouvait dans leur diversité. Des légionnaires, des volontaires... mais aussi des tirailleurs, des paysans. Ils avaient creusé des trous d'un mètre de profondeur et avaient posé un véritable champ de mine avant notre arrivée.

Il garda le silence un court instant puis reprit, tirant légèrement sur les cheveux qu'il n'avait pas lâché.

- La première charge fut lancée par une division italienne. Les mines et les canon anti-char ont donné le ton en stoppant net l'avancée de nos alliés. 33 blindés ont été perdu en 45 minutes. Notre moral en a pris un coup.

- Mais...

Il sourit en relâchant mes cheveux et laissa ses doigts s'aventurer sur mon visage. Il en dessina le contour jusqu'à venir effleurer mes lèvres, début d'un calvaire doux-amer.

- La bonne nouvelle est arrivée le lendemain matin : l'approvisionnement de Bir Hakeim avait été coupé. Notre offensive fonctionnait. Mais c'était sans compter sur une poignée d'hommes, une poignée de français...

Il s'arrêta mais j'inclinais la tête vers sa main pour l'inciter à poursuivre. Il le comprit et pencha son visage vers le mien, le regard incandescent.

- Ne jouez pas avec le feu, Madeleine... Je ne suis qu'un homme avec ses bas instincts. 

Avant que je ne puisse répondre, il poursuivit en glissant sa main sur ma nuque et me tira lentement vers lui. Je me laissais faire, à bout de souffle, à bout de nerf.

- Les troupes françaises - galvanisées par notre premier affrontement - pensaient avoir ce flegme qui ne leur ressemble pas. Ils ont lancé d'autres attaques contre nos forces en siège et ont détruit de nouveaux chars, décimant un peu plus nos rangs. Lorsque le 31 mai, je fis mon rapport par radio, le bilan était lourd. 41 chars étaient perdus et 250 soldats furent faits prisonniers contre seulement deux morts de leur côté. Je n'eus cette information que bien plus tard... Me croyez-vous si je vous dis que le Général a lui-même écrit à Koenig pour proposer une reddition sans effusion de sang ?

Je battis des cils, à sa merci.

- Cela semble... irréel, m'étranglais-je.

Inespéré. 

- Et pourtant, souligna-t-il.

Son souffle me balaya le visage. Je déglutis péniblement et dus m'accrocher à sa chemise en me sentant chanceler. Il ne bougea pas, se contentant de me laisser faire. Il avait eu le mérite d'accaparer toute mon attention et je me rendis compte que j'attendais après le dénouement de son histoire, un infime espoir se réveillant douloureusement en moi.

- Quelle a été sa réponse ?

- Une salve d'obus vers nos troupes ? Me proposa-t-il avec rhétorique.

- Typiquement français, souris-je malgré moi.

Je n'en savais en fait rien mais la touche d'humour fonctionna. Wilhem esquissa un sourire en appuyant sur ma nuque. Je penchais la tête en arrière alors qu'il reprenait, tout en s'inclinant sur mon visage.

- Chaque attaque, chaque charge furent inexorablement repoussées... par vos troupes. Toutes avec pertes et fracas. Pour un pauvre puits au milieu du désert. Huit jours après la première offensive, le général fut poussé à envoyer toutes nos troupes. Par orgueil. Par fierté. Je ne comptais plus le nombre de soldats que je perdais au fil des heures, murmura-t-il en se penchant sur mon cou.

Ses lèvres effleurèrent ma peau. Je fermais les yeux, me rendant compte de ce désir malsain qui nous consumait sur place. Pourtant, j'étais incapable de le repousser. Pire, j'en voulais davantage... Sa bouche remonta contre mon oreille et je m'alanguis dans ses bras, le corps pourtant tendu par cette lutte contre moi-même.

- Mais vous l'avez dit, murmura-t-il contre mon oreille, l'armée allemande ne renonce pas. Encore moins pour une petite troupe d'hommes moins bien entrainés, moins armés, sans plus aucun ravitaillement . Les attaques ont continué. Encore et encore. Le Führer lui même en fit une affaire personnelle et nous envoya des renforts. Le 10 juin, Rommel finit par nous laisser un jour de repos. Le constat restait pourtant inchangé : nous ne passons pas. Nous n'avançons pas.

Il laisse un temps de silence avant de reprendre, d'une voix mal maîtrisée.

- Le problème est que nous ne nous combattions plus contre des hommes mais contre des idéaux. Cette dangereuse fougue nous mena au bout de nos forces. C'était une véritable fureur dirigée contre nous.. 

Un frisson me remonta le long du dos alors que je pressais un peu plus contre le militaire. Une peur irrationnelle me broya de l'intérieur combattue pitoyablement par cet espoir infime que son histoire faisait naître pour notre libération. Pour la liberté de mon pays sous le joug du sien. Ses lèvres se posèrent avec douceur contre ma mâchoire. Je déglutis avec peine en rouvrant les yeux. Il me ramena fermement dans ses bras, raffermissant sa prise sur mon corps. 

- Ou plutôt devrais-je dire que "c'était de la fureur et c'était de l'extase", sourit-il contre mes cheveux.

- Hugo, murmurais-je.

- Il résume merveilleusement bien cette bataille, acquiesça-t-il.

Il reprit en tournant la tête vers moi. Son souffle me balaya aussitôt la joue, me faisant m'immobiliser.  

- "Ce qui dans ce combat te poussait, mais je dis ;

Que ton âme ignorante est une âme sublime.

Bonet brave, tu fais, dans le fond de l'abîme,

Deux pas, l'un vers ta mère et l'autre vers la mort..."

Il s'arrêta avant la fin du poème pour se relever légèrement. Je plongeais mon regard dans le sien et prononçais les derniers mots à sa place. 

-"L'enfant a la candeur et l'homme a le remord".

Cette fois, son sourire fut douloureux et me brisa le cœur. Je replongeais dans ses bras pour pouvoir frotter ma joue contre la sienne, reprenant ce contact interrompu entre nos peaux. La douleur qu'il avait dû ressentir me percuta de plein fouet. Je la comprenais même sans la vivre. La perte de ses hommes l'avait profondément marquée. Pouvais-je le blâmer d'avoir voulu exécuter les ordres de son armée alors que je ne le reprochais pas à cette unité - si isolée et pourtant si combative - contre laquelle il avait lutté ?

- Ce n'est que le lendemain que nous décidions d'envoyer les dernières forces dont nous disposions en une attaque massive. Nous fûmes accueillis par une place vide, ricana-t-il sans joie. Sans savoir comment, les forces françaises avaient réussi ce prodigieux coup de maître et s'étaient volatilisées sous nos yeux... Pouvons-nous appeler cela une victoire, Madeleine ?

- N'était-ce pas le cas ? Soufflais-je.

- Votre innocence est un baume au cœur, ma douce...

Je frissonnais à nouveau et Wilhem me serra plus fort contre lui.

- Nous avons perdu 3 300 hommes contre 130 pour l'armée française. Ce jour-là... J'ai douté de mon armée, Madeleine. Douté de mon engagement pour la Wehrmacht et de l'intérêt d'une telle victoire si elle avait ce prix là...

Je reculais légèrement la tête pour pouvoir plonger dans son regard, profondément touchée par sa détresse.

- Wilhem...

Un sourire mélancolique étira ses lèvres. Ses mains quittèrent soudainement mon visage, me faisant l'interroger du regard avec incompréhension. Il recula lentement pour remettre une certaine distance entre nous, luttant pourtant visiblement contre lui-même. Il se détourna pour rejoindre son bureau et posa les mains à plat sur le bois, le poids de la guerre lui pesant à nouveau sur les épaules et la tête basse.

- "Le vaincu pleure et le vainqueur est perdu", ricana-t-il sombrement. Plutarque avait raison, mein engel (mon ange). 

Je fermais les yeux en me laissant retomber contre le mur, le souffle coupé. Je les rouvris presque aussitôt pour fixer son dos, le coeur serré. Sa chaleur me manquait. Sa présence me manquait. Je baissais les yeux sur la chemise encore posée sur la fenêtre avant de revenir sur son dos. Il passa une main dans ses cheveux, se décoiffant sans le vouloir. Mon rythme cardiaque s'emballa dangereusement et je m'avançais, prenant la décision pour nous deux. Il resta parfaitement immobile alors que je rompais à mon tour la pauvre distance qui nous séparait. Lorsque j'arrivais dans son dos, j'hésitais. Mon souffle s'accéléra encore alors que je fixais l'allemand avec détresse et désir mélangés. 

Je posais une main dans son dos pour le prévenir de mon rapprochement physique. Il ne tressaillit pas mais tourna légèrement la tête sur le côté. Je laissais mes doigts remonter le long de sa chemise en me rapprochant encore jusqu'à presque le toucher. Il inspira brusquement, me faisant me figer contre lui. Quand il commença à se détendre, j'amorçais un nouveau mouvement pour le prendre dans mes bras. Mes mains glissèrent sur ses hanches, pour venir le ceinturer. Wilhem m'attrapa brusquement les poignets, me faisant sursauter contre lui. 

- Madeleine, me mit-il en garde. 

Pour toute réponse, je posais mon visage contre son dos. Il se figea à nouveau puis captura mes mains dans les siennes. 

- Madeleine, vous devriez partir... 

Je me serrais plus fort contre lui, l'angoisse m'emprisonnant violemment dans son étreinte. 

- Non, protestais-je.

Il me lâcha brusquement, le temps de faire volte-face. Puis ses mains s'abattirent à nouveau sur les miennes et son regard perçant me percuta de plein fouet. Je déglutis péniblement, le souffle toujours aussi court. Ses yeux se plissèrent comme s'il n'avait pas compris ma réponse. 

- Non ? Demanda-t-il en fronçant les sourcils. Je t'effraie, ricana-t-il. 

- Non ! 

Je baissais les yeux pour essayer de trouver mes mots avant de relever les yeux sur son uniforme. Je posais brusquement mes mains sur les rappels du IIIème Reich, omniprésents sur l'uniforme de l'officier supérieur. 

- C'est ça qui m'effraie ! M'exclamais-je en m'étranglant. Et ce qu'il permet de faire. Ce qu'il pourrait me faire ! Mais pas... pas toi. 

Ses pupilles s'assombrirent de désir. Ma familiarité soudaine devait y être pour quelque chose. Ses mains me lâchèrent à nouveau pour revenir sur mon visage, le prenant en coupe. 

- Pars, me supplia-t-il.

Je m'accrochais à ses avant-bras avec force, le cœur battant sourdement dans ma poitrine. 

- C'est ce que tu veux ? Soufflais-je avec douleur. 

- Je ne veux pas que tu regrettes, répondit-il durement. Je ne veux pas que tu aies honte de ce que tu ressens pour moi, Madeleine. 

- Ce n'est pas le cas, lui assurais-je avec difficulté. 

Il garda le silence en sondant mon regard, tiraillé. 

- Mais tu ne pourras jamais me retirer complètement cet uniforme. 

- Je sais... 

Quelque chose se brisa en moi à l'énoncé de cette simple vérité et des larmes m'assaillirent brusquement les cils. Wilhem fut aussitôt sur le qui-vive mais je le rassurais d'un sourire. 

- Tu peux toujours partir, m'assura-t-il avec réticence. Même si je veux tout le contraire, mon ange... 

Un vertige me saisit. Je m'accrochais davantage à lui, totalement soumise à mon désir. Pour cet homme. Pour ce soldat. Pour cet allemand. Je fermais brièvement les yeux alors que le visage familier de mon amour perdu s'imposait à nouveau à moi. 

- Tu ne peux pas être totalement à moi si tu penses encore à lui, souffla en écho Wilhem. 

Je rouvris les yeux pour le dévisager, muette. Une vive douleur brilla une fraction de secondes dans son regard, me remettant en mouvement au moment où il me lâchait. 

- Non ! Protestais-je à nouveau. 

Il me regarda sans comprendre. Ce fut à mon tour de poser mes mains sur ses joues et de me rapprocher. Je me hissais sur la pointe des pieds, le corps contre le sien. Puis posais ma bouche contre la sienne, mon rythme cardiaque dangereusement rapide. Wilhem resta immobile sans me rendre mon baiser. Ce fut alors à mon tour de me confier. 

- Je penserais toujours à lui, soufflais-je contre ses lèvres. Mais il fait partie de mon passé, Wilhem. Je n'ai pas honte de ce que je ressens pour toi, je... j'ai terriblement peur ! Parce que je ne sais même pas ce que je ressens. Parce que j'ai peur de... de ton départ, soufflais-je avec fragilité. Peur d'être la seule à ressentir tout ça. 

Je relevais le visage vers le sien sans le lâcher. Son regard me transperça, incandescent. Ses mains se posèrent avec possession dans mon dos. 

- Tu es allemand, ris-je avec angoisse. Je ne devrais pas faire ça mais je... ne contrôle pas ce que je ressens pour toi. J'ai peur de t'aimer, avouais-je enfin. Mais je suis davantage effrayée par le fait de ne pas prendre ce risque-là... avec toi. 


~ Et voilà le chapitre 15 ! 

Il m'a pris du temps mais n'en valait-il pas la peine ? Traditionnelles questions qui reviennent : 

Comment Wilhem va-t-il réagir ? Que va-t-il se passer entre Madeleine et le Colonel ? Madeleine pourra-t-elle faire face ? Et surtout, quoi qu'il arrive, comment se dérouleront les jours suivants - entre eux mais aussi avec les autres ? Wilhem doit toujours sanctionner sa belle infirmière... 

A vos claviers et vos souris ! Des bisouuus ~

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