Chào các bạn! Vì nhiều lý do từ nay Truyen2U chính thức đổi tên là Truyen247.Pro. Mong các bạn tiếp tục ủng hộ truy cập tên miền mới này nhé! Mãi yêu... ♥

Vaincre la peur

Un bruissement retentit dans le dos de Charlotte, et elle se tendit immédiatement, avant de se retourner, lentement, le regard rivé vers le sol. Mais il n'y avait rien d'autre qu'un écureuil s'échappant à toute vitesse vers l'orée des bois, son butin, quelques glands, bien sécurisé entre ses longues incisives. La jeune femme poussa un long soupire de soulagement, et la tension de ses membres se relâcha. Il n'y avait aucune raison pour que Sticks se trouve là, après tout. Depuis leur combat, Charlotte ne l'avait jamais recroisée. Mais son existence, sa présence, et la terreur que la fille de Jill avait ressenti en croisant son regard continuaient de la hanter. Elle craignait toujours de la voir dans un coin de son champ de vision. Elle avait peur de s'endormir, en sachant qu'elle la reverrait dans ses rêves. Les visions d'horreur que le simple fait de croiser le regard de Sticks avaient créées ébranlait encore Charlotte. Elle revoyait, encore, et encore, Yuu, dans ses bras, en train de mourir, de hurler de douleur, de se décomposer, de se désintégrer, sans qu'elle ne puisse jamais rien faire pour l'en empêcher. 

Parfois, dans ses rêves, c'était Cassandre qui prenait la place de Yuu. Et cela avait quelque chose d'encore plus dérangeant. 

Car Yuu était... partie, maintenant. Et ce, depuis plus d'une année, déjà, si les souvenirs qui étaient progressivement revenus à Charlotte ne la trompaient pas. L'explosion du Véloce l'avait emportée. Même Sticks ne pouvait plus rien changer à cela. Voir les cauchemars d'une personne déjà morte était une torture dont la jeune femme se serait bien passée, certes. Mais voir Cassandre à la place de Yuu créait une terreur très différente au creux du ventre de Charlotte. Cassandre, elle, était bel et bien encore en vie. Cassandre avait quitté la sécurité de monastère à cause d'elle. Et Cassandre était vulnérable... très, vulnérable. Si Sticks venait à réapparaitre... la possibilité que ce rêve devienne lui aussi réalité était palpable. La possibilité que Sticks tue Cassandre existait. Et l'idée que ce serait entièrement sa faute terrorisait Charlotte. Mais elle savait que si jamais elle devait de nouveau faire face à l'horrible créature qu'était Sticks... elle fuirait probablement. Elle était incapable de la vaincre, après tout. Elle était trop puissante, et Charlotte trop faible. Peu importe à quel point elle désirait protéger les siens... sa famille... ou même Cassandre... elle ne pourrait jamais rien y faire. L'écart était trop immense. C'était comme une fourmis s'imaginant capable de terrasser un éléphant. Durant leur combat, Charlotte n'avait pas été capable de faire la moindre chose. Elle n'avait fait que gêner Sélène dans son propre combat. Et Sticks n'avait fait qu'une bouchée d'elle. Un seul regard, et elle s'était retrouvée hors combat. C'était un miracle si elles s'en étaient tirées, grâce à ce pouvoir étrange qu'elle ignorait elle même posséder. 

Elle n'était pas sûre de parvenir à réitérer cet exploit lors de leur prochaine rencontre. Car la question n'était pas de savoir si il y allait en avoir une. Mais quand. Charlotte savait que, maintenant que Sélène avait retrouvé Sheira, elle n'allait pas se contenter de rester passive. Une expédition retour à Lyon allait avoir lieu. Sélène allait tenter de ramener Alice à la raison. De lui montrer les mensonges du Coven. Et Charlotte serait un argument de poids. Elle ne pouvait donc pas s'enfuir. Eviter cette inévitable nouvelle confrontation. Elle en avait déjà des sueurs froides. La terreur lui dictait de prendre ses jambes à son cou. De partir, le plus loin possible, de prier pour ne jamais, au grand jamais, recroiser la route de Sticks. D'emporter Cassandre avec elle, s'il le fallait... mais de fuir seule si cela était impossible. Charlotte se haïssait d'être aussi lâche. D'être aussi terrifiée. D'abandonner ses mères à leur sort, à Lyon, tandis que le Coven étendait son influence. Mais c'était plus fort qu'elle.

D'un simple regard, Sticks avait tué tout son courage. 

Un nouveau bruit fit sursauter Charlotte, qui se hérissa tout en se retournant pour réaliser avec horreur que, dans la pénombre de la nuit, derrière elle, se trouvait bel et bien une silhouette. Cependant, les deux immenses ailes qui semblaient peser sur les épaules de la femme qui lui faisait face la rassurèrent un peu, sans pour autant parvenir à faire ralentir les battements de son cœur. Ce n'était que Sheira... ce n'était que Sheira. Sticks n'était pas là. Sticks ne pouvait pas être là. 

-O-o-oh, p-p-pardon, je t-t'ai fait peur! Bégaya la dragonne.

-J-juste un peu surprise. Rétorqua Charlotte en jouant la dure, et en retournant à son observation de la vallée en contrebas.

-J- C'est- Je savais pas que tu étais r-r-réveillée, promis! Assura la dragonne en s'avançant un peu.

-Maintenant, tu le sais. 

Fini les grondements et l'immense corps de lézard. Quelques jours plus tôt, Sheira avait commencé à se métamorphoser, jusqu'à prendre cette forme plus humaine - et moins silencieuse. La couleur flamboyante de ses écailles était venue teindre de longs cheveux hirsutes de la même teinte. Son corps était pourtant musclé, large et imposant, et de ses épaules deux longues ailes continuaient d'exister. Ce n'était pas tout ce qu'il restait de sa forme initiale. Les longues cornes s'enroulant de chaque côté de son crâne, ses yeux flamboyants percés d'une fente, ses immenses canines, ses longues pattes griffues et sa queue qui fendait nerveusement l'air derrière aile étaient également restés. Apparemment, elle faisait sans cesse des allez retour entre cette apparence et sa forme de dragonne, selon un cycle régulier qu'elle ne contrôlait pas. Ce devait être assez pénible à gérer, de l'avis de Charlotte - surtout que sa forme draconique était particulièrement massive. Tout autant que sa forme humaine était timide. Et insupportable.

Charlotte soupira. Elle sentait que Sheira était encore derrière elle, immobile.

-Si tu n'as rien d'autre à dire, tu n'es pas obligée de rester. Grommela-t-elle.

-O-o-oh! P-p-pardon. S'excusa-t-elle. C-c-c'est juste que C-cassandre vient de s'endormir, a-a-alors...

Oui. Charlotte devait admettre que cela participait à la raison pour laquelle elle trouvait Sheira insupportable. Elle semblait s'entendre à merveille avec Cassandre. C'est comme si elle pouvait la comprendre sans même devoir passer par le complexe système de signes que Charlotte avait mis tant de temps à mettre au point. Et, de son côté, l'ex-nonne pouvait sentir qu'elle l'avait déjà rencontrée. Sheira représentait la première fois que quoi que ce soit du passé dont elle n'avait plus souvenir faisait surface. Il y avait un lien qui s'était forgé entre les deux femmes, à une vitesse impressionnante. Trop impressionnante. 

"C'est fichue dragonne n'est pas capable d'aligner trois mots sans bafouiller, et elle a réussi à devenir aussi proche de Cassandre en moins d'une semaine? Il m'a fallu des mois pour en arriver là!" S'insurgeait intérieurement la demi-démone. Elle avait l'impression que l'ancienne nonne blonde préférait la compagnie de cette créature hybride et bègue à la sienne. Et cela la frustrait grandement.

-Ben va voir Sélène si Cassandre dort. Grinça Charlotte. 

-E-e-elle d-d-dort aussi.

-Super... Soupira la demi-démone.

C'était stupide d'être jalouse pour une raison aussi ridicule. Mais Charlotte n'arrivait pas vraiment à s'en empêcher. Cassandre était devenu si dépendante d'elle qu'elle avait fini par en croire qu'elle lui était indispensable. Et, d'une certaine manière, ça ne lui déplaisait pas. Mais elle agissait comme une enfant à passer sa frustration sur la dragonne ainsi. 

-Viens. Concéda Charlotte en tapotant le sol à côté d'elle.

La queue de Sheira se mit à battre joyeusement, comme celle d'un chien, à l'exception que, vu sa taille et sa force, celle de la dragonne semblait bien plus dangereuse que celle d'un quelconque canidé. Elle s'approcha et vint se laisser tomber à côté de Charlotte, à une distance tout de même respectable, et dans un silence absolu. C'était un peu gênant... mais la demi-démone ne savait pas vraiment quoi dire pour lancer la conversation. Et puis, elle n'avait pas tant envie de parler que ça. Elle était encore secouée par ce rêve.

-T-t-tu n'arrives p-p-p-pas à... d-d-dormir? Demanda finalement Sheira, brisant le silence qui s'était étendu pendant maintenant plusieurs minutes.

Charlotte fronça les sourcils.

-Je n'ai pas besoin de dormir autant que de simples humains. Tu le sais pas?

-S-s-s-si! B-b-bien sûr! Mais... ç-ç-ça fait plusieurs nuit qu-que tuuuu ne... dors pas. e-enfin je crois! Je crois! J-j-e peux me tromper.

Elle ne se trompait pas. Depuis sa discussion avec Sélène le soir de leur arrivée, Charlotte avait du mal à dormir. L'idée de leur retour à Lyon la stressait. Celle de devoir recroiser la route de Sticks également. Son sommeil était toujours agité. Elle ne parvenait pas bien à se reposer. Elle pensait avoir été discrète à chaque fois qu'elle se réveillait en plein milieu d'un cauchemar horrible. Ni Sélène, ni Cassandre ne lui en avaient parlé. Mais peut être que Sheira était plus observatrice que leur deux autres compagnes. Ou alors elle avait l'ouïe fine.

-Oui, je ne dors pas très bien. Ya rien à y faire.

-O-o-oh. J-j-je vois. Concéda Sheira, avant qu'un nouveau silence s'installe.

Charlotte grimaça. Elle rechignait à parler de ça à cette lezarde bègue qui accaparait l'attention de Cassandre. Mais c'était elle, ou Sélène... et elle n'avait pas particulièrement envie d'entendre le ton moqueur de la petite fille quand elle viendrait lui demander des conseils pour faire fuir les cauchemars.

-Eh... finit-elle par dire, commençant, cette fois ci, la conversation. Tu... tu connais... une certaine Sticks?

La grimace qui fit Sheira était éloquente. L'air légèrement apeuré qu'elle afficha ne rassura pas non plus Charlotte.

-Ooh, oui, oui, terrible, terrible Sticks, la terreur in-in-incarnée, brrr... e-e-elle m'hérisse l-l-les écailles. 

-Oh... répondit Charlotte, la gorge serrée. 

-U-u-u-une fois, j-je l'ai frappée d'un c-c-coup de queue, et t-t-tu sais ce qu'elle a fait? Elle m'a mordue! Glapit la dragonne, une expression si outrée sur le visage que Charlotte ne put s'empêcher de pouffer. C-c-c'était p-p-pas drôle! Sa m-m-machoire en m-m-métal fait mal!

-Qu'est ce que tu as fait, alors?

-J-j-je l'ai secouée très fort. Elle a fini par voler et aller s-s-s'écraser contre un m-m-mur. B-b-bien fait. 

Charlotte ne put contrôler un nouveau rire. La scène semblait si loufoque que celui lui en faisait presque oublier qu'elle parlait de la même silhouette qui avait failli la déchiqueter. 

-Tu t'es souvent battue avec elle, alors... sourit légèrement Charlotte.

-Oooh, oui. B-b-beaucoup. D-d-depuis très longtemps. E-e-elle a toujours été ennemie de Dame Satan. 

-Ah oui, vraiment.

-Oui! D-d-dame Satan a m-m-même failli la t-t-tuer une fois. C'était... sanglant. C-c-c'est pour ça qu'elle a p-p-plus un d-d-de ses bras. Et p-p-pas de machoire. Enfin... a-a-avant qu'elle fabrique c-c-celle en métal qui mord fort. 

-Je vois... murmura Charlotte. Et... ses... yeux?

-Oh, ça, elle a t-t-toujours été c-c-comme ça. C-c-c'est f-f-flippant.

-Toi aussi, ça te fait peur?

-O-o-oui! Evidemment! J-j-juste le fait de c-c-croiser ses yeux fait très p-p-peur, c'est comme ça, c-c-c'est son p-p-pouvoir. 

-Mais... comment tu fais pour quand même te battre contre elle malgré ça?

-J-j-je regarde pas s-s-ses yeux? Répondit Sheira comme si c'était la réponse la plus évidente du monde, et une vague de désespoir envahit Charlotte.

-Je ne pourrai jamais me battre contre quelqu'un d'aussi fort en évitant en plus son regard...

-O-o-oh, non, c-c-c'est moi qui me b-b-bat contre elle d'habitude. D-d-donc je m'en occuperai. N'ai p-p-pas peur.

Cela suffit à Charlotte pour craquer.

-Mais j'ai peur! Je suis terrifiée! Je rêve encore et encore de ce qu'elle m'a montré, ça ne veut pas ressortir de ma tête! Je ne veux pas la recroiser! Je veux partir le plus loin possible d'elle, pour ne plus jamais avoir à revivre ça, je, je... 

Charlotte écrasa rageusement une larme contre sa joue.

-Je ne pense qu'à fuir, qu'à l'éviter à tout prix. Je suis une couarde! Je n'imagine pas un seul instant lui faire face comme toi, et... et pourtant... je ne veux pas qu'elle fasse du mal à qui que ce soit... je ne veux pas qu'elle s'en prenne à ma famille... Je ne veux pas qu'elle tue Cassandre! 

Un long silence s'ensuivit, uniquement percé par la respiration sifflante de Charlotte qui tentait de repousser la panique et la terreur qui l'envahissaient. 

-M-m-mais tu es... e-e-encore la, non?

-Ouais, et alors? Renifla Charlotte.

-B-b-bah... s-s-si tu étais vraiment c-c-couarde... t-t-tu te serai déjà enfuie.

-Mais!-

-C'est ce que f-f-font la p-p-plupart des gens qui c-croisent son regard...

-M... mais je suis quand même... au fond du trou. Je ne dors même plus à l'idée de la recroiser.

-P-p-peut être. M-m-mais pour t-t-ton âge, j-j-je trouve que t-tu lui résiste p-p-pas si mal. Sélène, elle, é-é-était bien plus... pire... quand elle a c-c-combattu Sticks pour la première f-f-fois, q-q-quand elle a s'est r-r-rebellée contre Morgane. 

-Vraiment? Demanda Charlotte, un peu sceptique. J'ai du mal à le croire.

Sheira rit légèrement.

-E-e-elle était e-encore jeune... ç-ç-ça a fait remonter beaucoup de s-s-souvenir de son enfance. Elle... était t-t-terrifiée. Elle venait dormir t-t-tout les soirs dans mon lit.

-Mais nan.

-S-s-si!

-Ca je lui ressortirai à l'occasion... parvint à ricaner légèrement Charlotte.

-T-t-tout ça p-p-pour dire q-q-que... Sticks n-n-nous fait voir n-n-notre plus grande p-p-peur, mais... ce n'est p-p-pas la réalité. C-c-ce n'est pas une v-v-vision du futur. C-c-ce n'est m-m-même pas une m-m-menace. Je pense qu'elle ne sait m-m-même pas ce qu'elle nous f-fait voir. T-t-tout ça, c'est dans notre t-t-tête. Il s-s-suffit de savoir s'en r-r-rappeler. 

-Et de dormir en faisant des câlins à une dragonne.

-D-d-d'après Sélène, ç-ç-ça marche très bien! Rit Sheira. 

Charlotte sourit.

-Merci pour ça. Je crois que j'en avais un peu besoin. Et... désolée.

-D-d-désolée p-p-pour quoi?

La demi-démone entrouvrit la bouche, mais se tut. Elle se contenta de sourire, avant d'ébourrifer la tignasse hirsute de Sheira.

-Pour rien. Je vais essayer de dormir. 

-B-b-bonne nuit.

En se glissant dans son sac de couchage, la sensation du réveil et du cauchemar revint cependant frapper Charlotte. Elle tourna la tête pour observer la silhouette de Sheira, à quelques mètres, se découpant sur le ciel étoilé. Puis, elle roula dans l'autre direction. Cassandre dormait paisiblement, son souffle repoussant à intervalle régulier une mèche de cheveux blonds. La gorge de Charlotte se serra. 

-Tu ne vas pas me quitter toi aussi, hein... murmura-t-elle.

Sa gorge se serra d'autant plus. Elle craint qu'une larme ne lui échappe. Charlotte tira son matelas pour qu'il se retrouve côte à côte de sa blonde endormie. Et se mit à la fixer. A l'observer. C'était... glauque, pensa-t-elle en son for intérieur, d'observer ainsi quelqu'un en train de dormir. Mais elle ne parvenait pas vraiment à s'en empêcher. Discrètement, elle vint retirer la mèche rebelle du visage de l'ex-nonne. Cette dernière entrouvrit immédiatement les yeux.

-Ah... excuse moi. Murmura Charlotte. Je ne voulais pas te réveiller.

Les yeux encore gonflés de sommeil, les cheveux hirsutes retombant à moitié sur son front, Cassandre se mit tout de même à bouger légèrement. Une main jaillit de son cocon de sommeil... pour venir cueillir la perle en train de rouler le long de la joue de Charlotte. 

-Pardon... s'excusa de nouveau cette dernière. Je sais pas ce qu'il m'arrive ce soir, je-

Les bras de Cassandre ne la laissèrent pas finir sa phrase. Déjà, son visage était lové au creux de la poitrine de la blonde, cette dernière la serrant si fort... comme si, elle aussi, craignait de la voir partir. Charlotte sentit ses défenses céder, alors que de nouvelles larmes prenaient la place des précédentes.

-... on peut rester comme ça? Murmura-t-elle dans un sanglot.

Pour toute réponse, Cassandre affermit sa prise, et tira le corps de Charlotte un peu plus près du sien. Lovée ainsi, l'une contre l'autre, Charlotte laissa s'écouler ses peurs et ses pleurs. Peut être que la solution de Sélène était la bonne, après tout.


A quelques mètres de la, une silhouette s'éloigna dans l'obscurité. Sheira la sentit. Se tendit, et se leva. Tenta de sonder les environs, pour ne rien sentir. Jill, elle, s'éloigna à la hâte, confuse et perdue. Sheira était là. A sa portée. La meurtrière de Jenn, si proche, si proche de ses griffes, et pourtant... pourtant, Charlotte était là. Jill écrasa une larme en courant plus loin, plus vite. 

Sa fille. Sa petite fille chérie. Elle était en vie. Elle était en vie! Et aux mains... de cette monstre de Sheira!


***


-Est-ce que ton Tom... sait qu'on est là?

-Ce n'est pas mon Tom. Grinça Alice, en réponse à la question que Nokomis venait de lui poser d'un air innocent. Et non. Il considère peut être que son père est stupide de ne pas nous parler de l'enquête, mais il ne serait pas pour autant d'accord pour que l'on... 

-Rende visite à une scène de crime de manière tout à fait illégale et en pleine nuit? Compléta Nokomis.

-Ouais. Admit Alice en grommelant.

Nokomis eut un rire gras, ce qui lui attira les foudres d'Ester. 

-Nokomis! Silencio! Le but n'est pas de se faire remarquer. 

La concernée roula des yeux, mais s'exécuta pour autant. Les ruines de l'ancien entrepôt effondré se trouvaient à presque une heure au sud de Lyon. Et, à première vue, tout ce qui en restait n'était que cela. Des ruines. Un monceau de gravats dans lequel il semblait peu probable de trouver quoi que ce soit. Le corps de Dylan Zebros avait déjà été emmené pour autopsie. La police continuait de fouiller l'endroit pour la forme, le lieu était donc toujours interdit au public. Mais la sécurité n'avait pas été la préoccupation principale... après tout, le lieu semblait de toute évidence peu fréquenté d'habitude, et les forces de l'ordre n'avaient pas de raison de penser que cela allait changer. Il n'y avait donc personne pour garder l'endroit une fois la nuit tombée. L'occasion parfaite pour venir effectuer une petite fouille. Bien qu'Alice, de son propre aveux, ne savait pas vraiment à quoi s'attendre de cette expédition.

-Il n'y a plus rien, de toute façon. Soupira-t-elle. Qu'est ce qu'on espère trouver ici, au juste?

-Des choses que la police n'aurait pas vu. Ou n'aurait pas pu voir. Rétorqua simplement Nokomis, très intéressée par les quelques gravats qui se trouvaient devant elle.

-Quels genre de choses?

-On le saura si on en trouve.

-C'est encourageant.

Nokomis roula des yeux, et lança à Ester:

-Tu veux bien t'occuper de la gamine? Elle me tape sur les nerfs.

-Non merci. Rétorqua Ester. Moi et les niños, ça ne fait pas bon ménage. 

-Hilarant. Railla Alice, non sans bouder légèrement.

Ester s'approcha d'elle avec un sourire qui se voulait peut être compréhensif, mais qui apparaissait comme légèrement condescendant. 

-Alice, mi querida Alice... J'admets qu'en ce qui concerne les histoires à dormir debout du Coven, et quand il s'agit de trancher quelques gorges, je te fais entièrement confiance. Mais, les enquêtes, c'est un peu notre truc, donc laisse nous un peu faire. Si?

Ça ne plut pas particulièrement à la jeune femme. Mais, d'un autre côté, elle ne su pas vraiment quoi répondre non plus. Après tout, il était vrai que sans Ester et Nokomis, elle ne serait pas allée bien loin. C'était elles qui faisaient le plus gros du travail d'enquête lorsqu'il s'agissait de débusquer les rats du Réseau. Elle, ne faisait que venir faire le ménage après. La toile d'informateur d'Ester avait l'air sincèrement impressionnante... au point qu'Alice en avait presque oublié qu'elle était, à la base, une femme de terrain. 

Mais que pouvaient-elles espérer trouver au milieu de tout ces gravats? Au milieu de ces monceaux de tôles et de béton? Jill avait réussi à passer sous tous les radars pendant presque un an, et Alice doutait qu'elle soit soudainement plus facile à retrouver simplement parce qu'elle s'était laissée aller à réduire un bâtiment en miette. D'autant que cela devait bien faire plus d'une ou deux semaines depuis son passage. En somme, Alice n'avait pas grand espoir. Et quand bien même elles parviendraient à retrouver Jill, après quoi? Sa tante avait fui. Il était évident que, si elle avait voulu revenir, elle aurait pu. Alice n'allait pas la mutiler pour la forcer à revenir non plus. Cependant, si Jill avait réussi à trouver la trace de Sheira... mais cela semblait si improbable. Comment sa tante serait-elle parvenue à mettre la main sur l'élusive dragonne?

-J'ai.

La voix de Nokomis, un simple murmure pourtant, sembla résonner longuement dans la ruine. Alice se tourna instantanément, se jetant presque sur la rousse. 

-C'est quoi??

-Eh, tout doux. Grogna Nokomis, en ouvrant tout de même la main, laissant apparaitre... deux fils?

Alice dû cacher sa déception. Mais Ester, elle, qui avait bien plus pris son temps pour arriver, eut une expression appréciatrice.

-Perfecto.

-Perfecto de quoi? Bougonna Alice. On va pouvoir savoir de quelle couleur elle était habillée, super.

-Ce qui est toujours utile quand on cherche quelqu'un. Contra Ester. 

-Surtout que je pense savoir de quel genre d'habit peut provenir ce genre de fils. Ajouta Nokomis. Ça me rappelle le genre de fils issus des tenues des cuisiniers de meth des pays-bas sur lesquels on avait enquêté. Tu te souviens, Ester?

-La tenue des... tu penses à une blouse blanche? C'est étrange, je n'imagine pas Jill en train de réduire ce bâtiment en charpie habillée en chimiste. 

-C'est peut être... une trace laissée par les experts? Hasarda Alice.

-Les flics se trimballent pas dans des vêtements qui pourraient contaminer leurs lieux d'enquête. Fit remarquer Nokomis. Serait un peu contre productif. 

-Peut être que d'autres personnes sont passés sur les lieux autre que Jill et les enquêteurs. Soupira Ester. Continuons de chercher. 

Mais Alice, elle, venait d'avoir une idée. Un peu saugrenue, certes, mais une idée tout de même. Et si... non, ça ne faisait pas de sens. Mais en même temps... La jeune femme fronça les sourcils. Et s'éloigna du bâtiment effondré. Elle avait besoin de prendre un peu de distance. Et de hauteur. Elle trouva une petite butte, à une cinquantaine de mètres de l'ancienne entrée de l'entrepôt. De là, il apparaissait plus clairement à quel point le bâtiment avait comme implosée, avec les fragments de mur et de toit éparpillés tout autour de la carcasse. Le cerveau d'Alice se mit à tourner à toute allure. Jill. Le fait qu'elle trouve la trace de Dylan Zebros seulement maintenant. L'ancienne cachette de Sheira. Sélène. Et Charlotte, qui l'accompagnait dans les montagnes. Il y avait un lien, un lien entre tout cela. Et ce lien ne tenait qu'à ces quelques fils sur lesquels Nokomis avait mis la main. Les paroles de la Suomen la frappèrent soudain.

Une blouse aussi est un habit fait pour éviter de contaminer des lieux. Ce n'est pas normal qu'elle laisse des fils derrière elle. A moins que ce soit un très ancien habit, ou... que ces fils aient été laissés là volontairement...

Alice se retourna soudain. Derrière elle, dans le large terrain vague dans lequel la nature avait depuis longtemps repris ses droits, il lui avait semblé ressentir une présence. Comme si quelqu'un l'épiais... mais cette présence s'était comme volatilisée en un instant. La jeune femme plissa les yeux, espérant réussir à capter la moindre présence dans les environs, sans succès. Cependant, un détail attira son attention. 

Sous la lumière des astres, quelques gouttes semblaient flotter en suspension, un peu plus loin sur le terrain vague. Prudemment, Alice s'en approcha. Pour réaliser que l'eau ne se contentait pas simplement de léviter. Elles étaient attachées à un fil. Un fil d'une finesse infinie, presque invisible. Mais quand la jeune femme y posa la main, ce dernier lui sembla plus dur qu'un cable en acier. Et sa couleur autant que sa texture faisaient penser... à de la soie. D'araignée, plus précisément.

Le fil semblait prendre son origine dans le fleuve lui même. Et, attaché au sommet d'une butte à son autre extremité, il semblait presque... pointer une direction. Vers les montagnes, qu'on distinguait à peine dans la pénombre nocturne.

-Quel message tu essaie de me faire passer cette fois ci, Wendigo? Murmura Alice pour elle même.

Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro