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Révélations

Cassandre passa un coup d'œil nerveux dans le couloir. Seul le silence et l'obscurité répondirent à son regard inquisiteur, alors elle se laissa aller à pousser un léger souffle rassuré en entrouvrant la porte de la chambre d'Ange, dont elle s'échappait. Enfin... non. Pas Ange.

Charlotte.

C'était cela, son véritable nom. Cassandre aimait beaucoup sa sonorité. Elle aurait aimé pouvoir le prononcer pour en savourer les sons... mais, de toute évidence, son infirmité rendait cela impossible. Avant de refermer la porte dans son dos, la jeune nonne jeta tout de même un dernier regard au corps prostré sur son lit de celle qui avait été auparavant une fière jeune femme. Mais Charlotte... n'était plus la même, depuis cette soirée où Cassandre avait osé franchir le pas. Osé lui montrer son amour. Osé l'embrasser. Elle était sombre, déprimée. Ne parlait presque plus, ne se nourrissait presque plus, non plus. Ses sourires, auparavant assurés et confiants, n'étaient plus que l'ombre de leur splendeur passée. Elle en flashait tout de même à Cassandre, à chaque fois que la jeune nonne lui rendait visite, mais il était évident que le cœur n'y était pas. Car, quel qu'ai été le souvenir que Charlotte s'était remémoré ce soir là, il l'avait détruite, à l'intérieur. Et sa condition avait empiré. Le moindre mouvement semblait la faire terriblement souffrir, et seul l'air du jardin parvenait à l'y soustraire. Mais chaque pas semblait lui causer une telle douleur que le trajet depuis sa chambre à l'extérieur était un périple que Charlotte n'était plus capable de parcourir. Alors, elle restait enfermée dans sa chambre, à se noyer dans ses pleurs, seule... La mère supérieure avait conseillé à toutes de la laisser tranquille, mais Cassandre, elle, continuait de venir la voir, même s'il ne subsistait plus qu'une ombre de la femme qu'elle aimait.

Et puis, il y avait... ça. Ce qui était arrivé ce soir là. La créature en laquelle Charlotte, emplie de douleur, s'était transformée. Cette amalgame affreux de gueules silencieuse, ce liquide visqueux qui semblait se solidifier à intervalle régulier, et faire partie intégrante de son corps, comme une extension d'elle même. Et, pour finir, ces yeux noirs... ces pupilles dont le noir d'encre semblait s'être échappé, noyant le blanc, les paupières, le visage, en veinules couleur obsidienne qui pulsaient au rythme de la douleur qui semblait habiter Charlotte. Cassandre ne lui avait pas évoqué ce qu'elle avait vu. Il n'y avait pas assez de signes dans leur petite langue rudimentaire pour exprimer et décrire tout ce qu'elle avait vu, et poser les questions qui lui envahissaient l'esprit à Charlotte. Cette dernière ne semblait de toute façon pas en état de vouloir lui répondre...

Cassandre traversa furtivement quelques couloirs, avant de soudain s'interrompre, en apercevant une silhouette, attendant impatiemment devant la porte d'une chambre. Sa chambre. Cassandre s'abaissa un peu pour mieux observer, cachée derrière le coin du couloir. La mère supérieure était là, tapant du pied sur le sol, et jetant des regards courroucés dans toutes les directions, comme si elle cherchait quelque chose, ou... quelqu'un. Cassandre déglutit. Elle savait qu'elle n'était pas sensée aller voir Charlotte ainsi, durant la nuit. Elle savait aussi que la mère supérieure considérait qu'elle avait une mauvaise influence sur elle. Et en toute honnêteté, la mère supérieure n'avait probablement pas tort. Après tout, c'était uniquement depuis que Charlotte était arrivée au monastère que des sentiments interdits avaient commencés à naître dans le cœur de Cassandre. Des sentiments malsains. Des sentiments punis par Dieu.

La mère supérieure en avait parlé plusieurs fois, disant qu'elle savait que certaines nonne s'adonnaient à des relations illicites et impures. Auparavant, Cassandre avait toujours été horrifiée d'apprendre que certaines de ses co-congrégationnaires pouvaient succomber à des telles pratiques. Mais c'était avant... Charlotte. Son expression hautaine si prenante. Ses yeux noirs envoûtant, ses manières parfois rudes, mais cachant une gentillesse infinie... Elle avait tant fait pour Cassandre en si peu, plus que qui que ce soit d'autre depuis les longues années que Cassandre avait passées au monastère. Elle lui avait proposé son amitié, l'avait suivie, protégée contre les médisances, et avait même trouvé un moyen de lui permettre de communiquer. Jamais Cassandre n'avait été le sujet d'une telle attention désintéressée. Pas même de la part de la mère supérieure, qui avait pourtant tant fait pour elle.

Cassandre soupira... devait-elle faire face à la vieille femme? Celle qui l'avait recueillie, alors qu'il ne restait plus rien de ses souvenirs, de sa vie d'avant? Celle qui l'avait nommée en honneur de leur sainte, l'avait couverte de ses attentions pendant tant d'années? La jeune nonne hésita à s'avancer dans le couloir, et à accepter le châtiment que la mère supérieure déciderait à son sujet, pour lui avoir désobéi. Mais elle se retint. Certes, cette femme avait tant fait pour elle, mais... Charlotte avait raison sur un point. Elle tentait de la maintenir isolée. Cassandre en avait conscience, jusqu'ici, à un certain niveau, mais pensait que c'était dû à son statut spécial que la mère supérieure la gardait à l'écart des autres religieuses.

L'arrivée de Charlotte lui avait prouvé qu'il n'en était rien. Que la mère supérieure n'avait pas les intérêts de sa jeune protégée à cœur, en lui refusant de communiquer avec le reste du monastère. Cassandre ne pouvait vraiment expliquer les raisons qui avaient poussées la vieille femme à agir de manière aussi égoïste, mais elle était certaines que ce n'était pas parce qu'elle était guidée par Dieu. Alors, la jeune blonde fit un pas en arrière, puis deux. Avant de partir dans la direction opposée à sa chambre, vers le cloître et les jardins. Elle ne pourrait pas échapper indéfiniment à la mère supérieure, mais elle ne comptait pas lui donner la satisfaction d'aller se rendre directement à elle, comme elle l'aurait fait avant. Désormais, Charlotte comptait plus.

Charlotte... était-ce une épreuve envoyée par Dieu? Pourquoi fallait-il que ces sentiments interdits aient fini par prendre corps dans le cœur de Cassandre? Et pourquoi pour cette femme? Car... Cassandre en était persuadée, Charlotte n'était pas une humaine. Elle était une démone. Les mêmes évoqués dans la Bible, et ayant vendu leur âme au seigneur des enfers pour tenter les humains. Elle avait été tentée, elle aussi... attirée par tant de gentillesse, elle avait succombé aux charmes de Charlotte. Avant de découvrir sa vraie nature? Non, elle s'en était doutée auparavant... elle avait vu la noirceur d'encre de son regard, lorsqu'elle s'énervait contre la mère supérieure. Elle avait vu la lueur particulière qui brillait au fond de ses iris. Et le contact particulier de sa peau contre la sienne n'avait rien de comparable au toucher des autres femmes du couvent. Mais que Cassandre pouvait-elle faire? Elle était folle de Charlotte. Elle avait failli à ses vœux. Et elle avait déçu la confiance qu'avaient placés autant la mère supérieure que Dieu en elle. Mais cela la déchirait de réaliser qu'elle ne s'en voulait même pas pour cela.

Finalement, elle était indigne de porter le nom de Sainte Cassandre, la grande chasseuse de démon. Elle, elle n'avait fait que de céder aux charmes de l'un d'entre eux, et se retrouver incapable autant de s'en libérer que de la dénoncer.

L'air frais des jardins permit à Cassandre de se calmer un peu. Il s'était passé tant de choses en si peu de temps, après tout... le milieu du couvent était pourtant si paisible et monotone, d'ordinaire, que Cassandre n'avait jamais cru que quoi que ce soit puisse venir briser la succession infinie des jours ressemblant autant au précédent qu'au suivant. Et pourtant, tout changeait... Charlotte... la mère supérieure... et surtout, elle même. Elle marcha jusqu'à l'extrémité du jardin, loin, très loin de la pointe de l'église du couvent derrière elle, jusqu'au mur d'enceinte légèrement écroulé qui surplombait la falaise descendant à pic dans la Méditerranée en contrebas. C'était ici que s'arrêtait son monde. Elle n'avait jamais rien connu d'autre que ce petit bout de terre battu par les flots. Elle ne parvenait même pas vraiment à imaginer à quoi devait ressembler le reste du monde. Peut être l'avait-elle su, avant que sa mémoire ne lui soit ôtée, et qu'elle finisse ici? Elle n'en savait rien. Après tout, elle n'en avait plus aucun souvenir.

-Belle nuit, n'est ce pas?

Cassandre sursauta violemment, et manqua de tomber en se retournant soudain, et en trébuchant. Face à elle, de l'autre côté du mur écroulé, se tenant en équilibre sur quelques pierres laissant à peine assez de place pour y poser les pieds, se trouver une enfant. Cassandre cligna des yeux plusieurs fois, pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. Après tout, cet endroit était inaccessible depuis la falaise, et cet enfant ne provenait de toute évidence pas du couvent. Etait-ce une... apparition? Dieu lui envoyait-il un message? Où était-ce peut être un ange, venu la punir d'avoir nommé une démone Ange? Cassandre se contenta de tomber à genou en position de prière face à l'apparition soudaine. Qui ne réagit pas de la manière à laquelle elle s'était attendue.

-Je crains que je ne sois pas la digne cible d'une telle dévotion, ma chère Cassandre. Déclama l'enfant d'un ton bien trop mature pour son jeune âge. Cependant, j'ai besoin de ton aide, car, vois-tu, je ne peux pénétrer au delà de ce mur d'enceinte.

Surprise, Cassandre rouvrit les yeux et fixa l'apparition. La petite fille était d'une beauté rare, avec ses longs cheveux d'un blanc de nacre, les traits fins de son visage, ou la couleur mauve de ses larges pupilles dont le regard semblait transpercer la nonne. Elle avait une présence presque irréelle, comme si elle n'était en réalité par vraiment là... et surtout, son magnétisme avait quelque chose d'effrayant. Cassandre avait la sensation de devoir exécuter le moindre de ses vœux pour la rendre heureuse, pour satisfaire ces magnifiques yeux qui semblaient fouiller au plus profond de son âme, malgré l'étrange lueur qui y brillait... et la jeune blonde comprit.

Ce n'était pas Dieu.

Ni l'un de ses anges.

C'était une démone. Une semblable de Charlotte. Et elle devait être venue pour elle.

-Je crois que tu comprends ce dont je parle, sans même que j'ai à te l'expliquer. Observa l'enfant avec un regard empli d'une certaine forme de tendresse dont Cassandre ne comprit pas la cause. Tu as bien grandi, Cassandre... et mûri.

Une douleur frappa Cassandre au cœur. Une succession ininterrompue d'images envahit son esprit, avant de s'en soustraire aussi rapidement qu'elles étaient apparues. Et la jeune femme frissonna. Etait-ce... ses souvenirs? Contrairement à Charlotte, jamais, jamais n'avait-elle eu la moindre réminiscence de sa vie passée, avant le monastère. Et soudain, face aux mots de cette démone qui prétendait la connaître... depuis longtemps... pour la première fois, il lui semblait que cette porte fermée de son esprit s'était légèrement entrouverte.

-La curiosité est une bonne chose, Cassandre. La mis en garde soudain la démone. Mais prends garde à ne pas désirer certaines choses que tu pourrai regretter. Quant à moi, je te demanderai simplement, et humblement, de bien vouloir porter la dernière venue de votre couvent à moi. Il me semble qu'elle est prénommée Ange par vous.

Cassandre frissonna. Ainsi, le temps était venu. Les personnes qui aimaient Charlotte l'avaient retrouvées, et allaient la soustraire à ce lieu. La faire disparaître de sa vie. Et elle se retrouverait... de nouveau seule. La tristesse s'empara du cœur de Cassandre, et la démone sembla le réaliser.

-Je suis navrée de devoir ainsi t'enlever une amie, chère Cassandre. Expliqua-t-elle posément. Vois-tu, j'ai dû cacher cette jeune femme dans un lieu où ses ennemis ne pourraient jamais la retrouver, le temps qu'elle se soigne. Qu'elle... récupère. Qu'elle puisse prendre conscience de son passé, et l'accepter, également. J'aurai aimé lui laisser plus de temps, pour cela, mais malheureusement... eh bien, du temps est ce dont je manque, et j'ai besoin d'elle. Elle pourrait sauver... beaucoup de monde.

Cassandre hocha la tête, la gorge serrée. Qui était-elle, après tout, pour prétendre s'opposer à quelqu'un ayant connu la Charlotte d'avant? La mémoire lui reviendrait sans doute en la voyant. Et c'est tout ce qu'elle voulait, après tout. Retrouver sa mémoire, retrouver ses proches... retrouver sa vie d'avant. Sa vie qui n'avait rien à voir avec le monastère. Ce n'avait été qu'une étape... un havre de paix. Cassandre ne put s'empêcher d'être reconnaissante envers cette démone inconnue de lui avoir permis, au moins un temps, de rencontrer une personne aussi magnifique que Charlotte. La jeune nonne hocha la tête, et fit demi-tour pour se diriger vers le cloître, et la chambre de son amie. Il était venu le temps des adieux.


***


-Toi... s'emporta Charlotte lorsqu'elle se retrouva au fond du jardin, guidée par une Cassandre qui avait fait son possible pour porter ce corps abîmé jusque là.

-Oui, moi. Répondit Sélène.

Charlotte n'en revint pas. Cette enfant, qui avait aidé à débarquer les vivres du monastère à peine quelques semaines plus tôt, était... en réalité, maintenant que sa mémoire lui était revenue, Charlotte se rendait compte à quel point cela était évident. La ressemblance entre cette enfant et Alice était si frappante qu'elle ne pouvait être qu'une rejeton de Satan, sans le moindre doute, même si ses traits étaient plus doux que celle de la sœur de cœur de Charlotte. Cependant, après la compréhension, vint également la colère.

-Tu savais... éructa-t-elle. Depuis le début, tu savais. Qui j'étais. Et ce qu'il s'était passé! Et tu l'as caché! J'en suis sûre! Pourquoi, hein? Pourquoi?

Les yeux de Charlotte commencèrent à se noircir, et Cassandre, à ses côtés, frissonna. Mais Sélène se contenta de soupirer.

-J'aimerai avoir eu la possibilité de faire les choses autrement, Charlotte. Mais tu avais besoin de temps. Pour cicatriser...

-Pour cicatriser... ha... haha. Le bateau, l'explosion... Ils sont... ils sont tous morts! Morts! Joseph! Roméo! Fatimah! Alexandre! Yuu! Alice! Et-et... et je suis sensée cicatriser? Je suis sensée croire que je me suis retrouvée sur ce foutu caillou, à me demander ce qui avait bien pu m'arriver pendant si longtemps, à croire que personne ne me cherchait, ou ne parvenait à me trouver, juste pour que je cicatrise?

-Charlotte. Tenta Sélène d'une voix apaisante. Je peux tout t'expliquer, mais pour cela, il faut que tu sois prête à m'écouter. Et que nous partions d'ici.

-Je ne veux pas t'écouter! S'emporta Charlotte, sa part démoniaque reprenant le dessus. A quoi bon? Que tu me répète qu'ils sont tous partis? Que je ne les reverrai plus jamais? Je ne veux rien entendre de tout ça! Je ne veux... je ne veux...

Cassandre posa une main qui se voulait apaisante sur l'épaule de Charlotte. Et cela sembla fonctionner. La noirceur des yeux de cette dernière se résorba, et elle s'effondra simplement en larme dans les bras de la jeune nonne.

-Charlotte... commença Sélène.

-Va te faire foutre. Qui que tu sois vraiment, va te faire foutre. Je ne vais pas partir. A quoi bon... tout ça ne sert plus à rien.

-Bien sûr que non, Charlotte. Il reste des gens à sauver! Pense à tes mères, qui se demandent où tu es. Pense à Jenn... pense à Alice...

-Je m'en fiche. Sanglota Charlotte. Plus rien n'a de sens, de toute façon...

-Tu ne le penses pas...

Non, elle ne le pensais pas. Elle savait que ses mères devaient se faire un sang d'encre. Tout comme Jenn... et tout comme Alice. Mais la douleur était trop grande... savoir que plus jamais elle ne reverrait tous ceux auxquels elle tenait autant que la prunelle de ses yeux, c'était trop. Elle n'était pas capable de le supporter seule, elle n'était pas capable... de le vivre sans les bras de Cassandre, qui l'enserraient avec tendresse.

-Non... je ne le pense pas... admit finalement Charlotte. Allons-y, alors...

-Merveilleux. Répondit Sélène.

-Mais uniquement si Cassandre peut venir aussi.

Sélène sembla sincèrement surprise, tout comme Cassandre, dont l'émotion serra la gorge.

-Je crains que ça ne soit pas possible... répondit Sélène.

-Ce n'était pas une proposition, c'était une condition. Rétorqua Charlotte. J'ai promis de la tirer d'ici, et je compte bien le faire.

Sélène poussa un long soupire, et se pinça l'arête du nez.

-Le cas de Cassandre est différent du tiens, Charlotte. Chaque seconde qu'elle passe hors de ces murs représente un danger immense autant pour elle que pour le reste du monde.

-Qu'est ce que tu me chantes là? Gronda Charlotte.

-C'est... long à expliquer...

-Nous aurons tout le temps sur le trajet pour Lyon. Coupa Charlotte.

-Abysse, vas-tu m'écouter? S'emporta Sélène. Cassandre est une clef qui, entre les mains de personnes mal intentionnées, pourrait tout simplement raser ce plan d'existence! Pourquoi crois-tu que nous l'avons caché dans le seul endroit qui soit inaccessible aux démons?

-J'y ai accès, pourtant. Fit remarquer Charlotte.

-Tu n'es qu'une demi démone, et fille d'une démone mineure! Et encore, je suis sûre que tu t'es maintenant bien rendu compte de l'effet délétère qu'ont les pierres du monastère sur toi! Seul mon sort d'oubli t'a permis d'y entrer en premier lieu, et maintenant, l'endroit va te le faire regretter de plus en plus.

Un silence passa. Et les yeux de Charlotte se noircirent à nouveau.

-Attends... comment ça, sort d'oubli?

Sélène poussa un nouveau long soupire.

-C'était partie intégrante du processus de cicatrisation... et aussi pour te garder en sécurité ici. Ne m'en veux pas, la situation était... désespérée.

Charlotte eut un rire cynique particulièrement désagréable. Elle attrapa Cassandre par l'épaule, avant d'éructer.

-Et elle, c'est aussi un sort d'oubli que vous lui avez lancé? Hein?

Sélène hésita un court instant. Avant d'admettre.

-Oui. A sa demande.

Les yeux de Cassandre s'écarquillèrent, tandis que ceux de Charlotte s'enflammèrent.

-Ah, oui je vois le genre. Eh bien, je te propose de nouveau d'aller te faire voir, du coup. Et nous allons partir d'ici, toutes les deux, que avec ou sans toi! Je ne voudrai pas que tu te décide soudain de nous effacer de nouveau la mémoire sur un coup de tête!

Et sur ces paroles, Charlotte fit demi-tour, d'un pas rageur, se dirigeant vers le cloître et entrainant Cassandre, encore hébétée, à sa suite.

-Tu as quelque chose à emporter? Demanda la brune alors qu'elles tournaient au coin d'un couloir, ignorant la douleur qui irradiaient des pierres rejetant sa présence.

Cassandre secoua la tête, le regard vide. Alors, Charlotte s'arrêta pour lui faire face.

-Eh... j'ai retrouvé ma mémoire, d'accord? Alors ses sorts ne sont sûrement pas si efficaces que ça. On va sortir d'ici, et tout faire pour que tu retrouves la tienne. Et puis... n'importe où sera mieux qu'ici. Non?

Cassandre sembla hésiter. Tout était si soudain... avait-elle vraiment... la possibilité de s'enfuir, comme ça, après tout ce que la mère supérieure avait fait pour elle? Mais d'un autre côté... elle ne pouvait pas refuser quoi que ce soit à Charlotte. Et surtout... sa mémoire... son passé... son lien avec cette mystérieuse Sélène, et la clef qu'elle serait à l'apocalypse? Elle avait fini par abandonner l'idée d'un jour revoir ses souvenirs faire surface, et d'un coup... tant de choses lui étaient révélées sur elle même, sur son rôle dans ce monde, et, aussi, peut être, sur les raisons l'ayant poussée à venir se réfugier sur cette île. Cassandre déglutit. Elle s'approcha du visage de Charlotte, et y planta un nouveau baiser. La concernée sembla gênée... et une ombre de tristesse passa sur son visage. Mais Cassandre prit sa main. Elle ne savait pas si les sentiments qu'elle nourrissait pour Charlotte pourraient un jour être réciproques... mais elle décidait de les embrasser tout de même. Si tout cela était un test que Dieu lui avait laissé, alors elle venait probablement de définitivement y échouer. Mais, si c'était pour passer le restant de son éternité en enfer, au pays des démons, auprès de Charlotte, alors elle n'avait aucun regret.


***


-Bonjour, Madame Alice.

La jeune femme releva un regard légèrement hagard. Un infirmière venait de pénétrer dans sa chambre. Elle semblait jeune, avec de magnifiques yeux, et une chevelure impressionnante teinte en violet. Cependant, la lueur dans son regard n'échappa pas une seule seconde à Alice.

-Haha... une autre rejeton de cette salope qui me sert de mère... je vois, je vois. Ricana-t-elle froidement.

-Eh bien, au moins, je n'aurai pas à l'annoncer moi même. Déclara Morgane, souriant malicieusement en réponse.

Alice poussa un long soupire ennuyé.

-Bon, et du coup? Tu vas profiter du fait que je sois alitée et affaiblie pour m'achever? Très classique, assez ennuyeux. Déclara-t-elle avec un bâillement exagéré.

-T'achever? Voyons, jeune femme, pour quoi faire?

-Oh, je ne sais pas, ce serait la suite logique après que vous ayez tenté de m'empoisonner, après tout. Railla Alice.

-Oh, pitié, n'insulte pas ton intelligence, Alice. Tu vaux mieux que cela. Déclara Morgane en venant se placer au bout du lit. Si nous avions désiré te tuer, tu ne serai pas en train de me parler actuellement, et tu le sais aussi bien que moi. 

Alice ne répondit rien. Elle savait que c'était vrai, après tout. Alors elle se contenta d'attendre que cette femme lui apprenne ce pour quoi elle était encore en vie.

-Nous avons beaucoup de choses en commun, Alice. Reprit finalement Morgane. Plus que tu ne le penses.

-Ah. Permets moi d'en douter. Railla Alice.

-Vraiment? Pourtant, je dirai, en regardant ces photos - Morgane s'approcha des différentes images scotchées au mur que Jenn avait ramené depuis le réveil d'Alice pour égayer sa chambre - que tu aimes beaucoup porter des lentilles de contact noires. Pourquoi cacher la magnifique couleur mauve de ces yeux, hm?

Alice fronça les sourcils, et Morgane continua.

-C'est pour la même raison que je teins ces cheveux en violet, vois-tu. Je ne peux pas supporter d'avoir les même que ma démone de mère. Cette trainée qui a laissé ma mère mourir en couche pour aller fricoter ailleurs...

Morgane fit quelques pas vers Alice.

-C'est ça que nous avons en commun, Alice. La haine. Satan ne devrait pas pouvoir s'en tirer avec tout le mal qu'elle nous a fait. Et qu'elle a fait au reste du monde.

-Ouah... joli speech. Approuva Alice, avec un faux air d'appréciation. Mais aussi idéaliste que stupide. Satan est presque toute puissante, elle peut faire ce qu'elle veut, et rien ni personne ne peut l'en empêcher. On ne peut rien contre elle.

-Vraiment? Fit Morgane avec une expression espiègle. Eh bien, si tu le dis, je vais te croire... après tout, que vaut l'expérience d'une demi-démone avec quelques siècles d'expérience de plus que toi, au fond?

Un silence passa, et Alice fronça légèrement les sourcils.

-Même s'il y avait un moyen... je m'en fiche. Je déteste cette femme, oui. Mais je veux surtout ne plus jamais avoir rien à faire avec elle.

-Je vois. Et c'est tout à ton honneur. Mais peut être qu'un petit détail pourrait te faire changer d'avis à ce sujet...

-J'en doute beaucoup. Ricana Alice. Mais essaie quand même.

-Sais-tu pourquoi personne ne veux te parler d'Alexandre? De Joseph et de Roméo? De Fatimah? De Yuu et de Charlotte?

Le regard d'Alice s'assombrit, et sa puissance commença à s'écouler dans la pièce autour d'elle.

-Ne commences pas à me mentir, toi aussi. Déclara-t-elle. Je suis peut être alitée, mais pas suffisamment pour ne pas pouvoir t'arracher la tête.

Morgane soupira.

-Je sais que la chose est difficile. Mais... il est un moment où il faut l'accepter.

Morgane tira alors de sa poche la couverture pliée d'un journal, datant de plusieurs mois déjà. Alice se figea. La puissance qu'elle laissait s'échapper dans l'air environnant se dissipa. Et, dans son regard, rien d'autre que la peur ne subsista quand elle se saisit du bout de papier que lui tendit l'infirmière.

-Je sais que ce doit être dur... soupira cette dernière. Surtout en sachant que Satan, elle aurait pu éviter tout cela.

-Dehors... murmura Alice.

-Mais surtout, je suis étonnée que tes proches aient choisi de te cacher cette vérité aussi longtemps. Continua Morgane. Tu as le droit de savoir, après tout...

-DEHORS!

La voix d'Alice résonna de la violence non contenue de sa puissance. Les cloisons autour d'elle, ainsi que la vitre contre laquelle une pluie battante s'abattait, se fissurèrent. Morgane resta immobile un instant avant de s'éloigner. Cependant, au moment de fermer la porte elle glissa tout de même.

-Je suis navrée pour ta perte, Alice. Vraiment. Mais saches que, si jamais tu es intéressée... je sais qui est derrière tout ça. Ce n'est pas sans raison que je hais à ce point Satan.

La porte claqua. Et Alice, fébrile, fixa le bout de papier froisser, sans parvenir à accepter ce qu'elle y voyait. Les débris du Véloce, ainsi que les portraits des victimes dont les corps avaient été retrouvés. Ses mains tremblaient. Les larmes ne purent lui échapper plus longtemps... elle le savait, au fond... mais elle refusait de l'accepter. Elle refusait que ce soit la réalité. Elle refusait d'avoir laissé mourir tous ceux auxquels elle tenait, malgré sa puissance, malgré le sang maudit qui coulait dans ses veines. Un hurlement pris naissance dans sa gorge, et elle le laissa échapper sans retenue pendant de longues minutes.


A l'extérieur de la chambre, Morgane s'adossa contre le mur. Face à elle, Sigurdsson et Wendigo se tenaient, attendant comme une forme de compte rendu. La fausse infirmière se contenta d'un sourire satisfait, mais légèrement tremblant.

-Tant de puissance pure... murmura-t-elle. Elle est parfaite.

-J'ai senti ça d'ici. Approuva Wendigo. Brr... saletés de sangs purs.

Sigurdsson, lui, semblait perdu.

-Elle est vraiment... vraiment... une démone... murmura-t-il.

-Je te l'avais pourtant dit, Jules... lui susurra Morgane d'un ton doucereux. Ne me fais tu pas confiance?

-Si, si, je... je ne pensais juste pas que... c'est... c'est à cause d'elle que mon fils est... qu'ils ont visé le bateau où elle se trouvait.

Morgane poussa un soupire théâtral.

-Viens, mon beau Jules, je vais t'accompagner jusqu'à ton bureau. Tu as besoin de repos pour absorber le choc...

-N... non, c'est aimable, Morgane, mais je... je crois que j'ai besoin d'être un peu seul.

Et, sur ces mots, l'homme d'ordinaire si distingué et froid s'éloigna, le dos courbé et les yeux perdus dans le vague. Wendigo lui jeta un regard suspicieux.

-Je ne comprends toujours pas pourquoi tu impliques celui là. Déclara-t-elle.

-Il fallait bien quelqu'un avec le bras long pour avoir accès à Alice. Et puis... je crois que je commence à m'y attacher... quel bel homme, tout de même.

Wendigo poussa un long soupire.

-Moi, tu sais, les hommes...

-Oui, oui, tu ne les aimes que cuisinés à point, je sais. L'interrompit Morgane avant de courir à petite foulée pour rattraper le médecin.

-Ce n'est pas faux... admit Wendigo, pour elle même. Mais... hm... intéressant. Intéressant...


Bonjour, bonsoir,

De retour après une longue pause consacrée à l'écriture d'une autre histoire, "Allô Docteure" (que je vous conseille). Ce temps là m'a également permis de mieux saisir ce que je voulais faire de 1000 mètres sous la surface, et j'ai donc opéré à certaines modifications et réecritures dans les chapitres précédents pour mieux faire avancer l'histoire et approfondir le scénario. Il est possible qu'il vous faille relire certains passage pour tout saisir, en conséquence...

Débizous,

Mei

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