Chapitre 8

-Leia-

« Le mec que tu as préféré à moi » ne m'avait pas reparlé depuis ma gaffe de l'autre jour. Je ne savais pas du tout comment me rattraper. Je me sentais coupable. Pourtant, je n'aurais pas pu deviner qu'il n'avait pas de mère. En tout cas, il ne m'en avait jamais laissé l'impression. C'est avec ces mots dans ma tête que je me suis vraiment rendue compte que je ne savais presque rien sur lui. J'énumérais le peu de choses dans mon crâne.

C'était un homme ; il était corse du côté de son père ; il travaillait dans la musique, dans le rap plus précisément ; il était croyant, il avait trois petits frères et une petite sœur ; son père était à la retraite ; et il n'avait pas de mère.

Je me demandais ce que cela voulait dire... Qu'elle était morte ? Qu'il avait deux pères ? Qu'elle était partie quand il était petit ? Qu'il avait coupé les ponts avec elle ? Tant de questions pour si peu de réponses. Apparemment, c'était un sujet délicat.

N'empêche, je me demandais si je ne me faisais pas des films. Je ne savais même pas s'il habitait lui aussi à Paname. Non pas que j'avais de soucis avec les relations à distance... Voilà que je repartais dans mes délires. Quand il y avait une personne qui me plaisait un tantinet, sois peu, je m'imaginais trop de trucs. De plus, je ne savais même pas à quoi il ressemblait. Mais à l'écrit, il y avait un si bon feeling. N'empêche que cela faisait bientôt un mois qu'on parlait, lui et moi. J'avais commencé à m'attacher. Je rigolais bien avec lui.

Je reçus une notification d'Instagram, qui me coupait dans mes réflexions. C'était vrai ! J'avais complètement oublié avec cette histoire ! Mais la veille, il y avait eu un live sur l'Instagram de PNL. On pouvait y voir un vaisseau spatial envoyer des capsules sur terre. J'avais mis ma main à couper que c'était la tournée de Deux frères qui allait être annoncée. C'était le cas. Je ne tenais plus en place depuis. Un live YouTube avait ensuite remplacé celui d'Instagram où l'on pouvait voir les futures villes de la tournée : Nice ; Toulouse ; Lille ; Strasbourg ; Nîmes ; Paris ; Lyon ; Nantes. Apparemment, il n'y avait toujours pas de signal à Lyon et Nantes. Il fallait soit disant snaper les capsules pour avoir les premières places de la tournée.

Coup de bol ! Les coordonnées des capsules avaient été enfin communiquées sur Instagram. Je pétais un câble ! Je pris mon sac, mon portefeuille, mon manteau, mes clefs, me chaussais en vitesse, puis partis en claquant la porte. Je pris le premier métro en direction du Palais de Tokyo ! Je me demandais si ce ne seraient pas les seules places. Dans le doute, je redoublais d'efforts et courus dans les escaliers du métro. Je brûlais d'impatience. Je lançais Deux frères dans mes écouteurs, que je n'avais bien sûr pas oublié de prendre. Plus les minutes passaient, plus je sentais l'excitation remplir mon corps. J'allais péter une durite. Je ne tenais plus en place.

Au sein de la rame, je croisais le regard d'autres jeunes. Vu leur sourire et leur fond d'écran ou autres, ils étaient aussi là pour trouver la capsule. Je regardais les arrêts défiler. Quand je vis le nom de l'arrêt en question, je descendis limite en courant. Je vis un mouvement de foule se créer et partir dans la même direction que moi. Je compris très vite que c'étaient des fans de PNL, qui comme moi allaient chercher leurs places. L'adrénaline monta en moi. Un sentiment de bonheur me remplit. J'avais l'impression de faire partie d'une famille. On était QLF. Enfin, on pensait l'être. Quel plaisir de, de nouveau, ressentir ce sentiment. Je rayonnais. On accéléra de plus en plus le pas. Quand le Palais de Tokyo fut en vue, les gens s'étaient mis à courir. Je devenais folle.

Néanmoins, un problème pouvait s'imposer. Je n'avais pas beaucoup d'argent. En plus, on était en fin de mois, alors c'était la hess.* Mais je n'en avais rien à foutre, je mangerais le peu de choses qu'il me restait dans mon placard jusqu'à recevoir mes APL. Puisque si je devais aller voir PNL en concert, ce ne serait pas seule. Bien évidemment, j'irais avec mon frère ou rien. Le monde ou rien.

Je m'approchais de la capsule en souriant. Malgré l'excitation, les gens restaient très cordiaux. C'était chacun son tour. Un gars me laissa même passer avant lui. Je le remerciai avec un grand sourire. On y était. Je déverrouillai mon téléphone et ouvris snapchat. Je snapai la capsule, ce qui me redirigea vers une page pour acheter les billets pour l'AccorHotelss Arena le cinq et six juillet en avance. Je m'écartai pour laisser la place aux autres. Je rentrais vite mes coordonnées bancaires et pris deux places en fosse. Quand je reçus la confirmation des billets par mail, un énorme sourire vint trôner sur mon visage.

Ni une ni deux, j'appelais Thomas pour lui annoncer la nouvelle. Je tombais sur sa messagerie. Cela me fit froncer les sourcils. J'essayais de joindre mes parents pour savoir s'il était avec eux.

« - Allô ? Mamma ? C'est moi pulcino.

- J'ai vu. Qu'est-ce qu'il y a ma carissima ?*

- Je cherchais à joindre Tumasgiu.* Il est avec vous ?

- Non, il est au marché de Noël avec Clémence.

- Ok. Bah, j'essaierai de le joindre plus tard alors.

- Pourquoi cherchais- tu à le joindre ?

- Je nous ai pris deux places pour PNL à Bercy !

- Ooooh ! Mais c'est génial pulcino, il va être si heureux ! S'exclama-t-elle.

- Oui. Sourais-je. Je suis si heureuse d'y aller avec lui. Notre premier concert ensemble. En plus pour la tournée Deux frères... Dis-je rêveuse.

- Je comprends carissima. Avec ton babbu, on est heureux pour vous.

- Bon, je vais te laisser mamma.

- D'accord pulcino. Bonne soirée et j'espère que tu l'auras au téléphone.

- J'espère aussi. Bonne soirée à toi aussi mamma ! Je t'aime.

- Je t'aime aussi. »

Je raccrochais le sourire aux lèvres. J'avais envie de partager la nouvelle au « mec que tu as préféré à moi ». Mais nous étions en froid depuis ma gaffe. Je ne savais vraiment pas comment me rattraper.

J'envoyais un message à Thomas.

« Rappelle-moi quand tu seras libre. Et passe le bonjour à Clémence de ma part :) »

-Tarik-

Nabil toqua à la vitre de la cabine d'enregistrement, me faisant sursauter. Il me faisait signe de sortir. J'enlevai mon casque, pris mes lyrics griffonnés sur des bouts de feuilles et sortis.*

« - Y a heja ? Demandais-je.

- Toi y a heja ?

- Pourquoi tu dis ça ?

- Bah, je ne sais aps, si tu m'expliquais pourquoi tu rep' plus à sonne-per ? Pourquoi tu as gueulé ces horreurs à Yanis et à Sarah ? Pourquoi tu as dit aux gars d'aller se faire foutre ? Et surtout pourquoi tu t'es enfermé dans le stud' dans le noir depuis une semaine en virant tout le monde ?

Je ne répondis aps, sachant très ienb que j'avais merdé. Sachant aussi très ienb pourquoi j'avais fait aç, et que aç n'était aps une raison. Mais je ne voulais aps le reconnaître. Je voulais juste taffer jusqu'à en perdre la raison. Nabil reprit.

- Bon, tu craches ce qui t'as mis dans cet état ou ienb ? Car je ne compte aps m'en aller. J'ai tout mon temps. Et tu sais très ienb que je suis sérieux quand je te dis aç.

Oh que oui, je le savais. Une fois, j'avais merdé, il m'avait aps lâché pendant une semaine jusqu'à ce que je crache le morceau. Mais qu'est-ce que ça foutait la rage de me faire reprendre par mon petit. Putain, c'était oim le grand dans l'histoire ! C'était oim qui devait donner l'exemple. Bon, de toute façon, aç servirait à rien d'attendre plus, il ne bougera aps jusqu'à ce que je dise pourquoi j'avais fait aç donc...

- Je sais que c'est aps une raison, et tout. Mais tu sais à quel point aç me fout la haine chaque fois que j'y repense. « La lionne de la liberté » a posé des questions sur ma iev, sur si j'avais des khey ou des oukhty.* Mais elle m'a surtout posé des questions sur baba et ... 'fin, tu vois très ienb de qui je parle.

- Je comprends mieux. Même si je me doutais que c'était forcément aç pour te mettre dans cet état-là.

- Voilà. Smeh...* Dis-je penaud.

- 'Faudrait surtout t'excuser auprès de Sarah et Yaya, ainsi qu'auprès de tous les gars.

- Ouais, je sais...

- J'imagine quand plus, que depuis qu'elle en a parlé, tu ne lui as plus envoyé de ssages-me ?

- Non, elle m'a trop énervé.

- Ouais, mais c'est aps une raison. Tu sais très ienb qu'elle ne pouvait aps être au courant. Et puis c'est contre... que tu as la haine pas contre « la lionne de la liberté ».

- Hm...

- Tu devrais lui envoyer un sms. Elle a l'air vraiment cool cette go. Alors ne foire aps tout à cause de la D.* Elle ne pouvait aps savoir. Donc redescends. Ça ira comme d'habitude.

- Pff. Tu me saoules à avoir raison... » Dis-je en souriant, étant vaincu.

Il me sourit en retour. Je pris mon tel' que j'avais éteint depuis une semaine. Le logo éclairant de sa lumière la pièce. Nabil se mit à rire, puis alluma cette dernière.

« - C'est mieux comme aç, non ?»

Je le remerciai en hochant la tête. Ensuite, j'allai dans mes contacts, cliquant sur « la lionne de la liberté ».

« - Bon, comme tu as dû très bien le comprendre la dernière fois, j'ai aps de mère. Elle s'est tirée quand on était tipeus. On ne va aps s'éterniser dessus. Tu n'as aps à en savoir plus. Viens on parle d'autre chose. »

*hess : de l'Arabe, hessd, «volonté de nuire». Aujourd'hui utilisé pour dire «être dans la misère», «dans une situation difficile», «ric rac niveau argent», «on est en galère»

*carissima : ma chérie

*Tumasgiu : Thomas en Corse

*lyrics : paroles de chanson en Anglais

*khey ou oukhty : frères et sœurs en Arabe

*smeh : désolé en Arabe

*D : la merde, la mouise en argot

Voilà le chapitre 8 en avance profitant de la 4G, j'espère qu'il vous aura plu.

Leia qui culpabilise pour sa gaffe ?

Leia qui achète deux places pour PNL à Paris ?

La réaction de Tarik ?

La discussion entre les deux frères ?

Le message de Tarik ?

On se retrouve vendredi soir !

Bisous ♥

Saphira