Chapitre 28
Chapitre 28
-Leia-
J'étais sur le toit du bat' des deux frères. J'avais rejoint Tarik. Plus tôt, il m'avait fait signe de venir là-bas, il avait envie de parler. Ce genre d'occasion ne se présentant pas souvent, je m'étais jetée dessus. Alors, j'étais là, au bord, à avoir une peur du vide monumental. C'était ma phobie. Mais bizarrement la présence de Tarik me rassurait assez pour que je reste ici. De plus, que je sentais la lourdeur et l'importance de notre future conversation.
« - J'aimerais t'expliquer pourquoi j'agis comme ça, particulièrement avec toi.
- Je t'écoute. L'encourageant sachant à quel point c'était dur pour lui.
- Dans ma te-tê j'ai besoin de sonne-per, à part mon re-frè. Mais ça, cela tombe sous le sens. Pour être totalement honnête, ma famille aussi, évidemment. Mais j'ai l'impression que ça me rend faible. Car s'ils leur arrivent quelque chose, je vais vriller, mais genre violent. Du coup, je me persuade que j'ai besoin de sonne-per. Moi, mon but dans la vie, c'est de mettre les miens à l'abri, qu'ils ne manquent de rien, qu'ils soient heureux. Pour ça, j'avais mon objectif de percer de le rap, faire de la maille, des lovés.1 2 Mais en vrai, j'ai toujours aimé le rap, j'avais envie de le déterrer et de le réenterrer. Avec Bilna, on voulait apporter notre truc, car on était persuadé d'avoir quelque chose en plus, quelque chose à donner. Mais tu vois, ce n'est pas mon seul objectif, je veux aussi être quelqu'un de bien, un bon musulman. T'inquiètes, je ne t'en voudrai pas si ça te fait sourire. Je sais bien que je fais des trucs complètement haram.3
- Oui, mais ta foi, elle, elle est sincère. Je le sens dans tes sons. Tu crois fort en Allah, et de la façon la plus honnête qui soit. Tu es prêt à en répondre devant lui. Tu le crains et le respectes. Dieu est miséricordieux, il sentira ton amour, il te pardonnera. Il ne peut pas en être autrement.
Je me repris n'étant pas totalement sûre de mes propos, puisque que je n'étais pas musulmane.
- Enfin, je n'en sais rien.
- Peut-être. Mais à mes yeux, je ne mérite pas le paradis. Je mérite encore moins l'amour d'une femme. Je l'ai déjà dit, pas de Jasmine pour Jafar. De toute façon, je ne suis pas un mec ienb Leia. J'ai été trafiquant de drogue, j'ai fini en zonz.4 J'ai fait tellement de trucs sales. Tu devrais partir loin de moi, je vais finir par te décevoir. Sortit-il avec une agressivité et un dégoût envers sa propre personne.
Je ressentais toute cette haine, cette tristesse en lui. Cela me bouffait. À cet instant, il était très difficile pour moi de retenir mes larmes.
- Peut-être bien que non. Peut-être que tu vas me surprendre. Et puis ce n'est pas comme si je ne savais pas dans quoi, je me lançais.
- Je te jure que tu ne veux pas ça. Franchement, pars, je n'ai pas besoin de toi. Et ne fais pas comme la psy avec moi. Me rejeta-t-il.
Il préférait repousser les gens qu'il aimait, de peur qu'ils le trahissent ou le détruisent. Je le comprenais un peu. À force que les gens soient partit de ma vie, m'ayant abandonné comme une merde, j'avais parfois tendance à rejeter les gens, les pousser à partir, pour éviter qu'ils ne partent d'eux même.
- Je ne fais pas la psy. J'essaye d'être là pour toi, de te comprendre et de t'aider. Dis-je en soutenant son regard.
- Je n'ai pas besoin qu'on m'aide. Je suis déjà perdu de toute façon.
Je soupirais face à son entêtement. Mais je finis par sourire repensant à tous ses sons, qu'il le définissait si bien.
- J'ai l'impression de te connaître, et en même temps, non. C'est fou comme vous pouvez dire beaucoup en confiant des choses intimes tout en restant pudique et en ne disant rien.
- Tu ne me connais pas. Cracha-t-il.
Ses mécanismes de défenses ne lâchaient pas.
- Oui, mais j'apprends. Retorquais-je.
- Non, tu ne sais pas. Puis, tu ne sauras pas.
Il se tue, se murant dans son mutisme. C'est fou comme cet homme pouvait se braquer.
Est-ce que je ne saurais vraiment jamais ? J'ai de sérieux doutes. Le fait qu'on soit là comme ça tous les deux à parler était déjà une preuve qu'Ademo cédait petit à petit face à l'homme derrière le pseudo.
- Tarik ?
Il ne broncha pas.
- Mi lionu ? Essayais-je faisant pencher la corde sentimentale.
Son regard, se voulant froid, trouva sa place dans le mien décidé.
Tu ne me tromperas pas Tarik. Je commence à te connaître. Tes faux-semblants ne me trompent plus.
- Écoute-moi bien. Je ne joue pas de rôle Tarik. Je sais très bien que je ne suis pas comme toi, je suis plus tout l'inverse. Je sais parfaitement qu'on ne vient pas du même monde. Que je n'ai pas vécu un dixième que de ce que t'a vécu. Mais ça ne m'empêche pas de ressentir tout ça. Quand toi ou les autres QLF, vous m'en parler ça me tue. Ça me déchire. Oui, je ne connais rien à la rue, rien au bâtiment, rien au hall. Je ne connais que le récit de mes potes ou le peu de chose que j'ai vu. Peut-être que mon avis est biaisé. Rien que le fait que je sois né blanche, je suis privilégiée. Je suis née et j'ai grandi dans une société patriarcale raciste. Après, ça ne retire pas toutes les années de déconstruction que je me suis faite. Oui, je ne pourrais jamais comprendre, mais tu ne pourras jamais me retirer mon empathie. Je ne peux peut-être pas comprendre, mais j'imagine en permanence. Et ça me bouffe, pour vous, je suis trop hypersensible. Rien que d'y penser, j'ai la rage et les larmes aux yeux. Je serais prête à me battre avec mon corps de fragile. Alors, oui, peut-être que je n'ai pas vécu un dixième que ce que tu as vécu et peut-être que je ne comprendrais jamais, mais je te suivrais jusqu'en enfer. Je me damnerais pour toi. Je ferais la guerre avec toi. Je signe si tu saignes. T'entends Tarik ?! » Criais-je, mes larmes roulant sur mes joues.
Il se tut dans un premier temps. Puis, il prit mon visage entre ses deux grosses mains et m'embrassa comme un fou. Je n'arrivais plus à respirer. Je soupirais de bonheur contre ses lèvres. Cette sensation m'avait manqué. Je me blottissais contre l'homme dont je tombais de plus en plus amoureuse. J'étais bien dans ses bras, malgré la hauteur à laquelle j'étais.
-Tarik-
Après notre discussion sur le toit du bat', on avait décidé de rester. On s'était mis une grosse couette sur le sol pour se coucher dessus. Ensuite, j'avais fait un truc que j'aurais jamais cru faire avec une go. À mes yeux, c'était grave un truc de zemel.5
« - Regarde ! Me dit-elle.
- Quoi ?
- Les étoiles. À chaque fois, ça me rappelle qu'ils veillent sur nous. Dit-elle souriante et reconnaissante envers les dieux qu'elle priait.
- Oui, il veille sur nous. Dis-je reconnaissant envers Allah.
- Ça me rassure tellement. C'est si beau.
- La lune est encore magnifique ce soir. »
Je la regardais sous la lumière de l'astre. Leia était magnifique. Elle avait beau complexer sur ses rondeurs et son acné. Elle n'en était pas moins belle. C'était même l'inverse. C'était ce qui la rendait unique. Elle m'avait ensorcelé. Pourtant, elle m'avait assurée qu'elle ne m'avait jeté aucun sort. Cela me fit sourire.
Ce n'était pas vraiment mon style de go si on réfléchissait ienb. D'habitude, j'avais plus une grosse attirance pour les latinas, surtout les belles vénézuéliennes, et plutôt fines en général, mais quand même avec un bon boule. Mais là, Leia était juste sublime, elle avait des formes et rondeurs là où il fallait. Et son petit ventre me faisait craquer. C'étaient ses « imperfections » qui la rendaient plus réelle. J'aimais son naturel, comme quand elle jure, ou bien quand elle parle de cul sans gêne. Malgré ses blessures, elle est tout le temps souriante. Elle est hyper forte. Elle a toujours réussi à se relever, malgré les critiques et les échecs. Et même si elle avait tendance à être flemmarde, ce qui m'énervait beaucoup, elle ne s'arrêtait jamais. Elle s'accrochait et bossait comme une folle. Oui, elle avait ses périodes où elle procrastinait. Je croyais que c'était une grosse chômeuse. Mais c'était en la surprenant plusieurs fois chez elle à bosser jusqu'à des heures irraisonnables que j'avais compris. En fait, c'était une putain de charbonneuse. Elle avait toujours plein d'idées, de projets, d'histoires en tête.
En fait, Leia m'impressionnait. Oui, elle n'avait pas vécu un dixième de ce qu'on avait vécu. Mais la vie l'avait détruite aussi. Ça se voyait parfois quand je croisais son regard. Il y avait une lueur de tristesse au fond d'elle. C'était comme si je pouvais voir son âme détruite derrière ses pupilles. Alors peut-être qu'elle n'avait pas le même passé, mais elle était autant bousillée que nous. La voir sourire comme ça pour quelques étoiles. Si je pouvais, je lui offrirais la Voie lactée entière, rien que pour elle.
Depuis que je l'ai rencontré, je ne me reconnais plus. Elle m'avait apaisée en quelque sorte. Quand j'étais en colère et que j'avais envie de tout détruire, elle était là avec moi prête à en découdre. Leia avait aussi cette haine. C'était à croire qu'elle était née avec le M sur le front. Elle m'avait déjà dit pourquoi elle aimait mes couplets quand je l'avais rencontré :
« - C'est cette haine que tu as dans ta voix, dans ton flow, ça me prend aux tripes. Ça me fait vibrer, ça me retourne, ça résonne en moi. »
Wallah fait ier-ch je crois que je suis vraiment piqué.
1 maille : argent en argot
2 lové : argent en argot, PNL vient de là : Peace and lovés, paix et argent
3 haram : contraire de halal, d'un côté, il signifie l'interdiction, de l'autre, il signifie « sacré » : le territoire autour des deux villes saintes de la Mecque et de Médine est sacré « le territoire », donc interdit aux non-musulmans.
4 zonz : prison, cachot en argot
5 zemel : de façon vulgaire, signifie, « homosexuel » et de façon injurieuse, signifie, « pédé », « tapette », « pédale ».
J'espère que vous aurez aimé le chapitre 28
Tarik qui se confie ?
Leia qui fait une déclaration ?
Leur moment sur le toit ?
Tarik piqué ?
On se retrouve vendredi soir
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Merci pour votre soutien chaque semaine
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