Chapitre 19
Chapitre 19
-Leia-
Je m'étais surprise à être dehors au petit matin. Après, il fallait dire que je m'étais endormi très tôt la veille, dû à la fatigue de notre petite nuit. Alors, oui, j'étais sur la terrasse le soleil se levant, les eucalyptus et les figuiers de barbaries qui embaument le village de bon matin. Cet effluve de poussière, de sel marin : l'odeur de Corsica. Il manquait que la chaleur de l'été que j'aime tellement. J'étais bien malgré le froid de décembre caressant ma peau. Je m'étais couverte de mon gros sweat Thrasher et avais pris mon précieux carnet de croquis, plus communément appelé sketchbook.1 Je m'étais mise en tailleurs à même le sol et commençais à griffonner le paysage devant mes yeux. J'entendais au loin la petite fontaine de la place couler. Le peu d'oiseaux n'ayant pas quitté l'île pour rejoindre les contrées plus chaudes de l'Afrique chantait joyeusement. Douce mélodie qui berçait ma matinée.
« - Tu es bien matinale. Fit une voix féminine, mon cœur rata un battement.
Je me retournais et vis la belle Sarah appuyée contre l'embrasure de la porte, deux tasses dans ses mains.
- Désolée, je ne voulais pas te faire peur.
- Ce n'est pas grave. Dis-je avec un sourire rassurant.
- Je t'ai apporté du thé. Comme je ne savais pas ce que tu aimais, j'ai misé sur un classique thé à la menthe.
- Oh, ça me va très bien. Dis-je émue.
On s'installa à leur mignonne table de jardin.
- Je me demandais si tu voudrais bien m'accompagner au marché ce matin ?
- Oh oui, ça ne me dérangerait pas le moins du monde.
- Super. J'avais hâte de passer un moment rien que toi et moi, qu'on fasse un peu connaissance. Me dit-elle avec un sourire d'une douceur incroyable.
- Avec plaisir. »
*
C'est comme cela que je me retrouvais une demi-heure plus tard dans les rues de Sartène en plein marché. Les gens joyeux et leurs rires habillaient la ville. Il y avait très peu de touristes dû à la période de l'année. Mais les étals des marchands étaient bien remplis : charcuteries, fromage, fruits et légumes y faisaient place. Sarah avait l'air de connaître les habitués, elle les saluait tous. Pendant que je mettais quelques kiwis dans un sac en carton, elle s'adressa à moi :
« - Du coup, tu as connu mes fils avec le fameux concours ? Me demande-t-elle.
Je ne relevais pas le « mes fils », car même si ce n'était pas ses fils biologiques, c'était tout comme. Elle avait mille fois plus le rôle de mère auprès de Tarik et Nabil, que la leur qui s'était enfui.
- Oui ! Je n'en revenais pas. Je n'y ai pas cru pendant plusieurs jours, pensant que j'allais finir par me réveiller.
- J'imagine. Dit-elle avait un regard et un sourire si doux. Tu as des frères et sœurs ?
- Thomas : Tumasjiu, c'est mon petit frère, on a quatre ans d'écart. Il est en première au lycée.
- Tu t'entends bien avec ?
- Oui, même si parfois, il m'énerve énormément. Dis-je en rigolant.
- Tu fais des études ?
- Oui, des études d'animation 2D dans une école d'art à Paris.
- Wow. C'est hyper chouette ça ! Pour faire donc des films, c'est ça ?
- Oui, c'est un peu comme les vieux Disney, ou les films du Studio Ghibli, ou encore ceux de Makoto Shinkai. Dis-je avec un énorme sourire.
- Ça se voit que c'est ce qui te passionne.
- Oui, j'ai toujours aimé les films d'animation, depuis toute petite déjà, et les Japonais encore plus ! Je disais "japoton". Dis-je en rigolant. J'adore dessiner. C'est toute ma vie.
- Ça se ressent. C'est bien que mes garçons ont rencontré quelqu'un d'aussi passionné que toi. »
On s'arrêta devant l'étale de viande. Sarah savait très bien que je n'en mangeais pas, puisque hier, avant de faire le repas, je lui avais expliqué que j'étais végétarienne en transition pour devenir végétalienne. Elle avait été très compréhensive. Cette viande serait pour les garçons. On mangeait un couscous ce midi. J'étais si heureuse, affectionnant particulièrement ce plat.
Quand toutes nos emplettes furent faites, on se dirigea vers la voiture de Sarah, avec laquelle nous étions venus.
*
Une fois rentré toutes les deux, on entreprit de commencer le déjeuner de ce midi. On avait du pain sur la planche, le couscous n'étant pas un des plats les plus rapides. Pendant que nous nous activions en cuisine Nabil et Yanis entreprirent de mettre la table. Une fois tout prêt, nous nous mîmes à table. Les voir manger avec autant d'appétit me fit énormément plaisir. Avec Sarah, on y avait mis beaucoup d'amour.
« - C'est excellent Leia ! S'exclama Nabil.
- Ouais ! C'est trop bon ! S'exclama à son tour Yanis.
C'est fou les mecs comme parfois, ils peuvent être clichés. Il a suffi d'un bon plat pour endormir la méfiance de Yanis.
- Yanis, on ne parle pas comme ça ! Je t'ai déjà dit de dire "Oui" et pas "Ouais". Réprimanda René, son fils avec une tape derrière la tête.
- Oui baba.
- C'est vraiment excellent Leia. On a l'a vraiment bien réussi. Me dit Sarah toujours avec son doux sourire.
- Merci beaucoup. Je suis touchée.
- Une vraie femme à marier ! S'exclama René.
Je grinçais des dents à cette phrase. Cette réflexion était si archaïque. Déjà qu'avec Sarah, nous étions chargé du repas, restant à la cuisine. Nous n'avions rien dit, car les garçons avaient aidé pour d'autres tâches ménagères. Je n'arrivais pas à contenir ma contrariété sur mon visage. Mais j'évitais tout de même de répondre.
Leia tu es une invitée, une invitée.
Malgré ces mots dans ma tête, je remarquais les regards insinuant de René vers Nabil. Je soupirais et me levais de table.
- Je vais chercher le dessert.
Je me dirigeais alors vers la cuisine. Malgré le fait que j'étais dans une autre pièce de la maison, j'entendais toute la conversation.
- Bien habibi ! Je ne te félicite pas. Tu l'as vexé. Tu pourrais taire tes idées d'un ancien temps. Fit la voix de Sarah.
J'entendis quelqu'un soupirer.
- Mais c'est vrai que vous feriez un joli couple. Ajouta-t-elle en s'adressant à son fils.
Je ne pus m'empêcher un petit rire. Moi et Nabil ? La grosse blague.
- Vous vous trompez sur toute la ligne. » Commença Nabil.
Il entreprit de relater tout ce qu'il s'était passé entre Tarik et moi depuis le début. Son changement de comportement face à moi, et bien d'autres choses. Quand je revins à table avec notre tarte aux pommes maison, tout le monde s'était tuent. J'eus l'impression de voir une lueur dans l'œil de René. Sarah avait les larmes aux yeux. Je ne comprenais rien. Yanis lui semblait tirer la tronche. Je m'installais et me tus.
- Nabil-
Ça y est, ils avaient tous capté. Ils avaient tous compris que Leia ce n'était pas n'importe qui. Et surtout pas pour Tarik. Je voyais la lueur dans le regard de baba, elle avait changé. Il avait capté que Leia était la femme de la iev de son fils. Alors que je sentais Leia essayer de se faire une place dans cette famille que sont les QLF, je rigolais. Elle n'avait donc pas compris qu'après ce week-end en Corse, c'était trop tard. Que ça y est, elle faisait partie de la famille. Je voyais quand même que ça triturait baba d'embêter Leia et de lui poser plein de questions pour tenir son rôle de père protecteur.
« - Tes parents font quoi ? Demanda baba.
- Ma maman est prof d'arts appliqués à l'université. Et mon papa est vendeur de matériel audio pour les studios d'enregistrement.
- Et je ne savais pas ça ! M'exclamais-je.
- Oui. Dit-elle gênée.
- Donc une famille d'artiste. Dit baba.
- Oui, c'est ça, car mon frère voudrait aussi partir dans l'art.
- C'est chouette de voir une famille aussi passionnée. Dit Sarah avec un sourire qui se voulait protecteur envers Leia.
Comment Leia ne pouvait-elle ne pas voir qu'elle était déjà adoptée par baba et Sarah. Yanis me saoulait à pas lui faire confiance.
- Et tu penses quoi de mon fils ? Demanda baba.
Sans qu'il n'ait besoin de préciser, Leia parla directement de Tarik. Je soupçonnais mon père d'avoir fait exprès, comme un test.
- Tarik est, je pense, puisque je ne le connais pas encore vraiment, quelqu'un qui peut paraître très froid au premier abord. Mais c'est juste une façon de se protéger, une carapace pour ne pas revivre votre passé que du peu que je connais est très sombre. Commença-t-elle.
Tarik a l'air d'être quelqu'un de très terre-à-terre, très sérieux et ambitieux. Quelqu'un qui ne s'arrête pas tant qu'il n'a pas réussi son objectif. Quelqu'un qui pourrait tout sacrifier, même sa propre vie pour les siens. Quelqu'un d'honnête et de droit malgré son lien avec la drogue. Quelqu'un avec une foi et un amour sincère pour Allah. Quelqu'un qui ne pleure que quand il est seul. Il aime garder cette image d'homme solide. Ça a l'air d'être quelqu'un de très fidèle, et à sa famille, et à lui-même. Continua-t-elle.
Après, Tarik a aussi l'air d'être quelqu'un d'extrêmement rancunier, prétentieux et pessimiste. Mais malgré ces défauts, ça a l'air d'être une personne d'extrêmement ouvert d'esprit et à l'écoute des autres, et qui doit donner de merveilleux conseils. Ça se voit que ce que Tarik déteste le plus c'est de recevoir des ordres, puisqu'il est lui-même très autoritaire, ainsi qu'on se serve de lui.
Euh... Je crois que j'ai fait le tour... Dit-elle pas très assurée.
On était tous bluffés après son discours. Ça confirmait encore tout ce que je pensais déjà d'elle. Leia ne connaissait Tarik que depuis six semaines et elle avait déjà compris qui il était. C'était limite si elle le connaissait mieux que nous. Yanis n'en revenait pas, je le vis réfléchir. Je croyais ienb que ce qu'avait dit Leia était en train de le faire changer d'avis. Sarah était à la limite de pleurer de joie. Baba souriait comme jaja.2 Et Leia qui était dans ses pensées, calculait R à ce qui se passait. Je rigolais.
Baba se leva de table et mit sa main sur l'épaule de Leia.
- Tu reviens quand tu veux ma fille. La porte des Andrieu te sera toujours ouverte. Peu importe ce qu'il pourra se passer dans le futur.
- Oh. Mais... euh. Merci. » Bredouilla-t-elle.
C'était au tour de Leia d'être à deux doigts de pleurer. Je souris voyant que ce que j'avais vu en Leia, tout le monde commençait à le voir.
-Leia-
Malgré le froid de l'hiver je m'étais posé dehors sur la terrasse. Le soleil couchant réchauffant ma peau. Il était magnifique. Je voyais les couleurs et les ombres danser sur les parois des montagnes. J'entendais au loin s'écraser les vagues contre la côte. Je respirais l'air salé à l'odeur des plantes corses. Cela me faisait un bien fou. Dans mes écouteurs l'album Citadelle d'Izïa m'accompagnait, plus particulièrement les chansons Sunset et Calvi. Ces mots résonnant dans ma tête.
J'entendais la porte coulisser derrière moi. Je ne me retournais pas, voulant rester dans mon petit monde, je fermais les yeux. J'entendis la personne à côté de moi allumer un briquet. L'odeur de la cigarette vient troubler la fragrance de la Corse. Fronçant les sourcils, j'ouvris les yeux pour voir qui m'avait tiré de ce moment si agréable.
C'était bien évidemment Nabil, il me regardait avec un sourire en coin.
« - C'est beau, hein ?
- Oui. Soupirais-je.
- Je t'ai dérangé dans ton petit moment, hein ?
- Oui. Soupirais-je de plus belle.
Cela le fit rire.
- Je voulais te dire.
- Quoi ?
- Tu peux m'appeler Nabil à partir d'aujourd'hui.
J'étais estomaquée. Avais-je bien entendu ? Je n'en revenais pas. Entre le repas de tout à l'heure et ça. Voyant mon air surprise, il m'expliqua.
- Aujourd'hui, t'es QLF Leia. T'as vu tout ce que t'as fait pour nous. Et puis baba et yemma t'adorent. T'as tout gagné.
Une larme de joie roula sur ma joue. Les émotions prenaient possession de mon corps. Je tressautais dû à mes sanglots. Nabil me prit dans ses bras.
- Chuuuut Leia. Ana m3ak.3
- Chuuuut Leia. Je suis là.
- Merci Nabil.
- Merci à toi de m'avoir décidé à rentrer à la maison.
- De rien, c'est normal.
- Non, c'est pas normal. C'est pas tout le monde qu'en aurait fait autant.
- Pour moi, c'est normal. J'aurais fait ça pour n'importe qui.
- Alors on est n'importe qui pour toi ? Me demanda-t-il en fronçant les sourcils.
- Non, non ! Ce n'est pas ce que je voulais dire. Dis-je paniquée.
- Je te taquine. T'es nouille toi. Me dit-il en rigolant. Après quelques secondes de silence, il reprit. Ça y est on va devoir y aller. Tes affaires et tes papiers d'identité sont prêts ?
- Oui, j'ai fait ça tout à l'heure.
Il me sourit.
- Prête à dire au revoir à la Corse ?
- Oui ! »
Ça y est, on allait rentrer sur Paname.
1 sketchbook : carnet de croquis en anglais
2 jaja : jamais en argot
3 Ana m3ak : Je suis là en arabe
Voilà le chapitre 19, j'espère qu'il vous aura plu.
La matinée entre Sarah et Leia ?
Le repas ?
La famille Andrieu qui réalise que Leia n'est pas n'importe qui ?
Nabil qui autorise Leia a l'appeler par son prénom et l'accepte au sein de la fafa ?
On se retrouve vendredi soir !
Ou sur insta : saphirabluesharkwttpd
Bisous 🧡
Saphira
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