⚃
La langue pâteuse, les yeux rivés sur cet anneau argenté décorant sa main gauche, Katsuki relève lentement la tête, comme en état de choc, trouvant le regard désolé et quelque peu fuyant d'Izuku.
- Deku .. Tu t'es marié ?
Inclinant vaguement le menton, les lèvres pincées et la mâchoire serrée, Izuku semble s'arrêter de respirer pendant plusieurs secondes, interrompant la conversation.
L'atmosphère devient soudain très lourde, pesant sur les épaules de Katsuki, qui sent son dos s'affaisser sous son propre poids.
Puis, reprenant son souffle après un trop long moment sans oxygène, Izuku chuchote près de son visage sans vraiment le regarder pour autant.
- L'année dernière.
Les espoirs de Katsuki s'effondrent brutalement, se brisant les uns contre les autres au contact de la réalité et, fermant les yeux pour tenter de garder le contrôle sur l'angoisse bruyante qui cogne à ses tympans, il défait ses mains de celles de Deku, s'éloignant d'un pas malhabile.
Perdu et désorienté, alors qu'il lui semble qu'il vient de tout perdre à l'instant, sa bouche se tord d'une grimace de douleur.
Incapable de dire ou de faire quoi que ce soit de cohérent, il reste figé là, les yeux fermés et la tête basse, voyant sous ses paupières l'intégralité de son monde se fendre à ses pieds.
Près de lui, un froissement discret lui parvient, trahissant une action de la part de Deku et, sans réagir pour autant, il sent sa main récupérer la sienne malgré tout.
- Katchan, je .. J'y croyais plus tu sais. Je pensais que tu reviendrais pas, pas après tout ce temps. Et .. A un moment, j'ai pensé que je devais au moins essayer de faire quelque chose de ma vie, qu'elle ne dépende pas que de toi à tout jamais ... A une époque, j'ai essayé de savoir où t'étais, mais on a pas voulu me le dire, t'avais changé de numéro, d'adresse .. et je pouvais rien faire de plus. Ma mère disait que c'était mieux comme ça, finalement. Qu'on avait causé tellement de problèmes, aux autres et à nous même, alors qu'il fallait que je passe à autre chose.
Rouvrant ses yeux, sans pour autant lever son regard vers lui, Katsuki tente d'avaler la salive sèche du fond de sa bouche, dérangée par la soif et la chaleur, avant d'éclaircir sa voix.
Ses mots s'emmêlent et, sans savoir dans quel ordre ils sortiront, il s'efforce quand même de les prononcer péniblement.
- Ma mère aussi, disait qu'on foutait le bordel. Quand je les ai planté tout à l'heure, elle m'a dit qu'elle me pardonnerai pas pour ça, et de plus mettre les pieds chez elle. A vrai dire, je sais même pas où je vais dormir cette nuit, j'ai pas ma bagnole, ni mes papiers, et y'a plus de bus.
Puis, prenant conscience qu'il répond à côté de la plaque, il secoue sa tête de droite à gauche pour se ressaisir, reprenant le plus clairement possible.
- Quand je suis parti, je voulais me convaincre que j'pouvais le faire. Que je vivrais sans problèmes loin de toi, et je me suis accroché à cette idée ridicule pendant longtemps. Et puis après, même quand j'ai commencé à sentir que tu .. que tu me manquais, je me disais que c'était trop tard de toute manière, pour revenir. Et que .. si t'avais voulu me retrouver, tu l'aurais déjà fait. J'avoue, des fois, j'espérais te voir arriver, semer le bordel dans ma relation avec Eijiro, et ..
- Même si je t'avais retrouvé, j'aurais pas fait ça Katchan.
- Pourquoi ?
Haussant une épaule, Izuku passe nerveusement sa main libre dans ses cheveux, secouant ses mèches folles entre ses doigts.
- Je pouvais pas .. C'était .. pas mon tour.
Balançant la tête de droite à gauche, Katsuki soupire par le nez en serrant les dents, pensant que, définitivement, leurs vies entières demeurent dirigées par ce jeu qui n'en fini jamais.
Soumis à leurs propres règles, piégés dans une partie devenue incontrôlable, ils n'auront jamais été capable de fonctionner autrement.
Mais puisqu'il en est ainsi ..
- Je vois .. Alors c'est le miens ?
- On peut peut-être ... faire une trêve.
Faire une trêve ... A sa connaissance, les règles ne l'interdisent pas et, pour ce soir, l'idée lui parait plutôt appropriée à la situation.
Alors, hochant la tête, il cherche à nouveau son regard, s'enfonçant dedans pendant plusieurs secondes.
Hors du jeu, s'imaginant qu'il peut tout à coup dire tout ce qu'il lui passe par la tête sans craindre de ne pas être pris au sérieux, ses pensées se mettent à bouillonner d'un millier de choses à dire.
Des sentiments fusent un peu partout sous sa peau, soudain libérés de leur prison imaginaire et, resserrant d'abord sa main dans la sienne, il tire brutalement sur son poignet pour l'attirer contre lui.
L'encerclant dans ses bras, fermant les yeux en enfouissant son visage dans le creux de son cou, il s'accroche à son dos pour plaquer son torse contre le sien.
Sentant les reliefs et les courbes de son corps tout près du sien, il inspire profondément le parfum de sa peau.
Son cœur pulsant contre le sien, synchronisant sa respiration avec la sienne, il mouille sa gorge avec les résidus de larmes de ses joues.
Le long de sa colonne vertébrale, les mains d'Izuku remontent progressivement pour venir se lier en dessous de ses omoplates, resserrant l'étreinte autant que les lois de la physique le permettent.
Son souffle tiède et quelque peu désorganisé vient régulièrement s'échouer près du visage de Katsuki et, comme un réflexe mal géré, il s'écarte de lui pour le forcer à redresser la tête hors de son cou, avant d'embrasser subitement sa bouche.
Sans aucun préavis, ses lèvres écrasent les siennes, et Katsuki, soudain ravagé par le séisme qui secoue sa poitrine, se sent tanguer de l'intérieur, perdant l'équilibre de ses pensées.
Privé de toute notion de temps, d'espace, et même de sa propre existence, il ne perçoit plus que le contact de son corps, celui de sa bouche, et ses mains dans son dos.
Les émotions se déchainent dans ses veines, comme ses sentiments qui implosent en dessous de sa peau, et la fièvre monte soudain jusqu'à son crâne.
Jamais un baiser n'a déclenché de telles réactions, et les sensations qu'il lui renvoie lui paraissent inédites.
Un frisson sans point de départ ni d'arrivée se déplace à travers chacun de ses muscles, s'emmêlant un peu partout entre ses os pour faire chavirer ses esprits.
Puis, alors qu'Izuku interrompt l'échange, qui a très bien pu durer dix secondes ou un siècle, Katsuki ne sait plus trop, il s'éloigne très légèrement de lui en récupérant son regard.
Desserrant l'emprise de ses bras dans son dos, il soupire longuement avant de venir buter son front contre son épaule.
Murmurant contre le tissu de sa chemise, sa voix étouffée parvient tout de même aux tympans de Katsuki.
- Je devrai repartir après, tu sais.
- Je sais.
Presque malgré lui, Izuku embrasse un carré de peau découvert sous son col, soufflant près de sa gorge, avant de redresser la tête, cognant son front contre le sien.
- Tu vas aller vivre où maintenant ?
- J'en sais rien.
Un sourire plus triste que joyeux anime vaguement le visage d'Izuku, qui soupire près de sa bouche avant de claquer sa langue à son palais.
- A quel moment est-ce qu'on s'est à ce point laissé dépasser Katchan ?
Les mots empêtrés derrière ses dents, Katsuki hausse simplement les épaules sans vraiment lui répondre.
Pourtant, il sait ce qu'il voudrait dire.
Ils se sont laissés dépasser quand leurs sentiments se sont emmêlés avec les règles du jeu, brisant la frontière du réel et du factice.
- Je sais pas trop, il y a longtemps, je crois.
Un instant de silence se crée entre eux et, prenant tout à coup conscience qu'ils occupent toujours un morceau de trottoir au milieu de la ville, bien que presque déserte, il s'éloigne d'un pas pour surveiller son environnement, craignant d'être épié.
Cet échange ne regarde qu'eux, il ne tient pas à se faire des témoins.
Au dessus d'eux, un réverbère jette sa lumière jaune à travers la pénombre maintenant bien incrustée et, toujours à moitié débraillé et sans solution pour passer la nuit, Katsuki passe ses deux mains dans ses cheveux en scrutant le vide.
Deku repartira, bientôt, il rejoindra son couple, et probablement qu'ils ne savent ni l'un ni l'autre ce qu'il adviendra par la suite.
Il leur reste si peu de temps à se donner.
Alors ...
- Deku, est-ce que .. tu peux rester encore un peu ?
- Où ?
- Là où on pourra. Ensemble.
Hochant d'abord simplement la tête en silence, puis amorçant un premier pas pour se déplacer sur le trottoir, Izuku l'invite à le suivre en prenant sa main dans la sienne.
- Viens, on va pas prendre racine ici. J'suis sûr qu'on a l'air de deux mecs louches.
Et Katsuki, suivant ses pas en passant ses doigts entre les siens, se laisse guider à travers la petite ville.
Croisant plusieurs enseignes éteintes et quelques véhicules respectant plus ou moins le code de la route, le silence persiste à occuper toute l'attention pendant plusieurs centaines de mètres.
Puis, à hauteur d'un parking presque vide, Izuku tire une clé de sa poche, pressant un bouton sur le boitier sombre.
Les clignotants oranges d'une voiture grise illumine sa propre carrosserie en même temps que les rétroviseurs s'ouvrent automatiquement, et Izuku vient tirer la portière conducteur, lâchant la main de Katsuki pour l'inviter à aller prendre place sur le siège passager.
- Je sais pas où on va, mais allons y.
Dans l'habitacle, l'éclairage discret du tableau de bord révèle à peine les traits de leurs visages et, enclenchant la marche arrière pour s'échapper du parking, Izuku lui lance un dernier regard avant de se concentrer sur la route.
- Et puis, on a l'habitude toi et moi Katchan, de pas savoir ce qu'on fait mais de le faire quand même.
S'élançant sur la chaussé jusqu'à sortir complètement de la commune, roulant au hasard sur des chemins étrangers, Izuku l'emmène partout et nul part sur quelques kilomètres, croisant plusieurs panneaux et devantures de magasins random.
Puis, s'arrêtant sur un nouveau parking d'une nouvelle ville inconnue, il pointe finalement du menton l'enseigne éclairée d'un hôtel ouvert.
- On entre ?
D'abord un peu perplexe, Katsuki pose son regard sur l'établissement, à travers la vitre de sa portière.
Devinant une enseigne quelque peu luxueuse, et des prix à la hauteur de l'allure grandiose du bâtiment, il pince ses lèvres en regardant Deku couper le moteur.
- J'ai pas de quoi payer sur moi, tout est resté à-
- Je sais, tu l'as déjà dit.
Puis, descendant de la voiture en premier, Izuku lui fait un signe de la main pour lui intimer de le suivre à son tour, insistant auprès de lui.
- Je vais payer Katchan.
Puis, discrètement, presque en murmurant, il ajoute :
- Shoto ne voit pas mes comptes, il le saura pas ..
- Shoto .. ?
Bien sûr qu'il se doute qu'il s'agit de son mari, mais découvrir son nom lui rappelle qu'Izuku ne pourra pas rester auprès de lui, et qu'il rentrera bientôt chez lui pour simplement reprendre sa vie là où il l'a laissé quelques heures plus tôt.
Et ça blesse son cœur, en plus d'accentuer son sentiment d'impuissance.
Katsuki ne possède officiellement plus rien et, même s'il ne regrette pas d'avoir tout balayé pour trouver Deku, il se sent tout à coup très démuni.
Mais, sans lui répondre à nouveau, prenant la direction de l'entrée de l'établissement, Izuku l'entraine encore à sa suite jusqu'à la réception.
Réglant une facture hors de prix pour une pauvre nuit, ils suivent les indications de l'employé d'hôtel pour rejoindre la chambre que ce dernier vient de leur assigner, au quatrième étage par l'ascenseur.
Derrière une porte sobre dans le couloir excessivement éclairé par des nombreux spots au plafond, se dessine alors une large pièce aux murs clairs.
Une moquette fine et immaculée recouvre le sol, et un lit capable d'accueillir facilement quatre personne en serrant un peu trône tout au centre.
Un minibar attire l'attention de Katsuki, assoiffé depuis des heures, et une télévision trois plus grande que nécessaire décore une partie d'un mur.
Face à la porte, une large fenêtre ouvre l'espace vers l'extérieur, offrant une vue d'ensemble sur les constructions urbaines alentours.
Et, alors qu'Izuku se poste justement devant la grande vitre, semblant suivre du regard un déplacement invisible dans la nuit, Katsuki hésite une demi seconde avant de finalement se servir dans le tout petit frigidaire, l'appel de la soif se faisant bien plus fort que les bonnes manières.
Dévissant le bouchon d'une petite bouteille d'eau en le laissant retomber à ses pieds, il verse les cinquante millilitres d'une traite entre ses lèvres.
Sentant sa gorge se rafraîchir, un véritable soupir de plaisir lui échappe, éveillant un rire moqueur près de la large fenêtre puis, abandonnant la bouteille à proximité du minibar, il rejoint finalement Izuku, face au paysage, se postant à sa droite.
L'éclairage urbain, reparti en dizaines d'ampoules aux couleurs nuancées, illumine le décor endormi en contrebas, comme autant de lanternes flottant dans les airs.
Leurs reflets traversent le verre qui les sépare de l'extérieur, venant danser dans les yeux d'Izuku pour révéler toutes les variations de teintes de ses iris.
Sur ses joues, les tâches de rousseur apparaissent et disparaissent au gré des mouvements de sa tête, parfois dans l'ombre, d'autres fois exposées aux reflets de lumières.
Près de lui, occupé à admirer son visage pour en dévorer les contours, imprimant ses traits dans ses rétines, Katsuki soupire avant de chercher sa main pour la capturer une nouvelle fois.
Puis, tournant à son tour son regard vers lui, Izuku lui sourit en avisant l'état de sa tenue.
- Tu pourrais au moins te rhabiller.
Baissant la tête vers les boutons de sa chemise, arrachés à leur coutures pour certains, Katsuki arque un sourcil peu convaincu.
- Je pense que je suis plus à ça près ...
- S'il te plaît Katchan rhabille toi.
- Pourquoi ?
Détournant le visage en se décalant d'un pas vers la gauche sans lâcher sa main pour autant, Izuku claque sa langue à son palais.
Sur ses joues, et malgré les ombres colorées qui brouillent son teint, Katsuki jure qu'il vient de le voir rougir.
- Je suis toujours marié ...
Soupirant, moins de dépit que de désarroi, Katsuki lève un moment les yeux vers les étoiles visibles au dessus de leurs têtes.
Suivant leurs constellations du regard, il plisse le front quand ses paupières tressautent, menacées par quelques molécules de sel trop près de ses cils.
- Ca t'a pas empêché de m'embrasser.
- Ne sois pas de mauvaise foi, tu sais très bien ce que je veux dire.
Katsuki n'est pas stupide, tout du moins pas à ce point, mais l'idée que toute puisse prendre fin de cette manière le détruit de l'intérieur.
Penser qu'il ne lui restera plus que ses yeux pour pleurer quand Deku repartira, le laissant seul ici alors qu'il ne possède plus rien, ronge sa poitrine comme un poison corrosif baignant ses os.
- Deku, il va se passer quoi maintenant ?
- Eh bien ...
Retirant finalement sa main de la sienne, Izuku tourne le dos à la grande fenêtre, déambulant de quelques pas sûr la moquette propre, faisant nerveusement tinter son trousseau de clé dans sa poche entre ses doigts.
- Tu penses qu'on devrait faire quoi Katchan ? Finir de détruire tout ce qu'on a ? Renier nos familles, que je demande le divorce du jour au lendemain .. Et après ? On va où, on fait quoi ?
Sans avoir bougé, Katsuki observe ses déplacements à travers la chambre calme, le laissant chercher ses mots sans l'interrompre.
Puis, vidant l'air de ses poumons dans un soupir lent et bruyant, Izuku se traîne jusqu'au bord du grand lit, s'asseyant dessus en appuyant ses coudes sur ses cuisses.
- Shoto ne sait pas où je suis ce soir, et j'ai dû lui mentir pour venir. J'ai l'impression qu'à chaque fois qu'on est ensemble toi et moi, on brise tout autour de nous. Alors ...
Redressant son dos, Izuku fixe son regard dans le sien pendant plusieurs secondes silencieuses.
Semblant chercher sa propre réponse dans ses yeux, le doute parait danser dans les reflets de ses iris.
- Shoto est quelqu'un de bien tu sais. Il mérite pas que je disparaisse sans raison du jour au lendemain .. Quand je l'ai rencontré, même si je ne lui ai jamais parlé de toi, j'avais la sensation qu'il m'aidait à me reprendre en main. On a .. des projets, une maison, et ...
Au bord de ses paupières, la ligne humide d'une larme se dessine en même temps qu'il finit par détourner le regard, s'interrompant dans son discours pour tenter de garder le contrôle sur son souffle.
Triturant anxieusement ses mains, tordant ses phalanges et ses poignets dans un sens et dans l'autre, il ferme finalement les yeux quand l'eau s'en échappe malgré ses efforts.
La voix perturbée par une vibration maladroite, il relève le nez vers le plafond, sans doute dans l'espoir de ralentir le flot sur ses joues.
- Toi et moi on sait même pas si on peut vivre ensemble. On a jamais eu ce genre de relation, et on s'est pas vu depuis des années ..
Prostré près de la fenêtre, Katsuki sent le sol trembler en dessous de ses jambes, semblant prêt à se dérober.
La maigre lueurs de ses espoirs s'essouffle au contact de la réalité, des conséquences de ses décisions et de ses fuites.
Le corps poignardé de l'intérieur, transpercé par les mots d'Izuku, il se tourne à nouveau vers le paysage.
Cognent doucement son front contre la vitre dans un léger bruit sourd, il abandonne l'idée de s'empêcher de pleurer.
Laissant toute la douleur, emmêlée dans des regrets, s'échapper pour noyer son visage, il ne retient pas non plus les spasmes de ses épaules et de son diaphragme.
Sans parler, mais restant attentif à ce que Deku lui dit derrière lui, il plaque ses doigts sur la vitre, y apposant ses empreintes digitales.
- Tout notre entourage a toujours tout essayé pour nous séparer, et je pense que je les comprends malgré tout. On était .. ingérables.
Un rire nostalgique interrompt le monologue d'Izuku avant qu'il ne renifle, plus pour se ressaisir que par nécessité.
- On vivait à travers un jeu, on ne se connait qu'à travers ça, on communique à travers ça, je sais même pas si on est capable de se comprendre réellement en dehors de ça. Pourtant, je suis presque sûr qu'on saura jamais faire autrement toi et moi et- Katchan regarde moi s'il te plaît.
S'efforçant de défroisser son visage pour ne pas lui montrer une grimace ridicule au moment de se retourner, Katsuki décolle son front et ses mains de la vitre, rouvrant ses yeux sur le paysage.
Le dos légèrement courbé, il aperçoit son propre reflet dans le verre, se trouvant pathétique et monstrueusement impuissant.
Mais, avec toute la force qu'il peut encore réunir, il obéit à sa requête, pivotant lentement sur lui même pour lui faire face.
Sur le lit, Izuku inspire entre deux sanglots maladroits.
- Alors je vais rentrer chez moi, je retrouverai mon mari et-
- Je t'en prie, me fais pas ça Deku.
Secouant la tête de droite à gauche, comme refusant de l'écouter, Izuku essuie vaguement son visage contre ses mains avant de se redresser sur ses jambes.
Venant à sa rencontre, se postant face à lui sans le toucher, il avale le mélange de larmes et de salive dans sa bouche avant de reprendre.
- Je suppose que ta mère a déjà prévenu la mienne de ce que tu as fait .. Quand elle me demandera, parce que je suis certain qu'elle va le faire, je lui dirai que je t'ai pas vu, qu'on s'est pas parlé.
- Deku s'il te plaît-
L'empêchant d'intervenir, Izuku plaque la paume de sa main sur le haut de son torse toujours découvert, lui intimant de ne pas l'interrompre davantage.
- Ensuite, je ferai comme si c'était vrai. Je changerai de numéro, comme toi à l'époque. Je disparaîtrai de ta vie, comme tu l'as fais il y a cinq ans. Et chaque jour, j'attendrai que tu viennes foutre ma vie en l'air, parce que c'est à ton tour. Et quand tu le feras, je tricherai pas. Parce que c'est comme ça qu'on fonctionne. J'accepterai de décevoir ma mère et mon mari, parce que c'est la règle. Et ensuite .. ensuite je sais pas.
Désorienté et le doute dans la voix, Katsuki fronce les sourcils en inclinant la tête sur le côté.
Un élan d'adrénaline venu de nul part, comme un vieux réflexe du corps, traverse son dos et, frottant ses yeux contre sa main, il redresse correctement sa colonne vertébrale.
- Je dois .. venir te chercher ? Mais où ?
- Je vais pas te le dire.
- Alors comment Deku ? Je suis censé te chercher partout et nul part, à deux cent bornes d'ici sans savoir exactement où ?
- Oui.
Puis, posant ses deux mains de chaque côté de son cou, Izuku sourit entre ses larmes, avant de fermer les yeux.
- Je porte le nom de Shoto, au cas où te viendrait l'idée de chercher mon nom quelque part. Mais je vais pas te le donner non plus.
- Et si je te trouve jamais ?
Avec pour unique indication une distance hasardeuse de deux cent kilomètres, sans nom et numéro de téléphone, retrouver Izuku relèverai presque du miracle.
Ou bien de l'acharnement.
- Tu l'as fais une fois, non ?
- Avec ton numéro. Là tu ..
- Je serai patient.
Enfin, remontant ses doigts sur les lignes de sa mâchoire, soufflant près de son visage, Izuku rouvre ses paupières pour le regarder dans les yeux quelques secondes, avant de poser un baiser mouillé de larmes sur ses lèvres.
Les émotions en désordre, la poitrine déchirée entre plusieurs sentiments contradictoires, Katsuki s'accroche à son tour à ses joues pour maintenir l'échange plus longtemps.
Un bouillonnement, au fond de son ventre, agite soudain son estomac et contracte les muscles de son abdomen quand sa température corporelle se mêle à celle d'Izuku.
Et, pour la toute première fois, peut être la dernière s'il ne parvient jamais à le retrouver, il s'autorise à découvrir le goût de l'intérieur de sa bouche.
Sentant sa langue contre la sienne, en même temps que son parfum se mélange au sien, l'atmosphère s'embrase autour d'eux.
La peau calcinée par cet échange bien trop tardif, et peut être sans suite, il emmêle légèrement le bout de ses doigts dans quelques mèches de ses cheveux.
Sa bouche pressée contre la sienne, le torse presque plaqué contre celui d'Izuku, il prend le temps de retenir toutes les saveurs de ce baiser, pour ne plus jamais l'oublier.
Puis, s'éloignant le premier, humectant ses lèvres avant d'avaler sa salive, Izuku recule de deux pas sans lâcher son regard.
- Devrait y avoir à nouveau des bus dans quelques heures.
Plongeant ensuite sa main dans la poche de son jean pour en sortir son téléphone, il s'avance vers la large fenêtre.
Ouvrant la vitre, tendant son bras dans le vide, il se mord la lèvre inférieure avant de laisser tomber l'appareil en bas des quatre étages.
De loin, le bruissement léger de l'écran explosant au contact du sol lui parvient et, même sans le voir, Katsuki sait que les dégâts sont irréparables.
- Je crois bien que je vais devoir me racheter un téléphone, avec un nouveau numéro.
Puis , continuant de s'éloigner à reculons jusqu'à atteindre la porte, Izuku presse lentement sa main sur la poignée sans l'ouvrir immédiatement.
- Avec un peu de chance, il te faudra moins de cinq ans cette fois ci.
Puis, tirant finalement sur la poignée pour s'échapper vers le couloir, il sourit une dernière fois.
- Au revoir Katchan.
Et Katsuki, debout au milieu de la chambre, le regarde disparaître de son champs de vision.
Fatigué, le ventre vide, sans papiers et sans argents, sans la moindre idée de ce qu'il fera demain, il fixe le vide laissé par le départ d'Izuku près de la porte.
Le souffle encore perturbé, les yeux humides et le feu dans la gorge, un rire nerveux et dérangé secoue subitement sa poitrine.
Sa voix résonne entre les murs, s'échappant par la fenêtre toujours ouverte et, perdant doucement les pédales, il presse la paume de sa main sur son front en fermant les yeux.
Lentement, traînant ses pieds sur la moquette comme un homme à l'esprit dérangé, il vient s'échouer sur le matelas bien trop large pour une seule personne.
La folie dans les veines, démuni de tout, il s'allonge sur le draps parfaitement bordé, alors que sa voix continue d'éclater comme un élan d'hystérie à travers la pièce calme, et rouvre ses yeux sur le plafond blanc et neutre.
Célibataire et renié par ses parents, livré à lui même sans possession, abandonné à son sort par l'unique amour de sa vie qu'il doit chercher il ne sait où, ses pensées divaguent à mesure qu'il rit sans raison dans un hôtel hors de prix.
Mais avec maintenant un seul objectif, qu'il atteindra ou pas, peut être dans six mois ou dans dix ans, il tourne son attention vers la porte encore ouverte de la chambre, se demandant si Deku est déjà sorti de l'établissement ou s'il marche encore dans les couloirs.
Cet enfoiré vient de le planter ici, et de le mettre au défi alors que c'est pas du tout son tour de jouer.
Mais, puisqu'il n'acceptera pas de perdre aussi facilement, puisqu'il demeure bien incapable de passer une vie sans lui courir après, il respectera la règle, cette fois.
Il ne va pas se défiler, pas cette fois, et peu importe ce qu'il devra encore sacrifier pour ça, il va le faire.
Ça le mènera quelque part, ou pas, mais il va le faire.
Il n'y arrivera peut être pas, si ça se trouve, mais capituler ne fait définitivement pas parti des options envisageables.
Puisque c'est ainsi qu'ils fonctionnent, puisqu'ils ne peuvent pas prendre de décisions l'un envers l'autre d'une autre manière, il n'a pas d'autre choix s'il veut le récupérer.
Sans ça, Izuku ne quittera pas son mari, pas si le jeu ne l'y oblige pas, et Katsuki devra encore trouver un moyen de briser ce mariage de force
Alors, quand il l'aura trouvé, s'il le trouve, ils feront ce qu'ils ont toujours fait.
Détruire tout autour d'eux, perde tout ce qu'ils ont, pour suivre un jeu stupide sans fin, et probablement sans gagnant.
_________
C'est drôle, j'ai l'impression de n'avoir rien publié depuis une éternité, alors que ça fait même pas deux semaines 😅
Ca doit vraiment me manquer !
J'en reviens pas d'avoir bouclé cette histoire aussi vite, je pensais avoir du mal à la finir à temps, mais finalement j'ai réussi 😁
Je vais me donner quelques jours uniquement pour mes recherches QASM, et puis peut-être que je trouverai l'inspiration pour écrire un autre OS pendant la dernière semaine d'Aout 😁
Ca me fait plaisir de poster un peu, ça faisait longtemps et j'adore pouvoir échanger un peu avec vous en même temps 🥰
Ca se ressent peut-être un peu pour ceux qui ont fait le lien, cette histoire est en partie inspirée d'une œuvre cinématographique franco-belge que vous connaissez peut-être 🙃 ( Vous voyez ? un film avec Guillaume Canet et Marion Cotillard 🤭 )
En tout cas ça me fait plaisir de publier une histoire et de vous retrouver 🥰
Cette dernière partie était un peu plus courte que les trois premières, mais les coupures me semblaient pile aux bons endroits alors j'ai pas voulu les décaler pour faire 4 parties exactement de la même longueur.
Ca faisait un moment que je ne m'étais pas autant pris la tête sur une histoire par contre, j'ai autant adoré l'écrire que râler dessus 😅
J'ai encore fait une fin .. disons entrouverte, j'espère que vous ne m'en voulez pas trop. 😊
J'en profite pour dire que vous êtes un peu plus de 230 à me suivre, et ça me fait tellement plaisir ! ❤ ( un peu la pression aussi, parce que je me dis que j'écris pour pas mal de monde finalement, et que je peux tout aussi bien vous faire kiffer que vous sortir un truc décevant 😱 )
Mais surtout, je vous remercie pour tout ce soutien ❤❤❤
Je vous embrasse très fort en attendant de se retrouver 😘
Prenez soin de vous ❤
PS : Je suis très fière d'avoir eu l'idée de mettre des faces de dés en guise de titre de chapitres et des pions de jeu de plateau pour les transitions. Voilà c'est tout, je voulais juste dire ça 😅
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