22.
Même si il ne le laissait jamais paraître, Jisung était profondément dévasté par la mort de Wooyoung. Ce qui était normal après tout, perdre l'un de ses amis les plus proches n'est pas un événement dont on se remettait facilement, surtout si l'on avait été accusé de son meurtre et que l'assassin courait toujours.
Souvent quand il était seul chez lui, le soir, il pleurait pendant des heures dans son lit, sans pouvoir s'arrêter, faisant le moins de bruit possible pour ne pas réveiller Felix. Il lui arrivait même de craquer à la fac, alors il s'enfermait dans les toilettes pendant quelques minutes le temps de se calmer.
Et à l'heure actuelle, fraîchement rentré de l'université, il pleurait à chaudes larmes dans sa chambre, ressassant ses souvenirs, et culpabilisant de penser à Minho alors que son meilleur ami, celui qu'il avait aussi aimé, était mort dans ses bras.
— Mec c'est Tchernobyl dans la salle de bain, t'as fait quoi sérieux ?
Felix venait d'entrer dans sa chambre comme une tornade, s'arrêtant brusquement en voyant Jisung essuyer ses larmes en vitesse.
— Bah, qu'est-ce qu'il se passe mon poussin ?
— Rien rien, mentit Jisung en reniflant. T'en fais pas.
Il s'asseya contre le lit, à côté de son ami, et l'enlaça. Il était là pour lui, pour lui remonter le moral. Il lui apporta d'ailleurs un des brownies qu'il avait fait, et ses attentions eurent un effet positif sur Jisung qui arrêta de pleurer et commença même à sourire.
— Je vais chez Minho ce soir, annonça Jisung doucement, le visage fendu par un petit sourire.
Felix fronça les sourcils en soupirant.
— C'est pas un peu trop rapide entre vous ? Et oublie faut que tu travailles quand, t'as pris pas mal de retard.
— Je sais... Mais en vrai, j'ai pensé que c'était trop rapide. J'suis tellement content de l'avoir retrouvé, 'fin je sais pas. C'est bizarre qu'on se reparle aussi rapidement et aussi facilement, mais ça me rend tellement heureux... Puis bon, c'est pas comme si c'était un gars que j'avais rencontré y'a deux jours.
— Ça tu gères, souffla Felix. Mais pense aussi à la réussite de tes études. Je sais que ca fait daron de dire ça mais t'es clairement un bon élève alors j'ai envie de te voir réussir.
Felix était un élève brillant. Sûr de lui, de ce qu'il voulait, et déterminé à réussir sa vie. Alors il était un peu comme son exemple et son soutien. Il admirait sa classe et son charisme naturel. Le jeune homme avait un regard de glace, et imposait le respect à chaque première impression. Sans aucun doute, il allait devenir un super avocat. Il savait que son ami avait raison et qu'il ferait mieux de travailler plutôt que de courir batifoler avec Minho.
— Si je t'ai toi comme modèle de travail à la maison, ça devrait aller.
Felix fit ressortir sa lèvre inférieure, touché par ses mots.
— Je vais travailler plus, promis.
Et il sortit de la chambre de Jisung, après lui avoir adressé un clin d'œil et crié un « ça c'est mon champion ! ».
Jisung avait aussi prévu de dîner chez Minho ce soir là, alors avant d'y aller, il était passé chez un grand fleuriste pour lui acheter un bonsaï. Il les adorait depuis toujours et Jisung ne savait pas si il avait pu s'en acheter un. Mais bon, dans le pire des cas, cela lui en ferait deux. Et puis, l'attention le toucherait dans tous les cas.
Alors il était arrivé chez le policier avec son arbuste dans le bras, et armé d'un grand sourire qui montrait ses petites dents de devant. Minho était comme un gosse ayant reçu une voiturette, il tournait l'arbuste dans tous les sens, l'admirait encore et encore et ne cessait de répète à quel point c'était beau.
Il avait pris Jisung dans ses bras et l'avait fait tourner autour de lui pour le remercier, sous les éclats de rire de ce dernier. Il avait décidé de l'appeler — car oui il tenait à lui donner un nom — Scrat, en référence à l'écureuil dans son film d'animation préféré.
Puis il avait incité Jisung à s'installer sur son canapé, et de boire quelque chose, et l'étudiant avait opté pour un gin. Et ils discutaient de la semaine qu'ils avaient passé, des cours de Jisung, de la mère de Minho qui allait très bien et qui était passée rapidement ce jour même, et qu'il serait très heureux de revoir.
Minho n'était pas un grand fan de l'alcool, peut importe lequel. Il n'en buvait que très rarement et lorsqu'il le faisait, c'était pour éviter de passer pour un rabat joie, ou parce que la situation l'exigeait. Mais il n'appréciait presque jamais.
— C'est vraiment dégueulasse, lâcha Minho en manquant de s'étouffer.
— C'est pas fait pour être bon en même temps.
— Non mais boire ça sans rien c'est comme avaler du détergent pour chiottes.
— Super Minho, souffla l'autre à demi exaspéré.
— Bon, il lança en se relevant. J'vais faire un truc à manger.
Ils étaient aller dans la cuisine, sans arrêter leur discussion, un autre album installé sur le tourne-disque. Ils avaient décidé d'improviser un simple plat de légumes accompagné de riz nature.
Minho parlait tout en faisant à manger. Il lui racontait ce film génial qu'il avait vu quelques jours auparavant. Mais Jisung ne l'écoutait qu'à moitié, préférant regarder les bras du noiraud découvert par son col roulé à manches courtes, ainsi que sa lèvre boudeuse et son arête nasale, encore plus jolie de profil. Même en coupant des poivrons il était magnifique.
Minho s'éloigna pour vider le contenu de sa planche dans une poêle, et se retourna pour se remettre devant le plan de travail, mais fut brusquement couper par deux mains froides se posant sur ses joues, et deux croissants de chair se posant sur les siens. Il sursauta légèrement, puis réalisa ce qu'il était en train de se passer. Il ne répondît pas au baiser, ce qui fit reculer Jisung.
— Je... J'suis désolé, j'aurais pas du...
Le policier ne lui laissa pas le temps de s'excuser et fondit lui-même sur ses lèvres. Il soupira de plaisir. C'était magique, ils sentaient leurs oreilles chauffer, leurs dents se cogner, leurs souffles chauds et leurs cœurs exploser, battant à tout rompre. Il n'y avait pas de mot pour décrire cette sensation de redécouverte de l'autre. Simplement unique et révolutionnaire.
Minho bascula légèrement en arrière avec Jisung qui l'avait tiré par la taille, et dans son élan il avait fait tomber par terre les deux assiettes posées sur le plan de travail. Le fracas les firent sursauter et s'arrêter brusquement.
— Oh merde ! Pardon pardon !
Minho éclata de rire, le moment était bien choisi pour casser des assiettes. Il attrapa la main de Jisung qui s'était baissé pour ramasser les morceaux de céramique brisée, de confondant en excuse.
— C'est pas grave, répéta Minho en rigolant. On s'en fout.
Alors Jisung reprit l'assaut de ses lèvres. Puis sans qu'il ne s'y attende, Minho sentit une pression sous ses cuisses et atterrit sur le plan de travail, pour ne pas risquer de marcher pieds nus sur des morceaux de vaisselle coupants. Il ne s'attendait pas à ce que Jisung soit si musclé.
Il passa outre ce détail et se reconcentra sur lui, la main caressant sa mâchoire, l'autre agrippée à ses hanches féminines. Tout son corps brûlait, pas de passion fiévreuse à cause de ce baiser, mais d'euphorie. Il retrouvait cette intimité amoureuse qu'il avait eu avec Jisung il y a si longtemps maintenant. Et c'était bon.
Et ils avaient continué à s'embrasser, lentement, fougueusement, chastement, ou encore délicatement. Ils s'étaient redécouverts, ils étaient absorbés par leurs émotions, noyés par ce sentiment léger et agréablement brûlant. Et ils avaient dansé, fait valser leurs cœurs et leurs corps, fait chanter leurs rires dans le salon, fait se rencontrer leurs pupilles dilatées de bonheur. Et ils avaient su.
Jisung était maintenant allongé sur le canapé, caressant les cheveux de Minho assis par terre, juste à côté de lui. Le vinyle tournait toujours, remplaçant le silence. Il n'était pas lourd, simplement là, comme si ils en avaient besoin. Mais le blond et décida de la rompre.
— Wooyoung et moi on s'aimait plus que comme deux amis.
Minho releva la tête vers lui, légèrement surpris.
— J'vais pas m'attarder dessus, ricana-t-il. Mais je vais pas te mentir, j'arrivais pas à passer à autre chose. Après toi, je veux dire. Encore une des raisons pour lesquelles on s'était disputés, il arrêtait pas de dire que je t'aimais encore et qu'il fallait que j'avance.
Il inspira longuement avant de reprendre, se triturant les mains.
— Il avait raison, enfin maintenant... c'est assez ironique, mais comme je t'ai retrouvé j'me dis qu'il avait tort... Enfin bref je m'égare.
Il semblait parler tout seul, comme prit dans ses pensées.
— C'est ridicule mais même si j'suis parti comme le dernier des fils de putes, je tenais à te dire ça. Que j'ai jamais pu passer à autre chose et que, t'as toujours occupé la première place dans mon coeur, quoi.
Ça, c'était une sacrée révélation, à laquelle Minho ne répondit pas de suite, la bouche bée, les sourcils froncés, et l'estomac en vrac.
Aucun geste affectif n'aurait pu remplacer le silence à cette instant. Il n'était pas gênant, il était nécessaire, pour que les deux jeunes hommes digèrent ces informations. Ils n'avaient pas besoin de se prendre dans les bras, ils laissaient les mots et les pensées agir et émouvoir. Ils parlaient à cœur ouvert pour refermer les plaies de leurs cœurs ensuite.
— Minho ?
— Hm ?
— Est-ce que tu pourras me pardonner un jour ?
— Jamais j'oublierai ce que tu m'as fait, et je pense que je ne te pardonnerai jamais.
Sa tête tomba vers l'arrière. Ces mots lui déchiraient le cœur, et ses yeux perlèrent.
— Comment je pourrais te pardonner, alors que ton départ c'est...
Il sembla hésiter, chercher ses mots un instant. Pour la première fois depuis le départ de Jisung, il parlait à cœur ouvert, simplement et sans retenue de ses sentiments.
Il s'ouvrait à son bourreau, à celui qui l'avait détruit, pour lui faire comprendre sa douleur. Sans s'en rendre compte, il rendait la monnaie de sa pièce à Jisung, pour toutes ces années qu'il avait passé, une place vide à ses côtés, qu'il aurait espéré comblée par son ami.
— Ton départ, c'est comme si je m'étais retrouvé dans un endroit complètement vide, blanc, pendant un instant, et puis que tout s'envolait, qu'il n'y avait plus rien quand je revenais. Puis jour après jour, on me plantait un couteau dans le coeur. Jour après jour, j'espérais que tu reviennes, que tu donnes un signe, mais rien.
Il l'écoutait silencieusement, la vision troublée par ses larmes.
— Mais beaucoup d'années sont passées entre temps. J'ai peut-être pas beaucoup évolué, sentimentalement parlant, ou même psychologiquement, mais je sais que je suis près à avancer, sans y repenser. A passer au dessus parce que finalement, je peux pas changer le passé, et toi non plus. Ressasser tout ça ne fera qu'empirer les choses, et c'est pas ça qui changera ce que t'as fait.
Il entendit Jisung renifler péniblement, et attrapa sa main pour y entrelacer la sienne, la caressant de la pulpe du pouce.
— Et puis....
Il pivota légèrement la tête, suffisamment pour apercevoir le blondinet du coin de l'œil.
— Je serais vraiment bête de te laisser filer maintenant, pour une histoire qui s'est passée au lycée.
Minho le savait, Jisung était juste un enfant qui avait grandi trop vite, qui avait du tout faire plus tôt que les autres, ou qui les avaient faites parce qu'il était perdu. Il avait malheureusement touché à la drogue, sans personne pour l'en empêcher, et s'en était pourtant sorti, à temps. Alors Minho ne lui en voulait pas. Il voulait simplement l'aider à avancer, en même temps que guérir sa blessure à lui.
olalala trop d'émotions TROP
alors ? 😆je sais vraiment pas quoi en penser
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