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𐚁 Chapitre 80

━━━┅━ M I N H O ━┅━━━

   Ma main se cajolait parfaitement dans le creux de celle de Jisung. La sienne n'était pas plus grande mais beaucoup plus ferme malgré sa paume pourtant si douce et sa poigne de fer. J'avais comme l'impression qu'il craignait que je disparaisse soudainement, que je lui échappe alors que je ne souhaitais absolument rien d'autre qu'être constamment près de lui. Nous nous faisions tous les deux face, un sourire béat sur nos visages alors qu'on venait de frapper à la porte devant laquelle nous nous tenions.

Jisung avait gentiment pris l'initiative de faire un détour à mon arrêt de bus pour m'y récupérer dans l'unique but de continuer ensemble le chemin jusque chez Changbin. Ça pouvait sembler tirer par les cheveux mais chaque opportunité était bonne pour passer du temps rien que tous les deux. Cet après-midi, nous allions le passer à réviser en compagnie de notre groupe d'amis et il fallait dire que je n'avais pas encore l'habitude de mon statut de couple en public. J'avais peur de paraître trop collant ou bien, au contraire, distant et mal à l'aise. Il était évident que l'ex-blondinet n'y prêtait pas attention et devait très probablement se moquer de l'opinion générale. Cependant, je craignais tout particulièrement qu'il ait honte de moi, de mon comportement ou bien de mon apparence.

C'était une peur dite irrationnelle mais qui m'envahissait dès la moindre occasion, malgré moi.

Je sursautai légèrement en sentant la main de mon petit-ami se poser doucement sur mon crâne, comme s'il se rendait compte que j'avais besoin d'être réconforté. Celui-ci se hâta de recoiffer quelques mèches de mes cheveux avant de passer sa main à travers sa propre tignasse fraîchement recolorée. Je l'observai ainsi amoureusement, mes iris emplis d'admiration à son égard alors que des bruits se faisaient entendre derrière le battant verni. Rapidement, ce dernier s'ouvrit en un mouvement brusque pour nous laisser apercevoir l'un des propriétaires de la demeure. Changbin arborait un rictus chaleureux sur son faciès joufflu, rictus qu'on attrapa comme une maladie contagieuse avant d'être incité à entrer.

— Les autres sont déjà là ? Questionnai-je en retirant mes chaussures alors que je pouvais déjà distinguer des voix provenant du séjour.

— Ouais, 'manque plus que Hyunjin. Me répondit-il ensuite tandis que Jisung pouffait de rire.

— Il va quand même pas encore venir avec son Troye, si ?

Une remarque qui ne manqua pas de nous faire rire à l'unisson, soudainement tous complices dès qu'il s'agissait de se moquer – gentiment – de notre ami commun. Nous étions de toute façon habitués à ses retards depuis belle lurette, alors il n'y avait jusque-là rien d'anormal dans le début de cet après-midi. Lorsqu'on pénétra dans le grand salon élégamment décoré, j'aperçus immédiatement Junji et Seungmin. Tous deux étaient installés sur le canapé alors que Changbin se dirigeait naturellement vers le fauteuil dans leur perpendiculaire qu'il s'était déjà certainement approprié. On se salua ensuite mutuellement, ravis de se revoir en dehors du cadre scolaire même si nous allions principalement nous focaliser sur nos révisions pour l'épreuve écrite de philosophie et le Grand Oral du baccalauréat.

Jisung ne réfléchit pas à deux fois avant de s'asseoir sur le tapis autour de la table basse. Il ne souhaitait probablement pas être à proximité de Seungmin, lui qui pourtant l'observait du coin de l'œil, alors je l'imitai et m'assis auprès de lui. Le jeunot esquissa un sourire en s'en rendant compte, il me regarda avec une pointe de timidité puis s'approcha un peu plus de moi, nos genoux désormais collés l'un à l'autre. J'étais rassuré qu'il fasse le premier pas, qu'il assume entièrement notre relation devant les autres et qu'il me montre que je ne devais pas m'empêcher de me comporter comme je le voulais. Ce n'était pas comme si j'étais quelqu'un de très tactile en public, de toute façon, mais ça me rendait heureux de savoir que Jisung ne se gênerait pas de l'être si l'envie lui prenait.

— 'Fait super chaud, aujourd'hui. Souffla le susnommé en s'éventant à l'aide de sa main.

— Vous voulez boire un truc ? Proposa ensuite Changbin, ce à quoi on acquiesça vivement. C'est dans le frigo, vous savez où il est.

— T'abuses, même pas aimable avec tes invités. Râla Jisung en levant les yeux au ciel.

Je laissai m'échapper un léger ricanement en le regardant se lever avec peu d'envie et beaucoup de complaintes. Mais alors que je m'apprêtais à le suivre pour l'aider à apporter de quoi nous désaltérer, il me fit comprendre d'un mouvement de tête qu'il s'en occupait lui-même. On s'échangea ainsi un sourire puis sa silhouette s'effaça dans le cadre de la porte. Pile à cet instant, alors que je m'apprêtais à sortir mes affaires de cours afin de les poser sur la table basse, Seungmin se redressa en appuyant ses avants-bras sur ses cuisses. Il me chercha du regard, Changbin et Junji occupés à discuter de leur côté, puis afficha un énorme sourire sur ses lèvres lorsque je portai mon attention sur lui. Intrigué, je haussai les sourcils pour l'inciter à s'exprimer car, le connaissant, il voulait certainement profiter de l'absence temporaire de Jisung pour m'adresser la parole.

— Alors ? Commença-t-il. Comment ça se profile ?

— De quoi tu parles ? Je l'observai en clignant des yeux, confus.

De toi et Jisung. On n'a pas trop eu le temps d'en discuter, tu m'envoies plus de messages depuis que vous êtes ensemble.

Sa remarque me compressa le cœur. Je n'avais pas vraiment d'excuses, pour dire vrai, je ne m'étais même pas rendu compte d'avoir mis mon amitié avec Seungmin de côté depuis le début de ma relation avec Jisung. On se voyait tous les jours au lycée mais, en y réfléchissant, notre dernière discussion par messages remontait à déjà plus d'une semaine. Je m'en voulais, désormais. L'expression hésitante sur le faciès du brunet me laissait supposer que les moments qu'on avait pu passer ensemble lui manquaient et je devais avouer qu'à moi aussi. C'était étrange de se dire que nous n'avions pas loupé un seul jour pour discuter, ni une seule occasion pour se voir pendant plus d'un mois et que, maintenant que son aide avait porté ses fruits, tout ce que nous avions bâti s'était évaporé.

— Oh... Pardon, je suis super occupé en ce moment... M'excusai-je alors, craignant d'avoir pu le blesser.

— T'inquiète, je comprends ! Ça me fait juste un peu bizarre qu'on traîne plus ensemble, mis à part quand on sort avec notre groupe de potes.

Je comprenais son point de vue, je le comprenais et le partageais aussi. Seulement, ça me gênait qu'il en parle si ouvertement même en l'absence de Jisung. J'adorais Seungmin et j'aimais passer du temps avec lui, alors c'était évident que j'accepterais volontiers de lui accorder plus d'importance s'il ne s'était pas déjà passé tout ça entre nous. On était amis à l'heure actuelle mais je n'oubliais pas qu'on avait aussi été très intimes ensemble et, par "tout ça", je pensais aux simples baisers, aux rendez-vous innocents, puis surtout à mon envie d'aller plus loin avec lui qui faisait surface à certains moments.

Ça n'avait été que des pensées vacantes sans réelles significations mais elles avaient été suffisantes pour semer le doute dans mon cœur pendant quelques jours. Aujourd'hui, je n'y pensais plus mais je ne pouvais m'empêcher de me dire que j'aurais potentiellement pu tomber pour Seungmin si Jisung n'avait pas réciproquer mes sentiments à temps. Après tout, j'avais même menti à mon copain pour lui éviter davantage de répercussions sur leur amitié. Je l'avais fait dans l'unique but d'apaiser les tensions mais, au final, je craignais que cette histoire ne me retombe un jour dessus. Je ne voulais plus de ressentiments, plus de chagrins, plus de doutes ni de regrets... Alors, pour ce faire, je me devais d'instaurer des limites et mettre en place une assez grande distance entre lui et moi, pour le bien de tous.

Entièrement plongé dans mes songes, mes yeux fixés sur mes mains jointes dans le creux de mes jambes, je commençais à angoisser. Cette simple pensée s'était multipliée en un tas de milliers d'autres toutes aussi anxiogènes, m'enfermant dès lors dans ce fameux engrenage que je n'avais pas enduré depuis mes retrouvailles avec Jisung. Ce dernier me fit d'ailleurs sursauter en s'asseyant soudainement près de moi. De nouveau conscient, je l'observai déposer quelques verres sur la table basse et une bouteille fraîche de soda pour tous nous en faire profiter. Un brouhaha s'éleva alors peu à peu dans la pièce, mes amis se servant chacun à leur tour tandis que je restais, pour ma part, silencieux dans mon coin, le coeur lourd et vif

— Ça va ? Me questionna Jisung.

Surpris, je tournai ma tête vers lui en cherchant quoi lui répondre mais fus malheureusement interrompu dans ma réflexion par des coups fracassants sur la porte d'entrée, puis le bruit de celle-ci qui s'ouvrait sans attendre de permission. Curieux, je fis volte-face en même temps que les autres pour connaître l'identité de cet intrus et que fut notre surprise – ça n'en était pas vraiment une – en découvrant qu'il s'agissait de Hyunjin. Ce dernier, culotté et tout sourire, pénétra dans la demeure comme dans un moulin et n'y voyait apparemment aucun problème.

— Salut, les copines ! S'exclama-t-il de manière enthousiaste.

On le salua ainsi en retour sur le même ton, peu rancuniers malgré son habituel retard qui n'étonnait finalement plus personne. Jisung le suivit d'ailleurs du regard, analysant ses moindres mouvements en portant toute son attention sur le grand blond qui s'installa sur le canapé. Il devait probablement déjà avoir oublié la question qu'il venait de me poser puisqu'il ne la réitéra pas, il ne posa même pas les yeux sur moi. Cependant, je ne lui en voulais pas, j'aurais certainement omis la vérité, de toute façon. Je déglutis, maussade. Si je continuais de me sentir aussi mal, il était clair que je ne resterais pas ici autant que prévu.

Une complainte sortie de la bouche de Junji attira mon attention. Le pauvre adolescent se débattait à cor et à cri pour tenter de s'échapper hors de l'étreinte de Hyunjin, celui-ci à priori on-ne-peut-plus heureux de le revoir. Il avait pourtant toujours la manie de le saluer de cette manière mais le jeunot ne devait pas réussir à s'y faire, trop timide.

— Tu es en retard, Hyunjin-san. Lui fit-il remarquer en ricanant.

Ce rappel à la réalité força le concerné à grincer des dents avant de lâcher un soupir qui se voulait dramatique.

— C'est pas ma faute, j'ai loupé mon bus ! Se plaignit-il, contradictoire. Du coup, j'ai pris le suivant mais il a dû faire un détour parce qu'il y a eu un accident sur la route.

— Ah ? Rien de grave ? S'interrogea Seungmin.

— Non, je pense pas mais bon... En attendant, je suis content de voir que vous m'avez attendu comme la star que je suis !

Tous se mirent à rire, amusé par l'impertinence de notre ami qui se sentait pousser des ailes. De mon côté, je ne pouvais m'empêcher de regarder discrètement Jisung boire une gorgée de sa boisson avec un rictus au bord des lèvres. J'avais soif à mon tour et ce fut en jetant un coup d'œil à mon propre verre que je constatai qu'il était plein. Mon petit-ami avait dû me servir lorsque j'étais distrait et ce geste, pourtant si anodin, me fit esquisser un sourire. Aussitôt alors, je l'imitai et me rafraîchis en permettant à mes idées d'en faire de même.

— Je croyais que tu viendrais avec Troye, moi. Lança Jisung, moqueur.

— Le mec qui abuse de la blague, tu sais. Enchaîna Changbin en soupirant.

— J'avoue.

— J'y ai pensé mais comme c'est une session d'études, il se serait grave fait chier. Rétorqua le concerné.

— Il aurait tenu compagnie à Junji, en vrai.

— Et tu crois que j'aurais pu rester concentré si mon homme et mon fils se faisaient une séance détente sans moi ?

— Comme si t'allais savoir te concentrer, de toute façon. Renchérit le maître de maison.

Je pouffai de rire en même temps que les autres. J'adorais les voir se chamailler et se taquiner gentiment, c'était franc mais jamais blessant, chacun connaissait les faiblesses des autres et ce qui faisait leur force, alors personne n'en abusait. Ces moments étaient simplement agréables à passer, tous ensemble. Hyunjin, je l'appréciais beaucoup. Je l'admirais, en fait. Ce n'était pas mon ami le plus proche, on ne se connaissait que depuis la terminale, après tout. Néanmoins, tout le long de cette année où nous côtoyer avait été inévitable, non seulement car on se retrouvait dans la même classe mais aussi parce qu'on possédait des amis communs, j'avais découvert une personnalité haute en couleur qui me laissait les yeux pétillants à chaque fois que je le voyais.

Hyunjin était sûr de lui, extraverti, il avait toujours de bons sujets de conversation et tout le monde se retrouvait subjugué devant sa beauté à couper le souffle et son charisme qui ne laissait jamais personne indifférent. Il était drôle aussi, d'une maladresse qui attendrissait. Et je l'enviais un peu – ou même complètement – car, comme à son habitude, il avait les yeux de tous posés sur lui, y compris les miens. J'aurais tellement aimé avoir son assurance et toute cette attention à mon égard, à condition qu'elle soit intégralement positive, ce qui n'était pas toujours son cas. Seulement voilà, comme j'en avais la forte impression ces derniers temps, je demeurais invisible et inutile. Je culpabilisais aussi d'y penser maintenant alors que j'étais censé profiter de cet instant précieux qui ne tarderait pas à devenir rare.

Malgré ça, j'étais là sans véritablement être présent. Je sirotais ma boisson en me demandant constamment si je n'avais pas mieux fait de rester chez moi pour étudier de mon côté parce qu'à priori ça n'était pas non plus la priorité de mes amis, bien trop absorbés par leur discussion. On n'était pas prêt de commencer et, pour être honnête, ça nourrissait davantage mon angoisse.

— Tu veux des cacahuètes ? Me proposa subitement Jisung en se tournant vers moi.

— Hum... Non, merci.

— Bon ! Hurla presque Changbin en tapant dans ses mains. Il est temps de s'y mettre.

Il reçut un râle général en guise de réponse, personne ne semblait avoir envie de s'exécuter. Une plainte qui était plus pour la forme qu'autre chose puisque, aussitôt, on se dépêcha de sortir nos fournitures, tous hormis Junji. Ce dernier s'était décidé à voler la place de Hyunjin, qui avait préféré s'installer à même le sol, pour s'allonger confortablement et jouer à la switch qu'il avait dû amené en amont. Nous allions étudier ensemble la philosophie en repassant sur chacune de nos leçons pour réviser les parties susceptibles de sortir le jour de l'examen. L'épreuve écrite avait lieu dans exactement trois jours, alors il était hors de question de se tourner les pouces. Heureusement, j'étais assez bon dans ce domaine, chose qui ne m'aurait donc pas donné du fil à retordre si je n'avais pas loupé la fin de tout un trimestre.

À cause des récents événements, j'avais souvent été absent au lycée et malgré le fait que j'appréciais énormément la matière, je ne l'avais pas du tout travaillé et encore moins rattrapé lorsque j'en avais eu l'occasion. Seungmin m'avait été d'une grande aide pendant cette période, ce qui n'était plus un secret pour personne. Élève assidu, il avait pris soin de rédiger chaque cours dans son entièreté et de scanner les feuilles dont j'avais besoin pour me les donner ensuite. Je lui devais beaucoup, tellement que ça me mettait parfois mal à l'aise. Néanmoins, grâce à lui, je n'avais juste qu'à rattraper ce petit retard avant de pouvoir réviser mes fiches de synthèses comme mes autres camarades. Plus facile à dire qu'à faire, je n'arrivais pas à visualiser le bout du tunnel.

— Tchu me dis chi t'as bechoin d'aide. Chuchota Jisung au creux de mon oreille avant de se redresser.

Je relevai rapidement ma tête vers lui dans le but de le remercier mais fus surpris de le voir les joues exagérément remplies – je me doutais – de cacahuètes. Ça expliquait sa manière de parler à l'instant... Nos regards se croisèrent ainsi pendant de longues secondes sans qu'aucun de nous ne le détourne. Il ne mâchait plus, comme s'il se trouvait honteux d'avoir été pris la main dans le sac. Quant à moi, je l'observais en clignant frénétiquement des paupières, ne sachant pas comment réagir face à sa gloutonnerie. J'avais envie de rire, de me moquer de lui et de passer tout l'après-midi à le charrier à ce sujet mais ce n'était pas le moment, alors je devais me contenir et faire comme si rien ne s'était passé. Aussi naturellement que possible, je hochai la tête pour lui montrer que j'avais entendu sa proposition puis focalisai mon attention sur mon manuel.

Ce fut compliqué d'ignorer à quel point il était adorable, en plus de la montée d'amour que je ressentais soudainement pour lui actuellement. J'eus un mal fou à effacer cette image de mon esprit mais, lorsque je réussis enfin, je pus me concentrer pleinement sur la philosophie. Je donnais mon maximum et je devais avouer que je m'en sortais plutôt bien, plus les minutes passaient et plus j'avançais sans être distrait. Nous avions décidé de fonctionner par sessions de trois quarts d'heure de révision puis d'un quart d'heure de pause et ainsi de suite. Et, au départ, ça marchait vraiment bien. Le salon était calme, certains posaient des questions, d'autres y répondaient, on grignotait et buvait comme bon nous semblait, personne ne faisait de vague... Jusqu'à ce que l'un d'entre nous en ait plein les bottes.

Les aiguilles de l'horloge que je fixais sans cligner des yeux venaient d'annoncer dix-huit heures trente. Il était évident que je n'arrivais plus à me concentrer sur les leçons, je me sentais fatigué et la soudaine onomatopée que lâcha Hyunjin me fit faire un bond sur place. L'ébène s'était affalé sur son livre, l'air dépité tant il semblait en avoir marre d'étudier. Je l'observai alors, compatissant, avant de sursauter à nouveau, cette fois-ci à cause de la réprimande que Changbin était en train de lui faire. Ces gens-là ne savaient pas communiquer dans la sérénité, il fallait apparemment toujours que mes tympans en souffrent et que je frôle la crise cardiaque. À ce moment-là, j'en conclus que ma batterie sociale était totalement vide, je n'avais même plus la force d'ouvrir la bouche ni de bouger le petit doigt.

— Minho, t'es là ?

Jisung dût se répéter plusieurs fois avant que je ne l'entende réellement, trop absorbé par le néant qui m'enserrait petit à petit. Le brouhaha animant de nouveau la pièce, j'avais du mal à me ressaisir et à réagir à la voix de mon petit-ami qui – pourtant, je le comprenais inconsciemment – devenait de plus en plus inquiet. Il fallut qu'il pose sa main sur ma nuque pour que je puisse enfin sortir de cette catalepsie. D'un mouvement tout de même hésitant, il avait progressivement resserré sa prise sur ma peau pour tenter de tirer une quelconque réponse de ma part et ce ne fut pas en vain. Lorsque je plongeai mon regard encore absent dans le sien, je remarquai ses sourcils froncés d'incompréhension et ses pupilles brunes qui me dévisageaient.

Ce fut n'empêche à mon tour d'être confus quand il se leva subitement, sa main tendue vers moi pour m'aider à me mettre sur mes deux jambes. Malgré tout, j'acceptai volontiers son appui, curieux de savoir ce qu'il s'apprêtait à faire ou, plutôt, à dire puisqu'il s'adressa ensuite à Changbin.

— J'accompagne Minho dans la salle de bain, il se sent un peu mal.

Personne ne fit de remarque, si ce n'était leurs faciès changeant tout à coup d'expression pour en aborder une reflétant de la préoccupation. J'étais extrêmement soulagé que Jisung ait pris cette décision à ma place, qu'il ne m'ait pas posé de questions auxquelles je n'aurais pas pu répondre et qu'il prenne ainsi le temps de s'occuper de moi. Ce n'était rien de bien grave mais il avait dû comprendre que j'avais besoin de quelques minutes de tranquillité avant de retourner dans ce zoo. Ce n'était pas la première fois qu'il me voyait dans cet état, après tout.

Nos mains toujours accrochées l'une à l'autre comme si elles ne s'étaient finalement pas quittées depuis notre arrivée, je suivais ses pas en essayant de ne pas tituber. J'avais l'impression d'avoir usé toute mon énergie et qu'il ne s'agissait que de minutes avant que je ne m'écroule d'épuisement. On se dirigea dans le hall d'entrée où se situaient les escaliers menant à l'étage supérieur, là où – je supposai – se trouvait la salle de bain jusqu'à laquelle Jisung comptait m'emmener. J'avais l'estomac noué et je piquais du nez, nul besoin de s'interroger sur la raison, le stress était bien évidemment l'auteur de tous mes maux et mes absences de mots. Heureusement pour moi, on se retrouva vite devant la pièce d'eau. Jisung entra en premier en allumant la lumière puis, quand je mis à mon tour les pieds à l'intérieur, il referma doucement la porte

— Tu veux t'asseoir ? Me questionna-t-il sans me lâcher la main.

Ce à quoi je répondis positivement en hochant la tête. Je laissai ensuite mon regard se balader autour de moi en cherchant un endroit où m'installer mais, à vrai dire, il n'y avait pas beaucoup d'options. Les toilettes se trouvant dans une pièce à part, la seule solution se trouvait être le sol même. Le carrelage froid ne me faisant pas de l'œil, je me tournai vers Jisung pour le solliciter silencieusement en espérant qu'il puisse me proposer autre chose. Celui-ci huma doucement en réfléchissant et on resta ainsi une dizaine de secondes avant qu'une idée lui vienne en tête. J'aurais dû me souvenir à cet instant-là que mon copain n'avait jamais réellement de bonnes idées, surtout muni du genre de rictus malicieux affiché sur son visage actuellement, mais je décidai de faire l'aveugle pour cette fois-ci.

Confus mais surtout très curieux, j'observai alors attentivement le brunet se déplacer dans la petite pièce jusqu'à la baignoire dans le fond de celle-ci. Il enjamba le rebord pour y pénétrer puis, comme si son action était ordinaire, s'asseya dedans en laissant reposer son dos contre le mur perpendiculaire au récipient. Il poussa un soupir de contentement puis replia légèrement ses jambes avant de les écarter et de m'inciter à le rejoindre d'un signe de tête. Cependant, je ne bougeai pas. Il fallait dire que j'avais déjà du mal à comprendre ce qui m'arrivait en ce moment même, alors tenter de décrypter le message que Jisung voulait me faire passer était mille fois pire. Est-ce qu'il voulait prendre un bain ? Là, maintenant ? Avec moi ?

— Bah viens, qu'est-ce que t'attends ?

— Dans la baignoire ? Répliquai-je, d'autant plus perplexe.

— Ouais, on va discuter.

Ça ne me prit pas très longtemps avant de céder à ses avances. La place qu'il me réservait ne semblait pas si confortable que ça mais je ne me plaindrais pas d'être caler contre son corps comme je l'étais actuellement. J'étais dos à lui, dans le creux de son bassin tandis qu'il avait entouré mes épaules de ses bras. Et je fondais complètement dans son embrasse, chaleureuse, rassurante... L'arrière de mon crâne était posé contre sa clavicule, mes paupières closes. Le silence régnait malgré les échos de nos respirations que ces quatre murs nous renvoyaient, je me sentais bien près de lui, je ne voulais plus partir et je ne voulais pas non plus discuter. C'était bien mieux si aucun de nous ne parlait, si on profitait simplement de cette intimité en se suffisant l'un à l'autre. Seulement, je ne pouvais pas flotter indéfiniment parmi les nuages.

— Comment tu te sens ? Demanda Jisung, le volume de sa voix si bas qu'on aurait dit un murmure.

Je déglutis, mes yeux de nouveau ouverts. Pour être tout à fait honnête, j'en avais aucune idée et je ne souhaitais pas non plus l'importuner avec mes pensées alors qu'il devrait être avec les autres, à l'heure qu'il était. C'était si dur de ne pas avoir la force de m'exprimer et de me sentir coupable d'inquiéter les personnes autour de moi. Je voulais à la fois lui dire tout ce que j'avais sur le cœur et, d'un autre côté, tout refouler pour éviter de lui imposer mon propre spleen. Ce n'était pas grand-chose, quelques tracas que je devais apprendre à gérer intérieurement, rien de plus.

— Tu sais que tu peux te confier à moi, maintenant ?

Le son de sa voix, toujours aussi faible, m'avait surpris. Je n'avais même pas remarqué avoir de nouveau fermé mes yeux, bercé par les caresses que son pouce dessinait sur mon bras. J'aurais pu m'éterniser ainsi des heures et même prétendre m'être endormi en son sein mais Jisung était visiblement déterminé à obtenir des réponses et je n'avais plus la force de garder le silence. J'étais touché qu'il insiste, qu'il s'intéresse, qu'il s'inquiète pour moi... Seulement, lui dévoiler chacune de mes pensées n'était pas chose aisée et ce, malgré son statut de petit-ami. Les yeux désormais ouverts, je relevai la tête pour rencontrer le regard du jeunot qui, lui, m'observait déjà.

— Je sais. Lui dis-je avant de baisser de nouveau les yeux sur mes mains. Je suis juste un peu fatigué, c'est tout.

— Fatigué ? Tu dors pas assez ?

— Non, pas trop... Répondis-je en un soupir.

— Pourquoi ?

— Je crois que j'angoisse un peu à cause des exam' et de l'obtention du bac', en général.

Ce n'était pas un mensonge, juste un petit morceau de la vérité. Comme tout étudiant pendant cette fameuse période, je stressais beaucoup, une crainte presque irrationnelle de ne pas décrocher mon diplôme même si je m'en savais capable. Cajolé dans ses bras, je sentis immédiatement lorsqu'il gesticula pour s'incliner sur le côté en m'enveloppant davantage de son corps. Il chercha mon regard du sien puis, tendrement, prit mon menton dans sa main. Je pus lire dans ses iris du tourment et de l'affection, une potion que je distinguais comme étant source d'amour. Pourtant, je baissai de nouveau le regard en esquivant son toucher comme s'il me brûlait.

— Pourquoi tu m'as rien dit..? Me questionna-t-il, plus hésitant cette fois-ci.

— Je voulais pas m'apitoyer sur mon sort... Tu dois être sous pression, toi aussi.

— Dis pas n'importe quoi, D'un mouvement vif, voilà que mon visage se retrouva une nouvelle fois entre ses paumes. les exam' ça stresse tout le monde mais ça veut pas dire que t'as pas le droit de t'en plaindre.

Notre position n'était pas la plus confortable mais j'aimais voir l'acharnement dans les yeux de Jisung. Et au fond, je savais qu'il avait raison mais ça ne m'empêchait pas de penser que garder tout pour moi était la meilleure chose à faire dans cette situation, au risque de prendre l'habitude de me reposer sur mon petit-ami. Je ne voulais pas qu'il ait ce rôle dans notre relation, qu'il soit uniquement celui qui écoute et moi celui qui débite. J'espérais que notre relation – bien qu'elle venait tout juste de débuter – soit équilibrée, basée sur la confiance, le partage et la légèreté. Il s'agissait de ma toute première mise en couple mais je savais pourtant très bien qu'en priorisant mes sentiments on courait droit dans le mur. Alors, je voulais me faire tout petit, causer le moins de tracas à Jisung et ne lui apporter que joie et paix.

— 'Y a pas que ça, si ?

Mais comment étais-je censé me montrer stoïque et insensible alors qu'il me regardait avec des étoiles plein les yeux. Les miens ne firent pas long feu avant de se remplir de larmes, l'intensité de son regard me prenant subitement aux tripes. Ses mains lâchèrent ma mâchoire et l'une d'elles vint, à la place, se caser dans mon cou. Les frissons qui remontaient le long de mon échine en étaient presque douloureux tant je tremblais d'angoisse. C'était ridicule, j'avais l'impression d'en faire des caisses et de ne pas savoir mesurer l'ampleur de mes petits secrets. Seulement, même si j'essayais tant bien que mal de rationaliser, je restais anxieux. La boule de stress autrefois logée dans le creux de mon estomac s'était déplacée dans ma gorge, bloquant ainsi tout son qui tentait de se faire entendre.

Désormais temporairement muet, je décidai alors de confirmer sa question en secouant ma tête de gauche à droite, suite à quoi il soupira. C'était un soupir de soulagement, il était visiblement rassuré que j'accepte de lui en dire plus mais, comme de paire, je pouvais aussi apercevoir de l'anticipation dans l'expression de son visage. Ses sourcils épais ne trompaient personne lorsqu'ils se tordaient d'inquiétude.

— Tu veux bien m'en parler ? Me hâta-t-il ensuite.

— C'est pas vraiment l'endroit ni le moment... Bredouillai-je alors pour tenter de le repousser.

C'est toujours l'endroit et le moment quand il s'agit de toi.

Il me sourit timidement, sa main maintenant sur les miennes pour m'encourager à me confesser. Je l'observai ainsi silencieusement pendant un long moment, admiratif et touché par ce qu'il venait de me dire. C'était comme revivre cette fameuse soirée une deuxième fois, je détestais ce sentiment d'impuissance qui me retirait toute capacité de dire un mot alors que je voulais en déblatérer des centaines. Jisung était un garçon patient mais je ne souhaitais pas lui faire revivre ça toutes les semaines, non plus.

— Il y a... beaucoup de choses à la fois, en fait. Réussis-je à expliquer.

— Je t'écoute.

Je cherchais désespérément mes mots sans réellement savoir quoi dire en premier. À vrai dire, mon esprit était tourmenté par tellement de tracas que j'avais moi-même du mal à faire le tri et organiser mes pensées.

— C'est un tout qui me met dans cet état... Je laissai échapper un soupir. Je pensais que... qu'être avec toi réglerait tous mes problèmes mais c'est pas le cas et c'est pas non plus ton rôle, d'ailleurs.

Je m'apprêtais à nouveau à m'embarquer dans un monologue et, comme auparavant, Jisung restait silencieux de son côté. J'ignorais si c'était la bonne chose à faire, les bons termes à employer et j'avais terriblement peur de le contrarier. Alors, je déglutis, incertain et terrorisé avant d'enchaîner.

— L'avenir me fait peur. Lâchai-je avec sincérité. Je stresse pour un rien à la simple mention des études supérieures et des choses qu'il faut préparer pour y arriver, puis mon père me fout sans arrêt la pression... Et le pire dans tout ça, c'est qu'on sait toujours pas si tu vas finir par être accepté ou non à l'université.

— Je t'ai Il fut coupé dans son élan par ma prise de parole.

— Je sais que tu penses tout ce que tu m'as dit la dernière fois, par rapport au fait de partir avec moi même si t'es pas pris mais... Jisung, je veux pas que t'aies à prendre cette décision-là et le fait que tu l'envisages me fait encore plus angoisser.

À cet instant-là, le surplus d'émotions que je ressentais brisa ma voix. Mon petit-ami dut d'ailleurs le remarquer puisqu'il me serra immédiatement contre lui, comme si j'étais une petite chose fragile qui menaçait d'être cassée à tout moment. Cependant, encouragé par son geste, je décidai de continuer mon récit.

— Et puis... Pris d'un sanglot, je fermai mes paupières. C'est de pire en pire avec mon père. Il rentre souvent tard ces jours-ci et tu t'imagines bien qu'il est ivre à chaque fois...

— ll continue de te demander de l'agent ? Me questionna le brunet.

— Oui... Si ça continue, j'en aurais même plus assez pour partir à la fac'.

C'était invivable et j'avais l'impression que jamais je ne pourrais m'en sortir car rien n'allait dans mon sens, ces temps-ci. Fatigué, je m'accordai le droit de craquer dans les bras de Jisung. Je m'y sentais incroyablement bien, aimé, en sécurité. Malgré tout ce que j'avais pu mentionner vis-à-vis de ma crainte de le faire fuir, tout au fond de moi, l'unique chose que je souhaitais véritablement était qu'il me chérisse et me protège.

— J'ai beaucoup de mal à me focaliser sur le présent uniquement, parce que j'arrête pas de penser au futur, au mien et au nôtre. Avouai-je entre deux pleurs. Je veux juste que tout se passe bien, je veux pas risquer de te perdre...

La douleur dans ma poitrine était intense mais pas autant que l'euphorie qui alimentait mon amour pour Jisung lorsque ce dernier posa son menton sur mon épaule. Ses bras complètement enroulés autour de ma taille, il me maintenait fort contre lui pour me prouver qu'il ne comptait pas s'en aller de sitôt. Et sa présence me faisait énormément de bien, tellement que j'anticipais déjà devoir le quitter en fin de journée. Ça aussi, c'était inévitable, et ça m'effrayait. Je ne voulais pas, une fois de plus, rentrer chez moi et me retrouver seul avec pour seule compagnie mes pensées négatives. Je passerai alors ma soirée à fixer mon plafond en m'imaginant les pires scénarios possibles, puis je me tâterai à me mettre quelque chose sous la dent pour au final vite abandonner l'idée de sortir de ma chambre. Et enfin, mon père rentrera en plein milieu de la nuit et je ferai alors semblant d'être endormi.

Voilà à quoi se résumaient mes soirées, depuis quelques temps. Tantôt je me prenais de violentes remarques sur mon physique, souvent des réflexions sur ma soi-disant paraisse et, dans le pire des cas, une gifle que je n'avais apparemment pas volée. Alors, je veillais à rester dans les rangs, à ne pas me faire remarquer et à ne surtout pas chercher la confrontation en attendant de pouvoir m'échapper de ce cocon infernal. J'aimais tout de même mon père car il avait aimé ma mère au point de se gâcher la vie, et il ne passait pas un jour sans qu'elle ne me manque. Alors, à chaque fois que Jisung m'envoyait un message, aussi futile soit-il, tout mon monde s'illuminait et devenait soudainement rose. Ce n'était peut-être pas très sain, à première vue, mais pourtant c'était la seule personne qui réussissait à rendre le cycle de ma vie un peu meilleur et ce, depuis notre rencontre.

Il m'était précieux, je l'aimais comme pas permis. Mes mains agrippaient les siennes avec ténacité, refusant catégoriquement de le lâcher. Je sanglotais comme un nouveau-né, l'écho de ma voix me faisant grimacer tant je me trouvais absurde. Seulement, Jisung était là, avec moi, il me berçait tendrement de droite à gauche pour me consoler tout en me déposant quelques baisers au bas de ma nuque. Et je pleurais davantage, submergé par l'attention qu'il me portait, celle que j'attendais, celle dont je manquais. Il n'hésita pas non plus à me susurrer des mots doux pour m'aider à calmer mes tressautements, me révélant qu'il était ému que je me sente suffisamment à l'aise pour me laisser aller en sa présence. Il s'excusait aussi de ne pas savoir comment régler la majorité de mes soucis, comme s'il en était le responsable.

— Je suis tellement désolé que t'aies à passer par-là... Souffla-t-il en resserrant son étreinte.

Je me détendais petit à petit, si bien cajolé contre son torse, ma tête basculée contre sa clavicule tandis qu'il en profitait pour choyer ma joue humide de petits baisers. On demeura silencieux de longues minutes, le temps parut s'écouler si lentement que je jurerais avoir déjà passé une bonne demi-heure dans cette salle de bain. Nos amis devaient probablement s'interroger et nous attendre mais c'était ici le cadet de mes soucis, je ne souhaitais penser à personne d'autre que Jisung et moi.

— J'ai envie de t'embrasser, je peux ? Me demanda soudainement le susnommé, sans crier gare.

— T'as envie de m'embrasser alors que j'ai le visage trempé..? Répliquai-je en fronçant les sourcils d'incompréhension.

— J'ai tout le temps envie de t'embrasser.

L'expression placardée sur son visage me laissait entendre qu'il était très sérieux et qu'il ne semblait, à priori, pas comprendre pourquoi je me mis à légèrement pouffer de rire. Il resta alors ainsi, penaud et immobile tandis que, moi, je sentais mes joues chauffer.

— C'est parce que je pus la cacahuète, c'est ça ? En déduit-il, ce qui me fit sourire davantage.

Il était fort. Tout ce cinéma dans l'unique but de me faire décrocher un rictus et, par miracle, il avait réussi haut la main. Il méritait finalement peut-être bien son dû.

— Ça va être un peu compliqué dans cette position... Me plaignis-je en me redressant, courbé vers l'avant.

— Qu'est-ce que ce sera au lit... Marmonna Jisung dans sa barbe en gigotant sur place.

— Quoi ?

— Quoi ?

— Je suis pas sûr d'avoir bien entendu- Rétorquai-je, les yeux écarquillés. Mais pourquoi tu bouges comme ça ?

— Parce que j'ai le pommeau dans le cul !

Les sourcils faussement froncés, il se tortillait dans tous les sens pour essayer de déplacer l'objet qui l'importunait contre lequel il était adossé. Ses mains cherchaient à attraper le tuyau mais la tâche s'avérait plus compliquée que prévue car il semblait coincé sous ses cuisses. Nos rires s'unirent alors, cette légèreté apaisant instantanément l'atmosphère pour mon plus grand bonheur. Et ma tentative de l'aider n'y changea pas grand-chose, ce fut seulement lorsque je me relevai pour lui laisser l'espace nécessaire qu'il put enfin libérer ce pauvre pommeau de douche. Jisung le brandit ensuite, fier de son triomphe tandis que je m'installai à nouveau dans la baignoire mais, cette fois-ci, en tailleur face à lui.

Malgré le fait qu'on ait pu casser ce moment pesant et que je me sentais, à présent, un peu soulagé de m'être livré à mon petit-ami, il y avait d'autres choses qui me pesaient toujours sur la poitrine. On aurait pu continuer à se marrer tous les deux puis on serait descendu rejoindre nos amis dans la tranquillité quand on en aurait eu marre d'être assis dans ce grand tube. Néanmoins, je savais que je m'en voudrais de ne pas lui avoir avoué la principale raison pour laquelle je me retrouvais dans cet état, aujourd'hui. Je n'avais pas cessé de ruminer, encore et encore, en me demandant si je devais ou non lui dire la vérité et mon honnêteté avait finalement pris le dessus. Il était hors de question de commencer ma nouvelle relation avec un mensonge, Jisung devait savoir.

— C'était pas très agréable. Gloussa ce dernier en se positionnant correctement face à moi, la mine enthousiaste.

— Il faut que je te dise quelque chose. Lâchai-je subitement, le sourire de mon vis-à-vis tombant alors comme un soufflé. Un truc que je t'ai caché.

— C'est le mois des révélations ? T'as déjà fait ton coming out, pourtant.

Il tenta de rire de la situation, nerveusement, je le voyais bien. Cependant, en remarquant que je n'avais plus la tête à plaisanter, il effaça immédiatement son rictus et s'approcha de moi. Ses deux mains vinrent d'elles-mêmes attraper les miennes, mon regard de nouveau perdu dans le vide en essayant de formuler une phrase.

— C'est pas vraiment quelque chose que j'ai caché, en fait, je t'ai juste volontairement menti. Murmurai-je, honteux.

— Oh. Il fit une pause avant de m'interroger. À propos de quoi ?

— De Seungmin.

On s'observa droit dans les yeux pendant de longues secondes qui me parurent devenir des heures. Son regard s'était soudainement assombri et sa mâchoire s'était crispée, comme la simple mention de notre ami le rendait irritable. Je n'osais plus rien dire par peur de le contrarier mais le silence sembla l'offenser davantage. Bien vite, il lâcha mes mains pour venir frotter son visage des siennes. Jisung ne s'était jamais mis en colère contre moi avant ça, ce fut seulement pendant ce long mois de push & pull que j'avais découvert ce côté impétueux de sa personnalité. Il avait su se montrer très blessant et je devais avouer craindre qu'il ne sache, une fois de plus, pas retenir sa langue.

— C'est maintenant que je dois te supplier de pas me larguer pour te jeter dans ses bras ? Nan parce que je suis à deux doigts de me mettre à genoux, là.

Le noir de ses pupilles transperçait le mien à travers ses mains qu'il avait alors écarter pour me voir. Je ne savais pas exactement ce qu'il voulait me dire par-là, s'il le pensait vraiment ou si c'était sa façon à lui de satiriser son imagination. En tout cas, c'était terriblement déstabilisant.

— Tu crois que je veux te quitter pour lui..? Demandai-je, sous le choc.

— Je sais pas, à toi de me le dire...

L'expression qui froissait son faciès n'était plus animée par la haine, la peur et l'inquiétude sortaient plus que tout du lot : La deuxième fois que je voyais Jisung si vulnérable. La première, c'était lorsqu'on s'était échangé quelques mots au hangar, le jour où il n'avait pas voulu me laisser partir à nouveau loin de lui. Ce fut à ce moment-là que je sus qu'il ressentait peut-être un peu plus que de l'amitié envers moi, que mon chagrin n'était potentiellement qu'éphémère et que je méritais moi aussi d'être aimé.

— Jisung, je t'assure que c'est pas le cas.

Mon souffle était court et ma gorge presque totalement nouée. C'était tellement dur de mettre des termes sur mes sentiments, de m'exprimer de vive-voix et convenablement. Alors, afin de le convaincre, je pris à mon tour ses mains et les déposai de chaque côté de mon visage encore humide. Ses pouces essuyèrent machinalement mes cernes comme il l'avait si bien fait autrefois, nos regards toujours ancrés l'un dans l'autre.

— Ça arrivera jamais parce que c'est toi que j'aime, seulement toi. Murmurai-je en resserrant ma prise sur ses poignets.

— Sur quoi tu m'as menti, alors ?

— C'est pas moi... qui ai proposé à Seungmin de prétendre sortir ensemble, c'est lui. Je déglutis, analysant chacune de ses minuscules réactions sur lesquelles m'appuyer avant de continuer. C'est lui qui a eu cette idée et j'ai marché parce que c'était pour moi la seule issue possible, à ce moment-là. Je te l'ai pas dit parce que je savais que tu lui en voudrais encore plus mais je voulais pas non plus garder ce secret indéfiniment, par peur que tu l'apprennes un jour ou l'autre et que ce soit à moi que t'en veuilles.

Jisung se pinça les lèvres, ses yeux fixant un point inexistant à sa droite. Il avait l'air davantage remonté mais demeurait pour l'instant muet, ses mains tremblotant contre mes pommettes.

— De toute façon, j'ai décidé de mettre un peu de distance entre lui et moi. Ce serait injustifié de l'ignorer après tout ce qu'il a fait pour moi mais je veux pas non plus que tu continues de te sentir comme... ça. Le son de ma voix de plus en plus bas, je tentais d'attirer son regard et fus surpris lorsqu'il le tourna enfin vers moi.

— Comme quoi ?

— Je sais pas, à toi de me le dire. L'imitai-je en esquissant un rictus timide.

— Mal. Répondit-il instantanément avant de pousser un lourd soupir hors de ses poumons. Je suis paumé, ça m'énerve.

— Tu m'en veux..?

— Nan, je comprends pourquoi t'as fait ça. Ça m'étonne pas de toi, en fait, et ça m'étonne pas de Seungmin non plus.

— Qu'est-ce que tu veux dire par-là ? Questionnai-je, confus.

— Que t'as un grand cœur et que lui se gêne pas pour en profiter. Le ton qu'il employait sonnait grave et sec, ses sourcils légèrement froncés lui donnant ainsi un air sévère.

— Dis pas ça, il m'a forcé à rien... Et, comme je te l'ai dit, j'ai déjà mis de la distance entre lui et moi donc t'as pas à t'inquiéter.

— Je m'inquiéterai toujours pour toi, surtout vis-à-vis de lui ! Je lui fais plus confiance depuis qu'il me provoque.

— Mais à moi, tu me fais confiance, non ?

Ses yeux autrefois plissés s'étaient soudainement arrondis en me regardant. Il prit une profonde inspiration, les paupières closes, avant d'expirer tout l'air en les rouvrant. Je ne fus pas surpris lorsqu'il hocha ensuite vivement la tête mais je le devins quand il s'inclina sur moi pour venir m'embrasser. C'était un baiser tendre que je réciproquai à la seconde en agrippant davantage ses poignets, court mais significatif. J'étais soulagé qu'il ne tienne pas en compte mon erreur et que son aigreur se soit aussitôt dissipée, tout allait enfin pouvoir rentrer dans l'ordre.

— Je suis sincère avec toi quand je te dis que je t'aime, Jisung. Lui avouai-je, mon visage à quelques centimètres du sien. Crois-moi, je me serais pas infligé ça pendant presque deux ans si tomber amoureux de quelqu'un d'autre était si facile.

À peine avais-je terminé d'articuler ces mots qu'un grand sourire, quoique visiblement timide, éclaira le beau visage de mon vis-à-vis. C'était rassurant de savoir que je n'aurais désormais plus la moindre raison d'angoisser par rapport à cette histoire, le poids sur mes épaules s'était totalement envolé. Il m'avait fallu du courage, énormément même, mais ça avait payé et j'allais enfin pouvoir respirer. Une nouvelle fois, comme pour confirmer mon raisonnement, le brunet captura mes lèvres. On partagea ainsi un baiser langoureux qui dura un long moment sans qu'aucun de nous deux ne veuille s'éloigner de l'autre. Les paumes de ses mains encadrant autrefois fermement mes pommettes se déplacèrent sur ma peau, longeant mon cou en caressant chaque parcelle de celui-ci. Le goût de ses lippes était si addictif que j'en redemanderais encore et encore.

Lorsqu'on fut obligé de reprendre notre souffle, mes yeux s'ouvrirent et se déposèrent automatiquement dans ceux de mon petit-ami. Ce dernier m'observa silencieusement, l'euphorie de l'instant plus intense que jamais. Je ne pouvais pas le quitter du regard, je ne voulais pas. Je ne voulais pas non plus détacher mon corps du sien et retourner comme si de rien n'était à nos obligations. Cependant, on avait beau prétendre n'être que seuls au monde, tous les deux, c'était faux et nos amis devaient très certainement commencer à se faire impatients. Je n'avais aucune idée du temps pendant lequel nous nous étions absentés mais j'osais espérer qu'ils ne nous en voudraient pas.

D'un commun accord, après que je me sois à nouveau excuser pour tout ce remue-ménage, on s'extirpa hors de la baignoire et je me dirigeai immédiatement vers le lavabo. Seulement, alors que je m'apprêtais à allumer le robinet, Jisung poussa un cri qui me fit brusquement sursauter. Quand je fis volte-face pour m'assurer qu'il allait bien, je le surpris grimaçant de douleur en se tenant comiquement le pied.

— Ce putain de pommeau de merde, bordel !

Je ne pus évidemment pas m'empêcher de me moquer de lui à gorge déployée tandis qu'il souffrait dans son coin, déblatérant des tas de jurons à répétitions. Incliné sur le lavabo, j'étais littéralement tordu de rire en me demandant si les autres avaient réussi à l'entendre depuis l'étage d'en-dessous puis, une fois mon hilarité passée, je me dépêchai de rincer mon visage. Hors de question qu'on me voit dans cet état, je devais effacer les derniers stigmates de mes pleurs pour éviter de procéder à un interrogatoire. Jisung s'était posté à côté de moi, une petite serviette en mains qu'il me tendit quand je me redressai. L'air attendri, il m'observait à travers le miroir et je ne pus réprimer un rictus d'éclore sur mes lippes lorsqu'il me déposa un baiser sur l'arrière de mon crâne.

Bien vite, nous étions sortis de cette salle de bain pour rejoindre le séjour. À quelques pas de celui-ci, nous pouvions déjà distinguer leur conversation qui semblait tout à fait passionnante et amusante, à en déduire par leurs gloussements. Ils devaient avoir abandonné l'idée d'étudier depuis longtemps et, pour être honnête, ce n'était pas pour me déplaire. Néanmoins, quand on pénétra enfin dans la grande pièce, le silence s'abattit soudainement. Plus aucun mot ni aucun son ne fut prononcé, leurs yeux étaient désormais fixés sur nous, comme des vautours sur leurs proies. Confus mais peut-être un poil paranoïaque, je ne fis pas la moindre remarque et me contentai de m'asseoir à la place que je m'étais précédemment attribuée. Seulement, ce n'était sans compter le franc-parler de mon copain.

— Un problème ? Les questionna-t-il en s'installant près de moi.

— Non, du tout... Bredouilla Changbin d'un air suspicieux, ce qui rendit Jisung davantage curieux.

— Je sais pas, vous êtes chelous, là.

— Bon, c'est encore moi qui vais faire le porte-parole. Soupira Hyunjin avant de prendre une grosse bouffée d'air. Vous pensez vraiment être discrets ?

Tous les deux désemparés, Jisung me lança un regard puis se tourna à nouveau vers le grand dadais pour lui demander de clarifier ses propos. Ce dernier nous rit au nez, sûr de ce qu'il avançait sans pour autant qu'on ne sache à quoi il faisait référence.

— Non mais il a raison... Ajouta le maître de maison. Vous auriez pu attendre de rentrer chez vous au lieu de baiser dans ma salle de bain...

L'expression de mon faciès changea du tout au tout, interloqué, choqué et confus par ce qu'ils s'étaient tous imaginé. Je me demandais comment ils avaient bien pu en arriver à cette conclusion pourtant absurde mais, peu étonné venant de ces imbéciles, je décidai de ne pas prendre la parole. De toute façon, Jisung le faisait très bien tout seul. En effet, le brunet se mit à leur râler dessus, expliquant simplement la manière dont il s'était blessé tout à l'heure sans pour autant donner trop de détails sur notre entrevue beaucoup moins sensuelle. Seulement, évidemment, personne ne le crut et on dut subir une heure entière à se faire taquiner avant de mettre les voiles. C'était déjà la deuxième fois que nos amis supposaient qu'on avait passé le cap, qui sait, peut-être que la troisième fois serait la bonne.

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