Dimanche 15 octobre 2023

Il était une fois, dans la forêt magique de Winterborn, un renard aux poils roux qui gambadait entre les arbres jaunis par l'automne. Comme chaque nuit, le petit animal avait quitté son terrier afin de trouver son dîner. La truffe près du sol, il perçut une odeur qu'il connaissait bien et se mit à regarder autour de lui. Ses petites oreilles aux pointes blanches redressées, il était sur la trace de ce lapin au pelage de neige qui le narguait quelques mètres plus loin. Affamé, le renard se mit à lui courir après, usant de toute sa rapidité et de sa ruse pour le traquer.

Absorbé par sa chasse, l'animal ne se rendit compte qu'il s'était éloigné de son territoire, seulement lorsqu'une odeur épicée effleura sa truffe. Attiré par cet effluve qu'il ne connaissait pas, il s'immobilisa, oubliant totalement sa proie qui continua de courir pour sa vie. Son museau en l'air, le canidé renifla de gauche à droite, puis ses yeux d'un orange flamboyant se posèrent sur un lieu qu'il n'avait encore jamais vu. De sa petite taille, ce qui se trouvait devant lui, semblait gigantesque et pourtant, ce n'était rien de plus qu'une modeste maison, mais comment pouvait-il le savoir ? Lui qui avait passé sa vie dans ces bois, entouré de ces grands chênes qui changeaient de couleur au fil des saisons, ne connaissait rien à la vie humaine, il n'en avait même jamais vu un.

Curieuse petite bête qu'il était, le renard au pelage d'automne, se mit à tourner autour de la bâtisse, flairant tout ce qu'il pouvait. Les senteurs qui l'entouraient étaient nouvelles et très étranges, mais elles ne faisaient qu'augmenter son intérêt pour ce lieu. Tandis qu'il approchait d'une ouverture qui était au ras du sol, un bruit sourd résonna dans la nuit, le faisant sursauter. Surpris et apeuré par ce fracas soudain, il recula jusqu'à mettre une distance raisonnable entre lui et son précédent point d'intérêt, puis il recommença son observation.

Le calme avait repris sa place dans cette forêt dense, seul le bruit des cigales et des lucioles se faisait entendre. Subitement, le vent se mit à souffler plus fort, faisant siffler les branches des grands chênes, pendant qu'au sol, les feuilles mortes se mirent à voltiger, tourbillonnant sur elles-mêmes. Encore une fois, le canidé sursauta, regardant autour de lui, à l'affût du moindre danger. Ce dont il ne se doutait pas, c'est qu'il s'apprêtait à vivre un évènement qui allait totalement changer le cours de sa vie.

L'obscurité qui entourait le renard fut subitement éclairée par un halo de lumière verte qui illumina la maison en pierre puis, une onde de choc traversa les murs venant droit sur lui. Pris de panique, il se mit à courir, mais ses petites pattes n'étaient pas assez rapides et il fut rattrapé par ce mal invisible qui le traversa et le projeta brusquement contre l'un des troncs. La douleur qu'il ressentit le fit couiner, mais son instinct de survie prit le dessus. Mal en point, il se mit tout de même sur ses pattes tremblantes et reprit sa course pour sauver sa vie.

Totalement désorienté par le choc, l'animal partit dans la direction opposée à son terrier, tentant simplement d'échapper à ce qui semblait en vouloir à sa vie.

⊶⊷⊶⊷❍⊶⊷⊶⊷

Une musique de pop emplissait la Jeep noir, qui roulait à bonne allure sur la route de Winterborn, rendu glissante par la fine pluie. Assis derrière le volant, un jeune homme à la chevelure ébène rejoignait tranquillement son domicile après une sortie qui s'était passé bien plus mal que prévu. Poussé par ses deux amis, le vétérinaire de vingt-huit ans avait accepté de rencontrer un homme, lors d'un rendez-vous à quatre, mais comme toujours, cela avait été d'un ennui mortel.

Oui, Jimin Park était souvent déçu lorsqu'il faisait la connaissance de potentielles conquêtes. Après toutes ces années, il avait fini par accepter qu'il était fait pour être seul. Étant un homme solitaire, son rythme de vie lui convenait parfaitement. Se lever le matin, aller au travail et se coucher, seul. C'était pour lui la définition du paradis et pourtant, ses deux meilleurs amis essayaient à tout prix de le caser avec quelqu'un.

— Quelle merde cette chanson, grommela-t-il.

Agacé, il s'apprêtait à changer de musique lorsque le nom de son meilleur ami s'afficha sur l'écran de son téléphone qui était posé sur le socle. Un rictus taquin sur les lèvres, il fit glisser l'icône verte et accepta l'appel.

— Quoi, je te manque déjà ? lança Jimin avec sarcasme.

— Tu sais bien que oui, ricana son interlocuteur. Tu es arrivé ?

— Non, j'ai dû m'arrêter pour mettre de l'essence. Alors, pourquoi tu m'appelles ?

— Yoongi a oublié sa veste dans ta voiture.

— Oh, ok. Euh... passez à la maison demain matin. Ma première consultation n'est qu'à neuf heures,  proposa-t-il en jetant un rapide coup d'œil sur la banquette arrière pour y voir le vêtement en question.

Le brun entendit son ami répéter sa proposition à son amant et bien-sûr, ce dernier accepta sans rechigner.

— D'accord, on sera là.

— Parfait, bonne nuit à vous deux.

— Bonne nuit Min. Yoongi t'embrasse.

— Moi aussi, répondit le vétérinaire en tournant la tête vers son téléphone.

Totalement déconcentré par cet appel, Jimin ne vit qu'à la dernière seconde cette boule de poils rousse sortir à la hâte de la forêt pour se ruer sur la voie de circulation. Par réflexe, son pied s'écrasa contre la pédale de frein et la réaction du véhicule fut immédiate. Des crissements de pneus sur le bitume déchirèrent l'air, faisant vibrer l'entièreté de l'habitacle en métal, tandis qu'à l'intérieur, son conducteur avait fermé les yeux. Amoureux des animaux, il savait qu'il ne supporterait pas d'écraser une pauvre bête à cause de son inattention. Il se mit alors à prier pour que sa voiture s'arrête avant qu'il ne commette l'irréparable.

Après plusieurs mètres de dérapage sur le goudron humide, la Jeep s'immobilisa enfin, secouant son passager qui manqua de heurter le volant de son front. Le cœur tambourinant dans sa poitrine, Jimin descendit de sa voiture et se pencha en avant, les mains posées sur ses genoux pour tenter de reprendre le contrôle de ses émotions. Une seconde d'inattention, c'était tout ce qu'il avait fallu pour qu'il ne fasse une monstrueuse erreur.

Lorsqu'il retrouva enfin une respiration normale, le vétérinaire se redressa et ferma les yeux un instant, laissant la fine pluie rafraîchir son visage rougi par l'adrénaline. Le cœur battant à tout rompre, il se dirigea vers l'avant du véhicule, où se trouvait probablement sa victime à poils roux.

— Pitié, ne sois pas mort, murmura-t-il.

Quand il arriva devant les phares qui l'aveuglaient, son regard se posa sur une petite bête à la fourrure de feu, enroulée sur elle-même juste en dessous de son pare-choc. Voulant s'assurer qu'elle n'était pas morte, il s'accroupit et tendit sa main pour venir la toucher de son index. À ce contact, l'animal tressaillit faiblement, mais pour le plus grand soulagement du brun, il n'eut aucune réaction agressive, ce qui le poussa à s'approcher davantage.

— Chut, tout va bien, chuchota Jimin en retirant sa veste en cuir. Je ne te veux aucun mal.

Avec prudence, il reposa le vêtement sur l'animal pour l'envelopper et le saisit. Une fois entre ses mains, il ne mit qu'une fraction de secondes à comprendre ce qu'il avait trouvé.

Un renard roux.

Ces canidés étaient rares dans ces forêts, surtout à cette saison. Peut-être s'était-il perdu ? Contrairement à ce qu'il pensait, l'animal ne semblait pas effrayé par sa présence. Néanmoins, les tremblements de son corps et surtout ses couinements, inquiétèrent le vétérinaire qui comprit que quelque chose n'allait pas. L'avait-il heurté avec son véhicule ? Il espérait que non.

— Je vais m'occuper de toi.

Enveloppé par sa veste, le jeune renard se roula en boule, se sentant très certainement à l'aise dans ce cocon chaud et douillet, qui le protégeait de cette pluie froide. Caressant tendrement le haut de sa tête, Jimin retourna rapidement à son véhicule et grimpa à l'intérieur, déposant le canidé sur la banquette passager.

— Je vais t'emmener chez moi. Là-bas, je pourrais te soigner.

Bien-sûr, le brun n'attendit aucune réponse. Depuis les années où il s'occupait des animaux, il avait pris l'habitude de leur parler, il voyait là un moyen de les calmer et la plupart du temps cela fonctionnait. Englouti dans le vêtement, le renard se mit à trembler faiblement, ce qui inquiéta Jimin. Sans perdre plus de temps, il passa la première vitesse et démarra en trombe, direction la périphérie de Winterborn, où se trouvait sa maison.

⊶⊷⊶⊷❍⊶⊷⊶⊷

Arrivé à son domicile, Jimin courut jusqu'à son cabinet vétérinaire qui se trouvait dans une dépendance au fond de son jardin. Il entra le code de sécurité et la porte s'ouvrit. Dans ses bras, le renard semblait s'être assoupi, pourtant, le brun le sentait encore grelotter contre son torse, signe que quelque chose n'allait pas.

Pressé par le temps, il déposa la petite bête sur la table d'auscultation en métal et prit tout le matériel nécessaire à l'examen. Son stéthoscope sur les oreilles, il parcourut les flancs de l'animal et remarqua avec inquiétude que son cœur battait bien trop vite. Il prit ensuite sa température et remarqua une petite plaie juste derrière l'une de ses oreilles.

— Tu n'as pas de fièvre, c'est déjà ça, alors pourquoi continues-tu de trembler ? parla le vétérinaire en se penchant juste au-dessus de la tête du renard.

Avec précaution, il écarta les poils derrière son oreille droite et comme il s'y attendait, il y avait bien une petite coupure.

— On va soigner ça.

Habitué à ce genre de situation, Jimin se désinfecta à nouveau les mains et prit les outils essentiels pour les points de suture qu'il allait devoir faire. Une fine seringue de tranquillisant dans la main, il vint pincer doucement la peau de la cuisse de l'animal et remarqua à quel point il était maigre. Était-il adulte ? Il avait de sérieux doutes. Sa taille était bien trop petite pour qu'il le soit, sans parler de son poids qui était bien en dessous de la moyenne. Peut-être était-ce un jeune renard qui s'était égaré.

Mettant de côté toutes ces questions, le brun s'attela à la tâche. Son objectif était de remettre ce canidé sur pied et il comptait bien y parvenir.

⊶⊷⊶⊷❍⊶⊷⊶⊷

Une heure plus tard, les soins de l'animal furent enfin terminés. En plus des points de suture, Jimin lui avait donné de quoi booster son système humanitaire puis, il avait placé un bandage autour de sa tête, évitant ainsi qu'il n'ouvre sa blessure en se grattant. Bien qu'il ait fait convenablement son travail, le vétérinaire décida de le garder avec lui pour la nuit, alors avec précaution, il l'enveloppa à nouveau dans sa veste et quitta le cabinet pour se rendre chez lui.

— Cal ? appela-t-il lorsqu'il passa la porte d'entrée.

Cal était son animal domestique, un splendide Maine Coon au pelage aussi roux que le renard qu'il tenait dans ses bras. Ce félin était un véritable vagabond. Quand il n'était pas en vadrouille dans le quartier, il trouvait toujours un coin tranquille pour y dormir avant de revenir pour se remplir la panse. Pour une fois, Jimin fut heureux qu'il ne soit pas rentré, car la cohabitation avec ce canidé risquait d'être musclée et il n'avait pas besoin de ça. Dans son état, cette petite bête devait se reposer et le tranquillisant qu'il lui avait donné, garantissait son repos jusqu'au lendemain.

Retirant ses chaussures, le vétérinaire traversa le hall d'entrée pour se rendre dans son salon. Dans un coin, près de la cheminée qu'il n'avait pas encore allumée, se trouvait un panier qui, lors de son achat, était destinée à Cal, mais ce dernier préférait dormir partout ailleurs que sur cette surface pourtant douce et moelleuse.

— Tu seras bien ici, murmura Jimin en déposant le renard sur le petit matelas pour animaux. Si tu te réveilles, pitié, ne détruis pas toute la maison, ok ?

Debout, les mains sur les hanches, le brun observait le canidé qui se referma davantage en boule et il ne put empêcher un sourire de prendre vie sur ses lèvres. Il était si petit et adorable, qui sait, peut-être qu'il pourrait le garder ? Oui, Jimin n'aimait pas la compagnie des humains. Après avoir été exclu par sa famille à cause de sa différence, il avait petit à petit préféré la compagnie des animaux jusqu'à en faire son métier.

— Bon, je vais me coucher aussi. Bonne nuit le renard.

Puis, il tourna les talons, prenant la direction de sa chambre qui se trouvait au bout du couloir. Après une journée comme celle-ci, le vétérinaire ne rêvait que d'une chose, retrouver son lit bien douillet et enfin avoir une bonne nuit de sommeil.

⊶⊷⊶⊷❍⊶⊷⊶⊷

Les premiers rayons de soleil passaient timidement entre les épais nuages qui entachaient le ciel qui recouvrait Winterborn et ses alentours. Englouti dans ses draps, allongé sur le ventre, Jimin fut réveillé par un brouhaha qui provenait du salon. L'esprit embrouillé par le sommeil, il se mit à grommeler tout en se retournant sur le dos, emportant avec lui sa couette qui était coincée entre ses cuisses.

Un œil fermé, il tendit sa main pour saisir son téléphone qui était en charge sur la table de chevet et appuya sur le bouton latéral. Aveuglé par la luminosité de l'appareil, le jeune vétérinaire ferma ses deux yeux en passant une main endolorie sur ces derniers. Quand il les rouvrit, et vit qu'il n'était que sept heures, le brun jura dans sa barbe, maudissant son chat de faire tant de boucan à une heure si matinal.

— Cal, je vais te tuer, pesta ce dernier.

Avant de se lever, Jimin s'étira, laissant échapper un petit cri aigu qui témoignait encore de son état de fatigue, puis ce fut lorsqu'il entendit un nouveau fracas qu'un éclair de lucidité le traversa.

— Putain, le renard !

Paniqué, le vétérinaire rejeta la couette et quitta le lit en troisième vitesse. Dans son empressement, l'un de ses pieds fut coincé par le tissu et il s'étala de tout son long sur le parquet, sifflant de douleur.

— Aïe, grogna-t-il en se relevant.

Tout en boitant vers le couloir, le brun se pencha, caressant la zone endolorie par le choc. D'un pas aussi rapide que possible, il parcourut le couloir et arriva enfin dans son grand salon.

— Bordel de merde, mais qu'est-ce....

Ahuri, Jimin s'avança dans la pièce en regardant autour de lui. Face au chaos qui s'étendait sous ses yeux, il aurait pu croire qu'une tornade était entrée chez lui pendant la nuit et avait tout ravagé sur son passage et pourtant, il n'avait rien entendu.

À mesure qu'il se dirigeait vers le canapé, son cœur se mit à battre plus vite dans sa poitrine. Derrière le sofa, se trouvait le panier sur lequel il avait laissé l'animal la veille, toutefois celui-ci était vide. Confus, il contourna le canapé, puis son cœur tomba à ses chevilles.

— Mais où.... oh bordel de merde ! cria presque le vétérinaire en reculant, avant de heurter le serviteur de cheminée en métal.

Les accessoires en acier s'entrechoquèrent, résonnant dans la pièce où le silence de mort régnait à présent. Sur le sol, à quelques pas de lui, entre la table basse renversée et la cheminée, se trouvait non plus un renard, mais un homme. Un humain en chair et en os qui tentait tant bien que mal de se redresser, sans succès. En plus d'être totalement nu, ce qui attira surtout l'attention du vétérinaire, ce furent les oreilles recouvertes de poil roux sur le haut de sa tête, ainsi que la queue rousse qui se trouvait dans le creux de ses reins.

Pris de panique, le brun saisit le tisonnier qui se trouvait derrière lui et le tendit devant lui, telle une arme de défense.

— Q-qui es-tu et qu'est-ce que tu fais chez moi ? demanda-t-il en tenant fermement son arme de fortune.

Lorsque l'inconnu parvint enfin à s'appuyer sur ses bras et à s'asseoir, il releva la tête vers l'homme et sursauta, manquant de tomber à nouveau. Visiblement effrayé, il traina des fesses pour se reculer et se cacha derrière le plateau en bois foncé de la table basse, laissant seulement dépasser le côté gauche de son visage. Son œil, d'un orange intense, fixait Jimin, tandis que ses oreilles bougeaient de gauche à droite, telles des antennes.

Confus par son comportement, le brun baissa son tisonnier et observa l'inconnu. Il n'avait rien d'une personne normale, ça, c'était une certitude. Les humains n'avaient pas d'attribut animal, alors il ne pouvait y avoir qu'une seule explication, la magie était responsable de tout ça.

Oui, la magie existait, les sorciers principalement et d'autres créatures qu'il n'avait jamais rencontrées, et comment Jimin le savait ? Car il descendait lui-même d'une des plus anciennes familles de jeteur de sort du pays. Ses parents étaient des sorciers reconnus et respectés, il en était de même pour ses deux frères aînés et sa petite sœur, tous sauf lui.

Le jour de sa naissance, le destin avait décidé que Jimin Park, fils de Joy et Ji-won Park, serait dénué de pouvoir magique. Lorsque vint l'âge de la majorité et qu'aucune présence magique ne se manifesta, sa propre famille l'avait exclu de son clan. Ce fut ainsi qu'il s'était retrouvé ici, à Winterborn où il vivait depuis maintenant une décennie.

Durant ces dix dernières années, il était resté à l'écart de tout ce qui touchait de près ou de loin à la magie, mais à présent que cet homme était chez lui, il devait découvrir pourquoi et comment il était arrivé ici. En l'observant de plus près, une idée traversa le brun qui fit un pas vers lui. La couleur de ses oreilles et ces yeux lui rappelaient quelques choses et à cette réalisation ses yeux s'écarquillèrent.

— Je n'y crois pas, Cal ?

Est-ce que son maine coon s'était changé en homme pendant la nuit ? Cela expliquerait sa présence ici. Pourtant, en voyant le bout de sa queue qui apparut dans son dos, il comprit que c'était impossible. Son hypothèse fut confirmée par un miaulement qui attira son attention. Tournant la tête vers l'entrée du salon, Jimin vit son animal de compagnie apparaitre dans son champ de vision. Celui-ci s'immobilisa et posa son regard perçant sur l'inconnu avant de feuler, ses poils totalement redressés, visiblement mécontent de la présence d'un étranger sur son territoire. De son côté, l'homme aux oreilles d'animal leva la tête au-dessus de la table et planta son regard sur le félin avant de grogner, tandis que sa queue se redressa, sa fourrure de feu entièrement hérissée.

— Hé, ça suffit ! intervint Jimin en chassant Cal de la pièce. Non, mais je rêve, cette situation est complètement lunaire.

Un rire nerveux le quitta tandis qu'il reposa son regard sur l'homme.

— Qui es-tu ? demanda-t-il à nouveau.

En voyant la tête de l'inconnu se pencher sur le côté, un soupir las le quitta. Il devait se rendre à l'évidence, cette personne n'était pas humaine, du moins jusqu'à aujourd'hui, il ne l'était pas.

Résigné, et comprenant que son vis-à-vis n'était pas dangereux, Jimin reposa le tisonnier et l'observa quelques instants. Ce garçon devait être à peine plus jeune que lui. Ses cheveux étaient d'un roux flamboyant, sa peau bien plus pâle que la sienne, tandis que ses yeux perçants étaient d'une beauté sans nom. D'un orange envoutant, il le fixait et il pouvait y voir la peur, mais aussi de l'incompréhension et de la curiosité. En l'observant, il remarqua à quel point il était fin. Sa peau opaline présentait quelques cicatrices anciennes, puis enfin, ses yeux se posèrent sur la queue animale qui reposait sur le sol, bougeant de gauche à droite. Sa fourrure était semblable à sa couleur de cheveux, hormis son extrémité qui était d'un blanc pur, lui faisant penser à celle de la bête qu'il avait sauvée la veille.

— Oh non, ne me dis pas que tu..., souffla-t-il en s'approchant de l'accoudoir du sofa sur lequel il s'installa. Tu es le renard que j'ai sauvé hier ?

Ses jambes nues, pliées contre sa poitrine, le garçon aux cheveux de feu le regardait, les sourcils froncés et la tête penchée sur le côté, mais aucun son ne sortit de sa bouche.

— Tu ne comprends rien à ce que je te raconte, pas vrai ? se résigna le vétérinaire. Fait chier, pourquoi fallait que ça tombe sur moi.

Si cet inconnu était réellement le renard qu'il avait sauvé la veille, alors il allait avoir besoin d'aide, et pas n'importe laquelle. Si la magie était la cause de cette situation, seuls deux personnes pouvaient l'aider.

— Ne... ne bouge pas, ordonna-t-il en tendant ses mains devant lui.

Ne voulant pas qu'il reste nu, le brun prit l'un des plaids qui se trouvait sur le canapé et l'ouvrit. D'un pas prudent, il s'approcha du rouquin qui se recula jusqu'à toucher le bandeau latéral de la cheminée.

— Je ne veux pas te faire de mal, promit Jimin d'une voix douce. Je... je veux simplement te couvrir parce que là, tu es à poil dans mon salon. Pas que ça me dérange, mais on se connait à peine.

Visiblement rassuré, l'homme aux oreilles de renard sembla baisser sa garde et tendit son bras frêle vers lui. Le vétérinaire l'observa prendre le tissu entre ses doigts et l'amener contre son visage, puis il se mit à renifler, ses oreilles se mouvant de gauche à droite.

— C'est pour te couvrir que je t'ai donné ce plaid, pas pour que tu le renifles, fit le brun amusé et attendri. Ne t'en fais pas, il est propre.

Encore une fois, son vis-à-vis ne comprit aucun mot qui s'échappa de sa bouche, alors le vétérinaire s'approcha de lui avec prudence et s'accroupit pour être à sa hauteur. Avec précaution, il saisit le bord de la couverture et l'amena jusqu'aux épaules, recouvrant ainsi sa peau blanche.

— Voilà, comme ça, ajouta Jimin avant de se relever. Ne bouge pas d'ici.

Sans attendre, il partit en courant vers sa chambre pour récupérer son téléphone. Une fois l'appareil en main, il le déverrouilla et composa le numéro de son meilleur ami. Heureusement, ce dernier répondit dès la deuxième tonalité.

— Allô, répondit une voix rauque qui n'était pas celle de Jungkook.

— Yoongi ?

— Oui. Tout va bien ? Pourquoi tu appelles si tôt ?

— Je suis désolé de vous réveiller, mais j'ai besoin de vous, implora presque Jimin en partant en direction du salon.

Il entendit un bruissement de drap à l'autre bout du fil, comprenant que son ami bougeait dans son lit.

— Salut Min. Qu'est-ce qu'il y a ? Tu as un souci ? demanda Jungkook d'une voix rauque.

En arrivant dans sa pièce de vie, les yeux noirs du vétérinaire se posèrent sur l'intrus qu'il avait laissé quelques minutes plus tôt. Ce dernier avait de nouveau repoussé le plaid, dévoilant ses attributs masculins à la vue de quiconque voulait les voir, et tentait de se mettre sur pied. Quand il y parvint, un sourire prit vie sur son visage, mais disparut lorsqu'il perdit subitement l'équilibre et s'écroula de face sur le canapé.

— Oh oui, un souci de taille, annonça-t-il, le regard rivé sur le rouquin. Vous pouvez venir ? Je crois qu'un sorcier a jeté un sort à un renard.