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† DIX-NEUF †

Notre trajet en voiture est assez court, néanmoins, les questions se bousculent dans ma tête. Je me demande où Lehb veut m'emmener et surtout, pourquoi ? Est-ce seulement pour me changer les idées, comme le ferait un ami pour soulager une autre amie ? Je ne sais pas... Sa Fiat garée sur le parking de notre destination mystère, je découvre enfin un bâtiment toute en longueur horizontale aux murs entièrement vitrés. Une belle végétation bien verte l'entoure, les branches des grands arbres tombent paresseusement sur les hauteurs du toit. Au centre de l'entrée, élevée sur le gazon, une sorte de sculpture abstraite en pierre noire se dresse. On dirait un serpent torsadé jouant avec un Rubik's Cube.

Où est-ce qu'on est ?

Comme s'il avait lu dans mes pensées, Lehb chantonne, tout en sortant de sa voiture :

— Bienvenue au Dennos Museum Center !

Un musée ? C'est une blague... ? M'extirpant moi aussi de mon siège, je jette un œil oblique sur mon rouquin d'accompagnateur. Il me fixe avec un sourire confiant, comme s'il était fier d'avoir prononcé ces paroles au timbre espiègle. Je n'ai jamais été très fan d'art, c'est d'un ennui mortel... Ces natures mortes me filent le cafard plutôt qu'autre chose. Comment comprendre et déchiffrer ce qui nous indiffère ?

— Ça ne va pas ? me demande Lehb. Tu n'es pas contente ?

— C'est que... je n'ai jamais mis les pieds dans un musée. Je m'attendais à autre chose.

— Comme quoi ?

— Je sais pas... Un urbex dans un ancien cimetière indien.

Lehb s'esclaffe de ma déclaration.

— Ça aurait pu, mais non... Aujourd'hui, tu as besoin de te détendre et pour moi, le meilleur moyen de le faire, c'est d'admirer les beautés de l'art.

Je penche la tête légèrement sur le côté, tirant une moue peu convaincue. Sérieusement, mon gars ? Dans quelle époque tu vis ?

— Ne me regarde pas comme ça, s'il te plait, glousse-t-il. Je suis sûr que tu vas aimer. Viens.

Ai-je le choix ? Malheureusement, je ne crois pas. Lehb a verrouillé la voiture, pas moyen d'y retourner même en tirant de toutes mes forces sur la poignée. Sois maudit, poil de carotte... Un soupir d'agacement au bord des lèvres, je me résigne à talonner la longue silhouette de Lehb qui est déjà à quelques mètres devant moi, marchant à grandes enjambées sur l'allée cimentée menant à la porte vitrée du hall. Apparemment, il est pressé d'y entrer.

Notre balade dans les allées décorées de sculptures étranges et des tableaux sans queue ni tête semble durer une éternité. Je ne suis pas du tout réceptive à la beauté de l'art et me demande encore ce que je fiche ici. Je soupire ; Lehb est à un pas devant moi, les bras dans le dos, s'arrêtant sur chaque nouveau morceau de toile qu'il voit. Quel ennui ! Ma principale activité est de regarder mon reflet miroitant dans le sol de marbre beige. Hmm... Au moins, je dois avouer qu'il est bien lustré malgré les allées et retours des férus créatifs arpentant cet endroit.

— Tu t'ennuies, Sephora ?

Ça se voit tant que ça ? Relevant mon nez tacheté vers lui, je rétorque :

— Eh bien, disons que je ne sais pas ce que tu peux aimer dans ce genre de dessins. C'est tellement... mort.

— Le but d'une peinture, c'est qu'elle n'est pas vivante, en fait. Mais avec un peu d'imagination, on peut donner l'illusion d'un cœur battant dans les couleurs. Toute la profondeur et la lumière s'y trouvent, concentrées dans les motifs. Une fois agencés, tout devient plus clair et magnifique.

Mes yeux se plissent légèrement. Quel homme étrange, n'empêche... Il me décontenance et me fascine, en même temps. C'est un drôle de sentiment qui m'envahit et me fait sourire, malgré moi. Quelle est cette magie ?

— Sans doute, mais... Ma belle-mère, Linda, est peintre... Je crois que mon dégoût de ce domaine artistique me vient d'elle. On ne s'est jamais très bien entendues.

— C'est triste, car l'art n'est pas fait pour séparer les gens. Personnellement, j'adore les langues et les natures mortes, ainsi que la beauté qui s'en découle. Je visite énormément de musées pour m'enrichir d'histoires et des merveilles que l'homme peut apporter. Je t'avoue que le Louvre est mon préféré.

— Tu as déjà été à Paris ? m'étonné-je, avec une discrète admiration.

— Oui, une année. J'y suis resté quelques semaines... Oh, tiens, regarde ça.

Surprise, je vois Lehb s'arrêter devant un tableau distordu, plaqué sur une paroi blanche en mélaminé. Qu'est-ce qu'il fiche, bon sang ? Ses yeux verts se remplissent d'étoiles pour ce gribouillis disparate dont les couleurs m'agressent la rétine.

— Ce tableau est sublime. Les lignes abstraites sont d'une subtilité ahurissante, c'en est hypnotisant, tu ne trouves pas ?

Douloureusement, je me retiens de rire. Mes côtes me demandent grâce. Il est si sérieux et passionné... juste pour un tas de lignes entrecroisées sur une toile vierge. Décidément, je ne comprendrais jamais les adeptes de grand art... Tous des illuminés, y a pas à dire. Or, Lehb capte mon expression contractée par l'envie de glousser. Ses sourcils épais se froncent, faussement sévères.

— Ne te moque pas, tu veux. Laisse-moi t'initier à la subtilité de la peinture. S'il te plait, approche...

Il me tend une main que j'hésite à prendre. Qu'est-ce que je peux faire d'autre, de toute façon ? Il ne me laissera pas tranquille tant que je n'aurais pas cédé à sa demande. Je soupire à nouveau, faisant voler un bout de ma frange dans l'ouragan. Autant jouer le jeu pour en finir vite. Mes doigts las saisissent doucement les siens, puis il m'attire à lui. Ses deux grandes mains sur mes épaules, il me place devant ce graffiti.

Qu'est-ce que je suis censée voir ?

— Regarde, Sephora. La ligne sur la droite prend une courbe arrondie, s'élevant vers les cieux pour décrire la danse folle d'un bras enlaçant un cou.

— Je... Je vois rien de tout ça, marmonné-je, perplexe.

— Regarde plus attentivement...

La voix de Lehb devient plus basse, semblant presque être un souffle dans mon oreille. Je détaille les coups de pinceaux dans un effort visuel sans vraiment trouver de forme exacte. Derrière moi, penché vers mon cou pour avoir sa tête à ma hauteur, Lehb continue :

— Si on suit le chemin inverse de ce bras, on remarque la finesse envoûtante d'un buste, les clavicules se dessinent très nettement dans l'explosion de pêche et de noir. Plus on descend, plus la scène devient limpide. La courbe d'une hanche, le trait visible d'un nombril, la rondeur de ce sein appelant la délicatesse...

Hypnotisée par les murmures profonds de Lehb qui pénètrent mon âme, l'image qu'il se fait du tableau prend tout son sens à mes yeux. Je... Je le vois. Enfin. C'est clair comme de l'eau de roche. Une passion sans borne découle de cette peinture, un abandon total qui me subjugue et me désarme. C'est déstabilisant, mais je ne peux le lâcher du regard. Tout un ballet charnel virevolte sous mes cils. Comment ne l'ai-je pas vu tout de suite ?

Encore chamboulée, je ne réalise pas immédiatement que Lehb, derrière moi, a fait glisser tendrement ses mains le long de mes bras.

 

Le soir est tombé sur la ville et la fraîcheur aussi. Pour se faire pardonner son ennuyante balade au musée, Lehb a décidé de m'inviter à dîner dans un petit restaurant de Traverse City. Un boui-boui traditionnel égaré dans une rue bordant les rives du Boardman Lake. Je n'y suis jamais venue et j'avoue que c'est un cadre très jolie, voire idyllique. Le gérant du restaurant a installé des guirlandes lumineuses sur sa devanture, égaillant le passage piétons lui faisant face jusqu'à la ruelle menant au parking.

Assis à une petite table en retrait des autres clients, Lehb et moi sirotons un bon vin en dégustant les spécialités de la ville. C'est l'un des meilleurs repas que j'ai pris de ma vie, mais aussi l'une des meilleures soirées. Les discussions ont été de bons trains et Lehb m'a fait parfois beaucoup rire. Malgré ses airs dérangés et, par moment, mystérieux, c'est un homme qui cache un bon sens de l'humour et une sensibilité toute particulière au monde qui l'entoure. Il est complexe, complètement taré, mais j'aime être avec lui.

Lorsque le dessert arrive, une délicieuse tarte aux cerises dont je raffole, je prie Lehb d'y goûter. Il se doit de partager ma douceur favorite. En croquant dans un fruit plein de sirop, il s'esclaffe maladroitement :

— J'ai failli en avoir de partout ! C'est juteux.

— Faut fermer la bouche quand on mange, aussi, ricané-je.

— J'y penserais. En tout cas, c'est vraiment goûteux. Je n'en avais jamais mangé, avant. Par chez moi, ce n'est pas une spécialité.

Mon verre de vin rouge à la main, une question me brûle les lèvres. Sous les faibles bruits de la vaisselle qui s'entrechoque au loin, je ne tarde pas à me laisser tenter :

— D'où tu viens, Lehb ? Qu'est-ce que tu es venu faire à Traverse City ?

Ma question le fait sourire. Il m'imite en saisissant son ballon de rouge californien entre ses doigts interminables. Une gorgée avalée, il répond :

— Je suis venu habiter ici pour changer d'air, il y a quelques mois. Traverse City est une ville agréable, je m'y sens bien. J'ai très vite trouvé un appartement et un travail convenable à la bibliothèque, j'ai même réussi à faire de vives recherches et à auto-éditer mon premier livre... J'avais besoin de ça. Besoin de neuf. Je ne supportais plus l'ambiance générale de mon ancienne vie et de ma famille. Enfin, si on peut appeler ça une famille. J'ai plusieurs frères avec qui je ne m'entends pas qui vivent aux quatre coins du pays. L'un en Louisiane, un autre dans le Wyoming, dans le Tennessee... Ce n'est pas plus mal. Plus ils sont loin, mieux je me porte.

— Comment ça se fait que tu n'as peur de rien, ni des fantômes, ni mêmes des enfants aux yeux d'ébène ?

— J'ai vu énormément de souffrance et d'horreur au cours de mon existence, Sephora. Des familles être déchirées, perdues, apeurées par ce qu'elles vivaient avec ces entités. Plus rien ne m'effraie, désormais, ce sentiment n'appartient pas à un homme comme moi.

Portant mon verre à ma bouche, mon regard s'insinue dans le sien. Frappée par la flamme des chandelles, l'émeraude de ses prunelles a prit des teintes ambrées, tel le plus prisé des métaux. Un instant, ses mots tournent en boucle dans ma tête brumeuse par les premières vapeurs d'alcool. Lehb... Tu es un mystère pour moi. Comment te déchiffrer et comprendre tes réponses qui me laissent à chaque fois songeuse ? Ton sourire menu est un croissant de lune qui brille dans la galaxie de mes questionnements. Ne pourrais-je jamais te découvrir en entier ?

Mes yeux se posent alors sur sa chevalière. Une aura étrange m'attire à elle. Le métal ressemble à de l'argent, mais plus foncé, presque noir. Et l'animal en son centre possède des rubis étincelants à la place des prunelles.

— Où tu l'as eu, cette chevalière ? Elle est magnifique. C'est un ours dessus ?

Avalant sa gorgée, Lehb baisse les paupières sur l'objet, puis me répond, l'air détaché :

— Un grizzli. C'est un héritage familial. On en a une chacun avec mes frères.

Cherchant probablement à changer de sujet, Lehb me demande subitement :

— Au fait, tu as ouvert le dossier bizarre que tu as trouvé dans ton ancienne maison ?

Je soupire, reposant doucement mon verre près de mon assiette vide. Autant ignorer son léger mal-aise et lui répondre gentiment, il n'aime peut-être pas parler de sa famille.

— Non, toujours pas. À vrai dire, je n'ai pas eu le temps...

— Il y a un temps pour tout. Rien ne presse. Pour l'instant, profitons...

Un sourire sur ses lèvres fines, Lehb monte son verre rouge sang dans ma direction, m'incitant à en faire de même.

— Trinquons à notre rencontre, Sephora, et à ta vérité.

En faisant tinter nos boissons dans un son cristallin, je réalise à quel point Lehb a du charme. Un charme bien à lui. Un charme paranormal.


Très tard dans la nuit, nous sortons enfin du restaurant. Lehb et moi avons bu jusqu'à la fermeture, le gérant n'en pouvait littéralement plus de notre présence et de nos blagues qui ne faisaient rire que nous. L'alcool est une vilaine petite peste qui adore s'insinuer dans les veines lors de rencards improvisés. J'en suis toute retournée. Ivre, même... Ça fait quelques secondes que je rigole aux éclats sans pouvoir m'arrêter. Pendue au bras de Lehb, mes jambes flageolent sur les pavés humides de la ruelle. Lui aussi a un petit coup dans le nez, visiblement. Il est aussi hilare que moi.

Moi qui avais juré de ne plus boire, ce saligot m'a fait faillir à ma promesse. Sacré rouquin !

Je sens des gouttes furtives effleurer ma peau brûlante par le vin. La pluie commence à tomber sur Traverse City. Les étoiles ont disparu, recouvertes par un épais manteau nuageux. On va être trempés ! Mais, Lehb a une idée de génie ; il retire sa veste pour recouvrir nos deux têtes avec durant notre trajet vers le parking. Seulement, étant bien plus petite que lui, on tombe très vite dans une situation cocasse qui renforce notre fou rire. Je suis à moitié mouillée et lui, tordu comme un vieil épouvantail cassé.

On court, court, court sous la pluie, tels deux enfants insouciants. Jusqu'à ce que mes jambes faiblardes ne flanchent. Je me sens partir en avant, aspirée par les dalles du sol, hoquetant de surprise. Je ferme les yeux pour ne pas voir l'impact qui va sûrement faire mal. Or, une main me rattrape au vol et m'attire. En une seconde, je me retrouve plaquée contre un torse chaud emballé d'une chemise humide.

Même saoul, Lehb garde des réflexes incroyables.

Dans la pénombre d'un lampadaire, immobiles, on se fixe intensément du regard. Le rose aux joues, je me demande ce qui se passe. Je ne contrôle plus rien et de toute façon, je n'ai pas envie. Je veux laisser faire le moment, suivre le destin qui a ébauché cet instant pour moi. Plus rien ne compte, sauf lui. Ses mains pressent ma taille, la décrivant sous chacune de ses coutures. L'eau coule sur mes cils, colle mes cheveux, mais je n'en ai cure.

Mes doigts incertains glissent le long de sa poitrine ferme. Est-ce l'ivresse qui parle à ma place ? Ou bien j'ai réellement envie de le faire ? Probablement les deux.

Le temps semble s'arrêter lorsque je caresse les cheveux de sa nuque, le cœur battant à tout rompre. Il ne bouge pas, se laisse faire docilement. Tant mieux, je n'aime pas être interrompue. Sur la pointe des pieds, je m'élève. Mes lèvres, presque timides, embrassent les siennes de manière chaste. Je goûte la pluie perlant de l'ourlet de sa bouche, le vin s'y perd subtilement avec des notes de cerise. Rouvrant les yeux sur lui afin de mesurer sa réaction, je me sens étrange... La chaleur rugit du haut de mes pommettes, comme si c'était mon premier baiser. Je n'ai le temps d'examiner son visage que je suis de nouveau assaillie.

Il me rend mon baiser. Passionnément, comme jamais quelqu'un ne l'avait fait.

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