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Un Diamant Alhorien 4/11

Face à son miroir, Evanora regardait son reflet avec satisfaction. Oui, une immense satisfaction ; ses cheveux châtains coulaient sur ses épaules avec grâce, ses yeux azur brillaient d'une jeunesse chaste. Elle était superbe et le fard à joues rosée que lui appliquait sa femme de chambre rehaussait bien davantage cette beauté. Un diadème à fleurs sur le sommet de son crâne, des boucles d'oreilles scintillantes, il ne manquait plus que la robe, cette pièce maîtresse à sa parfaite panoplie de bal.

Oui, le bal de la floraison était pour ce soir et elle avait hâte. Si hâte.

— Comment me trouvez-vous, Gerta ?

La domestique, prise par surprise, la contempla un instant. En effet, Miss Evanora était connue pour ses superbes attraits à Alhora, mais aussi pour son égo surdimensionné battant tous les records. Elle voulait être belle en toutes circonstances et qu'on la complimente.

Surtout qu'on la complimente.

— Vous êtes ravissante, mademoiselle.

— Seulement ravissante ?

La pauvre femme tourna sept fois sa langue dans sa bouche face à l'œil inquisiteur de la lady.

— Plus ravissante que tout.

Evanora sourit avec joie en la remerciant ; c'était assez heureusement, la servante soupira de soulagement. Elle avait déjà entendu des histoires terribles disant que des employées avaient été licenciées du manoir de Dame Malista après avoir trop longtemps hésité concernant la beauté de sa fille. C'était un sujet avec lequel il ne fallait pas plaisanter et, lorsque des coups retentirent à la porte de la chambre, Gerta se pétrifia.

Il en était de même à chaque fois que la sœur du roi pénétrait une pièce. Soit le monde était subjugué par son allure et son impérissable majesté, soit elle leur glaçait le sang. En l'occurrence, debout dans un coin de la porte, préparée d'une longue toilette scintillante dans le noir, elle n'était que froideur.

— Veuillez sortir, je m'occupe du reste.

S'inclinant devant Malista, la femme de chambre ne chercha pas à comprendre et se retira. Une fois seules, Evanora posa un œil sur sa mère à travers son miroir. Dans la lumière vacillante de la chandelle, son sourire avait disparu.

— Tu es magnifique, fille chérie.

— Merci, mère. Vous aussi.

— Défroisse-moi ce regard, tu vas vieillir avant l'âge.

Obéissant à un automatisme acquis durant son éducation, ses yeux se détendirent. Quand la matriarche parlait, il fallait obéir.

— Lève-toi, il est l'heure de mettre ta robe.

Oui, elle avait attendu cet instant si important durant des jours. Étendue sur son lit, la robe dorée de ses rêves brillaient comme de la poussière d'étoiles. En corset, Evanora marcha jusqu'à elle et la caressa d'une main admirative. Malista émergea dans son dos, tel un fantôme dans la pénombre orangée.

— Accroche-toi aux baldaquins.

Evanora se redressa, sachant pertinemment ce qui l'attendait. Il en était de même à chaque sortie, à chaque événement, à chaque rendez-vous. Ses mains squelettiques aux longs ongles manucurés s'agrippèrent à la barre située au-dessus de son lit où pendait de beaux voiles saumon. Dans son dos, Malista glissa ses doigts et saisit les cordes de son corset.

Elle força, enroula les fils autour de ses doigts pour tirer, tirer et serrer encore plus fort.

Se mordant la lèvre inférieure, Evanora sentit sa taille être comprimée et son souffle se rompre. Il faut souffrir pour être belle ; telle était la maxime que lui avait toujours insufflé sa mère. Être belle et le mériter dans ce monde de laideur, attirer l'attention et planer au-dessus de toutes ces fleurs fanées, voilà pourquoi elle acceptait cette douleur, ces rougeurs et ces coupures dans son dos à mesure que la corde se resserrait.

— À ton âge, j'avais la taille plus fine que la pointe d'un stalactite. Alors tu vas me faire le plaisir de rentrer un peu ton ventre !

Malista mit toute sa hargne dans son opération sans voir la grimace de sa fille. Elle n'entendît que son cri étouffé entre ses dents. Une attache accrochée et un noeud finalisé, elle était fin prête.

Malista poussa un soupir en récupérant l'une de ses mèches sortie de son élégant chignon qu'elle plaqua en arrière.

— Ça fera l'affaire. N'oublie pas que ce soir, les Blanchecombe viennent à Alhora pour le bal. Je te prierai donc d'être séduisante et intéressante au possible pour attirer l'attention du prince Leftheris. Il n'est toujours pas marié et sera l'invité de choix de cette soirée.

Le prince Leftheris... Le dernier héritier des terres du sud, le futur roi de Cassandore. Tant de personnes, surtout ses amies, parlaient de lui à Alhora et vantaient autant ses exploits que sa beauté hors du commun. La jeune femme frissonna rien que de rêver d'un tel apollon...

Prenant de minuscules goulées d'air, Evanora pivota vers sa mère. Elle faisait bonne figure pour ne pas la décevoir, pour ne pas risquer de s'attirer ses foudres. Cette douleur était futile face à l'émotion qui l'envahissait lorsque cette grande femme la regardait avec tant de fierté.

Malista glissa sa main sur la joue de sa fille qu'elle caressa tendrement. Elle prit son visage en coupe et l'obligea à la regarder droit dans les yeux.

— Tu seras éblouissante, plus que le soleil, bien plus que Jaya. Tu m'as bien comprise ?

Leurs regards s'accrochèrent ; celui de Malista ne disposait d'aucune imperfection dans son état d'âme.

— Oui... oui, mère.

Malista lui déposa un baiser sur le front.

— Si je fais tout ça, c'est pour toi... Pour t'assurer un meilleur avenir. Si nous ne pouvons avoir Alhora, nous ferons notre possible pour nous faire une place à Cassandore. Un jour... tu deviendras reine, fille chérie. J'en fais le serment.

La cérémonie de la Fête de la Floraison venait de se terminer sur la place centrale. Le Grand Arbre arborait ses mille lucioles et ravissait le peuple de ses rayonnements enchanteurs. Les Fleurs Flocons étaient encore magnifiques, cette année. Jaya n'avait pas pu être présente. À vrai dire, elle n'avait pas eu envie de se présenter aux côtés de son père pour son discours, par lâcheté peut-être... La lâcheté de se jeter en pâture devant son royaume qui la jugeait en secret.

Non... Elle n'en avait pas eu la force et Frost avait consenti à lui laisser un peu de temps.

Pendue à sa fenêtre d'un air nostalgique, elle voyait arriver les nombreux carrosses dans la cour du château. Les invités débarquaient en grandes pompes ; Evanora et Malista, chics et raffinées, furent les premières sur le terrain, suivies de très près par un somptueux carrosse venant du sud.

Avec assurance et élégance, Leftheris s'extirpa de son convoi et leva des yeux vifs sur le palais d'Alhora illuminés de millions de lueurs bleutées. Cette beauté n'était rien face à celle qu'il était venu chercher ; celle-ci ne l'avait pas encore remarqué, du haut de son perchoir hors de tout contact social.

Jaya ferma finalement ses rideaux en soupirant.

L'angoisse l'empoignait à la gorge. Son esprit était enchevêtré, son cœur en désordre. Prendre part à cette soirée lui rappelait bien trop sa rencontre avec Vadim... Ses pensées commençaient déjà à s'emballer et la tirer vers le bas. Ce soir où elle l'avait vu pour la première fois sans se douter une seconde de toutes ces choses merveilleuses qu'il lui offrirait. L'ivresse, la folie, l'amour, la passion, le soleil, la pluie sur son corps nu...

Ça faisait déjà un an... Presque deux si on comptait les quelques mois synonymes à la courtesse de leur mariage. Une douloureuse mélancolie l'attirait vers l'ombre et clouait ses chevilles tremblantes au sol de sa chambre. La mélancolie était un amour qui ne trouvait jamais de fin, ni même de repos.

Un bleu au cœur, un pas lent vers sa coiffeuse, Jaya fit face à son reflet.

À cette fille qui la regardait si fixement.

Elle était si belle, tout comme sa robe noire sertie de saphirs ; son appartenance au deuil, au statut de veuve, selon sa tante. Des dizaines d'hommes s'étaient déplacés juste pour elle, pour avoir la chance de danser avec elle ou juste l'apercevoir. Sa main était le trésor à capturer.

Elle était si brillante préparée ainsi, des étoiles dans ses cheveux, du rouge sur les lèvres... mais elle était si triste, si perdue sur les images de ce futur encore si trouble. Jaya avait l'impression de faire face à une inconnue, une toute autre personne que celle désœuvrée par la solitude qu'elle était à l'intérieur.

Si belle... mais qui aurait voulu disparaître pour qu'on ne la voit pas pleurer.

Une larme tomba sur la rivière de diamants.

Baissant les yeux sur sa coiffeuse, Jaya la vit. Le présent du Lord Snovar... Les mots de Madis lui revenaient en tête : « profitez de la vie, princesse. Essayez, vous verrez. Même juste une soirée. »

Juste une soirée... Pourrait-elle en être capable ?

Ses yeux se bloquèrent sur l'autel dédié à la mémoire de Vadim. Son regard croisa celui vide du masque de soie. Sa main hésitante caressa la Larme de Leolan pendue à son cou.

Elle avait promis à Vadim de ne jamais la retirer et d'en prendre le plus grand soin. Mais cela servait-il à quelque chose hormis entretenir sa mémoire ? Qu'est-ce que cela changerait de toute façon ? Devait-elle... tourner la page ?

Essayer...

Juste pour une soirée...

Rejoignant lentement le sanctuaire, Jaya essuya ses larmes et se recueillit une minute, les yeux fermés. Quand elle les rouvrit, sa décision fut prise.

— Pardonne-moi, Vadim... Ce n'est que pour une soirée.

Ses mains glissèrent derrière sa nuque et détachèrent le pendentif pour la première fois depuis un an. Une sensation de vide s'empara d'elle, si bien qu'elle peina à déserrer sa main autour de l'objet. Frémissante, elle posa le cristal sur l'autel, devant le masque.

Elle savait que Vadim lui en aurait voulu, qu'il aurait probablement piqué une crise de la voir ainsi, mais elle avait promis de faire des efforts. Elle lui avait promis d'être forte pour se reconstruire après son départ.

Peu à peu... pas par pas... sans pour autant l'oublier.

Trois coups furent frappés à sa porte. Madis s'y dessina.

— Princesse ? Il est l'heure, votre père vous attend en bas. Tous les invités sont là.

Jaya projeta un œil terne mais plein d'espoir sur sa servante. Elle la suivrait, comme le voulait le protocole royal, pour faire bonne impression devant la noble société... la rivière de diamants sur sa poitrine.


Frost attendait au sommet des grands escaliers du hall de voir poindre sa fille avant d'officiellement annoncer l'ouverture du bal. Il eut du mal à retenir un geste d'anxiété ; il glissa un doigt dans le col de sa cape de fourrure blanche afin de mieux respirer. Allait-elle venir ? Lui ferait-elle faux-bond à nouveau ? Ce serait regrettable et fort impoli, sachant le nombre d'invités s'étant déplacés pour cette occasion. Une princesse digne de ce nom se devait d'être là aux côtés de son roi.

Soudain, des pas attirèrent son attention sur la droite.

Il vit descendre une fée gracieuse vêtue de noir et de bleu. Sa robe d'apparat épousait chaque forme de son corps et la grande traîne de voile derrière elle donnait l'impression qu'une mer de saphirs scintillants au soleil la suivait.

Frost en était boulversé.

Elle ressemblait tant à sa mère et, une seconde, l'image de Chrysiridia se superposa à la même époque, dans une charmante jeunesse qui lui paraissait si loin désormais. Des souvenirs doux-amers d'un passé bien trop vite avorté.

Quand elle arriva à sa hauteur, Jaya n'osa pas le regarder immédiatement, de peur d'affronter les questions et les reproches sur son absence ou son retard. Or, Frost n'eut qu'un unique geste envers elle : l'admirer.

— Ma fille... Tu es sublime. Je suis si fier de toi.

Son regard rebondit sur lui ; elle n'y voyait que de l'amour et de l'affection dans les yeux de cet homme puissant comme un mur de glace. Jaya eut la gorge serrée au point où sa voix dérailla d'une note.

— Merci, père...

Lui prenant la main, Frost y déposa un tendre baiser sans la lâcher. Oui, il était fier d'elle et de son courage. Fier qu'elle l'accompagne chaque jour. Fier de la future reine juste et bonne qu'elle deviendrait.

Les grandes portes s'ouvrirent enfin sur leurs convives. Sans lui lâcher la main, le roi du nord arbora un sourire solaire.

— Bienvenue à vous tous, chers invités ! Bienvenue au bal de la floraison !

Voir tout ce monde arriver, souriant et bruyant, crispa Jaya. Frost le remarqua quand ses doigts aussi fins que des brindilles serrèrent les siens. Leurs regards s'accrochèrent.

— Continue de sourire, Jaya, tous les yeux sont braqués sur toi.

Elle déglutit, repassant ses yeux sur la marée de corps pénétrant son territoire en bas des marches. C'était vrai, tout le monde la regardait, l'admirait, la toisait sans gêne comme si elle n'était qu'une créature rare. Elle tenta d'afficher un visage agréable, un masque qui trompait les gens, mais pas son cœur.

Son sourire factice chancelait, tremblait, la boule au ventre semblant plus forte que sa volonté de faire bonne impression.

Et ce n'était que le début du calvaire.

— N'est-ce pas la jeune baronne ayant été surprise en plein batifolage dans la cave du manoir de ses parents ? Comment s'appelle-t-elle déjà ? Miss Diya Lofsend.

— Oui, c'est elle avec son époux. Celui avec qui elle avait été surprise, d'ailleurs, avant le mariage.

Proches de la scène où se produisait les musiciens, Jaya grimaça. Cet endroit était le spot favori de sa tante, car de cette manière, elle avait une vue imprenable sur la salle et pouvait bavasser sur ce qu'elle voyait sans être entendue. Elle étendait son cou comme une tortue pour ne rater aucun ragot sur les incalculables va-et-vient de la noblesse.

Son père l'avait envoyée, afin qu'elle ne reste pas seule ; Jaya s'en serait bien passée, surtout quand elle entendait Malista et ses vipères en crinoline cracher leur venin sur des jeunes femmes inconscientes de la réputation qui se formait à leur égard. Un passe-temps que ces quadragénaires malheureuses et frustrées en amour adoraient. 

— Elle a eu de la chance qu'il ne change pas d'avis et l'épouse tout de même après un comportement aussi indigne et osé venant d'une jeune fille pure, s'indigna Malista. Ses parents devraient avoir honte d'elle. Ahh... une cuisse légère de la pire espèce.

— L'amour ne se commande pas, parfois.

Étonnée par ces mots soudains, Malista posa un regard froissé sur sa nièce. Celle-ci fixait les corps dansants sur la piste sans lui adresser la moindre attention.

— Pardon ? Vous avez dit quelque chose, princesse ?

— J'ai dit... l'amour ne se commande pas parfois.

Cette fois, Jaya lui appuya un œil froid qui déstabilisa sa tante et ses insupportables amies. Cette petite effrontée soutenait ce manque de respect à leur dieu ? Malista ricana, mauvaise.

— Oh, certes, mais une jeune fille de bonne famille et bien élevée doit savoir retenir ce genre de pulsions primaires si elle veut être digne devant sa famille et devant Ymos. Être abîmée et dégradée avant le jour fatidique est un péché aux yeux de notre dieu.

— Ils se sont mariés, c'est le principal. Et ils sont probablement heureux. Personne n'a le droit de les juger.

Devant l'air offusqué de Malista, Jaya préféra s'en aller. Comment ces femmes osaient-elles discourir ainsi ? Certes, elle avait un peu pris ce sujet à cœur, peut-être trop vite, car elle aussi était passée par là avec Tiordan, même si elle n'avait pas eu le temps de franchir le pas. L'amour ne se contrôlait pas et ces femmes, aussi distinguées étaient-elles, méprisaient les doux sentiments du plus brut de leur jugement.

Autant partir pour éviter de perdre patience avec elles.

Le bal battait son plein dans la lueur des chandelles, les invités dansaient et discutaient parmi les gerbes de fleurs flocons dévoilant des parfums entêtants et délicieux. Nombre de jeunes hommes titrés saluèrent la princesse sur sa route, d'un regard ou d'un geste, présentant leurs respects jusqu'à se démettre la nuque pour ne rien rater de sa subjuguante chute de reins.

Une telle beauté méritait d'être admirée, même approchée, peut-être mariée aussi.

Comme Frost s'en était douté, Jaya était devenue la favorite du bal et beaucoup d'hommes non-mariés étaient venus le voir dans l'espoir d'obtenir la grâce du roi concernant sa précieuse fille qui restait froide aux demandes. Frost commençait à s'inquiéter de l'engouement que prenait le retour de sa fille dans les bals par rapport à la gent masculine. Il aurait pourtant cru que son statut de veuve puisse rebuter, mais il en était tout le contraire visiblement.

Les regards insistants et gorgés de vice de certains ne lui plaisaient pas du tout.

Autant garder un œil sur ces garçons et refuser les accords de danse ; Jaya avait besoin de respirer et il le savait.

Parmi la foule, la princesse croisa d'innombrables visages, d'innombrables corps et d'yeux la caressant ou la jugeant sans vergogne. Par moment, des éclairs de jadis frappaient la salle ; un masque blanc s'y dessina, un échange de regard, une première danse qui lui brisait le cœur. Elle ne voyait plus personne autour, juste deux corps valsant au milieu des gens, aspirés l'un vers l'autre.

Vadim... Un battement de cils et elle le voyait partout, sur tous les visages, dans tous les coins jusqu'à lui en faire regretter d'être venue à ce maudit bal.

Lorsqu'on la bouscula légèrement.

Sortie de ses tortueuses pensées, Jaya leva un œil surpris sur Evanora qui, vêtue de sa magnifique robe d'or, la guetta de haut avant d'exposer un sourire impeccable. Son cri exagéré de surprise fit sursauter la jeune veuve.

— Oh, mais qui voilà ! Ma chère cousine Jaya ! Oh, mais ta robe est... fascinante. Elle te va à ravir.

Jaya baissa les yeux un instant sur son linge. Elle ressentait comme une pointe de moquerie dans la voix suraiguë de sa cousine. En effet, à côté de la sienne très lumineuse, le velours noir dévoilait des teintes ternes.

— Je te remercie... Je suppose ?

— As-tu vu la mienne ? N'est-elle pas superbe ? C'est du tulle brodé aux motifs de fleurs flocons. Une merveille !

Evanora tourna sur elle-même comme une toupie, le mouvement souleva les jupons qui suivirent le cercle fou. Jaya cligna des paupières, éblouie comme si elle venait de regarder le soleil droit dans les yeux. Sa taille était si fine et marquée que la princesse se demandait comment arrivait-elle encore à respirer sans s'évanouir.

— Elle est très belle, oui...

— Alors ? As-tu eu des demandes de danse ? Je ne t'ai pas vue une seule fois sur la piste.

En quoi cela la regardait ? À croire qu'Evanora tentait d'en apprendre plus sur l'approche des jeunes hommes à son égard. De façon si grossière, ce serait déplacé.

— Non, pour l'instant, je n'ai pas le cœur à danser.

— Oh, je vois. Dommage pour toi, chère cousine. Pour ma part, j'ai déjà eu une dizaine de demandes. Des jeunes hommes incroyables. D'ailleurs, l'un d'eux m'a fait glisser un adorable petit mot, dit-elle en brandissant un papier jauni qu'elle lit, une main sur le cœur. Chère Evanora, votre beauté m'a envoûté, je serais ravi d'être votre cavalier pour cette soirée. Vous brillez comme l'étoile dans la nuit et ravivait la flamme dans mon cœur éteint. Signé, Lord Allian Redborth... Ahhh, que c'est romantique !

En effet, ça l'était et Jaya pensa secrètement que ce jeune homme devait être follement épris pour écrire de telles choses. Evanora semblait tout particulièrement sensible à ces mots vu comme elle serrait le parchemin contre sa poitrine.

— Peut-être devrais-tu lui... répondre, non ?

La noble cousine s'esclaffa.

— Je n'ai pas besoin que tu me le dises, je l'ai déjà fait. Du moins, j'ai essayé...

Elle sortit tout un tas de petits morceaux de papier qu'elle cachait dans son décolleté. Jaya écarquilla les yeux, étonnée par la vivacité et la hargne de sa plume tirée en dizaine d'exemplaires.

— J'ai plusieurs brouillons, mais je pense étoffer en m'inspirant de tout ce que j'ai déjà écrit. Lord Redborth sera transporté par ma verve. Bien, je n'ai pas que ça à faire de rester plantée ici, la saison des cœurs amène les rencontres et pour ma part, j'ai encore beaucoup de monde à rencontrer. J'espère que tu comprends, chère cousine.

— Évidemment...

Evanora lui offrit un sourire forcé à la niaiserie si épaisse qu'on pourrait la découper au couteau.

— Bonne soirée.

Enfin elle était partie, songea Jaya qui put enfin reprendre un fil d'air. Déjà avec tout ce monde, elle n'arrivait pas à respirer convenablement. Rester dans ce bal avec ces souvenirs qui ne voulaient pas la lâcher l'étouffait.

Soudain, son regard s'accrocha au sol. Evanora avait fait tomber l'un de ses mémos. Jaya se pencha pour le saisir et, le dos contre le mur, commença à le lire :

« Cher Lord Redborth, votre attention me réchauffe le cœur. Votre romantisme caresse mon âme et recouvre mes yeux de milliers de fleurs d'admiration, je serais enchantée d'être la main que vous emmènerez danser ce soir et peut-être celle que vous emmènerai devant l'autel... »

Jaya dissimula un sourire derrière sa main. Elle était si passionnée pour si peu... À croire que la présence d'un homme lui manquait dans sa vie. C'était peut-être le cas, oui, sachant qu'à vingt-trois ans, elle n'était toujours pas mariée à cause de ses goûts bien trop sélectifs. Heureusement, ceci était un brouillon, le pauvre Lord Redborth prendrait ses jambes à son cou en lisant une telle déclaration.

Se mordant la lèvre pour coincer son rire, Jaya rangea le papier dans son col. Hors de question de se débarrasser d'un tel trésor.

— Princesse Jaya ?

L'appelée se figea tout à coup ; sur sa gauche, une fière silhouette se dressait.

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