Chapitre 40
Une fois chez moi, j'avise l'heure, il me reste pas mal de temps avant que Yann n'arrive. Je décide de prendre une douche, puis de me changer.
Alors que je suis devant le miroir en train de me coiffer, je repense à la journée qui vient de s'écouler. Même si la veille n'a pas été vraiment de tout repos, celle-ci compense largement tout le reste. Yann se livre peu à peu, et c'est plutôt bon signe.
Malgré tout je reste sur la réserve, parfois avec lui, je fais un bond énorme en avant, mais il lui arrive de reculer tout aussi vite et de se refermer totalement... Comme pour me faire comprendre qu'il a encore le contrôle, et qu'il ne s'attachera pas plus que nécessaire. Mais, je n'abandonnerais pas et puis mon but n'est pas de le changer, j'aime sa façon d'être, de penser, d'être là pour ses amis, les vrais j'entends bien... Alors loin de moi l'idée de changer qui il est. Je veux juste comprendre, pour mieux être présente pour lui. Je suis persuadée que découvrir ce qui se cache derrière ces messages reste la façon la plus directe d'y arriver.
Mon sac de vêtements étant enfin prêt, je prépare celui de cours, demain nous sommes lundi et si je dors chez Yann comme je le pense, je préfère prévoir. Une fois que tout est OK, je fais le tour de la maison et ferme chaque volet.
Bien sûr, le voisinage est là et jette souvent un œil à la maison quand nous sommes absents, mais, deux précautions valent mieux qu'une.
Une fois la porte d'entrée verrouillée, je m'assois sur l'une des marches des escaliers en pierre devant chez moi, et pose les sacs à mes pieds. J'attrape mon portable, cette fois, c'est moi qui suis en avance. J'en profite pour envoyer un message à Aurore, il faut que je lui explique ce qu'il s'est passé hier, et que j'ai dormi chez Yann... Ça fait un peu beaucoup... Je vais me contenter de lui raconter la soirée, avec elle mieux vaut y aller étape par étape.
Je la vois déjà d'ici à s'exclamer un truc du genre « Quoi t'as dormi chez lui ? Mais pourquoi ? Et, il s'est passé quoi ? » et blablabla... Pour moi aussi, ça risque de faire trop d'un coup à expliquer. Je décide de ne lui envoyer qu'un premier message, de toute façon, elle ne le lira pas tout de suite, vu l'heure, elle est à son entraînement de basket.
MOI : * Soirée de malade hier aux Blocks, on a évité le drame, Écho est un vrai connard, je l'ai un peu remis à sa place et Raphaël n'a pas eu le temps de dire grand-chose. Je t'explique tout dès qu'on se voit. Bisous. N.*
Je relis le message. Court et direct, c'est ce qu'il faut. Alors que j'appuie pour l'envoyer, j'entends au loin un bruit qui m'est familier et qui maintenant, me fait sourire intérieurement à chaque fois.
Yann approche et rentre sur le parking lentement, pour ensuite s'arrêter devant moi. Il lève la visière de son casque, puis m'observe.
- Ça fait longtemps que t'attends ?
- Nan, à peine cinq minutes, j'en ai profité pour faire un coucou à Aurore, expliqué-je en rangeant mon téléphone.
- OK, Prête ?
- Ouais, annoncé-je.
Il jette un œil à mes sacs, puis lève la tête vers moi.
- Merde, t'as ton sac de cours, lance-t-il comme si nous ne vivions pas sur la même planète.
- Bah, on a cours demain.
- Putain, j'ai complètement zappé, ça va être chaud avec la moto et les deux sacs.
Je réfléchis un instant, puis hausse les épaules.
- Au pire, je les laisse là, j'avais juste prévu au cas où je dorme chez toi, mais je peux rentrer avec le bus après...
Je m'interromps lorsque je vois à son regard que cela ne lui convient pas.
- J'ai dit quoi tout à l'heure ?
- Je sais plus, attends... Ah oui, que j'étais une grande fille et que prendre le bus n'était pas la fin du monde, blagué-je.
- Fous-toi de moi ! Oublis, on va se démerder, t'inquiètes je gère.
- T'es sûr, ça va aller ?
- Ouais, tu vas mettre le plus léger sur ton dos, et je vais caler l'autre sur le réservoir, on va rouler doucement et ça ira, affirme-t-il.
- OK...
Je m'exécute, et lui donne le deuxième, qu'il place à l'avant de la moto. Il abaisse sa visière, tout en me faisant signe que je peux monter. Je remarque à ce moment quelque chose qui cloche.
- Yann ?
- Hmm ? lance-t-il tout en relevant sa visière.
- T'as pas oublié quelque chose ?
Il m'observe un instant, cherchant de quoi il s'agit, puis me regarde l'air dépité.
- Putain merde le con ! J'ai zappé ton casque, lâche-t-il.
- Un peu plus et tu m'oubliais aussi à ce que je vois, rigolé-je.
- N'importe quoi.
- J'ai pas les miens, ils sont au circuit dans mon vestiaire.
- Sérieux ?
J'acquiesce d'un mouvement de tête, il réfléchit un bref instant, puis me regarde sérieusement.
- Prends le mien, dit-il en l'enlevant.
- T'es pas bien !
- Je vois pas d'autre solution, lance-t-il.
- Et t'oses faire la morale à Kévin quand il ne porte pas le sien ?
- Ça va, pour une fois, et on va rouler tranquille promis.
Je bougonne et attrape son casque, pour lui faire voir que je n'approuve pas. Il m'observe et souris.
- T'arrêtes jamais de râler toi, en fait, se moque-t-il.
- J'vois pas de quoi tu parles, répliqué-je tout en montant derrière lui.
- Bah, voyons !
Il se dépêche de mettre le contacte avant que je ne change d'avis, puis nous nous mettons en route.
Il n'a pas menti, il a roulé tranquillement, tout le long du trajet.
- T'as vu ? Miracle on est vivant ! se moque-t-il à nouveau tandis qu'il descend de moto.
- Ouais, enfin, c'est pas drôle quoi tu vois ?
- Bah, voilà elle râle encore.
Je lui adresse, une grimace qui le fait sourire, tandis qu'il attrape le sac posé sur le réservoir, puis il me tend son autre main afin que je lui donne le deuxième qui est toujours sur mon dos.
- Ça va je peux le porter, affirmé-je.
- Discutes pas, aller.
Je m'exécute, de toute façon, il est comme ça, et je ne le ferais pas changer d'avis. Nous montons ensuite jusque dans sa chambre où il dépose les sacs, près de son lit.
- C'est quoi la construction qui se fait à côté des garages ? demandé-je curieuse.
- Une annexe à la maison, mes parents font bâtir un petit loft pour que j'puisse avoir mon indépendance.
- Sympa !
- Ouais, j'arrêterais surtout de les déranger quand Kévin vient jouer à la console le soir, il gueule comme un malade à réveiller toute la baraque, rigole-t-il.
- Vu comme ça, c'est sûr.
- T'es pas mieux !
- Pardon ? m'étonné-je
- J'ai vu de quoi t'es capable quand t'as joué cet aprèm j'te rappelle !
- Oh, ça ? C'est rien, lâché-je sérieusement, tandis qu'il me regarde sceptique.
Je sors quelques vêtements de mon sac, histoire qu'ils ne soient pas trop froissés pour le lendemain, puis les portent à la salle de bain, tandis que Yann fouine sur son étagère, à la recherche d'un film à regarder.
Ce soir, c'est télé, pizzas et pop-corn. Et, ça me va très bien, ça fait même pas mal de temps que je n'ai pas passé une soirée posée de ce genre.
- J'ai trouvé ! s'exclame-t-il soudain.
- C'est quoi ?
- Tu verras.
- Allez, montre !
Nous nous chamaillons gentiment. Tandis que j'essaye d'attraper le DVD, lui le tient en hauteur à bout de bras au-dessus de sa tête. Forcément comme ça j'ai peu de chance d'y arriver...
Alors qu'il est fier de lui, ce qui, je l'avoue m'agace, je monte sur le bord de son lit, puis saute sur son dos pour essayer de lui voler le DVD, et il ne l'a pas vu venir !
- Hey ! Tu triches ! lance-t-il.
- C'est toi qui triches !
Franchement, à cet instant précis, on dirait deux gamins, mais lui comme moi, on s'en fout. Nous partons dans un fou rire, tandis que je ne lâche pas ma prise et ne compte pas abandonner.
Soudain, la sonnette de la porte d'entrée retentit.
- C'est le livreur pour les pizzas, annonce Yann.
Je me résous à descendre de son dos en soufflant, puis il se dirige vers la porte de sa chambre afin d'aller ouvrir. Il baisse à ce moment-là sa garde et le DVD est à ma portée. Je me précipite en courant, pas vraiment discrète, et il me repère aussitôt.
- Hop, hop, hop ! Tu crois faire quoi là ? lance-t-il tout en esquivant mon attaque.
- T'es sérieux tu vas descendre avec ?
- Bah ouais !
- T'as pas l'droit ! m'exclamé-je.
- Bien sûr que si.
- OK, comme tu veux, le menacé-je.
Je m'élance de nouveau vers lui, saute une fois de plus sur son dos, et m'y agrippe pour tenter d'attraper ce que je convoite. Nous rigolons de plus belle, tandis que le livreur sonne une seconde fois.
- Si tu crois que c'est ça qui va m'arrêter, lance-t-il en se dirigeant vers les marches avec moi sur son dos.
À ma grande surprise et alors que je n'étais pas prête, il commence à descendre, comme si de rien n'était.
- Hey ! Fais gaffe ! paniqué-je alors qu'il est mort de rire.
Je resserre ma prise autour de son cou, c'est un grand malade, il va réussir à nous faire dévaler les escaliers !
- Si tu m'étrangles comme ça, c'est sur on va tomber, s'amuse-t-il.
Arrivé en bas, il ouvre la porte d'entrée le plus naturellement du monde.
- Bonsoir, lance-t-il au livreur.
- Heu... Bonsoir, répond celui-ci tout en me saluant également, alors que je suis toujours perchée.
Si on voulait passer pour des gens normaux, c'est raté...
Yann paie le gars, qui nous observe curieusement, puis récupère les pizzas tandis que je lâche prise pour descendre. Il le salue lorsqu'il s'en va et ferme la porte.
- Tu sais que tu viens de me décrédibiliser là, lâche-t-il avant de poser son regard sur moi.
- Tu le connais ? demandé-je.
- Non.
- Bah, tu t'en fous alors.
- Ouais, dit-il tout en haussant les épaules avec nonchalance.
Nous nous dirigeons vers les escaliers, puis il se tourne vers moi l'air taquin.
- N'empêche, t'es pas légère !
J'ouvre la bouche, outrée, puis il se met à rire à la vue mon expression.
- Ça va, j'déconne t'es un vrai poids plume !
Je fais mine d'être vexée et de faire la tête, ce qui le fait rire de plus belle.
- Fait pas semblant de bouder ça t'va pas du tout, rigole-t-t-il.
- Qui te dit que je fais semblant ?
- Ça s'voit, et t'es tellement légère que j'te remonte de la même manière quand tu veux, me défit-il.
- T'es pas bien t'as failli nous faire tomber !
- Pas du tout, s'indigne-t-il. Petite joueuse t'as la trouille en fait !
- Pardon ?
- Ouais, ouais, t'as bien entendu.
Il me regarde en se moquant, puis je décide de ne pas me laisser faire et de lui montrer que je suis loin d'avoir la trouille comme il le pense. Il ne faut jamais me défier !
- OK, je relève le défi, dis-je.
Il lève un sourcil, amusé, puis s'abaisse à mon niveau, pour que je monte sur son dos.
- Fais pas le con hein ! lui ordonné-je avant qu'il ne pose un pied sur la première marche.
- Moi ? Jamais !
Alors que nous sommes à la moitié des escaliers, il fait semblant de perdre l'équilibre, et je pousse un cri, ce qui déclenche son hilarité.
- Non, mais t'es vraiment pas bien hein !
- Un peu plus et je devenais sourd là quand même, lâche-t-il.
- Pfff, t'as qu'à rester sérieux aussi.
Il me regarde par-dessus son épaule comme si je venais de sortir une énorme blague et je repère à ce moment-là le DVD, posé face cachée sur les pizzas qu'il porte. Je pourrais facilement l'attraper, mais je préfère attendre d'être sur la mezzanine, c'est plus prudent...
Arriver en haut, ni une ni deux, je mets mon plan à exécution et tends le bras pour saisir le butin tant convoité. Une fois en ma possession, je saute de son dos et le nargue sans retenue.
- Ah, t'es contente !
J'affiche un sourire, fière, tandis qu'il boude à moitié.
- Ça compte pas t'façon, lance-t-il.
- Pourquoi ça ?
- Parce que j'avais les pizzas.
- Roooh l'excuse ! rigolé-je.
- Allez, elles vont refroidir.
- Mauvais joueur !
- N'importe quoi ! s'exclame-t-il.
Je jette un œil au DVD maintenant qu'il est en ma possession, afin de savoir de quoi il s'agit. Lorsque je constate qu'il s'agit du film Bad Boy, avec Will Smith, j'affiche un large sourire.
- J'adore ce film, annoncé-je en m'installant sur le canapé.
- On est deux, sourit-il, en posant les pizzas face à nous sur la table basse.
Il lance le film, et nous voilà plongés dans l'action, prononçant les répliques les plus connues de façon synchro et au bon moment. Yann a l'air de passer une bonne soirée, et je dois dire que moi aussi. J'aime le voir comme ça.
Tantôt captivés devant l'écran, tantôt, chantant à tue-tête dans sa chambre la bande originale du film, en même temps que les acteurs, ce qui nous fait rire.
- Bad boys, Bad boys. Watcha gonna do, watcha gonna do. When they come for you !
Et, tout ça en piochant dans l'énorme saladier de pop-corn posé sur ses genoux.
Je repense soudain à Kévin. S'il nous voyait là tout de suite, il nous accuserait de se foutre royalement de sa gueule.
Après cette soirée où nous avons passé un excellent moment, comme la veille, Yann me laisse son lit, et s'installe sur le canapé. Nous nous souhaitons bonne nuit, puis sombrons vite dans le sommeil, épuisé par la soirée d'hier, et par cette journée bien remplie.
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