Considère maintenant ce qui leur arrivera naturellement si on les délivre de leurs chaînes et qu'on les guérisse de leur ignorance. Qu'on détache l'un de ces prisonniers, qu'on le force à se dresser immédiatement, à tourner le cou, à marcher, à lever les yeux vers la lumière. En faisant tous ces mouvements il souffrira, et l'éblouissement l'empêchera de distinguer ces objets dont tout à l'heure il voyait les ombres. Que crois-tu donc qu'il répondra si quelqu'un vient lui dire qu'il n'a vu jusqu'alors que de vains fantômes, mais qu'à présent, plus près de la réalité et tourné vers des objets plus réels, il voit plus juste ? Si, enfin, en lui montrant chacune des choses qui passent, on l'oblige, à force de questions, à dire ce que c'est, ne penses-tu pas qu'il sera embarrassé, et que les ombres qu'il voyait tout à l'heure lui paraîtront plus vraies que les objets qu'on lui montre maintenant ?

Platon, l'allégorie de la Caverne

Une nouvelle fois, je marchais dans les couloirs sans fins du centre. Les portes et les intersections se suivaient et j'étais complètement perdue. Artie me conduisait dans une pièce différente de la salle de contrôle. Nous arrivâmes dans une salle de conférences. De grandes tables étaient disposés çà et là mais toutes les chaises étaient vides. Il n'y avait que Peter, assis sur un grand fauteuil. Il se leva dès qu'il me vit.

- Mademoiselle Jenkins, je suis heureux de vous revoir !

Sa voix était teintée d'une pointe d'ironie que je trouvais désagréable à souhait.

- Avez-vous des nouvelles de mon frère ? demandai-je en premier lieu.

Il me montra un siège près de lui et me fit signe de m'y assoir. J'obtempérai et le regardai dans les yeux. Kara disait toujours que pour connaître une personne, il suffisait de regarder ses yeux. Ceux de Peter semblaient fatigués, vieux...

- Nous avons quelques pistes, annonça-t-il.

- Où est-il ?

Artie posa une main sur mon épaule comme pour me donner du courage puis elle sortit de la salle.

- Je dois encore vous dire certaines choses avant d'aborder le sujet, il va falloir que vous soyez patiente.

Sauf que j'en avais marre d'être patiente ! Mais si c'était le seul moyen d'obtenir l'aide de cet homme...

- Je vous écoute.

Il s'installa plus confortablement dans le fauteuil et commença son récit.

- Les pouvoirs d'un EPM se révèlent le plus souvent à la majorité lorsqu'il entre en contact avec une créature mythique de quelque nature qu'elle soit. Mais votre père n'a jamais voulu me révéler comment il avait acquis ses dons. Ils étaient d'une force incroyable ! Il est arrivé au centre à l'âge de vingt ans et m'a demandé de l'aider à les contrôler, ses visions étaient de plus en plus douloureuses et ils ne pouvaient continuer à vivre comme cela. Alors je l'ai aidé. Pendant des mois il a repoussé les limites de son corps et de son esprit. Il n'avait presque plus de vision non désirée, il pouvait voir l'avenir d'un objet en le touchant du bout des doigts et remonter dans à sa naissance. Nous avons des raisons de penser que vous possédez le même pouvoir mademoiselle Jenkins. Et vos réactions d'hier me l'ont confirmé.

Je ne pouvais plus nier ce qui m'arrivait... J'étais terrifié à l'idée de ce que j'allais apprendre de plus de la bouche de Peter.

- Carl est alors entré à mon service en tant qu'espion. Il a voyagé autour du monde à la quête d'informations confidentielles pour le centre : Hong Kong, Singapour, Mumbai, New York, Sidney... J'ai été, pendant des années, le seul à savoir où il se trouvait exactement. Ce n'est que lorsque que vous êtes né qu'il a commencé à retarder de plus en plus ses voyages. Il est devenu étrange et il me cachait des choses. Je pense qu'il avait découvert quelque chose à propos du monde mythique et qu'il voulait vous en garder éloigner. Il a commencé à agir bizarrement, essayant à tout prix de vous cacher avec ta mère, il devenait un peu plus fou au fil des années. J'avais l'impression qu'il ne contrôlait plus du tous ses visions, elles arrivaient sans crier gare au beau milieu des réunions ou dans les couloirs. Mes hommes l'entendaient hurler à toute heure du jour ou de la nuit. Il répétait votre prénom ou celui de sa femme et il n'arrivait plus à distinguer le rêve de la réalité.

Je n'arrivais plus à respirer. Tout était à nouveau bouleversé. C'était comme si ma vie était un sablier qu'on ne cessait de retourner, encore et encore...

- Un jour, il a commencé à boire. Il est arrivé un matin complètement ivre en racontant des histoires de monstres et d'armées... Il buvait pour stopper les visions. Cela marchait plutôt bien mais il perdait le sens de la réalité autrement : par l'alcool.

L'alcool... Le monstre qui a détruit ma famille.

- C'est le jour de naissance de votre frère qu'il a déposé sa démission. Je me souviendrais toujours du regard qu'il m'a lancé en quittant la pièce, le même que celui qui se trouvait sur votre visage en sortant de l'ascenseur hier soir : un mélange de peur et de détermination.

Je ne pus résister plus longtemps et des larmes de colère commencèrent à couler sur mes joues.

- Vous... Vous n'avez pas le droit de me comparer à lui ! m'exclamai-je. Pas le droit !

Peter me regarda tristement.

- Il n'a pas toujours été l'homme que vous avez connu... Mais je comprends votre étonnement et je vous promets de ne plus faire de rapprochement pour l'instant.

- Je... Merci, balbutiai-je. Que... que pensez-vous que Carl avait découvert ?

L'air dans la pièce devenait de plus en plus suffocant au fur et à mesure de la discussion.

- Cela fait des années que je cherche à la savoir. Il n'a laissé absolument aucun indice et je n'avais pas le droit de m'approcher de sa famille sans son autorisation. Mademoiselle Jenkins, je savais que ce jour arriverait. Que vous ou votre frère viendrait à moi un soir en me demandant de sauver l'autre. Votre famille s'entoure d'un mystère qu'il m'est difficile de résoudre. La disparition de votre frère a forcément un rapport avec la découverte de Carl.

Non.Je ne voulais pas y croire ! Le seul individu qui pouvait me dire outrouver Hadel était la personne que j'avais le plus détestée de toute ma vie !Il était mort ! 

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Bonjour Bonjour, 

Je vous poste un chapitre un peu plus petit mais il a une importance CAPITALE! Merci de continuer à me lire!

Clémalisa.