Chapitre 5
« En vérité, les convictions sont plus dangereuses que les mensonges »
Nietzsche
Je crois que j'ai rarement pris un aussi gros fou rire, de toute ma vie ! J'aurais pu me vanter d'avoir un rire cristallin et fluide mais pas du tout, on entendait plus que mes gloussements indiscrets dans toute la salle. Les scientifiques étaient tournés vers moi et avaient arrêté de travailler. Ils devaient se demander si je n'étais pas folle. Tant pis, ce que je venais d'entendre était tellement drôle ! C'était sans doute nerveux...
- On est sensé rire, c'est ça ? Demanda Dylan en souriant, il n'avait absolument rien suivi de la conversation.
- Cassandra ? commença Anna. Est-ce que ça va ?
Est-ce que ça allait ? Non... Non ça n'allait pas du tout ! Je ne pouvais pas nier l'évidence, on me disait la vérité, en partie en tout cas. J'avais quand même vu un monstre apparaitre juste devant mon appartement et mon frère avait été enlevé ! Comment ne pas être perturbé par ce genre de vérité ? Tout ce que je croyais connaître était majestueusement foutue en l'air ! Chacun est libre de verser toutes les larmes de son corps moi je préférais en rire... Et qu'est-ce que je riais ! Inspire.... M. Betsy m'avait inscrite au yoga un jour, pour soi-disant « Décharger toutes mes ondes négatives liées à la perte de mes parents ». Expire... Le yoga, c'est juste un tas de conneries ! Thérapie douce, par le rire, par la respiration...Inspire... Putain ! c'est vrai que rire est bon pour la santé ! Expire...
- Que quelqu'un m'explique pourquoi elle glousse comme ça s'il vous plaît...
C'est Pol qui avait daigné prendre la parole à l'autre bout de la salle, il était affalé contre une des tables de travail. Entre deux rires, je m'exclamais :
- Je décharge toutes mes ondes négatives liées à la découverte d'un monde de pseudo-dieux de l'Olympe à deux balles ! Alors ferme-là un peu !
Mon Dieu, ma crise d'hilarité redoublait d'intensité !
- Mademoiselle Jenkins, repris Peter, je sais que cela fait beaucoup à encaisser. Peut-être pourrions-nous continuer demain ?
Demain ? Je manquai de m'étouffer et prenais une crise de toux à présent. Ben voyons, rend toi encore plus ridicule que tu n'es !
- Non, pas demain : je dois retrouver mon frère !
- Je ne pense pas que nous puissions faire quelque chose de plus pour votre frère aujourd'hui, il va falloir nous laisser du temps.
- Dans ce cas racontez-moi la suite, je veux avoir le plus d'informations possible, répondit -je
Et ainsi, Peter a continué son histoire :
- Les humains ont arrêté de croire à la mythologie il y a 4000 ans et depuis toutes ces années nous vivons cachés. Mais il y a une chose qui ne s'est pas perdu. Depuis notre naissance dans la Grèce antique nous devons protéger les humains. De quoi, me direz-vous ? De toute menace extérieure ! Et croyez-moi ou non, elles sont très nombreuses. Certains parlent de tremblement de terre, d'autres de fin du monde ou encore de puissances maléfiques. Ce monde est encore plus effrayant que vous ne le croyez. Mais tous ces malheurs ne sont rien comparés à la menace de la folie des hommes. Un jour il se détruira tout seul et nous ne pourrons rien faire, on nous interdit d'intervenir dans un conflit entre les humains. C'est parfois difficile mais c'est la loi.
- A quoi bon empêcher un tremblement de terre si nous continuons à nous affronter à coup de de projectiles et de bombe atomique ? ai-je demandé un peu plus calme.
- Notre mission est de garantir les meilleures conditions de vie pour les espèces de cette planète, les humains ont une importance capitale mais ne sont pas indispensables. S'ils sont assez bêtes pour s'entretuer, alors qu'il le fassent, nous ne sommes pas responsables. Je sais que c'est une pensée cruelle mais même si nous le pouvions, nous serions incapables de les sauver. Enfin, là n'est pas notre sujet le plus important jeune fille ! Je dois vous parler de votre père.
- De triple A... Heu... Je veux dire mon père ?
Zut...
- Oui, Carl était l'un des nôtres, il était comme toi.
- Mon père comme moi ? m'étranglai-je. Laissez-moi rire...
- Votre père était un homme extraordinaire vous savez, a-t-il continué. Un EPM avec un don très rare qui est héréditaire.
J'avais envie de vomir...
- Etes-vous sûr que nous parlons de Carl Saran ?
- Plus que sûr ! Dites-moi, avez-vous fait des rêves récemment ?
Le rêve...
- Euh... Oui, comme tout le monde il me semble.
Hadel, son corps par terre, le froid du carrelage contre mes genoux...
- Je parle de rêve révélateur, tellement réel que vous ne saviez plus ce qui existait ou ce qui était fantasmé.
- Je... Je ne sais plus.
- La ligne entre la conscience, le présent, le passé et le futur est très proche, a-t '-il expliqué. La plupart des êtres ont accès au passé par les souvenirs, la nostalgie et certains peuvent même avoir quelques aperçus de l'avenir, mais seulement sur le moment. Tu as déjà entendu parler du sentiment de déjà-vu ? Chez ton père et toi, cette ligne n'existe pas : le présent, la passée et le futur sont mélangés. La conscience peut avoir accès aux trois librement. Le futur se manifeste d'ailleurs d'une manière particulière, ce sont des visions, des rêves prémonitoires. Ils arrivent pendant la nuit mais peuvent aussi s'imposer à la conscience au réveil. On ne peut que difficilement les contrôler et une vision s'accomplie toujours.
Non. Non. Non !
- Co... Comment on peut savoir si c'est un rêve ou une vision ? demandai-je paniqué.
- Eh bien, c'est très difficile mais ton père me disait souvent qu'il reconnaissait les visions grâce au sol sur lequel il se trouvait.
- Au sol ?
- Oui, apparemment il était toujours gelé.
Le froid du carrelage contre mes genoux...
- Non ! m'étouffais-je, je sentais la bile me remonter dans la gorge.
- Qu'est-ce qui se passe ? Qu'a tu vu Cassandra ? demanda Anna en me tenant par les épaules pour que je ne tombe à genoux.
Il me fallait de l'air ! Vite !
- Mademoiselle Jenkins ?
Ma vision se troubla et me genoux lâchèrent.
- Mon frère va mourir, ai-je simplement dit.
Et je me suis mise à courir. Je voulais juste sortir de cet endroit, tout tournait dans ma tête : mon père, les dieux, Hadel... Je voulais la paix ! Juste la paix ! Il fallait que ça s'arrête.
- Cassandra attend ! hurla Anna.
Je trouvai une sortie et pris un grand escalier. Je ne savais pas où j'allais mais tant pis, je finirais bien par trouver une sortie, de l'air frais. J'arrivais à l'étage au-dessus et me trouvais face à un grand couloir avec des dizaines de portes. Je les essayai toutes avant d'en trouver une ouverte, un porte violette qui portait l'inscription : « Salle des Exercices ». Il devait bien y avoir une fenêtre ? J'entrai, à l'intérieur il y avait un mur avec des armes, toutes sortes d'armes. J'étais incapable de les identifier dans leur ensemble mais il y avait des haches, des poignards, des lances ou encore des armes à feu. Chargés ? Quels genres de psychopathes m'avaient emmené ici ?
Et mince ! Je venais de me souvenir que nous étions sous terre. Aucune chance de trouver de l'air frais. Qu'allais-je faire ?
Soudain, je me figeai, un bruit de pas venait de retentir dans le couloir. Ils m'avaient suivi les abrutis ! Je regardais autour de moi, il n'y avait que des armes, des tapis au sol et une vieille armoire. Une armoire ! Je courus vers celle-ci, entrai et refermai la porte. Les trous dans le bois me permettaient de voir ce qui se passait dans la pièce.
La porte violette s'est ouverte et un homme est entré. Un jeune homme ? Ce n'était pas la bande de Peter. Il commença à installer des cibles face au mur et prit un revolver, il s'installa de l'autre côté et commença à tirer.
Il était beau, une beauté à couper le souffle. Ses cheveux étaient d'un blond très clair, presque blanc. Je ne voyais pas ses yeux mais je les imaginais d'un vert profond. Il prit son arme entre les mains et la disposa au niveau de ses yeux, son corps se mit en place tout seul comme un prolongement du révolver, sa silhouette était fine mais musclée. La salle était tellement grande qu'il était presque impossible de toucher les cinq petites cibles contre le mur et pourtant, les balles vinrent de loger au milieu des cinq ronds rouges. La précision était impressionnante. Il recommençait encore et à chaque fois le résultat était le même. Il ne se déconcentrait pas et répétait le mouvement pendant 45 minutes sans s'arrêter.
Il finit enfin par ranger son matériel, je poussais un soupir de soulagement et fis tomber maladroitement un balai dans l'armoire. Le garçon se tourna vers moi et commença à s'avancer. Non pitié... Je fermais les yeux et attendis qu'il ouvre la porte mais rien. Un téléphone si mit à sonner alors qu'il avait la main sur la poignée. Il se retourna pour décrocher.
- Oui ? marmonna-t-il. Oui, bien sûr j'arrive. Ne les faites pas attendre trop longtemps.
Il raccrocha et sortit de la salle. Je sortis de l'armoire. Maintenant direction l'extérieur du bâtiment. Je tirais d'un coup sur la porte mais impossible de l'ouvrir, elle était bloquée. Il avait fermé à clef derrière lui. Merde ! Je ne pouvais plus rien faire, il n'y avait pas d'autres issues. Je m'asseyais sur les tapis, mes forces étaient vidées et il devait être plus de trois heures du matin. L'appel du sommeil était beaucoup trop fort pour lutter et malgré tous mes efforts je finis par m'endormir. Quelqu'un finirait bien par rouvrir cette porte...
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