🏵️ chapitre 6
Chan fut réveillé par un vacarme assourdissant. Il ouvrit difficilement les yeux et se les frotta vigoureusement tant ils lui démangeaient. Il se tourna sur le côté pour constater, avec surprise, qu’il était seul dans le lit. Il soupira et s’étira en espérant émerger un peu plus vite.
Encore une fois, il se réveillait avec un mal de crâne, mais aussi des courbatures dans les jambes. Il avait peut-être un peu exagéré la veille. Entre ses cours de surf intensifs et la soirée de folie qu’il avait passée, il n’avait pas ménagé son corps. Et même si Minho avait pris les rênes, leur petite partie de jambes en l’air n’avait pas été de tout repos. Il sourit en y repensant. Son partenaire lui avait fait toucher les étoiles. C’était un jeune homme magnifique et entreprenant, il ne regrettait pas d’avoir succombé à ses avances. Comme pour s’assurer qu’il n’avait pas rêvé, il souleva le drap qui recouvrait le bas de son corps. Il était nu, et cela le fit sourire de plus belle.
Après quelques minutes, et toujours autant de bruit, Chan se redressa sur ses coudes. La portière arrière du van coulissa pour laisser entrer Minho, torse nu, les cheveux humides. Il lui adressa un clin d’œil et ouvrit le petit meuble pour sortir une bouteille d’eau. Il but quelques gorgées puis s’essuya le front avant de s’asseoir sur le matelas.
— Ça y est, t’es réveillé, lança-t-il, faussement agacé.
Chan se laissa retomber en arrière et Minho vint le rejoindre. Il se blottit contre lui, ses doigts aventureux caressèrent son torse, son ventre, pour ensuite se perdre dans les poils de son pubis. Ses gestes n’avaient rien de sexuel, Chan avait un drôle de pressentiment.
— Tu faisais quoi ?
Minho inspira à pleins poumons et déposa un bref baiser sur son épaule.
— Je vérifiais les niveaux du van. Et je suis allé me laver vite fait dans les douches sur la plage.
— C’est pour ça les cheveux mouillés.
Il hocha la tête et continua à le caresser. Chan pivota sur le côté afin de lui faire face, Minho délaissa son bas-ventre. Il chercha à enfouir le visage contre son torse, un bras autour de sa taille pour se rapprocher de lui. Il n’était pas comme d’habitude. Il était moins bavard, et surtout bien plus affectueux. Il sentait bon, pas d’odeur d’herbe ou d’alcool. Chan se demanda s’il avait fumé ce matin, mais il l’aurait forcément senti. Il se souvint soudain de ce qui s’était passé sur la plage la veille, de l’état étrange dans lequel il avait trouvé Minho. Il lui avait dit ne pas se sentir bien, et son visage d'habitude si jovial n’était que tristesse et lassitude. Il n’avait pas cherché à en savoir davantage, parce qu’il craignait de se mêler de quelque chose qui ne le regardait pas, mais son camarade était visiblement perturbé. Et ce matin, après cette agréable nuit ensemble, il ne pouvait pas se résigner à faire semblant.
Il ignorait s’ils étaient amis, s’ils étaient peut-être plus que cela — c’était sans doute trop tôt pour le dire — mais il avait envie d’être là pour le soutenir s’il en avait besoin.
— T’es sûr que ça va ?
Minho grommela et renforça son emprise sur Chan, comme s’il cherchait à se fondre en lui pour disparaître.
— Hey… Tu peux m’en parler, tu sais ?
Les secondes s’écoulèrent, interminables, jusqu’à ce que Minho décide de se détacher de lui. Leurs regards se croisèrent quand le brun baissa la tête. Il avait dans ses bras un jeune homme qu’il ne reconnaissait pas, un jeune homme fragile et incertain. Il battit des cils, perdu devant cet inattendu changement de personnalité. Il avait déjà vu le Minho sûr de lui et rentre-dedans, le Minho bougon, le Minho déprimé, mais jamais celui qui était vulnérable. Il passa une main dans ses cheveux pour les balancer vers l’arrière, il en profita pour lui caresser la joue et s’emparer de ses lèvres. Il l’embrassa lentement, sans approfondir les choses, mais son camarade finit par le repousser.
— Mais qu’est-ce que…
Chan n’eut pas l’occasion de terminer sa phrase, Minho s’était redressé pour ouvrir le tiroir et en extirper un joint déjà roulé. Il ne put s’empêcher de soupirer quand il le vit le caler entre ses lèvres pour l’allumer. Il tira dessus une première fois, puis une deuxième, et une troisième.
— J’vais partir bientôt.
Un lourd silence s’installa. Chan observa son camarade d’un air hébété. Partir ? Mais pour aller où ? Partir pour travailler, ou alors partir de Santa Cruz ? Il avait prononcé ces mots sur un ton mélancolique, comme si quelque chose de grave allait se produire. Minho prit une nouvelle aspiration et rejeta la fumée par ses narines, elle flottait à ras du plafond. Chan la fixa jusqu’à ce qu’elle se dissipe peu à peu.
— Tu vas partir ? C’est-à-dire ? se décida-t-il à demander.
— J’vais reprendre la route.
Ses craintes se confirmèrent, Minho allait quitter la ville, ça ne faisait aucun doute. À cette révélation, son cœur se serra de douleur. Il ne comprenait pas pourquoi cela lui faisait aussi mal. Ils ne se connaissaient que depuis deux jours, leur relation se cantonnait à se draguer, s’embrasser, puis à s’envoyer en l’air, mais Chan était vraiment peiné. Peiné et choqué.
— Pourquoi ?
— J’ai passé assez de temps ici, et j’en ai ma claque de voir toujours les mêmes personnes.
— Attends… Je comprends pas pourquoi tu veux te barrer comme ça alors qu’on vient de passer un bon moment.
Minho bascula la tête en arrière et fit craquer ses cervicales. Mais il ne répondit pas, et Chan n’en fut que plus froissé. Il avait la sensation de s’être fait avoir, même s’ils ne s’étaient rien promis et qu’ils n’avaient fait que profiter de la vie ensemble. Le temps d’une soirée, le temps d’une nuit. Quelques minutes, quelques heures de bonheur. Un partage, sans rien attendre en retour. Sans attache, sans avoir de compte à se rendre. Et pourtant, il avait ressenti une forte connexion avec Minho, quelque chose de différent de toutes les autres personnes qu’il avait pu rencontrer dans sa vie. Était-ce son goût prononcé pour la liberté ? Son style décalé et exubérant ? Ou alors cette brèche qu’il avait perçue en lui hier soir ? Chan n’en savait strictement rien, mais il ne voulait pas que tout s’arrête là. C'était trop tôt. Trop brutal.
— C’était nul ?
Le rire cristallin de Minho résonna dans l’habitacle. Il se tourna vers Chan et posa une main sur la sienne.
— Pas du tout. T’étais même mon meilleur coup.
Chan leva les yeux au ciel. Il se sentit flatté par le compliment, mais il se posait tout de même beaucoup de questions. Et il avait envie d’y avoir des réponses. Il n’aimait pas paraître insistant, cependant il percevait que quelque chose n’allait pas chez son partenaire. Ce n’était pas une histoire de sixième sens, c’était plus que cela. Il avait observé Minho, et il avait décelé une part sombre en lui, une part qui lui criait de ne pas l’abandonner maintenant.
— Tu sais, j’ai pas d’attaches, que ce soit ici ou ailleurs. J’aime être libre comme l’air, et rester là c’est pas du tout ce que je veux. J’ai pas encore vu tout ce que je voulais voir, je suis pas allé partout où je devais aller.
— Je peux te poser une question ?
Minho le scruta, un sourcil haussé.
— Vas-y, essaye toujours.
— Ça comptait pas ce qu’on a fait cette nuit ?
Il tira sur son joint.
— C’est pas ça…
Cette fois, il avait détourné le regard. Il souleva un des rideaux en vichy, la foule commençait à s’agiter sur Beach Street. Il devait être une heure avancée de la matinée.
— Il y a un endroit où je dois aller. C’est une promesse que j’ai faite à quelqu’un qui m’est cher, et je dois tenir cette promesse, dit-il, l’air pensif.
— Tu aimerais aller où ?
— Mon point d’arrivée sera Half Moon Bay.
Chan se redressa, soudain très intéressé par ce que son camarade lui racontait.
— Tu rigoles ? s’enthousiasma-t-il. C’est un super spot pour le surf !
L’excitation passée, il sembla prendre conscience d’une chose. Minho s’était braqué la veille quand il avait parlé de surf, alors pourquoi tenait-il tant à se rendre dans un endroit pareil ? Devait-il rejoindre quelqu’un ? Cela pouvait expliquer pourquoi il tenait à partir.
Chan fronça les sourcils. Il y avait trop de mystères qui planaient sur la vie du jeune homme, et il était curieux d’en apprendre davantage sur lui. Il avait envie de tout connaître ; découvrir son passé, faire partie de son présent, et pourquoi pas discerner un morceau de futur avec lui. Il avait l’impression d’aller vite en besogne, il savait qu’il devrait repartir pour la Corée dans deux semaines, mais il avait envie de faire un bout de chemin en sa compagnie.
Il secoua la tête pour chasser ces idées étranges. Quelle personne saine d’esprit abandonnerait tout pour un gars rencontré deux jours auparavant ? Il n’allait pas non plus s’imaginer en couple avec Minho, ça n’avait aucun sens, et il savait pertinemment que ce dernier était plutôt volage.
— Par contre, j’suis étonnée que tu veuilles aller là-bas, j’ai pas souvenir que tu m’aies dit faire du surf.
Minho se crispa et, machinalement, il porta la roulée à ses lèvres. Ses gestes étaient hésitants, sa main tremblante, et il n’osait toujours pas regarder Chan.
— Je t’ai dit, c’est une promesse. Et j’suis pas du genre à briser mes promesses.
— Je sais que c’est indiscret, mais tu vas retrouver quelqu’un ?
Chan n’avait pas envie de prendre des pincettes, ils préféraient entendre la vérité plutôt que de se bercer d’illusions. Il avait conscience qu’il s’était probablement fait des idées, qu’il avait cru qu’il passerait le reste de ses vacances en voyant Minho de temps en temps. Dans le fond, il aurait aimé qu’il soit son amour de vacances, un peu comme dans les films. Ça le faisait secrètement rêver. Il n’aurait pas imaginé que son amourette idyllique prenne la forme d’un autre homme, mais cela lui convenait très bien. Seulement, si Minho s’en allait, tout volait en éclat, et il ne pouvait pas s’imaginer séduire quelqu’un d’autre. C'était lui que le destin avait mis sur sa route, et il avait envie d'y croire pour une fois.
— Non, j’ai personne à retrouver là-bas.
L’énigme autour de cette promesse n’en fut que plus étrange.
— Je veux venir avec toi, dit Chan.
Minho lui lança un regard désabusé.
— Pourquoi tu viendrais ?
— Pourquoi pas ?
— Parce que t’as ta famille ici, et que je te vois mal planter ton cousin pour partir avec un inconnu.
C’était en effet vrai, Felix jouait beaucoup dans la balance. Chan tenta de peser rapidement le pour et le contre dans son esprit, mais sa raison s’était envolée. Son cœur prenait le dessus, et son cœur lui disait de suivre Minho. C’était sans doute un peu tordu, même complètement fou en fait, mais à cet instant, il avait l’intime conviction que c’était ce qu’il devait faire.
— Je suis sûr, et je veux venir avec toi.
Minho écrasa le joint dans la coupelle à proximité et il prit une profonde inspiration.
— Tu sais, avant d’arriver à Half Moon Bay, j’ai d’autres choses à faire dans d’autres villes, et ça risque d’être long.
— J’ai envie de passer plus de temps avec toi, ça me dérange pas.
— T’es têtu on dirait.
— Je préfère dire que je sais ce que je veux dans la vie.
Un mince sourire naquit sur le visage de Minho.
— T’es pas possible… Tu me baises une fois et tu peux déjà plus te passer de moi.
Le rire que Minho laissa échapper sonna comme une agréable mélodie, et Chan eut aussitôt les joues brûlantes. Les images de la veille revenaient par vagues dans son esprit et son ventre se tordait violemment sous l’adrénaline. Il n’avait jamais ressenti quelque chose de si puissant. C’était nouveau, délicieux, et ça avait un goût de trop peu. Alors oui, il ne serait pas contre le fait de recommencer avec le jeune homme.
— C’est pas que ça, avoua-t-il.
— C’est en partie ça.
— Et si je te rappelais que c’est toi qui as commencé à flirter avec moi et à dire que j’étais ton futur plan cul ?
— J’avais tort ?
Absolument pas. Et ça, Chan avait un peu de difficulté à l’admettre. Si Minho ne s’était pas endormi lors de leur rencontre, ils seraient passés à l’acte ce soir-là.
— C’est pas que pour le cul Minho, tu m’intrigues et j’ai envie d’en apprendre plus sur toi.
— Tu devrais pas.
Son expression joueuse avait disparu, il était de nouveau sérieux. Presque morose.
— Qu’est-ce que tu caches ?
— Rien que tu n’aies envie de voir.
Ils se fixèrent longuement, jusqu’à ce que Minho se lève en arborant un large sourire. Chan l’identifia comme faux, il n’eut aucun doute sur la question. Sa joie était contrefaite, il se dissimulait derrière son exubérance et son herbe pour que personne ne découvre qu’il avait un côté sombre. Qu’il avait une faille. Peut-être que lui-même ne savait plus qui il était, et qu’il cherchait à s’oublier.
— Bon, t’es sympathique et on a passé des bons moments tous les deux… J’ai bien envie de m’amuser encore avec toi et de profiter de l’été, alors si toi t’as envie de me faire chier encore un peu, tu peux venir. Mais tu gardes tes questions pour toi, d’accord ?
— Ça marche, si c’est la condition…
— C’est la condition.
Minho lui tendit une main que Chan s’empressa de serrer pour sceller leur accord. Se résigner à oublier toutes ses interrogations ne l’enchantait pas vraiment, mais il avait tant envie de découvrir un petit morceau de sa vie qu’il était prêt à faire ce sacrifice. Et qui sait, peut-être que Minho finirait par se dévoiler de lui-même.
— Maintenant va falloir que tu préviennes ton cousin que tu préfères un plan cul à lui.
Chan rit, mais il avait raison. Il était venu à Santa Cruz pour revoir Felix, car il lui manquait, et il allait disparaître plusieurs jours avec un inconnu. Ce n’était pas vraiment ce qu’il avait prévu, mais il sentait qu’il devait y aller. Il espérait que son cousin se montre compréhensif et le soutienne dans ce choix.
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Hellooo !
J'espère que vous allez bien ❤️
Je sais que Minho est très difficile à cerner pour le moment, mais soyez patient•es... Vous découvrirez tout en même temps que Chan 👀
J'en profite pour vous partager le magnifique (comme toujours) dessin de tinybinibini aka @ i.dont.like.cucumber sur Instagram 💕 merci encore de donner vie à mes personnages !
À bientôt pour la suite 💜
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