Chapitre 3
Elle marcha encore trois bonnes minutes avant d'arriver devant une porte en bois. Elle la poussa et se trouva en haut d'une plateforme en béton, dans une immense salle sombre et mystérieuse. Le sol était recouvert de terre et de feuilles mortes, imitant le sol d'une dense forêt. Les murs étaient tapissés de faux arbres, créant l'illusion d'une nature sauvage. L'ambiance était bizarre. La fausse forêt, qui semblait tout droit sortie d'une émission de télé pour enfants, lié à la lumière artificielle, donnait l'impression d'être prisonnier d'un mauvais rêve. Néanmoins, l'immense salle était très obscure, seules quelques lueurs filtraient à travers les branches factices.
La voix résonna, expliquant l'épreuve : "Bienvenue dans la Course de l'Ombre, la dernière épreuve de la journée. Pour réussir cette épreuve, vous devrez être plus rapide, plus rusé et plus déterminé que votre adversaire. Le participant le plus rapide pourra terminer le jeu. L'épreuve commence dans une minute. Mais attention, l'ombre de votre adversaire vous suit de près."
Rhudie regarda autour d'elle avec appréhension. Un compte à rebours s'afficha dans le ciel, ou plutôt au plafond. Choisit George ne voulait donc pas dire choisir un allié, mais un ennemi.
0:59
0:58
0:57
Son rythme cardiaque s'accéléra. Elle remarqua un bout de papier plié en quatre à ses pieds et le ramassa de ses mains tremblantes.
"REGLES DU JEU" était inscrit en haut de celui-ci. Le défi consistait à trouver un certain nombre de balises dissimulées dans la salle pour trouver la sortie. Au verso, les balises étaient marquées d'un point rouge sur la carte. Son cœur battait la chamade alors qu'elle examinait la carte, essayant de mémoriser les emplacements des balises. Son cerveau refusait cependant de mémoriser quoi que ce soit dans cette pression.
0:40
0:39
0:38
Les balises semblaient être éparpillées dans tous les coins de la salle, rendant la tâche encore plus difficile. Rhudie comprit qu'elle devait prendre des décisions stratégiques pour trouver le chemin le plus court vers les balises. Chaque décision pouvait faire la différence entre la victoire et la défaite. Entre la vie, et la mort.
0:32
0:31
0:30
Elle devra prendre le premier virage à gauche puis continuer tout droit pour atteindre la première balise.
0:25
0:24
0:23
Ensuite, il faudra tourner complètement à droite dans un virage épingle à cheveux.
0:19
0:18
0:17
Remonter, tourner, droite, droite, gauche, droite.
0:03
0:02
0:01
La voix robotique annonça le début de l'épreuve, et Rhudie s'élança. La lumière fût plus intense, des spots de lumière dispersés à travers toute la pièce s'allumèrent. La jeune fille descendit de l'estrade. Ses pieds foulèrent le sol mou de la forêt factice alors qu'elle se dirigeait vers la première balise. Le temps était compté, et elle ne pouvait se permettre de perdre une seule seconde.
Rhudie s'engouffra ainsi dans la forêt factice, cherchant frénétiquement la première balise. Ses yeux balayaient le sol, les arbres et les rochers, à la recherche d'un indice. Soudain, une lueur rouge émergea entre les branches d'un arbre. Rhudie s'approcha avec précaution et découvrit une petite plaque de métal rouillée accrochée à un tronc. C'était la première balise. Un mélange de soulagement et d'excitation la submergea. Il avait trouvé sa première piste vers la victoire, en espérant que George n'ait pas plus d'avance.
La plaque portait un numéro et une flèche pointant vers l'est. Finalement, la carte ne semblait pas indispensable. Rhudie prit une grande inspiration et se lança dans la direction indiquée. Ses pieds foulaient le sol avec détermination, ignorant la douleur croissante dans ses jambes.
Soudain, Rhudie vit une rangée de spots lumineux s'éteindre. Ils paraissaient se situer au-dessus de là où elle avait commencé. C'était donc ça, l'ombre qui la suivait de près dont parlait la voix robotique. Aucun retour en arrière n'était possible.
Elle pressa le pas. La course à travers la forêt semblait sans fin. Les balises semblaient être placées de manière aléatoire, obligeant Rhudie à changer de direction à chaque instant. Les ombres dansantes des faux arbres semblaient se moquer d'elle, la taquinant alors qu'elle cherchait désespérément les balises suivantes. Elle put en atteindre quelques-unes. L'ombre qui le suivait ne cessait de le mettre sous pression, l'incitant à aller plus vite.
Alors que Rhudie se hâtait vers la prochaine balise, ses sens étaient à vif. Chaque bruissement de feuilles, chaque craquement de branche le mettait en alerte. L'ombre le suivait sans relâche, lui rappelant qu'il n'était jamais seul, que ses peurs et ses doutes le poursuivaient sans relâche.
À mesure que l'épreuve avançait, l'obscurité semblait s'intensifier, rendant la vision de Rhudie de plus en plus floue. Elle trébucha plusieurs fois, se relevant à chaque fois avec résolution. La douleur dans ses muscles et la sueur qui dégoulinait sur son visage ne faisaient qu'ajouter à son sentiment d'épuisement.
+ impression de tourner en rond, se rend compte que les flèches ne donnent pas la bonne direction
La forêt paraissait sans fin, et elle sentait que ses forces s'amenuisaient à chaque pas. Cette dernière fichue balise qui devait être la sortie était introuvable. La fatigue physique commençait à la ralentir, et les émotions se mêlaient à la confusion dans son esprit. Cela faisait presque dix minutes qu'elle courait autour du même amas d'arbres sans rien trouver. Complètement épuisée, elle s'arrêta et s'accouda à un tronc d'arbre malgré l'obscurité grandissante derrière elle. Chaque inspiration lui paraissait de plus en plus difficile. Les visages de ses amis disparus tournoyaient dans son esprit, comme des ombres inquiétantes qui la hantaient.
Elle ne pouvait s'empêcher de penser à Camille et Adam, qui avaient été emportés par les épreuves précédentes. La culpabilité l'envahit, se demandant ce qui avait bien pu leur arriver.
Les larmes menacèrent de jaillir de ses yeux alors qu'elle sentait un puissant sentiment de désespoir l'envahir. "Je ne peux pas continuer... je ne peux pas... je ne peux pas les abandonner", murmura-t-elle d'une voix brisée. A quoi bon vivre si c'est pour garder un sentiment de remords si intense ?
Elle s'effondra à genoux, les poings serrés, prête à abandonner la course.
Pourtant, quelque chose en elle refusait de céder à la défaite. Elle savait que si elle abandonnait maintenant, elle perdrait tout, y compris sa propre dignité. Elle laisserait ses geôliers gagner.
Elle serra les dents, puisa au plus profond d'elle-même et retrouva son calme intérieur. Elle se releva lentement, essuyant les larmes qui menaçaient de couler.
Mais malgré toute la force qu'elle puisa en elle pour continuer, Rhudie sentit soudainement ses jambes flancher sous elle, et tout devint flou. Le monde semblait tourner autour d'elle alors qu'elle perdait connaissance. Dans cet état intermédiaire entre la conscience et l'inconscience, un nouveau flashback s'empara de son esprit.
Elle se revit assise à une table, une feuille devant elle. Un contrat. Des mots étaient écrits en petits caractères, mais les clauses semblaient floues, inintelligibles. L'homme en face d'elle, souriait d'un air confiant. Il parlait, mais les mots étaient eux-aussi flous. Et puis, il y avait cette mention de l'argent, d'une somme qui pouvait changer sa vie. L'argent, le pouvoir, la notoriété. Tout était tentant.
Dans cette vision, elle avait vu son propre nom, et avec un geste hésitant, elle avait apposé sa signature. La vision se dissipa alors, laissant place à un néant obscur.
Quand Rhudie reprit conscience, elle était allongée sur le sol froid. Son esprit était encore embrumé, mais les bribes de souvenirs flottaient dans sa mémoire. Elle se rappela du contrat, de l'argent promis... de la compétition. Une compréhension subite l'envahit. Tout était lié, les épreuves, les défis, les clauses. Elle était devenue une bête de foire. Un rat de laboratoire.
Elle se redressa brusquement, regardant autour d'elle avec une nouvelle acuité. La salle, les énigmes, la forêt, tout cela avait un sens. Elle n'était que la protagoniste d'un épisode. Tout était un jeu de manipulation, de risques et de récompenses.
Ses pensées étaient claires maintenant, si claires qu'elle avait l'impression de devenir folle. "Allez vous faire f*utre !", cria-t-elle en sachant que quelqu'un l'écoutait et la voyait. Sa voix résonna jusqu'à l'autre bout de la forêt. Rhudie se leva, le cœur battant, les yeux ardents de détermination. Une nouvelle force animait ses pas.
Elle atteignit enfin ce qui semblait être la dernière balise, marquant son passage avec un soupir de soulagement mêlé de frustration. L'ombre était toujours là, à ses trousses, lui rappelant qu'elle n'était pas encore arrivé au bout de cette épreuve cauchemardesque.
Une flèche annonça que la ligne d'arrivée était en vue, et Rhudie accéléra autant que possible, ses jambes tremblantes sous l'effort. À chaque pas, elle sentait l'ombre s'estomper derrière elle.
La ligne d'arrivée était là, à quelques mètres seulement, sur une autre plateforme en béton. Rhudie sentait son cœur battre la chamade dans sa poitrine alors qu'elle franchissait enfin la ligne.
Elle se jeta sur la plateforme sans porter attention à sa jambe qui s'était égratigné au contact du béton froid.
Des lumières vertes scintillèrent tout autour d'elle. Elle avait validé l'épreuve.
Un couloir s'ouvrit sur le mur derrière dans un vacarme assourdissant. Elle s'y engouffra et se retrouva dans une grande pièce vide séparée en deux par un mur de verre.
Rhudie était du côté gauche.
Elle tourna en rond, cherchant ce qu'elle devait faire ici.
Une minute.
Deux minutes.
Puis cinq.
Et dix.
George apparut en trombes de l'autre côté du verre et se jeta par terre.
"Je... j'en peux plus ahah. On l'a fait ! Et t'es arrivée en première !" Articula-t-il.
Rhudie frappa sur le verre : "On l'a fait !"
D'étranges personnes en costume apparurent soudainement derrière le garçon, leurs visages cachés derrière des masques sinistres. Ils s'approchèrent de George, qui était à genoux, épuisé par la compétition.
"Vous avez perdu l'épreuve, George," déclara d'une voix glaciale l'un des organisateurs.
Il sortit une seringue de sa poche. Et la planta sans aucun scrupule dans le bras de George qui tentait de se débattre, en vain.
Rhudie hurla à travers la vitre, frappant de toutes ses forces.
Les personnes en costument se retirèrent, laissant George seul.
Alors que Rhudie se tenait là, impuissante face au corps sans vie de George, elle sentit une présence sinistre s'approcher de d'elle. Les personnes masquées étaient maintenant de son côté, se tenant derrière elle.
Le cœur de Rhudie manqua un battement. Elle fit quelques pas en reculant avant de heurter le mur avec son dos.
"Bravo, numéro 593. Vous avez survécu à l'épreuve finale, dans un temps record. C'est très impressionnant. " déclara l'un d'eux d'une voix sans émotion.
Rhudie les regarda avec méfiance. Toutes les sorties près d'elle étaient maintenant fermées. Il n'y avait aucune échappatoire.
"Qu'est-ce que vous voulez maintenant ?" demanda-t-elle d'une voix tendue.
"Nous avons une dernière étape à accomplir," répondit le même homme qui commençait à s'avancer vers la jeune fille.
"Non, reculez !" s'écria-t-elle en se mettant en garde.
Les masqués s'approchèrent d'elle avec calme, et avant qu'elle ne puisse esquisser le moindre geste de défense, l'un d'eux lui injecta un sédatif dans la cuisse. Une sensation de torpeur envahit le corps de Rhudie, ses membres devenant lourds et engourdis.
"Nous vous faisons une faveur, 593" murmura l'homme.
Rhudie sentit son esprit s'embrumer, les images se brouiller et se mélanger. Elle essaya de lutter contre le sédatif, de rester éveillée, mais la fatigue était trop forte.
Alors que le monde autour d'elle s'effaçait, Rhudie revit toutes les épreuves qu'elle avait traversées, aux choix difficiles qu'elle avait dû faire. Elle voulait garder ces souvenirs, aussi douloureux soient-ils, pour se souvenir de ceux qui n'étaient plus là.
Dans un dernier élan d'espoir, elle tenta de griffer le visage d'un de ses ravisseurs. Sa main faible effleura la joue de l'homme, et il recula brusquement, laissant tomber son masque. Le visage de la personne était paniqué. Il cherchait frénétiquement son masque sur le sol. Rhudie fronça les sourcils, tentant de voir son visage, mais il était trop tard.
Le sédatif avait fait son effet, et Rhudie s'effondra sur le sol, plongé dans l'obscurité.
Un blackout total.
____________
Rhudie se réveilla brusquement, son cœur battant dans ses tempes, et une sensation de chaleur brûlante dans sa tête. Elle se massa le front pour reprendre ses esprits, puis prit une grande inspiration avant d'allumer la lampe de chevet près de son lit. La lumière chaude inonda la petite pièce, apportant un semblant de réconfort.
Assise sur le rebord du lit moelleux, ses pieds reposant sur un tapis doux qui la chatouillait légèrement, elle prit une boîte de médicaments dans le premier tiroir de sa commode. Un comprimé sortit de la plaquette, et elle l'avala avec le grand verre d'eau posé près de son réveil. Elle devait patienter quelques minutes pour que le mal-être s'estompe complètement.
Rhudie se leva enfin, enveloppée dans un peignoir chaud, et quitta sa chambre. Le long couloir la mena jusqu'à la cuisine.
"Alexa, routine matin," ordonna-t-elle d'une voix calme.
Les volets s'ouvrirent lentement, laissant filtrer la douce lumière du jour. Le grille-pain s'activa, embaumant la pièce d'une délicieuse odeur de pain grillé. La télévision s'éclaira également, et Rhudie se retrouva face à l'émission qu'elle appréciait tout particulièrement : "Sauve qui peut".
Les paroles enjouées du présentateur résonnèrent dans le vaste salon tandis que Rhudie beurrait ses tartines en sifflotant.
"Aujourd'hui, nos participants vont devoir relever le défi de la mémoire, affronter le labyrinthe du frisson et braver la chute sans fin. N'oubliez pas de voter pour votre participant favori pour le qualifier au prochain épisode, vous avez jusqu'à 18 heures ! Comme toujours, il y aura un gagnant à la fin de l'épisode. Voyons qui sera l'heureux élu aujourd'hui !"
Après avoir pris place sur le canapé, tartines à la main, Rhudie se concentra sur l'écran géant.
"Le défi de la mémoire" débuta avec dynamisme. Le présentateur commentait les actions des participants avec un enthousiasme contagieux. Soudain, l'un des participants, appelé George, poussa un cri alors que les lumières s'éteignaient. Rhudie ne put s'empêcher de rire légèrement face à cette réaction qui lui semblait démesurée.
Elle saisit son téléphone et ouvrit l'application Sauve-qui-peut. Les visages des participants s'affichèrent en grand au milieu de l'écran. Le menu défila jusqu'à tomber sur George. Rhudie appuya ensuite sur l'étoile à côté de son nom. Elle avait voté pour George. Le condamnant à continuer.
Fin.
Bạn đang đọc truyện trên: Truyen247.Pro